14: La sciatalgie et les muscles ischio-jambiers

La sciatalgie et les muscles ischio-jambiers


Nerf ischiatique


N. ischiadicus



Généralités




Rappel anatomique et physiopatholoqique


Le nerf ischiatique est un nerf mixte, issu du plexus lombo-sacré (L4-S3). Il est le plus volumineux et le plus long de tous les nerfs du corps et aussi le nerf principal du membre inférieur, dont il assure en grande partie la motricité et la sensibilité. Il est constitué de deux nerfs se côtoyant dans la même gaine : le nerf tibial et le nerf fibulaire commun.


Il descend en profondeur, verticalement et au centre de la loge postérieure de la cuisse, en arrière du muscle grand adducteur et en avant des muscles ischio-jambiers.


Dans la partie proximale de la cuisse, le nerf reste dans le voisinage immédiat de la tubérosité ischiatique et de l’insertion commune des muscles ischio-jambiers qu’il longe latéralement. Il croise la face profonde du chef long du muscle biceps fémoral, pour passer de son bord latéral à son bord médial. Une lésion musculaire proximale ou une fracture par avulsion de la tubérosité ischiatique peuvent provoquer un saignement susceptible d’irriter le nerf.


Le nerf ischiatique donne naissance à ses deux branches terminales, en amont de l’apex de la fosse poplitée. Le nerf tibial, qui descend à l’arrière de la jambe et le nerf fibulaire commun, qui descend sur le côté latéral du mollet. Le nerf ischiatique peut cependant déjà se diviser plus haut dans la cuisse, voire même dans le bassin (voir chapitre 12 – Le syndrome du muscle piriforme). Une coupe transversale à mi-cuisse nous montre comment ce nerf est protégé, entouré de quatre corps musculaires : antéro-médialement par le muscle grand adducteur, médialement par le muscle semi-membraneux, postérieurement par le muscle semi-tendineux et latéralement par le chef long du muscle biceps fémoral.


Il innerve au niveau de la cuisse, par l’intermédiaire de ses branches collatérales, les articulations de la hanche et du genou et les muscles : troisième faisceau du grand adducteur et ischio-jambiers.


Une coupe transversale au niveau de la partie distale de la cuisse, met en évidence la relation intime qui existe entre les branches terminales du nerf ischiatique et le muscle semi-membraneux médialement et les chefs court et long du muscle biceps fémoral latéralement.


Au niveau de la jambe, le nerf fibulaire commun longe le corps et le tendon du chef court du muscle biceps fémoral (voir chapitre 6 – Le syndrome de la tête de la fibula) alors que le nerf tibial descend verticalement en avant des chefs médial et latéral du muscle gastrocnémien et pénètre sous l’arcade du muscle soléaire (voir chapitre 1 – Le syndrome du canal tarsien postérieur).






Tableau clinique


Douleur et/ou hypersensibilité à la face postérieure de la cuisse, qui peuvent s’étendre à la fesse et/ou à la fosse poplitée.


Dysesthésies, parfois tension importante, fourmillements, engourdissement ou décharges électriques en profondeur dans la partie postérieure de la cuisse. Pas d’hypoesthésie dans le territoire de la douleur, mais possible au niveau de la jambe et du pied en cas de neurocompression.


Douleur et/ou symptomatologie, exacerbées par la position assise prolongée, la jambe du côté atteint croisée sur l’autre, la flexion du tronc, l’extension du genou, la marche ou la course rapide et la descente des escaliers.


Diminuées par la flexion du genou et l’inclinaison homolatérale de la colonne lombale.


Parfois attitude antalgique en station debout : flexion du genou ou translation du tronc homolatérale (shift homolatéral).


Compensations spontanées du sujet au cours de la flexion de la colonne lombale : flexion du genou, inclinaison homolatérale lombale ou extension de la tête et/ou de la nuque.


