Chapitre 1 Lifting cervicofacial
Le lifting cervicofacial (LCF) garde une place centrale dans le rajeunissement du visage et s’inscrit le plus souvent actuellement dans des plans de traitement associant à la chirurgie des gestes de médecine esthétique. Ses indications reposent sur une analyse rigoureuse du visage et une bonne compréhension de la demande de la patiente (ou plus rarement du patient).
La technique standard est le lifting biplan avec dissection profonde et mobilisation du système musculo-aponévrotique superficiel (SMAS) qui intègre de nombreux concepts d’anatomie chirurgicale [1–8], et dont la description magistrale a été faite par Owsley [9]. Cette technique parfaitement codifiée car très anatomique a deux avantages : elle est parfaitement reproductible et elle est facile à enseigner avec clarté. Elle a pour objectif de donner des résultats naturels et durables, dans la limite du possible, compte tenu de la qualité tissulaire et des antécédents pathologiques ou de chirurgie esthétique du futur opéré.
• première consultation : examen clinique complet et information du patient, discussion des possibilités chirurgicales ;
• temps de réflexion (suffisant) ;
• deuxième consultation : établissement avec le patient du plan de soins, devis, consentements, photographies, consultation avec le médecin anesthésiste ;
• troisième consultation ou visite préopératoire lors de l’hospitalisation.
Interrogatoire, examen clinique et analyse esthétique du visage vieilli
Interrogatoire
• la demande exprimée par la patiente : relâchement du cou, bajoue, creusement des sillons, apparition de rides, excès de gras ;
• les antécédents médicaux, les traitements médicamenteux et les pathologies chroniques qui pourront ajouter des risques à l’acte chirurgical ou qui sont susceptibles d’impacter le résultat : diabète, asthme et allergies, pathologies cutanées, pathologies cardiovasculaires, pathologies inflammatoires chroniques, prise de corticoïdes ou d’immunosuppresseurs, d’anticoagulants ou d’antiagrégants, etc. ;
• les antécédents d’actes esthétiques sur la région cervicofaciale : chirurgie (demander le compte-rendu opératoire), lipoaspiration, injections de fillers, injection de toxine botulique, etc. ;
• les facteurs de risque propres à la chirurgie esthétique : tabac, exposition au soleil, instabilité du poids, prise de TSH en cas de patiente ménopausée, fragilité capillaire, troubles circulatoires veineux.
Au cours de l’interrogatoire, on demande aussi des photographies de la patiente jeune (entre 20 et 30 ans) qui permettent d’analyser plus finement les relations entre l’aspect esthétique, la qualité de l’enveloppe cutanéograisseuse et le type d’infrastructure osseuse (fig. 1.1).
Examen clinique
L’examen apprécie les caractéristiques anatomiques constitutionnelles du patient et les effets du vieillissement d’une manière globale pour le visage et le cou, puis région anatomique par région anatomique et structure tissulaire par structure tissulaire (peau, gras sous-cutané, muscles peauciers).
Cet examen sera statique (unités esthétiques, ligne de l’ovale et ligne de profil) et dynamique (mimique, mouvements de la tête, mastication) (fig. 1.2).
Analyse esthétique
L’analyse du visage permet de comprendre la physiopathologie du vieillissement et de l’interpréter au cas par cas. On peut analyser de manière schématique séparément le vieillissement de la joue et celui du cou (fig. 1.3 et 1.4).
Diagnostic esthétique
Au terme de l’examen, un diagnostic « esthétique » est établi. Il décrit notamment : la conservation ou non des unités esthétiques de la face et du cou (fig. 1.5), l’aspect de la ligne de l’ovale (fig. 1.6) et celui de la ligne de profil (fig. 1.6 et 1.7).
