secondaires

Chapitre 7 Rhinoplasties secondaires


Les échecs des rhinoplasties peuvent être liés à des fautes techniques mais aussi à des erreurs de jugement. On peut considérer comme échec un nez techniquement bien fait s’il ne prend pas sa place dans le visage et ne cadre pas avec l’ensemble de l’individu.



CAUSES DES ÉCHECS DE RHINOPLASTIES ET PROBLÈMES RENCONTRÉS


Les fautes techniques sont de gravité variable et peuvent conduire à des déformations des différentes composantes de la pyramide nasale avec retentissement sur l’esthétique et la fonction.


Cependant, dans les cas bien opérés et où le chirurgien est satisfait du résultat immédiat, c’est-à-dire en dehors de toute faute technique apparente, on peut observer des défauts mineurs dans une proportion qui va selon les chirurgiens de 5 à 20%; parfois, ces défauts apparaissent comme tels, du fait que le sens d’observation du patient est beaucoup plus aigu après l’intervention. Un exemple fréquent concerne les déviations ou asymétries discrètes souvent méconnues avant l’intervention mais qui le sont rarement après ou qui peuvent être causées par la rétraction cicatricielle secondaire.


Les défauts importants sont en rapport avec des résections excessives irrégulières, et résultent aussi de la négligence ou méconnaissance des supports de la pointe, des ailes et du tiers moyen; mais il n’y a pas toujours de parallélisme entre l’importance du défaut observé et les difficultés opératoires rencontrées.


Les défauts les plus fréquents sont observés sur ces nez qui manquent de naturel et paraissent «refaits» à cause de certains traits retrouvés régulièrement : un angle nasofrontal insuffisamment creusé alors que le nez est trop raccourci, une arête trop abaissée mettant en évidence un bec de corbin ou une pointe de nez ronde, manquant de définition (figure 7-1)



Les problèmes rencontrés dans les rhinoplasties secondaires sont fréquemment associés et dépendent :






Les difficultés sont donc de degré variable, les problèmes pouvant exister au niveau des tissus de recouvrement, de la muqueuse et du squelette ostéocartilagineux.


Les tissus de recouvrement peuvent être cicatriciels, scléreux et adhérents au squelette ostéocartilagineux, condition favorisée par des gestes agressifs sur la couche musculaire et souscutanée, et par un «dégraissage». Les plans cutanés peuvent également adhérer aux plans muqueux lorsque les résections cartilagineuses ont été excessives. Le manque de souplesse des orifices narinaires accroît les difficultés d’exposition des lésions.



Les résections osseuses et cartilagineuses nécessitent une reconstruction anatomique, le plus souvent à l’aide de greffes cartilagineuses, l’objectif de la reconstruction étant anatomique et fonctionnel.




CHOIX DE L’ABORD CHIRURGICAL


L’abord chirurgical dépend des difficultés prévues ou rencontrées.


Un abord endonasal peut être utilisé en cas de défauts modérés, lorsque les problèmes portent essentiellement sur le tiers supérieur et moyen de la pyramide nasale, et que les tissus sont souples, les orifices narinaires de taille normale.


Une incision intracartilagineuse ou intercartilagineuse est suffisante pour effectuer les corrections désirées, en particulier lorsque la pointe du nez est symétrique et qu’elle ne constitue pas le problème majeur.


La tactique opératoire peut changer durant l’intervention et nécessiter une vue directe en cas de difficulté.


La voie d’abord externe a beaucoup plus d’indications dans les cas difficiles avec petites narines, téguments sans souplesse, et défauts importants prédominant au niveau de la pointe du nez et du tiers moyen.


L’incision transcolumellaire peut être placée à mi-hauteur de la columelle ou au niveau du pied de la columelle dans le sillon columellolabial en cas de columelle très courte. Elle permet une analyse précise des déformations, leur correction sous contrôle direct de la vue par des montages cartilagineux parfois sophistiqués; elle procure un accès aisé sur le septum et parfois la possibilité de prélèvement en cas de chirurgie septale antérieure. Dans certains cas, après plusieurs rhinoplasties, les tissus sont très cicatriciels, la columelle rétractée, scléreuse contre-indiquant un abord transcolumellaire. Il est plus prudent dans ces cas d’utiliser une voie endonasale avec décollements limités ou une voie sagittale médiocolumellaire.


L’ incision sagittale médiocolumellaire a été utilisée pendant des décennies dans la correction de séquelles de fentes nasolabiales. Il s’agit d’une voie d’abord rapide, simple, facile à suturer et qui laisse une cicatrice invisible. Elle présente un grand intérêt dans les reprises difficiles ou lorsque, après plusieurs interventions, les tissus sont très scléreux.


