18. Kinésithérapie et mucoviscidose

Chapitre 18. Kinésithérapie et mucoviscidose

Gregory Reychler and Christian Opdekamp




La mucoviscidose est une maladie génétique dont la première cause de morbidité et de mortalité est l’atteinte respiratoire. Si elle reste à l’heure actuelle incurable, son pronostic ne cesse de s’améliorer. Les progrès considérables réalisés au niveau des connaissances et du traitement des diverses complications liées à la maladie y ont beaucoup contribué, tout comme la prise en charge multidisciplinaire des patients en centres spécialisés. L’amélioration de l’espérance de vie n’est pas sans influence sur la kinésithérapie et sur cet autre aspect thérapeutique que sont les nébulisations. À l’origine, la kinésithérapie visait exclusivement à lutter contre l’encombrement présent chez la grande majorité des patients. Le nombre de patients cliniquement asymptomatiques augmentant, la kinésithérapie s’est adaptée et a ouvert son champ d’action, notamment aux complications musculo-ostéo-articulaires qui deviennent plus fréquentes chez des patients vivant plus longtemps. L’aérosolthérapie a également évolué avec l’apparition de nébuliseurs de nouvelle génération qui raccourcissent le temps de traitement, procurant une meilleure qualité de vie, et par le recours à de nouvelles substances nébulisables.

Comme le montrent les différents registres nationaux relatifs à la mucoviscidose, la kinésithérapie et les nébulisations occupent une place importante dans le traitement de la maladie. En Belgique, respectivement 90 % et 76 % des patients ont recours aux nébulisations et à la kinésithérapie (Registre belge 2003). La variabilité importante au niveau des manifestations de la mucoviscidose se retrouve également au niveau des modalités thérapeutiques et explique la diversité des techniques de kinésithérapie existantes. Le choix de la technique la plus appropriée dépend du patient, de sa situation psychosociale, de son âge… et, il faut bien le reconnaître, de l’influence des écoles locales.


La kinésithérapie respiratoire


La kinésithérapie à visée respiratoire rencontre plusieurs objectifs, à savoir l’amélioration de la ventilation, de la clairance mucociliaire et des échanges gazeux, la diminution de la résistance des voies aériennes et de l’obstruction bronchique, et le ralentissement de l’évolution de la maladie [1]. La recherche de tels objectifs requiert une connaissance précise de la physiologie respiratoire et de la physiopathologie de la mucoviscidose.

L’accumulation des sécrétions, caractéristique majeure de cette pathologie, provient d’un dysfonctionnement au niveau du système mucociliaire et du déficit d’une protéine transmembranaire (protéine CFTR). Secondaire à ce dernier, la perturbation de l’équilibre ionique au niveau des cellules du tissu pulmonaire provoque une déshydratation des sécrétions qui augmente fortement leur viscosité et par là même l’obstruction bronchique. Une stase bronchique s’installe progressivement et des infections apparaissent accompagnées d’une réaction inflammatoire. Des complications telles que atélectasies, bronchiectasies… peuvent survenir avec des conséquences potentiellement néfastes pour le patient [2].

