Protocole de thrombolyse

4. Protocole de thrombolyse


Le rt-PA intraveineux est le seul traitement ayant reçu l’AMM dans l’AVC ischémique en phase aiguë. Ceci est basé sur l’étude pivot NINDS TPA Stroke [14]*. Le médicament est maintenant approuvé en Amérique du Nord, en Europe et au Japon pour traiter l’AVC ischémique en phase aiguë. Le rt-PA intraveineux est utilisé depuis une quinzaine d’années. De nombreuses méta-analyses et des études réalisées après la commercialisation confirment que si les recommandations sont correctement suivies, les bénéfices sont substantiels et les risques minimaux pour les patients [1,2]. En revanche, si les recommandations ne sont pas respectées, le risque l’emporte sur les bénéfices.

Une fois ces consignes de prudence données, il peut y avoir parfois des variations quant à la façon dont les critères d’exclusion sont interprétés. Pour l’essentiel, les indications et contre-indications suivent les recommandations publiées [1,2]. Nous avons indiqué, sous chaque recommandation, là où nous pensons qu’il est possible d’autoriser quelque souplesse dans l’interprétation de certains critères.


Indications de thrombolyse






• Âge ≥ 18 ans. Il n’y a pas de données pour un traitement chez l’enfant. Cependant, des cas de grands enfants traités avec le rt-PA selon les critères des adultes ont été rapportés.


• Diagnostic clinique de l’AVC ischémique responsable d’un déficit neurologique patent. L’AVC doit présenter un minimum de sévérité (dans quasiment la totalité des cas une échelle de score NIH ≥ 3). Nous utilisons le critère: « Serait-ce invalidant si le déficit persistait? »


• Début des premiers symptômes clairement établi à moins de 180 min (3 h) avant que le traitement ne débute. Nous avons expliqué l’importance d’établir l’heure de début dans le chapitre 2.


Contre-indications absolues






• Symptômes mineurs ou s’améliorant rapidement. C’est l’un des points les plus difficiles de la prise de décision d’un traitement par thrombolyse. Les recommandations préconisent de ne pas traiter un patient qui a une amélioration rapide. Cependant, nous avons observé que nombre de ces patients récupéraient de façon substantielle mais gardaient un déficit invalidant. Même les patients avec des AVC de faible gravité bénéficient du traitement par rt-PA alors même que les complications à type de saignement intracrânien sont très rares chez ces patients. C’est pourquoi, plutôt que d’exclure systématiquement tous les patients ayant des symptômes mineurs ou ceux qui s’améliorent, nous les traitons quand même si au moment où nous sommes prêts à débuter le traitement, le déficit, tel qu’il existe à cet instant, serait invalidant s’il persistait.


• Antécédent d’HIC.


• Symptômes suggérant une HSA.


• Présence d’un quelconque signe de saignement sur le scanner cérébral prétraitement. Il n’est pas certain que des patients présentant une image de microsaignement à l’IRM (pas au scanner) puissent être traités en toute sécurité. Des données récentes suggèrent qu’ils ne présentent pas un risque accru de saignement après thrombolyse, mais les données sont encore peu concluantes. Néanmoins, s’il y a le moindre signe de saignement sur le scanner, le patient ne doit pas être traité.


• Néoplasie intracrânienne, malformation artérioveineuse (MAV) non traitée ou anévrisme à risque de saignement. Si le patient a un anévrisme ou une MAV qui a été traitée chirurgicalement par un clip ou réparée il y a plus de 3 mois, nous autorisons généralement le traitement, non sans avoir fait réaliser au préalable un angioscanner pour confirmer l’oblitération de la lésion. De nombreux patients avec des tumeurs cérébrales bénignes comme des méningiomes ont aussi été traités sans complications. Cependant, les patients avec une tumeur cérébrale plus agressive ne doivent pas être traités.


• Hypodensité ou effet de masse au scanner préalablement au traitement. Les modifications précoces, d’origine ischémique, sur le scanner ne sont pas une contre-indication. Néanmoins, une hypodensité à démarcation nette suggère que l’AVC a plus de 3 h, ce qui plaide contre le traitement. Un effet de masse avec une compression du ventricule ou des structures médianes suggèrent une autre étiologie qu’un AVC.


• Antécédent d’AVC, de chirurgie intracrânienne ou de traumatisme crânien de moins de 3 mois.


• Antécédent de chirurgie majeure de moins de 14 j.


• Pression systolique persistante > 185 mmHg.


• Pression diastolique persistante > 110 mmHg.


• Traitement agressif nécessaire pour baisser la pression artérielle à ces niveaux. Voir plus loin les commentaires sur le contrôle de la pression artérielle.


