10: Rhinoseptoplasties fonctionnelles

Chapitre 10 Rhinoseptoplasties fonctionnelles




On entend sous le terme de rhinoseptoplasties fonctionnelles les interventions destinées à corriger les structures anatomiques susceptibles d’être responsables d’une obstruction nasale. La prise en charge d’une rhinoplastie fonctionnelle passe par une analyse des déformations anatomiques retentissant sur la fonction respiratoire.


L’interrogatoire, l’examen clinique et endoscopique sont essentiels. Trois structures anatomiques peuvent être incriminées : le septum, qui est le pilier central du nez, la pyramide nasale pouvant présenter des déviations ostéocartilagineuses, et la valve. En fait, ces anomalies sont souvent associées et l’obstruction nasale est fréquemment plurifactorielle.


Nous étudierons successivement les différentes causes de troubles fonctionnels et leurs corrections.



Déviations septales et septoplasties


Déviation septale ne veut pas obligatoirement dire obstruction nasale : la plupart des cloisons ne sont pas rectilignes et n’ont cependant aucun retentissement fonctionnel ; un examen clinique précis doit donc être fait avant d’incriminer la déviation septale dans l’obstruction nasale.


L’approche des septoplasties n’est pas univoque ; elle repose sur une analyse anatomoclinique précise qui permettra une prise en charge adaptée à chaque déformation. Le septum est le pilier central du nez : une déviation septale peut être la cause d’une obstruction nasale, mais aussi entraîner des déformations morphologiques du dorsum, de la pointe, de la columelle et de l’angle nasolabial – « As the septum goes, goes the nose » [1]. La correction des déviations septales est un temps important dans la prise en charge des nez déviés.


Les septoplasties sont des interventions difficiles. Les procédés chirurgicaux de correction se complètent et peuvent être associés : intervention sous vidéo-endoscopie, résection osseuse et cartilagineuse, greffe cartilagineuse. Le défi est double : fonctionnel et cosmétique.


Nous étudierons successivement l’anatomie chirurgicale du septum, la systématisation de ses déviations et les différentes techniques chirurgicales des septoplasties.



Anatomie chirurgicale du septum nasal


Un cadre osseux inextensible enserre le septum cartilagineux. En avant d’une ligne rhinion–épine nasale antérieure (ENA), le nez est mobile ; en arrière de cette ligne, il est fixe (fig. 10.1).







Analyse des déviations septales : essai de systématisation anatomoclinique


Il faut distinguer les déviations postérieures, en arrière d’une ligne rhinion–ENA des déviations antérieures situées en avant de cette ligne (nez mobile cartilagineux).




Déviations septales antérieures


Au problème fonctionnel, s’ajoute un problème morphologique, avec une déviation du nez mobile (dorsum, columelle et/ou pointe nasale).


On peut distinguer les déviations simples, les déviations angulaires avec fractures cartilagineuses et les déviations complexes.



Déviations simples


Un bord du cartilage septal est dévié ou luxé le plus souvent sur son bord inférieur (fig. 10.5). En avant, au niveau de la columelle, on retrouve une luxation du bord caudal du cartilage septal dans une fosse nasale, et en arrière dans la fosse nasale controlarérale, une luxation du pied septal avec un éperon chondrovomérien obstructif.



On rapproche de ce type de déviations les déviations dites « en verre de montre » (fig. 10.6). Le cartilage septal est enserré dans un cadre osseux trop étroit et présente une convexité obstructive dans une fosse nasale et une concavité dans l’autre.




Déviations angulaires


Les déviations angulaires correspondent à des fractures cartilagineuses verticales ou horizontales. La déformation septale intéresse au moins deux bords septaux. Aux signes fonctionnels d’obstruction nasale viennent s’ajouter des déformations morphologiques : latérodéviation nasale, défaut de projection de la pointe et rétraction columellaire.


On peut distinguer deux types de déviations angulaires : les déviations par fractures septales verticales et celles par fractures septales horizontales.


Les déformations dues à une fracture septale verticale par rapport à la crête incisive donnent une latérodéviation nasale avec une angulation plus ou moins haute sur le dorsum (fig. 10.7).



Si l’angulation du dorsum est très antérieure, la déformation peut obstruer totalement les deux fosses nasales, avec d’un côté l’angulation obstructive et de l’autre la luxation du bord libre caudal réalisant au maximum un corps étranger transnarinaire (fig. 10.8).