La kinésithérapie joue un rôle prépondérant dans l’élimination des sécrétions bronchiques. Elle vise à rompre le cercle vicieux hypersécrétion-inflammationinfection et tente de ralentir au maximum la détérioration du tissu pulmonaire. Le dépistage systématique à la naissance se répand de plus en plus et contribue à l’accroissement du nombre de patients cliniquement asymptomatiques. Ces patients sont cependant malades et l’introduction de la kinésithérapie dans la prise en charge dès la découverte du diagnostic, même en l’absence de symptômes, prévaut pour bon nombre de cliniciens. La raison en est double. D’une part, l’inflammation apparaît très tôt dans le décours de la maladie – dès les premières semaines de vie – et certainement avant la survenue des premiers symptômes. Ainsi, les épreuves fonctionnelles respiratoires, maintenant réalisées dès 3–4ans, chez des enfants a priori asymptomatiques, montrent des valeurs inférieures aux valeurs prédites, notamment pour le débit expiratoire forcé entre 25 et 75 % de la capacité vitale, alors qu’à la naissance les poumons sont histologiquement sains. De même, chez certains patients cliniquement asymptomatiques, des prélèvements bactériologiques montrent la présence de germes pathogènes au niveau des voies aériennes. D’autre part, une introduction précoce de la kinésithérapie favorise une bonne compliance au traitement en faisant entrer la kinésithérapie dans les habitudes quotidiennes. Cette compliance, garante d’une évolution meilleure, doit être une préoccupation du kinésithérapeute. On sait en effet qu’elle a été associée à la conviction du patient en l’efficacité et en la nécessité de la kinésithérapie, à la durée des séances, à l’inconfort d’une technique, à la lassitude dans la succession des séances, à la mauvaise relation avec le(s) thérapeute(s)… autant d’éléments sur lesquels celui-ci a une influence. L’éducation du patient comme la recherche de la technique la mieux adaptée trouve ici tout son sens. Aussi, l’apport de la musique rend la kinésithérapie plus agréable pour les enfants et les parents et mérite d’être utilisée. L’absence de symptôme et le manque de validation des techniques utilisées peuvent entraîner une démotivation chez les kinésithérapeutes, d’où l’intérêt de la combinaison de deux thérapeutes pour un même patient.


Les techniques de kinésithérapie, même si elles ont bien souvent la même finalité, peuvent être fort différentes les unes des autres. Leur choix va dépendre de différents paramètres, dont l’âge et le niveau de collaboration ne sont pas les moindres. Chez le petit enfant, la kinésithérapie est exclusivement passive pour évoluer vers une autonomie maximale dans la pratique de la technique à l’âge adulte. Cette autonomie contribue à l’amélioration de la qualité de vie et favorise la compliance thérapeutique. Dès l’âge de 2ans, l’enfant commence à participer activement aux exercices respiratoires. Les jeux permettent de lui faire découvrir, par lui-même, les différents principes de la respiration. En bas âge, l’aspect ludique occupe une place importante dans la séance de kinésithérapie.

Quel que soit l’âge et l’état du patient, la kinésithérapie doit être efficace, confortable et réalisable aisément. Un plan de traitement est élaboré avec les parents et l’enfant en essayant de les y impliquer pleinement. Le terrain culturel, l’état de la maladie, le coût de la technique et les sensations des patients interviennent dans ce plan. La connaissance des processus physiologiques du désencombrement ainsi que les modifications provoquées par la maladie doivent être bien maîtrisées par le thérapeute.

Renforcée par les résultats de deux études déjà anciennes montrant une dégradation de la fonction respiratoire chez des patients non traités par des séances de kinésithérapie respiratoire, son importance n’est pas discutée [3, 4]. À l’origine, la kinésithérapie conventionnelle consistait en du drainage postural accompagné de percussions. Toutefois, depuis quelques années, avec l’amélioration des connaissances, de nouvelles techniques ont vu le jour, d’une efficacité similaire voire supérieure à celle de la kinésithérapie conventionnelle mais souvent mieux adaptées à la pathologie. Cependant, aucune d’elles n’est réellement parvenue à faire l’unanimité [5], en partie faute d’études randomisées et contrôlées. Les techniques employées varient (tableau 18.1) et leur utilisation dépend souvent plus de la localisation géographique du patient et du lieu d’origine de la technique que de son efficacité réelle. Privilégier les techniques dites d’expiration lente qui minimisent les épisodes de toux est la seule évidence reconnue par la plupart des kinésithérapeutes spécialisés. Une approche provenant de Suède préconise le recours à l’activité physique dans différentes positions combinée à des manœuvres de kinésithérapie respiratoire comme programme de prise en charge [6]. Celle-ci va dans le sens des études qui ont mis en évidence l’impact bénéfique de l’activité physique sur le désencombrement.





