Le sujet évite toute compression de la face postérieure de la cuisse, il se lève d’une chaise ou d’un fauteuil à la force de ses bras. Le praticien observe parfois une boiterie à la marche, celleci peut être due à la douleur ou à une légère diminution de force musculaire au niveau de la cuisse et/ou de la jambe et du pied.


Point hypersensible à la palpation du nerf ischiatique : latéralement à la tubérosité ischiatique et/ou en profondeur entre les muscles semi-tendineux, semi-membraneux et chef long du muscle biceps fémoral.










Bilan diagnostique


Les douleurs à la face postérieure de la cuisse peuvent avoir de multiples causes, au départ l’anamnèse et l’inspection seront indispensables au praticien afin d’orienter son examen clinique. Le sujet peut par exemple évoquer un traumatisme sportif et à l’inspection présenter un hématome et un oedème à la face postérieure de la cuisse. En phase aigüe, le praticien peut observer chez le sujet une marche difficile et une attitude antalgique : inclinaison homolatérale de la colonne lombale, légère flexion et rotation latérale de la hanche, flexion du genou et flexion plantaire au niveau de la cheville.


En phase aigüe, les premiers tests neurodynamiques peuvent être réalisés en position debout à l’aide d’un mouvement éloigné du site de la dysfonction : flexion de la tête et de la nuque, flexion de la colonne thoracique et lombale ou flexion dorsale du pied. Tout changement de la symptomatologie existante, permet d’émettre l’hypothèse d’une participation neurogène.


En phase chronique, l’élévation de la jambe tendue et le test en position assise avachie (slump), présentent souvent une restriction de mobilité due en partie à la défense musculaire de protection du nerf ischiatique.


L’examen neurologique et l’examen par palpation assistent le praticien dans son diagnostic différentiel entre : un SMD des muscles ischio-jambiers, une radiculopathie lombale, un syndrome du muscle piriforme, une dysfonction extra- ou intraneurale du nerf ischiatique au niveau de la cuisse, etc.





Bilan diagnostique



Examen neurodynamique


Le sujet est en décubitus dorsal en position standardisée. Le praticien amène et maintient la hanche et le genou du sujet à 90° de flexion.


La hanche du sujet se trouve dans une position neutre entre adduction et abduction et sans rotation.


Le praticien réalise ensuite successivement :




Les mouvements sont réalisés dans leur amplitude maximale. Chaque composante s’additionne aux précédentes.


Les symptômes du sujet sont reproduits au niveau de la face postérieure de la cuisse et/ou du genou, le praticien réalise :



Si la symptomatologie change, l’hypothèse d’une origine neurogène est émise. Il demande ensuite au sujet d’effectuer une flexion de la tête et de la nuque.


Si la symptomatologie diminue l’hypothèse d’une dysfonction de neuroglissement distal est confirmée (voir Annexes – page 408).


Le sujet place sa colonne lombale en inclinaison hétérolatérale. Le praticien effectue les mouvements décrits aux figures 10.1 et 10.2.




Si la symptomatologie au niveau de la face postérieure de la cuisse et/ou du genou est reproduite, il effectue une flexion plantaire de la cheville. Si la symptomatologie change, l’hypothèse d’une origine neurogène est émise. Il demande alors au sujet d’effectuer une flexion de la tête et de la nuque, si la symptomatologie change, l’hypothèse d’une origine neurogène est confirmée.


Le sujet place sa colonne lombale en inclinaison homolatérale. Le praticien effectue les démarches décrites aux figures 10.1, 10.2 et 10.4.



L’inclinaison hétérolatérale de la colonne lombale (voir figure 10.4) augmente les contraintes de tension sur les structures neurales, mais diminue les contraintes exercées sur ces structures par certaines de leurs interfaces mécaniques, tandis que l’inclinaison homolatérale (voir figure 10.5) a l’effet inverse. Réaliser les deux tests permet au praticien d’affiner son bilan diagnostique quant au caractère de la dysfonction.





