6. Valves cardiaques
STÉNOSES VALVULAIRES
Le diagnostic échographique des sténoses valvulaires telles que le rétrécissement mitral (RM) ou le rétrécissement aortique (RA), est basé sur l’étude:
– de la morphologie et de la cinétique de la valve sténosée;
– du degré de la sténose valvulaire;
– du retentissement hémodynamique du rétrécissement valvulaire.
Pièges dus à l’étude de l’état de la valve sténosée
Ces pièges échographiques concernent:
– la visualisation incomplète de la valve sténosée ;
– l’évaluation imprécise des lésions valvulaires (morphologie, mobilité) ;
– les cas particuliers comme la sténose mitrale sous-valvulaire ou la bicuspidie aortique.
Visualisation incomplète de l’appareil valvulaire (figure 6.1)
Pour évaluer correctement l’état de la valve sténosée, il est nécessaire de visualiser:
– tous les segments de la grande et de la petite valve mitrale (figures 6.2 et 6.3);
Fig. 6.2 |
Fig. 6.3 |
– les commissures valvulaires;
– les cordages et les piliers de la valve mitrale.
Fig. 6.1 |
Un recours à l’échocardiographie transœsophagienne (ETO) peut être nécessaire, surtout en cas de rétrécissement mitral.
Appréciation imprécise du degré du remaniement valvulaire et/ou sousvalvulaire (figure 6.5)
Il peut être difficile d’évaluer le degré de remaniement valvulaire et/ou sous-valavulaire (fibrose, calcification, fusion commissurale, rétraction sous-valvulaire, etc.) du fait:
– d’une non-uniformité possible des lésions valvulaires;
– d’une non-multiplication des incidences échographiques;
– d’un mauvais réglage surtout des gains pouvant surestimer ou sous-estimer des lésions.
Fig. 6.5 |
Le diagnostic différentiel entre calcifications et nodules fibreux n’est pas toujours facile. Classiquement, les calcifications se manifestent par des échos denses et brillants persistants après réduction des gains. Elles sont certaines en présence de cône d’ombre adjacent. Leur surestimation échographique est néanmoins assez fréquente.
Appréciation difficile de la mobilité valvulaire en cas de fortes calcifications des valves
Il est souvent difficile d’apprécier la mobilité valvulaire en cas de fortes calcifications des valves qui deviennent hyperéchogènes et réverberantes.
De même, des calcifications annulaires massives peuvent gêner l’étude de la cinétique valvulaire.
Non-identification de la sténose mitrale sous-valvulaire
Cette difficulté est due à la fusion et/ou à la rétraction des cordages ainsi qu’à la fibrose des muscles papillaires responsables d’une obstruction mitrale sous-valvulaires. En fait, l’étude de l’appareil sous-valvulaire est plus difficile que celle des valves, probablement parce que les lésions sont plus complexes et souvent mal appréhendées par l’ETT. Elle est beaucoup plus précise en échographie transœsophagienne.
Non-diagnostic de la bicuspidie aortique évoluée
L’échocardiographie tridimensionnelle paraît intéressante dans l’étude de la morphologie et de la cinétique des valves cardiaques sténosées (figure 6.6).
Fig. 6.6 |
Pièges dus à l’étude du degré de la sténose valvulaire
Les mesures échographiques permettant la quantification du rétrécissement valvulaire sont:
– le gradient de pression trans-sténotique mesuré en Doppler continu;
– la surface de l’orifice sténosée:
• anatomique (indépendante du débit cardiaque) évaluée par la méthode de planimétrie,
• fonctionnelle (dépendante du débit cardiaque) mesurée selon la méthode de Hatle (RM), l’équation de continuité (RM, RA), méthode de PISA (RM).
Chaque méthode écho-Doppler a des indications préférentielles avec ses limites propres. Les éléments permettant la distinction entre la surface aortique mesurée en échographie et celle calculée au Doppler sont résumés dans le tableau 6.1.
