Chapitre 16 La spectrométrie par résonance magnétique
La spectrométrie par résonance magnétique (SRM) (on dit aussi spectroscopie) a pour but de visualiser les différentes molécules, ainsi que leur concentration, contenues dans un tissu biologique, grâce au déplacement chimique de ces différentes substances.
Pour restituer les spectres, il faut faire appel à la transformée de Fourier. En effet, comme nous l’avions vu au Chapitre 6, cet outil mathématique permet d’extraire le contenu fréquentiel d’un signal en passant d’une représentation «amplitude par rapport au temps» à une représentation «amplitude par rapport à la fréquence».
Ainsi, à partir d’un échantillon, on réceptionne un signal FID (Free Induction Decay) contenant plusieurs fréquences : ces dernières ne seront pas «visibles» dans le domaine temporel mais pourront être différenciées dans le domaine fréquentiel après transformée de Fourier (fig. 16-1).
Le tableau 16-1 représente les principaux noyaux pouvant être utilisés en SRM ainsi que leurs fréquences de résonance respectives.
Noyau | Fréquence de résonance (en MHz/T) |
---|---|
1H | 42,6 |
31P | 17,2 |
13C | 10,7 |
19F | 40,1 |
23Na | 11,3 |
Principe de la SRM
La SRM est fondée sur le déplacement chimique entre les différents composés chimiques dans lesquels on trouve le noyau d’atome observé. En effet, l’environnement électronique de l’atome va modifier le champ magnétique local vu par chaque groupement chimique et, par conséquent, en modifier la fréquence de résonance correspondante. C’est le déplacement chimique tel celui que l’on peut observer entre l’eau et les lipides, deux composés contenant des atomes d’hydrogène (fig. 16-2).
En imagerie, il faut essayer de minimiser ce phénomène afin d’éviter des artéfacts (voir Chapitre 11), alors que le but de la SRM est justement de le mettre en évidence, aussi bien qualitativement que quantitativement. Ainsi, chaque molécule contenant le noyau d’atome observé possède un déplacement chimique bien précis qui constitue, en quelque sorte, sa «signature» RMN. Le déplacement chimique est représenté sur un graphe par un spectre de raies. Chaque raie (ou groupe de raies) correspond à un groupement chimique donné. L’abscisse de ce graphe est graduée en ppm (parties par millions) par rapport à une référence 0 qui, en spectrométrie protonique, est le tétraméthylsilane (TMS) ; en ordonnée, on trouve l’intensité du signal. Par convention, cette référence est placée sur la droite de l’axe et les valeurs de ppm les plus élevées vers la gauche, correspondant à des fréquences de résonance plus élevées. Enfin, la surface sous la raie de résonance (correspondant à l’amplitude du signal enregistré à la fréquence de résonance donnée) est proportionnelle à la quantité de noyaux contenus dans un groupement chimique donné (fig. 16-2).
où est la fréquence de résonance de la substance de référence.
Outre par le déplacement chimique, les différentes molécules contenant un même noyau peuvent aussi être différenciées par la forme des raies de résonance. En effet, certaines raies sont constituées de deux pics (doublets) ou de trois pics (triplets) (fig. 16-3) : d’une manière générale, on parle de multiplet lorsqu’on peut différencier plusieurs raies pour un même groupement chimique. Ce phénomène est lié au couplage de spin (ou couplage spin-spin).
Alors que pour le déplacement chimique, c’est l’environnement électronique des noyaux qui va modifier le champ magnétique local, et par conséquent les fréquences de résonance, dans le cas du couplage se spin, c’est l’interaction entre les noyaux de groupements chimiques voisins qui intervient. Cette interaction, indépendante du champ magnétique externe (contrairement au déplacement chimique qui est proportionnel à lorsqu’il est mesuré en Hz), est caractérisée par la constante de couplage J, qui exprime, en Hertz, l’espacement entre deux raies (voir fig. 16-3). Ce phénomène présente une autre particularité : en effet, on peut observer l’inversion des raies d’un doublet pour un TE = 1/J, si J est la constante de couplage de ce doublet (voir fig. 16-3), ce qui sera le cas du lactate, comme nous le verrons plus loin.
Les techniques de SRM
Spectrométrie localisée (ou spectrométrie monovoxel ou SVS – Single Voxel Spectrometry)
Principe
Cette technique est fondée sur la sélection d’un volume d’intérêt par l’intersection de trois plans orthogonaux. Pour cela, il faut appliquer successivement trois impulsions sélectives : dans chaque direction x, y et z, on excite une coupe par l’intermédiaire d’un gradient associé à une impulsion RF ; le volume issu de l’intersection de ces trois plans sera à l’origine du signal exploité pour la SRM (fig. 16-4) (les signaux obtenus après les deux premières impulsions RF ne sont pas pris en compte).
Le volume du voxel ainsi obtenu est compris entre 1 et 8 cm3.
Suppression de l’eau et des lipides
Pour obtenir des spectres de bonne qualité, il faut supprimer le signal de l’eau. En effet, ce dernier présente une très grande amplitude et sa fréquence de résonance est très proche de celle des métabolites que l’on veut détecter. Ainsi la raie de l’eau peut «masquer» les signaux des atomes d’hydrogène des autres molécules dont la concentration est beaucoup plus faible (fig. 16-5).
Différentes techniques permettent de supprimer le signal de l’eau :
Séquences utilisées
La séquence STEAM (STimulated Echo Acquisition Mode) est composée d’une succession de trois impulsions de 90°, associées à l’application d’un gradient dans chaque axe permettant de sélectionner le volume. Le signal enregistré provient d’un écho stimulé généré par la succession de ces impulsions RF. En effet, deux impulsions successives de 90° permettent d’obtenir un écho de spin (ou écho de Hahn) équivalent à celui obtenu avec une suite d’impulsion 90°–180°, mais d’intensité moindre, et trois impulsions successives de 90° produisent un écho stimulé (voir aussi Chapitre 9). Les différentes combinaisons possibles avec trois impulsions de 90° génèrent ainsi quatre échos, mais seul l’écho stimulé est réceptionné (fig. 16-7a). Le temps d’écho correspond à l’addition du délai séparant les deux premières impulsions de 90° (TE/2) et de celui séparant la troisième impulsion de la réception du signal (TE/2). Le temps séparant l’impulsion 2 et 3 est appelé temps de mélange TM (voir fig. 16-7a).