• Hémorragie gastro-intestinale ou urinaire datant de moins de 21 j. Dans quelques cas, nous ne sommes pas si rigides quant aux intervalles de temps avec les saignements gastro-intestinaux ou urinaires, faisant confiance à l’évaluation clinique basée sur le niveau du risque anticipé versus le bénéfice possible. Par exemple, la question peut se poser de traiter un patient avec un AVC très sévère qui a eu une hémorragie gastro-intestinale récente; connaissant le risque de voir survenir cette complication, mais sachant aussi que, sans traitement, le pronostic de ce patient sera certainement très mauvais. Ce risque est moins acceptable pour un patient présentant un AVC plus mineur. Le principal signe d’alerte est que si le patient a un saignement actif, mis en évidence par une diminution d’hématocrite ou d’hémoglobine, il ne devrait pas être traité. S’il faut traiter un patient avec un risque de saignement, il faut alors prendre contact, par anticipation et pas après la survenue de cette complication, avec le chirurgien approprié qui pourra aider à prendre en charge la complication hémorragique survenant au cours du traitement.


• Ponction artérielle d’un site non compressible ou ponction lombaire. Les recommandations préconisent de ne pas traiter par thrombolyse moins de 7 j après de telles ponctions, mais un jugement clinique est nécessaire. Habituellement, un intervalle de 24 h peut être suffisant s’il n’y a pas de traumatisme évident au niveau de la ponction.


• Traitement par héparine dans les dernières 48 h et élévation du TP.


• Taux de plaquettes < 100 000.


• INR > 1,7 ou connaissance d’une diathèse hémorragique. Nous sommes plus conservateurs que les recommandations au sujet du taux d’INR qui autorise le traitement par rt-PA intraveineux. Dans l’étude NINDS, le seuil utilisé était un TP de 15 s. Il y a débat quant à la concordance entre le niveau d’INR et le TP. Quoi qu’il en soit, nous savons que l’augmentation des saignements apparaît quand les patients traités par warfarine atteignent un INR de 1,7 ou plus. Pour cette raison, nous tendons à être un peu plus conservateurs et nous retenons un seuil d’INR à 1,6. Nous orientons les patients ayant un INR supérieur à ce niveau vers une procédure de retrait mécanique intra-artérielle du caillot (voir plus loin).


Contre-indications relatives






• Convulsions en début d’AVC. Les patients avec des convulsions étaient exclus des études initiales sur la thrombolyse parce qu’il était difficile d’établir la part du déficit neurologique qui revenait aux convulsions et celle qui revenait à l’AVC. Ceci est important lorsque l’on réalise une étude, mais moins dans la pratique clinique. S’il est certain que l’AVC qui est apparu a causé un déficit invalidant, même si le patient a eu des convulsions, nous pensons qu’il est pertinent de traiter ce patient s’il remplit les autres critères (particulièrement l’absence d’argument en faveur d’un traumatisme crânien avec les convulsions).


• Glycémie < 50 mg/dl ou > 400 mg/dl. Si le patient demeure symptomatique après correction d’une glycémie haute ou basse, il ne faut pas l’exclure d’un traitement.


• Atteinte hémorragique de l’œil et autres situations susceptibles de causer des séquelles en cas de saignement. Une chirurgie ophtalmologique récente comme une cataracte ou d’autres chirurgies mineures ne sont pas nécessairement des contre-indications. Un avis est nécessaire. Le traitement d’un patient avec des troubles oculaires, tel un récent décollement de rétine, engendre un risque trop élevé de perdre la vue, particulièrement si l’AVC est modéré. La meilleure stratégie est de contacter le spécialiste correspondant afin de lui demander son opinion sur les risques de saignement.


• Infarctus du myocarde datant de moins de 6 semaines. Là aussi, un avis doit être sollicité pour interpréter cette exclusion. Le délai depuis l’infarctus du myocarde ainsi que sa sévérité doivent, tous les deux, être pris en considération. Le risque majeur ici est une hémorragie péricardique et une tamponnade. Ce risque doit certainement être considéré après un infarctus transmural récent ou une opération à cœur ouvert, mais après un petit infarctus, même récent, il ne doit pas être considéré comme une contre-indication.


• Suspicion d’embolie septique ou endocardite infectieuse connue.



Le contrôle de la pression artérielle est très important pour prévenir les complications


Avant le traitement, l’objectif tensionnel est de < 185 / < 110 mmHg. Le labétalol (Trandate®; 10–20 mg IV) ou une perfusion de nicardipine (Loxen®) (bolus de 2,5 mg IV, renouvelable et relais à la seringue électrique jusqu’à une dose maximale de 15 mg/h) peuvent être utilisés pour faire baisser la pression artérielle. S’il n’est pas possible de maintenir la pression artérielle dans la fourchette recommandée avec le labétalol < 40 mg ou la nicardipine < 15 mg/h, le risque hémorragique est trop élevé et le patient ne doit pas recevoir le traitement par rt-PA.


Procédure


FAIRE VITE !!!

Ne pas oublier: le temps, c’est du cerveau. Les meilleurs résultats sont obtenus avec un traitement débuté dans les 2 h qui suivent le début des symptômes.

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Jun 2, 2017 | Posted by in MÉDECINE INTERNE | Comments Off on Protocole de thrombolyse

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