Surface échographique | Surface Doppler | |
---|---|---|
Type de surface | anatomique | fonctionnelle |
Mode de mesure | planimétrie | équation de continuité |
Site de mesure | en amont de la vena contracta | au niveau de la vena contracta |
Relation avec débit cardiaque | indépendante du débit | dépendante du débit |
Modification sous Dobutamine | fixe | augmentée |
Pièges concernant le gradient trans-sténotique (tableau 6.2)
➝ Absence de mesure du gradient de pression moyen
En fait, le gradient moyen reflète mieux la sévérité de la sténose valvulaire par rapport au gradient maximal. Il représente l’intégration du gradient instantané pendant toute la durée de la diastole (RM) ou de la systole (RA). Le calcul du gradient moyen nécessite l’enregistrement des vitesses maximales qui se situent dans la partie centrale et proximale du jet sténotique. Il est également réalisable en échocardiographie transœsophagienne, mais la voie transthoracique est habituellement suffisante. Cependant l’ETO majore souvent le gradient de pression du fait de la tachycardie et du stress générés par l’examen.
• Absence de mesure du gradient moyen • Enregistrement incomplet du jet sténotique • Non interprétation du gradient en fonction du débit et de la fréquence cardiaque • Cas particuliers : – utilisation inappropriée de l’équation de Bernoulli ; – négligence du phénomène de restitution de pression. |
➝ Enregistrement incomplet du jet sténotique en Doppler continu
Cela s’explique en raison de:
– l’impossibilité technique: absence de l’incidence échographique valable;
– l’alignement imparfait du faisceau Doppler sur le jet sténotique (risque de sous-estimation du gradient);
– la non-utilisation des différentes voies d’abord afin d’obtenir des vitesses les plus élevées possibles. En pratique, toutes les voies échographiques doivent être utilisées, en sachant que les fenêtres apicale (RM, RA) et parasternale droite (RA) sont les plus «rentables»;
– mauvais réglage, surtout des gains et des filtres conditionnant la qualité du spectre Doppler. De toute façon, on s’appliquera à obtenir un flux laminaire avec une enveloppe spectrale bien définie et en s’aidant du Doppler couleur et du son Doppler.
➝ Non-interprétation du gradient sténotique en fonction du débit sanguin à travers l’orifice sténosé et de la fréquence cardiaque
La sévérité de la sténose peut être surestimée (gradient augmenté) par l’existence d’un débit cardiaque élevé (anémie, hyperthyroïdie, fièvre, effort, grossesse, sujet jeune), d’une fuite valvulaire associée ou au contraire sous-estimée (gradient diminué) en cas de bas débit cardiaque lié à une dysfonction systolique du ventricule gauche ou une hypovolémie. À titre d’exemple, un gradient moyen modéré ne permet pas d’exclure un rétrécissement valvulaire serré en cas de bas débit. Enfin, chez les patients en fibrillation auriculaire le moyennage de plusieurs cycles est indispensable compte tenu de la grande variabilité du gradient en fonction de la longueur des cycles (figure 6.7).
Fig. 6.7 |
➝ Utilisation inappropriée de l’équation simplifiée de Bernoulli dans le calcul du gradient transvalvulaire
Cette équation simplifiée (4V22) n’est utilisable que si la vitesse en amont de la sténose (V1) est négligeable en regard de la vitesse au niveau de la sténose (V2). Dans le cas contraire (à titre d’exemple: vitesse sous-aortique dépassant 1,5m/s) l’utilisation de l’équation simplifiée entraîne une surestimation du gradient. L’utilisation de la formule «complète» de Bernoulli: 4(V22 – V12) s’impose dans ce cas.
