Traitement Médical et Prévention de la Pubalgie

19. Traitement Médical et Prévention de la Pubalgie

P. Rochcongar*



Le traitement médical de la pubalgie est étroitement lié à la prévention de cette pathologie complexe. Il doit notamment tenir compte du type de sport, du niveau de pratique, et des objectifs sportifs. Ceci est particulièrement important pour les atteintes inguinales car, dans le cadre de ces lésions, on ne peut, en effet, parler de traitement médical, la seule solution (comme cela est traité par ailleurs dans cet ouvrage) restant chirurgicale.


DISCIPLINES SPORTIVES CONCERNÉES

Les lésions constatées, et donc à traiter, sont différentes selon la discipline concernée. Malheureusement, à ce jour, tous les sports n’ont pas fait l’objet d’études épidémiologiques bien conduites.

Les atteintes inguinales sont très fréquentes chez les footballeurs [1], mais aussi chez les joueurs de rugby [2]. Elles sont retrouvées aussi dans d’autres sports comme le football australien [3].

L’atteinte prédominante des muscles adducteurs concerne, outre ces mêmes sports collectifs, plus spécifiquement d’autres spécialités sportives. Si certaines sont très peu responsables de lésions des adducteurs (c’est le cas de la danse [4], du basket-ball [5], du handball où les lésions représentent entre 1 et 6 % des blessures selon la littérature [6]), d’autres disciplines sont plus touchées. Ainsi, le suivi de nageurs de haut niveau a permis de mettre en évidence une incidence beaucoup plus élevée de douleurs des adducteurs (sans lésion échographique) chez les spécialistes de brasse, comparée aux autres nages, avec un retentissement direct sur l’entraînement et la performance en compétition [7]. Dans ce cas, les lésions sont le plus souvent isolées. En ce qui concerne l’athlétisme, les lésions des adducteurs ne sont retrouvées que chez les spécialistes de sprint, de haie ou d’épreuves combinées, et représentent à haut niveau 11 % des accidents musculaires [8]. Le hockey sur glace a fait l’objet de plusieurs études. Toutes confirment la fréquence des lésions des adducteurs, identiques chez les hommes et chez les femmes, pour un même niveau de pratique [9].


TRAITEMENT MÉDICAL

Après avoir éliminé, par l’examen clinique et les examens complémentaires, une souffrance de hanche, une fracture de fatigue, il reste à envisager la prise en charge des douleurs inguinales qui doivent être démembrées selon un protocole strict, actualisé très récemment par Falvey [10].

Dans tous les cas, le repos sportif ou plus exactement la suppression des gestes toxiques (course, accélérations, rotation, frappe de balle, tacle pour le footballeur) doit être imposée. L’arrêt peut aller de quelques semaines, si l’atteinte principale concerne les adducteurs ou s’il s’agit d’un syndrome canalaire, à 2 mois en cas d’atteinte inguinale. Le traitement anti-inflammatoire nous paraît dans ce cas justifié. Nous préconisons volontiers une à deux cures d’indométacine (3 semaines avec intervalle libre de 2 semaines). Dans le cas d’un syndrome canalaire, le test anesthésique est justifié. C’est le seul cas où l’infiltration est recommandée, en dehors des tendinopathies isolées des adducteurs, et rebelles aux autres traitements médicaux, ce qui reste tout à fait exceptionnel.

Ce schéma thérapeutique classique doit être systématiquement associé à une prise en charge rééducative, en tenant compte de la discipline sportive. Les arguments en faveur de cette prise en charge globale sont déjà anciens et ont été validés, depuis, par les études épidémiologiques.


RÉÉDUCATION ET PRÉVENTION


Arguments en faveur d’une politique de prévention

En 1983, le docteur André Boeda, médecin fédéral national de la Fédération française de football écrivait [11], dans l’introduction à une monographie intitulée La pubalgie et sa prévention : « la multiplication des cas de “pubalgies”, le nombre croissant de footballeurs professionnels contraints à l’intervention chirurgicale, ont suscité depuis quelques mois la réflexion commune des médecins et techniciens de la Fédération française de football. Le conseil fédéral a chargé sa commission centrale médicale d’établir un rapport sur la fréquence accrue des pubalgies et des interventions pratiquées sur les joueurs de haut niveau. »

Dans ce même document, le docteur Alain Durey, pionnier de la recherche clinique dans ce domaine, faisait la synthèse des facteurs favorisants, du bilan clinique, des traitements et surtout de la prévention. Dans le domaine de la prévention, il insistait sur le rôle fondamental de la protection rachidienne (et notamment de la lutte contre l’hyperlordose), de l’équilibre de la ceinture abdominale, et de la nécessité d’adapter la charge de travail à l’âge et au niveau de pratique.

Après plusieurs années d’études cliniques, de colloques, le message de la prévention de cette pathologie relayé par les médecins et kinésithérapeutes des clubs professionnels (équipes premières et surtout centres de formation), appliqué par les techniciens, a permis de voir diminuer de façon spectaculaire cette pathologie en réduisant notamment fortement les indications chirurgicales considérées, par beaucoup, comme le seul traitement au début des années 1980.

Progressivement, à la suite de ces travaux, un certain nombre de facteurs favorisant cette pathologie ont pu être confirmés :


– la perte de mobilité de hanche : elle peut avoir pour origine une coxopathie débutante pouvant entraîner, lors des mouvements de frappe de balle et lors du tacle, des douleurs pubiennes associées ou non à des douleurs postérieures au niveau des articulations sacro-iliaques [12]. L’autre cause principale est représentée par la raideur des muscles adducteurs, très fréquente chez les foot balleurs et entretenue par les programmes d’entraînement et de musculation [13]. Si, en ce qui concerne le football, il semble bien exister une relation entre le manque de souplesse et le risque lésionnel (mais uniquement chez l’adulte [14]), ce paramètre est par ailleurs très discuté [15, 16] et, pris isolément, ne semble pas être prédictif du risque lésionnel ;


– les déséquilibres de la ceinture abdominale : de très nombreuses observations cliniques ont révélé, notamment chez les footballeurs, la faiblesse des muscles obliques (stabilisateurs et rotateurs du tronc) comparativement à la puissance des muscles grands droits. Ceci est en rapport direct avec certains exercices de musculation préconisés, qui sollicitent presque exclusivement les grands droits, en course interne et à haute vitesse ;


– l’hyperlordose lombaire : le geste sportif lui-même s’accompagne d’une hyperlordose dynamique [17]. L’exemple typique en est la frappe de balle, mais on retrouve ce morphotype dans de nombreuses autres disciplines comme le ski de fond par exemple [18]. La répétition du geste conduit à une augmenta tion de l’hyperlordose lombaire notamment chez les footballeurs et les rugby men ; ceci a été parfaitement démontré par Watson [19]. Le morphotype particulier du sportif a déjà été souligné depuis de longues années par Delmas [20]. Cette hyperlordose peut être aussi favorisée par une raideur des muscles fléchisseurs de hanche (psoas-iliaque) et du muscle droit antérieur, ainsi que par une faiblesse de la paroi abdominale. Elle augmente les contraintes méca niques sur la symphyse pubienne et les sacro-iliaques [21]. Ces observations sont à rapprocher des études plus récentes entreprises à la recherche des fac teurs favorisants des spondylolyses et spondylolysthésis [22, 23] ;

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May 18, 2017 | Posted by in Uncategorized | Comments Off on Traitement Médical et Prévention de la Pubalgie

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