Tableau 18.1 Pourcentage de centres (n = 166) spécialisés utilisant les différentes techniques de désencombrement chez les enfants atteints de mucoviscidose
(IPG/CF 2005)
Drainage postural 55
Drainage postural modifié 47
Percussions manuelles 35
Vibrations manuelles 52
Vibrations mécaniques 9
Drainage autogène 19
Augmentation du flux expiratoire 17
Approche suédoise 19
PEP 14
Stimulation de la toux et aspiration 31
Positionnement pour améliorer la ventilation 58

L’élimination naturelle des sécrétions bronchiques dépend principalement de l’action ciliaire. Pour favoriser cette épuration ciliaire, altérée dans le cas de la mucoviscidose, la modulation du flux expiratoire est le facteur essentiel. L’efficacité de la kinésithérapie dépend de cette modulation qui doit permettre d’obtenir localement un flux expiratoire maximal. La toux termine le travail en évacuant les sécrétions collectées dans les voies aériennes supérieures. Étant un symptôme en tant que tel, la toux doit cependant être limitée pour minimiser la composante bronchospastique, transitoire mais souvent présente chez ces patients.


Le drainage autogène minimise les épisodes de toux et offre une grande autonomie au patient. Pour ces raisons, il est spécialement indiqué dans la mucoviscidose, d’autant plus qu’il ne provoque pas de reflux gastro-œsophagiens [10]. Chez les enfants qui ne peuvent le pratiquer seul, il peut devenir un « drainage autogène assisté » et éventuellement se combiner à un mouvement rythmique de hauts et bas (« bouncing ») réalisé avec l’enfant sur un ballon [11] (figure 18.1).








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Figure 18.1
Petit enfant en cours de séance de kinésithérapie combinée avec le bouncing.


L’active cycle of breathing technique (ACBT), composé de trois phases cycliques comprenant une respiration contrôlée, des expansions thoraciques et des expirations forcées, peut être débuté assez tôt, vers l’âge de 2ans, et permet comme le drainage autogène d’acquérir avec le temps une autonomie dans le traitement.

L’utilité de la PEP a été étudiée à plusieurs reprises dans la mucoviscidose. Cette technique où le patient expire au travers d’un masque ou d’un embout buccal muni d’une résistance permet de limiter la compression dynamique des voies aériennes (figure 18.2) et de maintenir un haut degré d’autonomie du patient. Dans une étude randomisée à long terme, un effet bénéfique au niveau de la fonction respiratoire a été noté comparativement au drainage postural combiné avec des percussions [12]. Grâce à la PEP, l’élimination des sécrétions est facilitée [13], la ventilation est améliorée et le volume résiduel est diminué [14]. Cette technique a l’avantage de s’adapter aussi bien aux enfants qu’aux adultes.








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Figure 18.2
A. Compression des voies aériennes lors d’une expiration. B. Stabilisation du diamètre des voies aériennes lors d’une expiration à travers une résistance.


Les appareils produisant des oscillations de la pression positive sans risque d’hyperpression tels que le Flutter®, le Cornet® et l’Acappella® ont pour objectif de diminuer la viscosité des sécrétions. Bien que non validés scientifiquement, ils sont régulièrement retrouvés dans le traitement des patients atteints de mucoviscidose. L’utilisation de ces derniers est généralement combinée à d’autres techniques. Comparativement à la PEP, le Flutter® ne semble pas aussi efficace [15].