➝ Négligence du phénomène de restitution de pression en cas de sténose aortique
Ce phénomène est grossièrement dû à la différence des gradients entre la vena contracta (Doppler) d’une part et la zone pré-sténotique et la zone post-sténotique (cathétérisme) d’autre part. Il correspond à une re-transformation, en aval de la vena contracta (zone de plus basse pression et de plus haute vitesse), de l’énergie cinétique en énergie potentielle (ré-ascension de la pression). Ce phénomène est responsable d’une surestimation des gradients par le Doppler en comparaison du cathétérisme. On l’observe dans les cas particuliers:
– des sténoses en sablier de type de coarctation aortique;
– des RA à débit élevé.
– d’une prothèse valvulaire mécanique associée à une aorte ascendante de petite taille.
La restitution de pression n’est pas une limite de validité pour l’équation de continuité.
Pièges concernant la surface de l’orifice sténosé
➝ Pièges de la planimétrie (tableau 6.3)
• Planimétrie de l’orifice aortique sténosée
La planimétrie de l’orifice aortique en échographie transthoracique (ETT) 2D utilisant l’imagerie fondamentale est pratiquement impossible (petit orifice irrégulier mal défini, valves hyperéchogènes). L’imagerie d’harmonique peut être utile dans cette démarche en identifiant mieux les limites de l’orifice (voirfigure 6.5B). L’échographie transœsophagienne multiplan permet de planimétrer l’orifice aortique avec une bonne fiabilité. Elle doit être réservée aux cas où il existe un obstacle à l’utilisation de l’équation de continuité ou une discordance entre les différentes méthodes de quantification.
• Faible échogénicité du patient examiné. • Erreurs d’enregistrement dans : – le réglage des gains ; – le choix du site de planimétrie ; – le repérage de la protodiastole. • Formes particulières de la valve sténosée (en membrane, en entonnoir). • Importantes calcifications de l’orifice mitral. • Obstacle mitral sous-valvulaire. • En cas de fibrillation auriculaire. • Après valvuloplastie mitrale percutanée. |
• Planimétrie de l’orifice mitral sténosé
La planimétrie de l’orifice mitral sténosé reste la méthode la plus fiable de détermination de la surface mitrale (SM) dite anatomique. Elle s’effectue sur la valve en position ouverte selon la coupe transthoracique parasternale transversale en utilisant le zoom et la fonction cinéloop. Cette technique de planimétrie doit être particulièrement rigoureuse car de nombreux pièges sont possibles avec cette mesure, tels que:
– des erreurs d’enregistrement dans:
• le réglage de gains responsable d’une fausse définition des limites internes de l’orifice mitral: un gain trop bas entraîne un orifice mitral faussement large; un gain trop élevé conduit à une fausse image d’orifice trop sténosé. L’utilisation du zoom permet de minimiser l’erreur de contournage de l’orifice mitral,
• le choix du site de planimétrie: en amont de l’extrémité libre de la valve mitrale ou selon le plan 2D oblique à l’orifice mitral. Ces incidences inappropriées (figure 6.8) sont responsables de la surestimation de la SM réelle (figure 6.9). Pour obtenir un «vrai orifice mitral» il faut répéter des balayages de l’aorte vers la pointe du VG pour repérer l’orifice mitral. Le plan de coupe doit être perpendiculaire à l’extrémité des valves mitrales. Plusieurs planimétries seront faites et la valeur moyenne sera retenue. La mesure doit inclure l’aire de commissures dans la SM planimétrée,
Fig. 6.8 |
Fig. 6.9 |
• le repérage de la protodiastole qui correspond au maximum d’ouverture de la valve mitrale. La planimétrie mésodiastolique entraîne une sous-estimation de la SM réelle.