Les déformations par fracture septale horizontale donnent une obstruction nasale haute avec une déviation du dorsum nasal et une columelle rétractée (fig. 10.9).





Les différentes septoplasties


En fonction de l’analyse sémiologique préopératoire, quatre grands types de septoplastie peuvent être individualisés :



Toute septoplastie nécessite des résections, des repositions, des reconstructions et des réalignements cartilagineux (4 R). En fait, les différentes techniques s’associent et se complètent.


L’utilisation de la vidéo-endoscopie est souvent indispensable car elle magnifie l’image et permet des gestes plus précis.


Certaines règles chirurgicales sont à respecter :





Septoplastie mobilisatrice de résection et de reposition type Cottle (image vidéo 10.2A,B)


Cette technique s’adresse aux corrections des déviations antéropostérieures simples – luxation cartilagineuse au niveau du pied septal et/ou de la columelle (imagecas clinique 10.1 et cas clinique e.10.1) – et aux déformations du cartilage en verre de montre (imagecas clinique e.10.2). L’opérateur peut s’aider de vidéo-endoscopie.








Technique chirurgicale


Quatre étapes sont nécessaires.





Résections ostéocartilagineuses

Les résections portent en premier sur le cadre osseux. Les déviations osseuses du rail du prémaxillaire obstructives sont enlevées à la demande, à la gouge ou aux ciseaux à frapper.


Plus en arrière, la résection du cal ostéocartilagineux chondrovomérien est pratiquement toujours nécessaire ; elle permet de compléter la libération septale en faisant sauter le verrou osseux postérieur (fig. 10.14). La partie excédentaire de cartilage septal est ensuite réséquée à la demande en prenant bien soin de ne pas fragiliser le bord dorsal du septum (point K) pour éviter un effondrement et une ensellure postopératoire (préservation du L de Killian).



Lors des déviations septales en verre de montre (image vidéo 10.3), la libération du septum de son cadre osseux permet son expansion dans la fosse nasale. Les zones cartilagineuses en excès sont ensuite réséquées (fig. 10.15A). Si des lignes de force persistent, elles sont fragilisées par des chondrotomies de fragilisation (fig. 10.15B).




Une autre solution pour corriger les déviations courbes consiste à réaliser une chondrotomie transfixiante en spirale selon la technique de Jost (fig. 10.16). Les ressorts cartilagineux sont brisés dans toutes les directions tout en gardant la continuité du septum. Le point de départ de la spirale est variable. Commencée près de l’angle supérieur, celle-ci réduit la déviation de l’arête. Commencée près de l’angle postérieur, elle agit sur le bord columellaire.




Reposition septale, sutures, pansement

Une fois les résections réalisées, le septum est mobile au niveau du pied septal. Pour éviter un recul de la pointe ou une dépression sus-lobulaire, le septum doit être fixé au niveau de son angle antéro-inférieur à l’ENA ou à son pourtour fibreux (fig. 10.17). Ce point peut être réalisé par voie vestibulaire labiale supérieure (point de Jost–Legent). Certains auteurs complètent la fixation par un point transcolumellaire.



La suture des incisions interseptocolumellaires est ensuite réalisée et un méchage est laissé en place pendant 48 à 72 heures. Des lames de Silastic® peuvent être laissées pendant 6 jours pour prévenir d’éventuelles synéchies (fig. 10.18).



Au total, les points importants sont :




Septoplasties avec attelles cartilagineuses sagittales (spreader grafts)


Ces septoplasties s’adressent aux déviations angulaires par fracture verticale ou horizontale (imagecas clinique 10.2 et cas cliniques e.10.3 et e.10.4) et aux déviations courbes à grand rayon du bord dorsal du septum qui sont incomplètement corrigées par une septoplastie type Cottle avec une persistance de la déviation en fin d’intervention.





La voie d’abord est le plus souvent externe, transcolumellaire (voie de Réthi), permettant un contrôle plus facile des déformations. Les premiers temps de la septoplastie sont identiques aux septoplasties de type Cottle, mais les déviations résiduelles en fin d’intervention nécessitent une correction propre avec une rigidification et un alignement septal.



Technique chirurgicale (image vidéos 10.4A,B)



Correction des angulations septales

Une fois le septum libéré de ses contraintes externes (cadre osseux, jonction septotriangulaire ; fig. 10.19), le verrou chondrovomérien enlevé, les différentes résections ostéocartilagineuses réalisées, les déviations septales résiduelles sont corrigées.