Les percussions mécaniques n’ont pu réellement démontrer de bénéfices cliniques tandis que les percussions manuelles, mieux connues sous le terme de clapping, sont tombées en désuétude, notamment à cause du manque de preuves d’efficacité et de l’hypoxémie qu’elles provoquent. Les vibrations, qu’elles soient mécaniques ou manuelles, restent sujettes à controverse. Actuellement, trop peu de données sont disponibles pour justifier l’usage d’une de ces différentes techniques en routine dans la mucoviscidose. En Amérique du Nord, les compressions thoraciques à haute fréquence sont considérées comme une alternative aux autres techniques de désencombrement. Le contexte global de la kinésithérapie y est fort différent, vu l’impossibilité de disposer quotidiennement d’une séance de kinésithérapie réalisée par un professionnel. Les techniques garantissant une autonomie plus importante y sont tout naturellement plus fréquentes. Les effets des compressions thoraciques à haute fréquence sont cependant contestés et les résultats expérimentaux attendent confirmation par des études cliniques.

La ventilation à percussions intrapulmonaires, bien que reconnue comme technique d’aide au désencombrement dans certaines pathologies pulmonaires restrictives [16, 17], manque encore de validation clinique dans le cas de la mucoviscidose. Récemment, il a été montré que cette modalité ne s’avère pas être indiquée pour la nébulisation de substances médicamenteuses [18].

Le coût et le problème de contamination bactérienne des appareillages utilisés représentent un inconvénient non négligeable dont il faut tenir compte, certainement dans le cas de la mucoviscidose où le traitement de base est déjà onéreux pour les patients.


L’activité physique et le réentraînement à l’effort


Suite aux recommandations internationales sur le maintien de la santé physique globale et la condition physique de l’individu [19], l’encouragement du patient à la pratique d’activités sportives et de loisirs fait partie des objectifs de la prise en charge multidisciplinaire du patient atteint de mucoviscidose. Il a fallu cependant attendre le début des années quatre-vingt avec les études d’Orenstein [20, 21] et de Stanghelle [22, 23, 24, 25, 26, 27, 28, 29 and 30], véritables pionniers de l’exercice physique chez ces patients, pour convaincre l’opinion médicale du bien-fondé et de l’utilité de cette prise en charge.


Pronostic de survie, tolérance à l’effort et activité physique journalière



Tolérance à l’effort


La capacité physique d’un patient atteint de mucoviscidose à réaliser des efforts intenses est un témoin de sa condition physique et de son pronostic de survie [31, 32, 33 and 34]. Il est souhaitable de mesurer épisodiquement la tolérance à l’effort des patients atteints de mucoviscidose par un test à l’effort cardiopulmonaire. Ce test avec mesure des échanges gazeux est l’étalon d’or. Il permet, outre d’évaluer la sévérité de la maladie et son pronostic, d’avoir des renseignements sur l’hématose d’effort (hypoxémie et possible désaturation en O2) non prédictible par la seule mesure du volume expiratoire maximal en 1s (VEMS) ou de la fonction respiratoire de base, et d’apprécier le plus justement possible le moment opportun de l’inscription sur la liste d’attente de transplantation.

Exception faite de certains patients capables de faire de la compétition sportive de très haut niveau [23, 28, 35], globalement, la capacité d’effort des patients est diminuée. En effet, la consommation en O2 atteinte au pic de l’effort (VO2 pic) et la puissance maximale aérobie (W max) sont moins élevées par rapport aux sujets sains [23, 24, 36, 37, 38 and 39] avec l’apparition plus précoce du seuil ventilatoire (SV), signe d’une hyperventilation excessive pour un effort sousmaximal. Cette tolérance à l’effort dépendra bien entendu de la motivation mais surtout de l’âge, du sexe et des statuts nutritionnel et respiratoire du patient. Les facteurs susceptibles de limiter les patients lors d’un test d’effort cardiopulmonaire peuvent être ventilatoires, cardiaques ou musculaires.