– la forme morphologique particulière de la valve sténosée (figure 6.10). Une coupe 2D inadaptée de la valve mitrale ayant la forme d’une membrane (RM dit à valves souples) donne l’orifice mitral faussement beaucoup plus large par rapport au RM à valves rigides en forme d’entonnoir (figure 6.11);
Fig. 6.10 |
Fig. 6.11 |
– la présence d’importantes calcifications de l’orifice mitral dont les échos réfléchis peuvent sous-estimer la SM réelle;
– la présence du remaniement important de l’appareil mitral sous-valvulaire (figure 6.12). La possibilité d’un obstacle sous-valvulaire prédominant doit être évoquée lorsque la surface planimétrée est supérieure à celle calculée par la méthode de Hatle;
Fig. 6.12 |
– les cas de fibrillation auriculaire. Pour obtenir une valeur précise de la SM, il est nécessaire de ralentir la fréquence cardiaque;
Cependant, il faut noter que la planimétrie mitrale est valable en cas d’insuffisance mitrale (IM) ou aortique (IA) associée.
➝ Pièges de la méthode de Hatle
La méthode de Hatle permet de calculer la SM dite fonctionnelle à partir du flux mitral diastolique enregistré en Doppler continu. Elle est basée sur la mesure des temps de demi-décroissance en pression ou PHT (pressure half-time). Ce temps varie de façon inverse avec la surface anatomique de l’orifice mitral. La SM est dérivée d’une formule mathématique empirique:
La méthode de Hatle a l’avantage car elle renseigne à la fois sur les obstacles valvulaire (fusion commissurale) et sous-valvulaire (lésions de l’appareil sous-valvulaire) alors que la planimétrie ne renseigne que sur l’obstacle valvulaire. Mesurée avec soin, la fiabilité de la méthode de Hatle est excellente. Néanmoins, cette méthode n’est pas dépourvue de nombreux pièges (tableau 6.4).
• Définition imparfaite de l’enveloppe spectrale • Décroissance non linéaire des vitesses de la sténose • En présence des troubles du rythme • Dans les conditions hémodynamiques associées : RA, IA, IM, trouble de remplissage,etc. • Lors de l’exercice physique • Chez les patients âgés • Au décours d’une valvuloplastie mitrale |
• Définition importante de l’enveloppe spectrale du flux mitral diastolique
La définition imparfaite de l’enveloppe spectrale du flux mitral diastolique empêche la détermination de la pente de décroissance. Elle est due à:
– un non-alignement avec le jet sténotique;
– l’insuffisance aortique associée engendrant le fluttering de la pente mitrale.
L’obtention d’une courbe Doppler interprétable aux contours définis sans ambiguïté est primordiale.
• Décroissance non linéaire des vitesses de la sténose mitrale
Il s’agit d’une morphologie particulière de la courbe Doppler: une pente biphasique avec une phase initiale raide et brève, suivie d’une phase plus lente (aspect « en spatule de ski ») (figure 6.13). Devant cette ambiguïté sur la pente à utiliser, il est recommandé d’effectuer la mesure du PHT sur la seconde pente (figure 6.14). Cependant, chez la plupart des patients, la pente de décroissance est une ligne droite.
Fig. 6.13 |
Fig. 6.14 |
• Troubles du rythme
Les troubles du rythme peuvent être des pièges de la méthode de Halte:
– tachycardie sinusale (> 100/min) favorisant une surestimation de la SM par raccourcissement de la durée de l’onde E mitrale et donc du PHT. La brièveté de la pente descendante de l’onde E peut rendre difficile la mesure du PHT. De même, une fusion des ondes E et A (téléscopage) dans les sténoses mitrales peu serrées peut gêner la mesure de la pente mitrale;
– flutter auriculaire perturbant la pente de décroissance du flux mitral;
– fibrillation auriculaire responsable du PHT variable. En cas d’intervalle R-R courts, le PHT est raccourci. Le moyennage de 5 à 10 cycles cardiaques est nécessaire dans cette situation;
• Conditions hémodynamiques associées
– rétrécissement aortique, insuffisance aortique importante, trouble de la compliance du VG (insuffisance cardiaque, cardiomyopathie restrictive, etc.). Dans ces cas, un raccourcissement du PHT est dû à la chute plus rapide du gradient transmitral en raison de l’élévation de la pression télédiastolique du VG. Il entraîne une surestimation de la SM réelle.