Types de vieillissement
On distingue ainsi plusieurs types de visage et de vieillissement :
• le vieillissement standard sur un visage ayant de bonnes bases osseuses, une qualité de peau satisfaisante et une couche graisseuse conservée : la ptose domine, le résultat du lifting sera bon (fig. 1.8–1.10) ;
• le vieillissement cutanéograisseux excessif, avec atrophie cutanée et présence de cassures dermiques : le résultat du lifting sera incomplet et instable dans le temps ; il devra être associé à des procédés de comblement et/ou des techniques de resurfacing (fig. 1.11 et 1.12) ;
• le vieillissement sur un visage avec des bases osseuses insuffisantes ou un larynx bas ; les résultats du LCF sont limités, sauf dans les cas où une correction de la projection mandibulaire est faisable et réalisée (fig. 1.13–1.16).
Anatomie chirurgicale appliquée aux liftings cervicofaciaux
L’étude de l’anatomie chirurgicale de la face et du cou appliquée à la réalisation de liftings concerne d’une part les structures superficielles de la face modifiées par le vieillissement (et qui vont bénéficier d’un repositionnement chirurgical), et d’autre part les éléments anatomiques régionaux non directement intéressés mais qui doivent faire l’objet d’une identification et d’une préservation lors du geste chirurgical.
Peau
La peau présente des signes de vieillissement sous la forme de rides et de plis qui sont la conséquence des forces qui s’exercent sur elle, notamment au niveau des zones d’adhérence des muscles peauciers sous-jacents. Le vieillissement de la peau du visage est habituellement plus marqué que celui de la peau du cou, plus épaisse et moins concernée par les actions musculaires. Une bonne analyse de l’état cutané est essentielle à la fois pour déterminer la surface de décollement utile et pour évaluer les risques trophiques de ce décollement. En pratique, le décollement cutané est plus important chez les sujets plus âgés ; il peut être très limité chez les sujets d’âge intermédiaire qui démontrent une bonne fonction du SMAS.
Le vieillissement dermohypodermique est marqué au niveau du cou par l’apparition de rides qui sont secondaires à des phénomènes orthostatiques. Les rides orthostatiques à proprement parler sont secondaires aux mouvements de flexion-extension cervicaux et apparaissent vers la trentaine sous forme de deux à trois rides à concavité supérieure. La ptose de l’enveloppe cutanéograisseuse se fait en masse dans la région latérale de la joue et va accentuer les sillons à la zone de jonction entre la joue et la région périorificielle ; puis le sillon nasogénien est le plus marqué (fig. 1.17).
Tissu gras [6,7,10,11]
La prise en compte du tissu gras sous-cutané est un temps essentiel pour le choix de la technique de rajeunissement qu’il faudra proposer au patient. La couche graisseuse recouvre totalement le système musculo-aponévrotique superficiel (SMAS) dans les régions latérofaciales et cervicales ; son épaisseur est variable d’une région à l’autre et même d’une unité esthétique à l’autre. On distingue des zones qui peuvent être le siège d’amas graisseux plus épais et plus dense : l’amas graisseux malaire et l’amas graisseux sous-mental.
Avec le temps, le tissu gras facial subit deux évolutions : la fonte et la ptose.
• la graisse temporale profonde en continuité avec la boule de Bichat (graisse jugale profonde) par la syssarcose masticatrice va ptoser et creuser ainsi le pli d’amertume ;
• la graisse préparotidienne ne ptose pas du fait des fortes adhérences des ligaments parotidocutanés et de la faible mobilité de cette zone ;
• la graisse jugale externe, en regard du muscle masséter, à la face superficielle du SMAS, est peu soumise aux mouvements de cisaillement et reste donc relativement stable en volume et situation avec le temps ;
• l’amas graisseux malaire posé sur l’extension jugale du faisceau orbitaire du muscle orbiculaire orbitaire ptose et s’atrophie avec le temps, entraînant l’apparition du sillon sous-palpébral et de la vallée des larmes ;
• la graisse jugale interne glisse le long des adhérences du sillon nasogénien pour créer la bajoue (fig. 1.18–1.20).