Limitation ventilatoire


La mucoviscidose se caractérise par un syndrome pulmonaire obstructif léger (VEMS compris entre 89 % et 70 % des valeurs prédites), modéré (VEMS compris entre 69 et 40 % des valeurs prédites) ou sévère (VEMS inférieur à 40 % de la valeur prédite) qui s’accompagne d’une diminution des débits expiratoires et d’une augmentation des espaces « morts » physiologiques. La capacité maximale à l’effort de ces patients est relativement bien corrélée à la fonction pulmonaire [19, 39] et, en cas d’atteinte pulmonaire légère, ils ne présentent pas plus de contraintes ventilatoires que les sujets sains [40]. Une diminution de la fonction respiratoire ne s’accompagne pas nécessairement d’une diminution de la consommation maximale en O2 et du statut nutritionnel [23]. La VO2 pic ne sera pas diminuée par une réduction du VEMS aussi longtemps que la ventilation maximale volontaire théorique (VMV = VEMS × 40) n’est pas atteinte [41].

Chez le patient présentant une atteinte modérée à sévère, la limitation à l’effort est proportionnelle à la sévérité fonctionnelle de la maladie. Elle est ressentie cliniquement par une dyspnée d’effort plus ou moins intense et objectivée par une diminution importante ou une disparition de la réserve ventilatoire. Dans ce cas, la fonction pulmonaire est un facteur limitatif de l’effort intense.

L’hyperventilation d’exercice, présente dès le début de l’effort [42], est nécessaire pour répondre à l’augmentation de l’espace mort (VD/VT [espace mort/volume courant] élevé) et pour permettre l’augmentation du VT de façon à lutter contre l’obstruction des voies aériennes et à favoriser la ventilation alvéolaire. Le degré d’hyperventilation à un niveau d’effort sous-maximal peut également aider à la programmation du moment de la transplantation [43]. Le rapport VE/VMV (ventilation exprimée en pourcentage de la ventilation maximale volontaire) au seuil lactique supérieur à 70 % indique un risque majeur de décès en liste d’attente de greffe. Les équivalents respiratoires (VE/VO2 et VE/VCO2) sont plus élevés, témoignant du coût énergétique de la ventilation avec une consommation d’O2 au profit des muscles respiratoires d’autant plus importante que la sévérité de la maladie et la dénutrition sont présentes.

L’hyperinflation pulmonaire (rapport CRF/CPT [capacité résiduelle fonctionnelle/capacité pulmonaire totale] élevé) présente assez rapidement chez les patients légèrement à modérément atteints n’influence que peu l’adaptation de la réponse ventilatoire à l’effort [44]. En revanche, chez les patients les plus sévères, l’augmentation de l’hyperinflation dynamique met les muscles respiratoires dans une position défavorable sur le plan de la mécanique respiratoire, augmentant ainsi leur travail et leurs besoins en O2. Cette hyperinflation peut alors être responsable d’une diminution de la ventilation entraînant une hypoventilation alvéolaire, risque de fatigue excessive des muscles respiratoires et de carbonarcose.

La fonction respiratoire et la réponse ventilatoire à l’effort ne seront donc un facteur limitatif de l’effort que chez les patients les plus sévèrement atteints. La sensation d’essoufflement ressentie par les patients n’est le plus souvent que le signe d’un important déconditionnement musculaire à l’effort.


Limitation cardiaque


Chez les patients légers à modérés, on note une tachycardie de repos et d’effort. L’adaptation du débit cardiaque est normale au cours de l’effort intensif malgré une limitation du volume d’éjection systolique [45]. Très souvent, on constate à la fin de l’effort le maintien d’une réserve chronotrope (la fréquence cardiaque [FC] maximale n’est pas atteinte). La consommation en O2 est fonction de la sollicitation de la masse musculaire périphérique. Celle-ci étant plus réduite chez le patient, l’effort se verra progressivement limité soit par la fonction respiratoire, soit par la fonction musculaire.

Chez les patients plus sévères, il peut apparaître une dysfonction cardiaque secondaire à l’insuffisance respiratoire. Suite à l’hyperinflation, au déconditionnement physique et à la malnutrition, la fonction ventriculaire droite puis gauche peuvent s’altérer [46]. Excepté chez les patients sévères, la fonction cardiaque n’est pas un facteur prépondérant dans la limitation du patient à l’effort.