– insuffisance mitrale importante, trouble de la relaxation du VG (hypertrophie pariétale, cardiopathie ischémique, etc.). Dans ces cas, un allongement du PHT augmente le risque de sous-estimation de la SM.
• Patients âgés
Chez certains patients âgés la méthode de Hatle entraîne une surestimation de la SM, due en outre à une réduction de la compliance ventriculaire gauche.
• Exercice physique
• Après une valvuloplastie mitrale
Au décours immédiat d’une dilatation mitrale percutanée, les valeurs de PHT sont responsables d’une surestimation de la SM. Ce phénomène est lié aux modifications brutales des compliances atrio-ventriculaires en post-dilatation. Le rôle de la communication interatriale créée par le cathétérisme transseptal a été également évoqué pour expliquer cette surestimation.
L’utilisation de la méthode de Hatle est donc à proscrire dans les 48 heures suivant la procédure de dilatation.
En pratique
On retiendra plutôt la planimétrie en cas d’imagerie satisfaisante, et plutôt la méthode de Hatle en cas d’orifice mitral sévèrement calcifié, de sténose sous-valvulaire, ou d’imagerie de qualité médiocre. En cas de discordance entre la planimétrie mitrale et la méthode de Hatle, le recours à une troisième méthode (équation de continuité) devient nécessaire. Enfin, le Doppler couleur a un rôle secondaire dans l’appréciation du caractère serré du rétrécissement mitral. Il aide dans le positionnement du tir Doppler dans la partie centrale laminaire du jet sténotique (noyau central de la sténose). Enfin, la méthode de Hatle n’est plus valable sur les valves mitrales natives.
➝ Pièges de l’équation de continuité (tableau 6.5)
L’équation de continuité utilise le principe de la conservation des masses avec la formule:
Mesure du diamètre sousaortique | • Coupe 2D inappropriée • Incidence de mesure oblique • Calcifications valvulaires ou annulaires • Bourrelet septal sous-aortique • Coudure septale |
Mesure des vitesses sousaortiques | • Coupe 2D apicale oblique • Mauvaise position de la porte Doppler • Qualité insuffisante du spectre • Pathologies associées : IA, cardiomyopathie obstructive, fibrillation auriculaire |
Mesure des vitesses sténotiques | • Mauvais alignement avec le jet sténotique • Qualité insuffisante du spectre • Pathologies associées : cardiomyopathie obstructive, fibrillation auricualire • Confusion du flux de RA avec les flux : d’IM, d’IT, d’obstruction sous-aortique |
L’échographie Doppler transthoracique permet de calculer la surface fonctionnelle de l’orifice sténosé (mitral ou aortique) qui est égale au débit dans la chambre de chasse du VG divisé par l’intégrale temps-vitesse (ITV) du flux trans-sténotique comme suit:
Cet examen nécessite une grande rigueur technique et une précision des mesures afin d’éviter les pièges de la quantification de la sténose valvulaire.
Il s’agit des mesures suivantes (figure 6.15):
– du diamètre sous-aortique (D) permettant de calculer la surface de la chambre de chasse du VG (S1) par la formule: π × D2 /4;
– des vitesses sous-aortiques (V1);
– des vitesses sténotiques transvalvulaires (V2).
Fig. 6.15 |
• Pièges de la mesure du diamètre sous-aortique
Utilisation erronée de la coupe 2D apicale centrée sur l’orifice aortique
L’imprécision de la mesure du diamètre sous-aortique par cette voie est liée à la faible résolution latérale des ultrasons dans cette incidence. L’orifice aortique est abordé de façon tangentielle, d’où un risque de sous-estimation du diamètre de la chambre de chasse du VG. Pour ces raisons, le diamètre sous-aortique doit être mesuré selon la coupe parasternale longitudinale, en systole, en utilisant le zoom et le cinéloop.