Le sujet est en décubitus dorsal en position standardisée. Le praticien réalise successivement :



Si la symptomatologie du sujet est reproduite au niveau de la face postérieure de la cuisse et/ou du genou, le praticien maintient la position atteinte et demande au sujet d’effectuer une flexion du genou à laquelle il résiste.


La compression par les muscles ischio-jambiers ainsi obtenue du nerf ischiatique, déjà sous tension, peut sensibiliser le nerf et reproduire ou intensifier les symptômes s’ils sont déjà présents.


Le sujet est en position assise avachie (slump) standardisée. Le praticien empaume le membre inférieur du sujet au niveau de la face latérale du genou et de la jambe.


Il effectue successivement :





La symptomatologie du sujet est reproduite au niveau de la face postérieure de la cuisse et/ou du genou. Le praticien demande au sujet d’effectuer une inclinaison hétérolatérale de la colonne lombale. Si la symptomatologie change, l’hypothèse d’une origine neurogène est émise.


Il lui demande ensuite d’amener sa tête et sa nuque en flexion. Si la symptomatologie change, l’hypothèse d’une origine neurogène est confirmée.




Le praticien effectue les mouvements décrits à la figure 10.7. La symptomatologie du sujet est reproduite au niveau de la face postérieure de la cuisse et/ou de la fesse.



Il effectue alors une flexion plantaire de la cheville et une inversion du pied. Si la symptomatologie change au niveau de la face postérieure de la cuisse et/ou de la fesse, l’hypothèse d’une origine neurogène est émise, voire confirmée.


Remarque : la tension est, dans ce cas, transmise au nerf ischiatique par l’intermédiaire du nerf fibulaire commun.



Examen palpatoire




Le praticien repère dans la région glutéale et à la face postérieure de la cuisse :



Remarque : le muscle grand glutéal est réséqué. Le chef long du muscle biceps fémoral croise le nerf ischiatique en dessous de la tubérosité ischiatique, il n’est pas représenté pour une raison de visibilité du nerf ischiatique.




Le praticien teste la mécanosensibilité du nerf ischiatique en le comprimant à l’aide de son majeur, juste en dehors de la tubérosité ischiatique. Il passe sous le bord inférieur du muscle grand glutéal.


Il réalise cette manœuvre bilatéralement et compare les réponses du côté symptomatique à celles du côté opposé.


Remarque : la compression se fait en amont de la partie proximale du chef long du muscle biceps fémoral.




Le praticien teste la mécanosensibilité du nerf ischiatique en le comprimant à l’aide de son majeur, en profondeur contre le fémur, entre les corps musculaires des muscles ischio-jambiers. Il réalise cette manœuvre bilatéralement et compare les réponses du côté symptomatique à celles du côté opposé.




Le sujet est en décubitus dorsal, sa hanche en flexion submaximale.


Le praticien teste la mécanosensibilité du nerf tibial (correspondant à la couleur bleue), en le comprimant au niveau de la fosse poplitée, à l’aide de son pouce. Il effectue simultanément à sa compression, une extension du genou et/ou une flexion dorsale du pied du sujet.


Il réalise cette manœuvre bilatéralement et compare les réponses du côté symptomatique à celles du côté opposé.




Le sujet est en décubitus dorsal, sa hanche en flexion submaximale.


Le praticien teste la mécanosensibilité du nerf fibulaire commun (correspondant à la couleur verte), en le comprimant au niveau de la fosse poplitée, à l’aide de son index. Il effectue simultanément à sa compression, une extension du genou et/ou une flexion plantaire, inversion du pied du sujet. Il réalise cette manœuvre bilatéralement et compare les réponses du côté symptomatique à celles du côté opposé.



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May 6, 2017 | Posted by in MÉDECINE INTERNE | Comments Off on 14: La sciatalgie et les muscles ischio-jambiers

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