L’incision courte, de moins d’un centimètre, est placée dans le segment columello-apical, mais elle peut être étendue en arrière vers le pli columellolabial; elle permet une exposition des crus intermédiaires et des dômes qui peuvent être disséqués et rapprochés par sutures, mais surtout l’insertion de greffes cartilagineuses dans des loges disséquées avec précision au niveau de la columelle, des ailes, de la pointe et même parfois de l’arête (figure 7-2).



Enfin, dans les rhinoplasties secondaires, il est classique et recommandé par certains auteurs d’effectuer des décollements limités. Mais que vaut-il mieux : effectuer un décollement modéré qui procure une exposition limitée, un contrôle difficile et insuffisant lors des corrections, ou un décollement plus important qui procure une meilleure exposition telle que celle obtenue par l’abord par voie externe? Qu’il s’agisse d’un abord par voie externe ou par voie endonasale, les décollements doivent être suffisants, pour permettre de travailler en étant à l’aise. Les risques cutanés sont inexistants si l’on prend soin de ménager une couverture tégumentaire suffisante et si le lambeau décollé est manipulé avec douceur.



DÉFAUTS MODÉRÉS ET MINEURS


Ces défauts consistent le plus souvent en une saillie cartilagineuse ou osseuse, une petite asymétrie ou déviation, une légère dépression. Ils peuvent apparaître tardivement après quelques mois lorsque l’œdème a totalement disparu. Leur correction est parfois simple, rapide, et peut être effectuée dans la plupart des cas sous anesthésie locale.


Une saillie osseuse ou du bord antérieur septal peut être réduite à l’aide d’une râpe étroite (3 ou 4 mm); l’extrémité présente une forme effilée qui permet, après puncture endonasale, d’introduire la râpe directement vers la saillie à corriger sans décollement préalable. Si l’os peut être facilement râpé, le cartilage septal qui est rigide peut l’être également, permettant ainsi de réduire une saillie de l’arête septale. En revanche, il est risqué de râper du cartilage auriculaire qui peut manquer de cohésion et peut se déchirer, entraînant un défaut plus marqué.


Une dépression modérée peut être corrigée par comblement à l’aide d’une greffe cartilagineuse écrasée prélevée sur le septum ou la conque et introduite après tunnellisation ou par injection d’un produit de comblement.


Les déviations discrètes sont détectées immédiatement par les patients. Elles correspondent souvent à une déviation cartilagineuse résiduelle ou à une asymétrie de résections. Leur correction est malaisée et il est souvent préférable et plus facile de les corriger par des gestes limités plutôt que de pratiquer décollements larges et ostéotomies; on risquerait dans ce dernier cas non seulement de ne pas corriger complètement le défaut, mais aussi de voir apparaître d’autres problèmes. C’est pourquoi, une solution simple, telle que le camouflage par greffe cartilagineuse placée du côté opposé à la déviation, peut constituer un geste efficace.



DÉFAUTS DE LA RACINE


La projection et la position de la racine sont importantes car elles ont une répercussion sur la longueur du nez et l’angle nasofacial. La position idéale de la racine (point de plus grande concavité) est située au niveau du pli palpébral supérieur, mais elle varie en fonction de la résection ou d’une greffe placée au niveau de la racine. La projection de la racine est à 4-5 mm en arrière du plan glabellaire (B. Guyuron) ou 10 à 12 mm du plan de la cornée (S. Byrd) (figure 7-3).



Une racine insuffisamment creusée avec dépression nasofrontale peu marquée constitue un défaut fréquent, car la réduction de la racine est difficile.


La réduction de la racine osseuse doit être faite avant de placer une greffe cartilagineuse et surtout osseuse car, d’une part elle permet une meilleure prise et d’autre part cela évite de fragiliser la greffe en réduisant son épaisseur.


La réduction osseuse de la racine doit être précédée d’un examen avec palpation pinçant les tissus mous de la racine pour en apprécier l’épaisseur (en moyenne 7,5 mm), la laxité ou au contraire l’aspect ferme. En effet, en dépit d’une résection importante de la racine osseuse, la rétraction des tissus mous sera limitée. Cette réponse des tissus de recouvrement qui est normalement de 25% (B. Guyuron) est liée d’une part à l’épaisseur et à l’élasticité des tissus mous, d’autre part à l’impossibilité de redrapage latéral lié aux points fixes que représentent les canthus internes.


Le creusement de la racine peut être effectué à l’aide d’un ostéotome biseauté dont le biseau est orienté en avant, ce qui permet à l’ostéotome de pénétrer plus facilement dans l’os dense à ce niveau.