Limitation musculaire et statut nutritionnel


Le statut nutritionnel est, à l’image du statut respiratoire, un facteur prépondérant dans le pronostic de survie du patient. La problématique du statut nutritionnel dans la mucoviscidose est liée à la malabsorption alimentaire due à l’insuffisance pancréatique. Cette dernière aura comme conséquence que la plupart des patients auront un index de masse corporelle anormalement bas avec une diminution importante de la masse graisseuse et de la masse maigre.

La fonction musculaire présente donc des anomalies d’origine non pas qualitative, comme par exemple une diminution de la contractilité du muscle, mais plutôt quantitative [47, 48] qui toucherait plus spécifiquement certains groupes musculaires [49, 50, 51 and 52]. La force musculaire globale du muscle est donc diminuée.

L’inflammation bronchique [53], les infections répétées, notamment au pyocyanique [54], le déficit pulmonaire chronique et le déconditionnement musculaire sont également à l’origine de cette diminution de force musculaire.

L’importance de la réduction de la masse musculaire ajoutée au déconditionnement peut expliquer l’intolérance de ces patients à l’effort [55, 56 and 57]. La faiblesse musculaire est à l’origine d’une augmentation de la demande ventilatoire et est très souvent responsable de l’arrêt de l’épreuve d’effort.


Activité physique journalière


Le patient atteint de mucoviscidose n’est pas plus sédentaire dans les activités de la vie courante que le sujet sain [58, 59 and 60]. Durant l’enfance, les activités ludiques ou sportives sont multiples mais à partir de l’adolescence et à l’âge adulte, la participation aux activités physiques diminue fortement.

Il n’y a pas de différences entre patients et sujets sains pour les activités légères de la vie quotidienne, c’est-à-dire les activités qui n’entraînent pas d’inconfort respiratoire. En revanche, pour les activités plus intenses, les patients sont significativement moins actifs. Il existe une corrélation linéaire entre l’activité quotidienne globale et la VO2 mesurée au pic de l’effort [61]. Plus la VO2 au pic de l’exercice est élevée, plus grande est l’activité physique quotidienne. L’altération des paramètres fonctionnels et nutritionnels liés à la maladie est responsable de la diminution de l’aptitude aérobie et anaérobie [62] des patients atteints de mucoviscidose. Mais les patients avec une fonction respiratoire et un statut nutritionnel à la limite de la normalité présentent déjà cette diminution dans la fréquence de participation aux efforts intenses. L’inconfort respiratoire et musculaire ressenti lors d’efforts intenses chez toute personne sédentaire saine ou malade est probablement inconsciemment évité. En pratique clinique, l’interrogatoire du patient portant sur son activité quotidienne est une source d’informations faussement rassurantes puisqu’en rapport avec des activités non limitées par l’altération de l’aptitude aérobie.

On comprend d’autant mieux l’importance d’encourager ces patients à entreprendre et à entretenir une activité physique régulière afin de préserver le plus longtemps possible la meilleure condition physique et la meilleure qualité de vie.


Activités physiques et sportives



Activités recommandées ou déconseillées


L’avenir s’envisage tôt. Qu’elle soit ludique ou sportive, la pratique d’une activité physique doit se développer dès le plus jeune âge. L’activité physique est une hygiène de vie qui sera d’autant plus facile à inculquer que le déficit respiratoire lié à la maladie est peu ou pas présent. Qu’il soit individuel ou collectif, le libre choix de l’activité pratiquée est primordial. Celle-ci sera choisie en fonction du style de vie, de l’aptitude physique et des possibilités géographiques qui s’offrent au patient. L’amusement et l’épanouissement doivent être recherchés et seront importants pour le maintien de la pratique à long terme.

