Chapitre 1 Installation et mise en place de la cœlioscopie
La création du pneumopéritoine et la mise en place des trocarts sont des moments primordiaux de la cœlioscopie qui conditionnent le bon déroulement de l’intervention. Différentes études ont mis en évidence que 25 à 40 % des complications opératoires graves, notamment vasculaires et digestives, ont lieu à ce moment de l’intervention. Quel que soit le type de chirurgie prévue, le risque est le même [2,6,9,16,22]. Une bonne connaissance de la mise en place est indispensable en cœliochirurgie.
Installation de la patiente
Position de la patiente sur la table opératoire
Pour la majorité des interventions, la patiente est placée à plat sur la table opératoire, avec les jambes tendues en abduction, type position double équipe, permettant un accès vaginal facile sans toutefois relever trop les cuisses pour éviter de limiter les gestes cœlioscopiques. Les fesses au bord de la table donnent un espace libre satisfaisant pour la mobilisation utérine après canulation (fig. 1.1).
Les deux bras sont fixés le long du corps, ce qui réduit les risques de compression du plexus brachial et en même temps améliore l’ergonomie pour l’opérateur ainsi que pour son aide (fig. 1.2).
La position de Trendelenburg accentue la lordose lombaire, rapproche les gros vaisseaux de l’ombilic et, en même temps, génère le déplacement crânial de l’ombilic, ce qui augmente le risque des plaies vasculaires au moment de l’installation [17] (fig. 1.3).
Mise en place de la cœlioscopie
Avant de décrire les techniques d’installation, il est important de rappeler que les risques de plaies vasculaires sont favorisés par l’introduction en aveugle de l’aiguille de Palmer et/ou du premier trocart dans la cavité péritonéale en cas de technique classique, ainsi que par la proximité anatomique immédiate entre le point d’introduction ombilical de l’aiguille de Palmer et/ou du premier trocart et les gros vaisseaux sous-jacents [27] (fig. 1.5).
Les antécédents de laparotomie qui peuvent être à l’origine d’adhérences intra-abdominales sont le facteur de risque majeur des plaies digestives. L’introduction, toujours en aveugle, du premier trocart ou de l’aiguille de Palmer peut être responsable de ces plaies chez des patientes présentant de tels antécédents [5,15] (fig. 1.6).
Fig. 1.7 La paroi doit impérativement être soulevée et l’incision pratiquée dans le plan horizontal.
Ces faits ont trois corollaires :
• pour augmenter la distance entre l’ombilic et les vaisseaux, il faut tirer sur la paroi ;
• le fait de tirer sur la paroi ne diminue pas le risque digestif (les anses montent avec la paroi du fait de la pression intra-abdominale négative ou des adhérences) ;
• en cas d’abdomen opéré, il faut choisir un site d’introduction à distance du foyer opératoire.
Il n’existe pas de technique d’installation universelle adaptée à toutes les patientes. Les facteurs qui déterminent le choix entre ces techniques sont : les antécédents de laparotomie, l’IMC de la patiente, le relâchement de la paroi et la curarisation. Les habitudes, l’expérience de l’opérateur ainsi que l’indication opératoire peuvent également influencer ce choix [20].
La technique classique réside dans la création du pneumopéritoine avec l’aiguille de Palmer suivie de l’introduction du premier trocart ombilical. Ce geste est réalisé en aveugle [22].
La deuxième technique consiste en l’introduction directe du trocart ombilical, toujours en aveugle, sans création préalable du pneumopéritoine [8,18].
À l’opposé, durant la cœlioscopie ouverte, une incision au niveau de l’ombilic permet d’ouvrir la cavité abdominale et d’introduire ensuite le premier trocart dans la cavité sous contrôle visuel [13].
Création du pneumopéritoine avec l’aiguille de Palmer
Création du pneumopéritoine en transombilicale
Les indications de cette voie sont les suivantes ( vidéo 1.1) :
• l’absence d’antécédent de laparotomie médiane et suprapubienne pour les indications non obstétricales ;
• une patiente non obèse (IMC < 30) avec une paroi facile à soulever ;
• un bon relâchement de la paroi et une curarisation ;
• l’absence de volumineuse masse pelvienne ou d’une grossesse.
En cas d’antécédents de laparotomie ainsi que d’obésité majeure, il est formellement déconseillé de mettre l’aiguille de Palmer en aveugle dans l’ombilic. L’hypocondre gauche doit être privilégié dans ces cas-là [20].
La technique est la suivante : après vérification du bon fonctionnement du ressort de l’aiguille et en gardant le robinet ouvert (ce qui est important pour permettre à l’air ambiant d’entrer dans la cavité péritonéale et chasser les anses digestives), une petite moucheture est réalisée sur le bord inférieur du fond ombilical, en dedans de l’ombilic, tout en soulevant fortement l’ombilic avec une pince à dissection (fig. 1.7). L’incision ne doit être faite que pour l’aiguille de Palmer (l’incision du trocart est au mieux réalisée lorsque le pneumopéritoine est fait).
Puis en soulevant fortement la paroi en sous-ombilical strict (jamais en latéro-ombilical), vers le haut et en avant, pour éloigner l’ombilic de l’axe des gros vaisseaux, l’aiguille est introduite lentement, dans le plan strictement sagittal, par un geste contrôlé, en tenant l’aiguille de manière à ce que le ressort soit libre, avec un angle de 90° par rapport à la paroi et avec un angle de 45° par rapport à l’horizontal (fig. 1.8 et 1.9).
Un ensemble de tests simples nous permet de vérifier la bonne position de l’aiguille avant l’insufflation [24]. Il s’agit du test à la seringue, réalisé avec une seringue de 20 cc.
Le test de sécurité comprend trois temps :
• l’aspiration ne ramène rien, témoin de la pression intra-abdominale négative ;
• l’injection de 15 cc d’air doit être facile, sans résistance, correspondant à une diffusion facile du gaz dans une cavité ;
• la deuxième aspiration ne doit rien ramener confirmant le vide, en raison de la diffusion du gaz injecté dans toute la cavité péritonéale.
Il faut se rappeler que le but de la création du pneumopéritoine est l’écartement et la stabilisation de la paroi à distance des gros vaisseaux [1,26]. Cette stabilisation est obtenue à une pression intra-abdominale de 15 mmHg minimum (fig. 1.10).