Lorsque la résection de la bosse nasale a été effectuée à l’aide d’un ostéotome avec mauvaise orientation de l’instrument, on peut observer, en fonction de l’orientation de l’ostéotome, soit une dépression à la partie moyenne du dorsum, surmontée d’une racine qui paraît plus saillante, soit un creusement important de la racine associé à une ensellure de l’arête. Une racine trop creuse rend plus apparente la saillie de la glabelle sus-jacente ou une base déjà proéminente.


La peau au niveau de la racine est relativement épaisse sur la ligne médiane. Elle devient de plus en plus fine en se rapprochant du canthus interne et vers le bas au niveau du rhinion (figure 7-9). Cela explique que les défauts observés sont situés sur les parties latérales de la racine et du rhinion. Ils peuvent être prévenus par une bonne préparation du lit receveur : faire une loge étroite, râper pour supprimer les tissus mous en profondeur de la greffe, biseauter ou écraser légèrement les bords et l’extrémité inférieure de la greffe. Le meilleur matériel pour la racine est constitué par les fragments de crus latérales réséqués qui sont fins et très malléables.



La correction d’une saillie de la greffe peut être faite par des punctures à l’aide d’une aiguille de gros diamètre ou à l’aide d’une râpe étroite. Un abord direct par une incision latérale de quelques millimètres constitue une solution rapide, efficace, et au prix d’une cicatrice invisible si elle est faite dans un pli.



ENSELLURES NASALES


L’ensellure de l’arête nasale est souvent causée par un traumatisme avec enfoncement de la pyramide nasale, mais aussi par une résection excessive portant sur l’arête ostéocartilagineuse. Un affaiblissement du bord antérieur septal par septoplastie ou prélèvement peut entraîner une déformation sus-apicale en «coup de hache».


L’ensellure peut intéresser la totalité de l’arête nasale depuis la racine jusqu’à la région sus-apicale ou seulement la partie inférieure du dorsum, réalisant une déformation en «coup de hache» surmontée d’une bosse plus ou moins marquée (vraie ou fausse bosse) (figure 7-4).



Selon l’importance de l’ensellure, diverses déformations peuvent être observées : de face, une asymétrie avec aspect plat, déformation en «V» inversé, et une base paraissant plus importante. Les supports de la pointe du nez sont souvent altérés par le traumatisme ancien ou par les interventions précédentes, comme l’indique la faiblesse des crus mésiales à la pression de la pointe du nez. La distance entre les bases alaires paraît importante par rapport à la longueur de la columelle. Une rétraction de la columelle est parfois notée.


La correction chirurgicale de l’ensellure consiste à corriger les défects par reposition des éléments déplacés, et reconstruction de l’arête.


Après dissection extramuqueuse, une section est effectuée à la jonction du septum et des cartilages triangulaires. Une déviation du bord antérieur septal peut alors être corrigée par des incisions cartilagineuses ou par des attelles cartilagineuses de type spreader graft dont l’intérêt est de symétriser le tiers moyen et d’améliorer la fonction de la valve interne. Un renforcement du septum caudal nécessite un étai columellaire ou une greffe septocaudale en extension.


Selon l’importance de l’ensellure, on utilisera des greffes cartilagineuses en une ou plusieurs épaisseurs ou une greffe osseuse. Le cartilage septal fournit des greffes plates qui peuvent être superposées en deux ou trois épaisseurs et parfois associées à des greffes de cartilage auriculaire.


Le cartilage de la conque peut être enroulé, formant un demi-cylindre à l’intérieur duquel sont placés des fragments résiduels de cartilage. Avant de placer une greffe s’étendant jusqu’à la racine, l’angle nasofrontal doit être légèrement creusé. La conque peut aussi être utilisée en DCF , plus facile à modeler aux dimensions exactes du defect que la conque en monobloc ; cela est particulièrement utile quand le septum a déjà été prélevé.


Les ostéotomies médianes et latérales permettent de corriger une asymétrie ou une voûte trop large, mais il ne faut pas perdre de vue que l’ensellure donne l’illusion d’une arête plate et large et qu’après augmentation de l’arête nasale, celle-ci paraîtra souvent moins large. Par conséquent, les ostéotomies de rétrécissement ne sont pas toujours indispensables.


La correction d’une asymétrie importante du lit receveur n’est pas facile car elle nécessiterait de reculer davantage l’arête nasale :











CAS CLINIQUE




Correction (C, E)



















CAS CLINIQUE


Correction (C, E)


Étant donné l’asymétrie importante du dorsum et le risque de voir une greffe placée sur l’arête instable et en raison d’un lit receveur difficile à régulariser, il a été décidé d’utiliser la technique de cartilage en dés de 1 mm enveloppés d’aponévrose temporale, décrite par O. Erol et R. Daniel.

