Mauvaise visibilité des points d’insertion des sigmoïdes aortiques
Elle est due le plus souvent soit à une échogénicité insuffisante du patient, soit aux calcifications valvulaires ou annulaires masquant l’insertion de sigmoïdes (figure 6.16).
Fig. 6.16 |
Mesure imprécise du diamètre sous-aortique
Normalement, cette mesure doit être effectuée entre deux points d’insertion de sigmoïdes aortiques et parallèlement au plan de la valve. Il faut prendre soin de mesurer le diamètre sous-aortique avec la plus grande précision car, en cas d’erreur, le diamètre porté au carré modifiera d’autant la surface valvulaire calculée. Les situations suivantes peuvent être responsables des erreurs de la mesure du diamètre sousaortique (figures 6.17 et 6.18):
– l’incidence oblique majorant faussement la valeur du diamètre;
– la présence d’un bourrelet septal sous-aortique. Dans ce cas, la mesure doit être effectuée en aval du bourrelet afin de ne pas sous-estimer le diamètre;
– l’existence d’une coudure septale. Cette angulation anormale du septum par rapport à l’aorte peut gêner la mesure du diamètre sous-aortique (risque de surestimation).
Fig. 6.17 |
Fig. 6.18 |
En pratique, la mesure du diamètre de la chambre de chasse du VG doit être répétée au moins 3 fois et moyennée; les valeurs extrêmes non reproductibles seront éliminées.
La formule: D = (0,01 × taille du patient encm) + 0,25 offre une possibilité supplémentaire de calcul du diamètre sous-aortique (D). Elle est relativement fiable. L’utilisation de la valeur chiffrée fixe de 2cm pour le diamètre sous-aortique doit être évitée car elle constitue une source d’erreurs considérable. Le diamètre sous-aortique faussement majoré entraîne une surestimation de la surface valvulaire (mitrale ou aortique) calculée par l’équation de continuité (tableau 6.6). Au contraire, la valeur erronée trop faible du diamètre sous-aortique est responsable d’une sous-estimation de la surface valvulaire.
• Surestimation du diamètre sous-aortique • Surestimation de l’ITV sous-aortique • Sous-estimation de l’ITV trans-aortique |
Notons que toute mesure du diamètre sous-aortique < 17mm chez l’adulte est a priori suspecte de sous-estimation.
Enfin, en cas de RA ne permettant pas la mesure du diamètre sous-aortique par voie transthoracique, il est possible de quantifier la sténose par l’indice de perméabilité. Celui-ci s’effectue par le rapport des ITV: ITV sous-aortique / ITV transaortique. Ce paramètre simple à calculer est indépendant du débit cardiaque, sa sensibilité est satisfaisante mais sa spécificité reste faible. En effet, un rapport ≤ 0,25 identifie une surface aortique ≤ 0,75cm2 avec une sensibilité de 92% et une spécificité de 68%.
Enfin, dans une situation diagnostique extrême, on peut avoir recours à l’ETO pour mesurer précisément le diamètre sous-aortique.
• Pièges de l’enregistrement du flux sous-aortique
Normalement, ce flux doit être enregistré en Doppler pulsé à partir de la coupe apicale passant par la racine de l’aorte. Les pièges potentiels de cette technique sont à connaître (tableau 6.5).
Incidence trop oblique de la chambre de chasse du VG
Afin de réduire au minimum l’angle entre le faisceau Doppler et le flux sous-aortique, il est souvent indispensable de déplacer la sonde d’échographie plus vers l’aisselle du patient examiné. Cette manipulation permet de verticaliser la chambre de chasse et d’obtenir un meilleur alignement du faisceau Doppler sur le flux d’éjection aortique.