Le cartilage septal est ensuite libéré de ses contraintes internes en supprimant les ressorts cartilagineux par des chondrotomies de fragilisation (fig. 10.20 et 10.21). Ces chondrotomies peuvent être transfixiantes au niveau des angulations saillantes en essayant néanmoins de garder des ponts cartilagineux entre les fragments pour éviter de les désolidariser les uns des autres. Sinon, elles sont hémitransfixiantes, réalisant un hachurage de fragilisation sur le côté concave dans les déviations courbes à grand rayon. Elles permettent ainsi une expansion et un redressement du cartilage septal.






Septoplasties extracorporelles (dépose–repose septale)


Ces septoplasties s’adressent aux déformations majeures (imagecas cliniques 10.3, 10.4 et cas clinique e.10.5) avec des fractures multiples réalisant un septum pyramidal, mais aussi à toutes les déformations non systématisables (nez enroulé).





La technique consiste à sortir le septum de sa loge et à réaliser une maquette cartilagineuse plane et rectiligne qui sera repositionnée dans la loge septale. La voie d’abord est soit externe, soit interseptocolumellaire.



Septoplastie extracorporelle par voie externe (image vidéo 10.5)


La voie d’abord externe avec incision transcolumellaire est la plus utilisée. Elle permet une exposition large, une dissection sous-périchondrale facile, une libération et, surtout, une reposition aisée de la maquette du néoseptum.



La septoplastie extracorporelle comporte différentes étapes (fig. 10.23) :



Décollement sous-périchondral du septum. Il est souvent difficile car la muqueuse adhère fortement aux angles saillants des angulations et l’opérateur s’efforcera d’éviter des perforations de la loge septale qui recevra le néoseptum (fig. 10.23A).


Libération et dépose du cartilage septal. Le cartilage est libéré de ses attaches osseuses inférieures. Il est sectionné des triangulaires au niveau de la voûte septotriangulaire, libéré de la lame perpendiculaire de l’ethmoïde, détaché de la voûte des os propres au niveau du point K, puis sorti des fosses nasales (fig. 10.23B).


Remodelage du cartilage septal et réalisation d’une maquette cartilagineuse. Les différentes anomalies du cartilage septal sont corrigées par des chondrotomies transfixiantes ou hémitransfixiantes de façon à avoir un septum plan et rectiligne. En cas de déviation majeure, on peut aboutir à un véritable puzzle cartilagineux (fig. 10.23 C–E). Les différentes pièces cartilagineuses sont ensuite suturées les unes aux autres et solidarisées par des attelles cartilagineuses. En cas de matériel cartilagineux insuffisant, on peut utiliser une plaque de PDS comme tuteur sur lequel les fragments cartilagineux sont alignés. Dans les cas où le bord supérieur du septum est très déformé, on peut effectuer une rotation de 180° du cartilage, son bord inférieur, qui est en général rectiligne, prenant alors la place de son bord supérieur.


Repose septale. Le septum est ensuite repositionné dans la loge septale comme une greffe libre de cartilage (fig. 10.23E,F). La fixation de la maquette (fig. 10.23 F) doit éviter tout déplacement ultérieur qui aboutirait à une ensellure, à de nouvelles déviations ou à une obstruction nasale. La maquette est suturée aux cartilages latéraux supérieurs, à l’épine nasale antérieure et aux deux mésiales du cartilage alaire. De la colle biologique peut être mise en place dans la loge septale pour fixer temporairement le montage. Un greffon cartilagineux de camouflage ou un fragment d’épicrâne peuvent être placés sur le montage et les sutures pour régulariser le nouveau dorsum et en atténuer les irrégularités sous-cutanées. La voie externe est ensuite refermée par des points nylon 6/0 au niveau de la columelle et des points 5/0 sur l’incision cutanéomuqueuse.


Pansement. Un méchage bilatéral est réalisé pour 48 à 72 heures. Des attelles en Silastic® peuvent être laissées en place pendant une semaine. Un pansement externe (attelle métallique) de protection est laissé en place pour 6 à 7 jours (fig. 10.24). Une antibiothérapie postopératoire est prescrite pour 6 jours.

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Apr 27, 2017 | Posted by in CHIRURGIE | Comments Off on 10: Rhinoseptoplasties fonctionnelles

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