PROBLÈMES LIÉS AUX GREFFES


Bien qu’elles soient indiquées dans le but d’améliorer la forme et la fonction et de corriger ou de camoufler des déformations, les greffes peuvent être cause de défauts divers, tels que déplacement avec asymétrie, visibilité en particulier sous une peau fine, déformations de la greffe, résorption, excès ou insuffisance de matériel, ou plus rarement de complications.


Parmi les complications liées au prélèvement, citons les chéloïdes rétro-auriculaires, les perforations septales, une ensellure sus-apicale par perte du support septal après prélèvement effectué trop prés du bord antérieur septal, une fuite de liquide céphalorachidien liée à des manœuvres brutales lors du prélèvement au niveau de la lame perpendiculaire par fracture irradiée à la lame criblée de l’ethmoïde.


Les défauts les plus fréquents concernant les greffes sont : un excès ou une insuffisance de greffe, une asymétrie, des irrégularités surtout visibles en cas de peau fine, un déplacement ou une torsion de la greffe – en particulier pour les greffes costales et auriculaires.


L’infection, très rare, peut survenir en cas de rhinoplastie secondaire avec peau épaisse, cicatricielle et plus volontiers sur du cartilage costal ou auriculaire. La résorption est observée sur les greffes osseuses, iliaques en particulier. Rougeur et télangiectasies surviennent surtout après plusieurs rhinoplasties.


Après plusieurs rhinoplasties, il est fréquent de faire face à un manque de cartilage à partir des sites usuels : septum et oreille. Cette situation doit être envisagée avant l’intervention par un examen endonasal qui permet, par une palpation du septum avec un instrument mousse, de déceler et parfois de circonscrire la zone prélevée. Il est parfois possible, en abordant le septum par voie dorsale, de passer au-dessus puis en arrière de la zone d’adhérences liée à la septoplastie antérieure et de prélever des fragments de taille variable.


En ce qui concerne les oreilles, les deux conques ont parfois été prélevées, mais il peut persister quelques zones où un prélèvement est possible.


On peut aussi effectuer un prélèvement de taille intéressante au niveau de la scapha ou du tragus (W. Gubish). La technique est simple, mais nécessite un pansement modelant (figure 7-8). Le cartilage costal est toujours utilisable et fournit un matériel abondant. Il est nécessaire de prévenir sa tendance à la déformation secondaire par des résections symétriques par apport à l’axe median de la cote, et attendre au moins 45 minutes entre la confection du greffon et sa suture. Le cartilage costal est un excellent site donneur en vue d’un DCF sans qu’il y ait un risque de déformation.






DÉFORMATIONS DU TIERS MOYEN ET DES AILES


L’importance fonctionnelle et esthétique de la paroi cartilagineuse est parfois ignorée ou omise lors d’une rhinoplastie. Il en résulte des défauts dont l’importance est en rapport avec celle des résections effectuées et des troubles fonctionnels affectant les valves nasales.



Tiers moyen


Les défauts rencontrés vont d’une légère interruption des lignes latérodorsales parallèles à une déformation typique en «V» inversé. Ces déformations peuvent être isolées ou associées à une ensellure. Elles sont favorisées par :




Mais une ostéotomie trop haute, un décollement trop étendu sur le trajet d’ostéotomie ou sur l’arête nasale fragilisent le support osseux du cartilage triangulaire, entraînant une déformation au niveau du tiers moyen.


L’aspect et l’importance de la déformation dépendent en partie de la couverture cutanée : une peau fine et la destruction de la musculature sous-cutanée (muscle transverse) lors des précédentes interventions favorisent et accentuent les déformations ainsi que les adhérences profondes. Une peau épaisse masque en partie les déformations de la charpente sous-jacente. Il est fréquent d’observer une faiblesse de la paroi latérale cartilagineuse dans sa totalité, c’est-à-dire incluant également la paroi alaire.


La correction chirurgicale est effectuée à l’aide de greffes cartilagineuses qui jouent un rôle de camouflage et de reconstruction, de renforcement des structures : greffes en onlay sur l’arête nasale; spreader grafts placés entre le bord antérieur septal et la muqueuse. Une concavité marquée des cartilages triangulaires peut être corrigée par une greffe placée sur la face superficielle des cartilages triangulaires.


Le cartilage septal est le meilleur matériel pour ces reconstructions. Dans le cas où les cartilages triangulaires ont été excessivement réséqués, une greffe auriculaire placée à cheval sur l’arête et débordant latéralement en passant à la face profonde des cartilages triangulaires préalablement disséqués de leur revêtement muqueux (splay graft de B. Guyuron) constitue une délicate mais belle reconstruction.


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Aug 7, 2017 | Posted by in GÉNÉRAL | Comments Off on secondaires

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