Mauvais positionnement de la porte Doppler dans la chambre de chasse du VG
En pratique, la porte Doppler de taille réduite (4–6mm) doit être positionnée au milieu de la chambre de chasse du VG, à environ 5mm en amont des sigmoïdes aortiques, ce qui correspond assez bien au niveau de mesure du diamètre sous-aortique en incidence parasternale. Le Doppler couleur peut faciliter le repérage du site de recueil du flux sous-aortique. Ce site correspond habituellement à la petite zone de premier aliasing (passage du bleu au rouge) en l’absence de bas débit. En modifiant légèrement la position de la porte Doppler dans la chambre de chasse, il est possible d’optimiser le recueil des vitesses sous-aortiques. Ce procédé permet d’enregistrer le flux sous-aortique intégralement dans sa zone exclusivement laminaire, au niveau de la vena contracta.
Une sous-estimation, des vitesses sous-aortiques est due à la porte Doppler trop éloignée de la valve aortique. Elle entraîne une sous-estimation de la surface valvulaire calculée par l’équation de continuité. Un rapprochement excessif de la porte Doppler de l’orifice aortique se traduit par un élargissement brutal du spectre lié à l’entrée dans la zone d’accélération du flux éjectionnel. Il entraîne une surestimation des vitesses sous-aortiques donc une majoration erronée de la surface valvulaire déduite de l’équation de continuité (figure 6.19).
Fig. 6.19 |
Mauvaise qualité du spectre sous-aortique enregistré en Doppler pulsé
Elle rend la mesure de l’ITV sous-aortique par planimétrie imprécise. Il est important d’obtenir une enveloppe spectrale du flux sous-aortique nette avec des contours bien définis, homogènes, sans écho à l’intérieur du spectre. La présence du clic de fermeture aortique n’est pas une condition indispensable d’enregistrement. Ce clic est souvent amorti en cas de RA serré. Enfin, la mesure de l’ITV sous-aortique doit être effectuée au moins sur trois cycles pour obtenir une valeur moyenne.
Pathologies associées
Des pathologies associés rendant l’enregistrement du flux sous-aortique moins fiable sont:
– l’insuffisance aortique importante et la cardiomyopathie obstructive majorant la vitesse sous-aortique. En effet, l’équation de continuité n’est pas valable en présence d’une accélération intraventriculaire gauche (supérieure à 1,5m/s) car la vitesse sous-aortique n’est plus négligeable dans ce contexte. Dans cette situation, le débit pulmonaire peut être utilisé dans le calcul de la surface valvulaire mitrale par l’équation de continuité;
– la fibrillation auriculaire responsable de l’ITV sous-aortique variable (figure 6.20). Elle impose de planimétrer et moyenner au moins cinq cycles cardiaques consécutifs à intervalle RR relativement constants.
Fig. 6.20 |
• Pièges d’enregistrement du flux sténotique
Le flux sténotique transvalvulaire (mitral ou aortique) est enregistré à l’aide du Doppler continu. Il convient de bien connaître les pièges d’enregistrement afin d’éviter les résultats discordants (tableau 6.5).
Mauvais alignement du faisceau Doppler sur le flux sténotique
Il se traduit par un enregistrement incomplet du jet sténotique et par un son Doppler «rauque» et vibrant. La multiplication des incidences échographiques est donc nécessaire surtout en cas d’exploration du RA. Réalisée avec patience, elle permet d’obtenir un alignement correct et le captage de la vitesse maximale de la sténose, la plus élevée possible. Le signal sonore pur et aigu témoigne du bon alignement. Le repérage préalable du flux sténotique en Doppler couleur sous la forme d’une mosaïque permet un ajustement précis de l’angle du tir Doppler (figure 6.21).
Fig. 6.21 |
Non-utilisation de la sonde Doppler continu de 2MHz type Pedoff (sonde crayon) sans imagerie 2D couplée (« à l’aveugle »)
La maniabilité parfaite de cette sonde permet un alignement optimal avec le jet central de la sténose. Un mauvais alignement (supérieur à 20°) entraîne une nette sous-estimation de l’ITV transvalvulaire (figure 6.22), ce qui conduit à une surestimation de la surface valvulaire calculée par l’équation de continuité (tableau 6.6).
