Chapitre 12 Rhinoplasties secondaires
Introduction
Les rhinoplasties secondaires doivent être le plus souvent considérées comme des rhinoplasties réparatrices sur le plan technique, qu’il s’agisse de gestes complémentaires après une première rhinoplastie à visée fonctionnelle ou morphologique, ou plus simplement de la révision d’une rhinoplastie esthétique.
En règle générale, une rhinoplastie secondaire ne doit pas être envisagée avant une année suivant la précédente intervention afin d’attendre que la réaction cicatricielle tissulaire soit stabilisée, fixant ainsi la morphologie définitive.
La décision d’entreprendre une rhinoplastie secondaire en cas de défaut minime doit naturellement tenir compte du contexte psychologique des patients. Les patients doivent être clairement informés du rapport bénéfique/risque. De la même manière qu’une rhinoplastie primaire n’est jamais urgente, une rhinoplastie secondaire ne l’est pas non plus.
Principes
Les principes guidant une rhinoplastie secondaire sont relativement simples, même si l’obtention d’un résultat significatif nécessite la mise en œuvre de procédés très divers et souvent complexes :
• reconstruire un nez complet sur le plan anatomique respectant les trois couches tissulaires muqueuse, cutanée et ostéocartilagineuse. Les défauts observés après une rhinoplastie primaire sont souvent la conséquence d’un défaut de reconstruction d’un squelette ostéocartilagineux continu ;
• restaurer les sous-unités esthétiques naturelles, c’est-à-dire les surfaces d’isoréflexion de la lumière décrite par G. Burget pour la rhinopoïèse ;
• restaurer une ventilation nasale confortable. L’obtention d’un bon résultat fonctionnel conditionne en grande partie la satisfaction finale du patient, même si le résultat morphologique reste imparfait.
Analyse sémiologique
Le projet de rhinoplastie secondaire doit s’appuyer sur une analyse sémiologique précise prenant en compte les éléments suivants.
• Les anomalies de la charpente ostéocartilagineuse : une analyse morphologique segmentaire du nez permet le plus souvent de dépister les défauts quantitatifs et qualitatifs du dorsum osseux, des cartilages alaires et triangulaires ainsi que du septum. Les déformations majeures constatées sont le plus souvent la conséquence d’une réduction excessive osseuse ou cartilagineuse. Les insuffisances de réduction représentent un défaut mineur et sont facilement corrigeables.
• La trophicité cutanée résiduelle doit être évaluée. La fibrose et la sclérose cicatricielle participent le plus souvent aux déformations morphologiques dont se plaint le patient. Les becs de corbin et les pointes constrictées sont par exemple la conséquence respective d’une fibrose cutanée et d’une sclérose cutanée (fig. 12.1 et 12.2).
• Une analyse profiloplastique recherchant un déséquilibre facial global est indispensable si l’on veut éviter le piège classique d’un nez mécaniquement perméable mais inutile chez un respirateur buccal dans un contexte de face longue. Les incompétences labiales et les dystonies labiomentionnières chez les patients respirateurs buccaux doivent être identifiées et décrites aux patients. Les anomalies de l’angle nasolabial restant trop fermé peuvent être la conséquence d’une hypomaxillie dans un même contexte de dysmorphose bimaxillaire (fig. 12.3).
• Les rhinites et rhinosinusites chroniques, si elles sont suspectées, doivent entraîner un examen rhino-endoscopique permettant de visualiser les méats moyens et le septum postérieur.
Examens complémentaires
Des examens complémentaires doivent être demandés sans restriction en cas de doute. Il s’agit :
Dossier photographique
Un dossier photographique doit être constitué, comportant dans la mesure du possible des photographies du patient antérieures à la première intervention et, surtout, des clichés de face, de profil, de trois quarts, en vue basale, mettant en évidence l’ensemble des déformations dont le patient a conscience et celles dont il n’a pas conscience. Ce dossier photographique a une grande importance médicolégale car il permet d’établir un inventaire des déformations dont le deuxième opérateur n’est pas responsable.
Une simulation informatique est recommandée. Elle permettra d’une part d’expliquer clairement les possibilités et les limites techniques d’une rhinoplastie secondaire, et d’autre part de réaliser une véritable analyse profiloplastique chez les patients présentant une dysmorphose maxillomandibulaire. Ce média facilite grandement la communication et donc la démarche de consentement éclairé du patient.
Déformations du dorsum
Identifier les déformations du dorsum
Surgical look
Les déformations du dorsum sont le plus souvent la conséquence d’une rhinoplastie de réduction sagittale et transversale radicale dont les caractéristiques morphologiques correspondent à l’aspect de surgical look. Les principales déformations observées sont les suivantes (fig. 12.4) :
• perte de la sous-unité esthétique dorsinasale avec interruption des lignes infraorbitaires de Sheen ;
• segmentation verticale du dorsum nasal correspondant à un défaut de projection et de définition du tiers moyen par excès de réduction sagittale ;
• aspect de V inversé du nez en vue de face lié à des ostéotomies obliques au niveau des branches montantes du maxillaire ou à une désinsertion des cartilages triangulaires vis-à-vis des os propres du nez avec collapsus de la valve interne.
Ensellure nasale
Cette déformation est souvent due à une régression sagittale trop importante du septum au niveau de la ligne de profil pouvant être associée à une cyphose osseuse résiduelle.
L’analyse de la base du nez montrant un effondrement et un étalement de celle-ci permet d’authentifier le rôle du septum dans cette déformation (fig. 12.5 et 12.6).

Fig. 12.5 A. Ensellure nasale par régression sagittale du dorsum cartilagineux impliquant le septum. B. Correction par greffon cartilagineux auriculaire.
Toit ouvert dorsinasal ou open roof
Cette déformation est due à une insuffisance de réduction transversale du dorsum nasal après une résection de bosse généreuse (fig. 12.7).
La médialisation des branches montantes du maxillaire n’a pas été suffisante pour réduire la solution de continuité de la charpente ostéocartilagineuse dorsinasale.
Pincement du dorsum
À l’inverse de l’open roof résiduel, le pincement correspond à une médialisation trop importante des volets osseux après ostéotomies latérales (fig. 12.8). La largeur résiduelle du dorsum peut correspondre, dans les situations extrêmes, à la simple saillie du septum sur la ligne médiane. La surface d’isoréflexion de la lumière rectangulaire dorsinasale n’existe plus.
Bec de corbin
Un bec de corbin correspond, sur la ligne de profil, à une dysharmonie entre le recul de la pointe et le recul du dorsum dans sa partie basse (fig. 12.9). Le bec de corbin peut correspondre à un défaut de réduction du cartilage quadrangulaire parfois associé à une déprojection trop importante de la pointe nasale ou à un excès de résection relative du dorsum osseux.
Un bec de corbin peut également correspondre à une fibrose cicatricielle du dorsum cartilagineux lorsque l’espace mort dû à la résection de ce dernier n’est pas suivi d’une rétraction cutanée suffisante. L’espace mort dermique peut alors être comblé par une fibrose collagénique.

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