Au départ, la plupart des sports sont encouragés. Jogging [20, 22, 28, 30, 63], vélo [64, 65, 66, 67, 68, 69, 70, 71 and 72], marche [67], natation [73, 74], trampoline [29], musculation [75, 76, 77 and 78], volley, tennis, tennis de table, danse ou badminton sont les activités les plus fréquemment rencontrées. La combinaison de plusieurs activités [60, 61, 62, 63, 64, 65 and 66] comme proposées dans les salles de sport ou de fitness est également attrayante et offre l’avantage d’être moins lassante à long terme. Avec le temps et la dégradation progressive de la capacité respiratoire, certains sports sont déconseillés tels que les sports de contact (rugby, karaté, judo…) ou les sports d’altitude ou d’eau (parachutisme, parapente, alpinisme, spéléologie ou plongée sous-marine) pour les risques potentiels de fractures, de pneumothorax, de traumatisme hépatique ou splénique et de barotraumatisme qu’ils pourraient engendrer.


Activités physiques en cas d’hypoxémie


L’activité physique n’est certainement pas contreindiquée chez les patients oxygénodépendants, mais doit être appropriée. Les facteurs prédictifs d’une éventuelle diminution de la saturation lors d’un effort intense sont :




• un rapport de Tiffeneau < 50 % de la valeur prédite ;


• un rapport entre le VEMS et la capacité de diffusion pulmonaire inférieur à 80 % ;


• une SaO2 repos inférieure à 92 % ;


• une VO2 max inférieure à 55 % de la valeur prédite ou un SV inférieur à 40 % de la valeur prédite [87] ;


• une hypoxémie ou une désaturation nocturne [36].

Un supplément d’O2 sera prescrit au repos et/ou à l’effort, si la valeur de la pression partielle en O2 dans le sang artériel (PaO2) est inférieure à 55mm Hg, ce qui correspond à une saturation du sang artériel en O2 inférieure à 90 %. Ce supplément en O2 va permettre d’éviter un trop grand stress de la fonction cardiaque et d’améliorer le confort respiratoire du patient à l’effort par une diminution de sa sensation d’essoufflement.


Activités physiques en cas de diabète


Chez les patients atteints de diabète, l’exercice physique doit également être encouragé. Il améliore le contrôle glycémique et diminue les besoins supplémentaires en insuline. Cependant, les risques d’hypoglycémie après l’effort sont possibles. Si le sport n’est pas une contreindication, certaines précautions sont à prendre : les efforts physiques doivent être si possible programmés. La dose d’insuline est adaptée en fonction de la durée et de l’intensité de l’effort. Les mesures urgentes à prendre pour corriger les signes d’hypoglycémie sont enseignées au patient et à son entourage.



Modalités pratiques de l’activité physique



La fréquence


Idéalement de 3 à 5 fois par semaine, une plus grande fréquence est souvent synonyme d’échec. Plus d’effort ne permet pas une récupération suffisante et peut entraîner à la longue une fatigue et un risque de blessures musculotendineuses.


L’intensité


Après une période d’échauffement, l’intensité de l’exercice doit, pour être efficace, varier entre 60 et 80 % de la puissance maximale développée lors de l’épreuve d’effort. Ceci correspondant à une FC comprise entre 65–70 et 85 % de la FC maximale (220 – âge) en cas d’épreuve d’effort normale. En présence de facteurs limitatifs (ventilatoire, cardiaque ou musculaire), on recherche un entraînement à la FC atteinte au niveau du SV. Une FC cible minimum et un essoufflement modéré sont nécessaires pour obtenir des bénéfices. Pour contrôler la FC, on conseille le port d’un cardiofréquencemètre et pour les patients oxygénodépendants, la surveillance se fait à l’aide d’un saturomètre. En l’absence de saturomètre, si le patient est non oxygénodépendant et que, durant l’épreuve d’effort initiale, il montre des signes de désaturation (SaO2 < 90 %), par sécurité, l’entraînement se fait à une intensité de 10 à 15 battements inférieure à l’apparition de l’anomalie.

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Oct 9, 2017 | Posted by in IMAGERIE MÉDICALE | Comments Off on 18. Kinésithérapie et mucoviscidose

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