Fig. 6.22 |
Négligence du moyennage des mesures d’ITV transvalvulaires
Comme pour le flux sous-aortique, il est recommandé de moyenner au moins trois cycles cardiaques en rythme sinusal en évitant les complexes post-extrasystoliques. En cas de fibrillation auriculaire, il faut moyenner un minimum de cinq cycles du fait de la variabilité de l’ITV du flux sténotique lors de l’arythmie complète (voirfigure 6.20).
Pathologies associées
Non application de l’équation de continuité pour le calcul de la SM en cas d’importante insuffisance aortique (de l’ITV sous-aortique) ou mitrale (de l’ITV transmitrale) associée à la sténose mitrale. En fait, une IM significative associée au RM, en majorant l’ITV mitrale, entraîne une sous-estimation de la surface mitrale calculée par l’équation de continuité.
Confusion entre le flux de rétrécissement aortique et le flux d’insuffisance mitrale (IM) avec la sonde Pedoff (figure 6.23)
Fig. 6.23 |
Confusion entre le flux de rétrécissement aortique et le flux d’insuffisance tricuspidienne (IT) avec la sonde Pedoff (figure 6.23)
La différenciation de ces flux est beaucoup plus facile. La vitesse maximale d’IT est le plus souvent plus basse que celle de RA, sauf en cas d’HTAP sévère, ou en cas de RA non serré. Le temps de régurgitation tricuspidienne est plus long que celui du flux aortique.
Confusion du flux de rétrécissement aortique avec un flux d’obstruction dynamique interventriculaire gauche
Pour différencier ces flux il faut s’aider de l’imagerie échographique et du Doppler continu. Le flux obstructif sous-aortique présente une accélération crescendo au cours de la systole avec un aspect particulier en lame de sabre (figure 6.23). Cependant, en cas d’obstruction sous-valvulaire associée au RA, l’équation de continuité est invalide car la vitesse d’amont n’est plus négligeable. La seule méthode utilisable dans cette situation est la planimétrie de l’orifice aortique.
• Pièges de « pseudo-sténose aortique »
Il s’agit du RA supposé serré (surface aortique < 0,75cm2) avec dysfonction systolique du VG (fraction d’éjection < 45%) et faible gradient transvalvulaire (gradient moyen < 30mmHg). Dans ce cas particulier, l’écho-Doppler classique ne permet pas de différencier la «pseudo-sténose aortique» liée à une dysfonction ventriculaire gauche avec bas débit, de la vrai sténose aortique serrée associée à une fonction ventriculaire altérée. L’échocardiographie de stress sous faibles doses de Dobutamine est très utile dans ce diagnostic différentiel. En fait, elle permet d’identifier l’existence d’une réserve contractile myocardique et d’étudier l’évolution des gradients ainsi que de la surface fonctionnelle aortique sous stimulation. La présence de la réserve contractile est définie par une augmentation de 20% d’ITV sous-aortique ou de 10% de la fraction d’éjection du VG.
La surface fonctionnelle augmente en moyenne de 0,1 à 0,3cm2 lorsque le débit cardiaque est majoré sous Dobutamine, la surface anatomique reste cependant fixe. Trois types de réponses hémodynamiques observées sous Dobutamine permettent de définir la conduite thérapeutique en cas de RA en bas débit (tableau 6.7):
– le type I reflète un RA réellement serré avec une réserve contractile justifiant le traitement chirurgical de la sténose;
– la réponse de type II permet de démasquer un RA modéré (pseudo-serré à l’état basal) associé à une myocardiopathie d’origine autre. Elle confirme la présence d’une réserve inotrope. Le traitement médical de première intention s’impose dans cette situation;