8. Programmation du Suivi Pédiatrique du Développement du Jeune Enfant
SURVEILLANCE DE LA POPULATION GÉNÉRALE
RECOMMANDATIONS POUR UN DÉPISTAGE UNIVERSEL
Les recommandations peuvent être résumées selon les écrits de l’Académie américaine de pédiatrie [1]:
– éliciter et prendre en compte les observations des parents: provoquer l’expression des inquiétudes en posant des questions simples à propos des acquisitions, du comportement, d’une éventuelle régression ; ces observations des parents ont démontré leur validité [2] ;
– faire un examen physique et observer le comportement pendant la consultation (il faut noter que l’examen neurologique n’est pas mentionné explicitement bien qu’il soit primordial);
– identifier des facteurs de risque de toute nature (génétique, environnemental, social) et aussi les facteurs favorables tels que la qualité du soutien familial, l’interaction avec d’autres enfants ;
– garder trace de toutes les observations, version papier, version informatique ;
– rassurer chaque fois que la situation le permet, tout en indiquant aux parents les progrès attendus dans les mois qui viennent. Il est utile de guider les parents dans leurs observations par la diffusion d’informations simples qui sont destinées aux familles [3] ;
– proposer un rendez-vous afin de poursuivre la surveillance si les progrès sont insuffisants ;
– évaluer systématiquement le développement à 9, 18 et 30 mois. Répéter les examens plus souvent en cas d’inquiétudes ;
– en cas de pathologie: référer l’enfant vers des consultations spécialisées ; établir un programme d’intervention permettant d’initier rapidement une intervention thérapeutique spécifique et appropriée ; poursuivre la recherche de l’étiologie des troubles observés.
La figure 8.1 résume la démarche clinique selon trois niveaux:
– niveau 1: surveillance. À chaque visite de routine, le pédiatre cherchera à identifier un éventuel risque ou une anomalie du développement par un examen neurologique et une vérification des acquisitions ;
– niveau 2: dépistage. Chaque fois qu’un risque ou une anomalie du développement est identifié, le pédiatre cherchera à confirmer ou infirmer une pathologie du développement en utilisant des outils standardisés. Il les utilisera également systématiquement à 9, 18 et 24-30 mois ;
– niveau 3: évaluation diagnostique. C’est un processus complexe ayant pour but d’identifier les pathologies spécifiques du développement. Cette évaluation requiert généralement la contribution de professionnels de diverses disciplines.
Fig. 8.1 |
L’algorithme proposé indique que des tests de développement sont nécessaires pour tous les enfants aux âges de 9, 18 et 24-30 mois. Une telle attitude systématique conduit à une identification précoce des troubles de développement. Elle met de la cohérence dans un domaine de la prévention qui demeure encore trop vague pour beaucoup de médecins.
La notion de « retard de développement » participe largement à ce « mou-flou » qui entoure surveillance et dépistage, en ignorant la distinction entre retard et trouble du développement. Selon les définitions actuelles, il est possible de conclure à un retard de développement si et seulement si les habiletés fonctionnelles n’apparaissent pas à l’âge attendu, mais que la séquence habituelle d’apparition est respectée. Le retard peut être global ou dissocié. Un trouble du développement est identifiable lorsqu’une anomalie de l’examen neurologique ou développemental est associée à une limitation fonctionnelle: dans ce cas, les acquisitions ne sont pas retardées, mais déviantes, ne ressemblant pas à la séquence habituelle de maturation d’une fonction. Entre autres, au cours de la phase d’installation d’une IMOC ou encore d’une dysphasie, les acquisitions apparaissent clairement déviantes et non simplement retardées. Devant toute inquiétude dans ce domaine, au lieu de se contenter d’attendre et voir, il est recommandé d’utiliser des outils de dépistage standardisés.
Autrement dit, la surveillance à chaque consultation et l’utilisation de tests standardisés aux âges de 9, 18 et 24-30 mois sont recommandées. Ces tests standardisés seront également faits chaque fois que la surveillance du développement fait apparaître une anomalie. De cette façon, les besoins spéciaux de chaque enfant seront pris en compte, ce qui conduira à une intervention précoce bien ciblée. Il apparaît malheureusement que ces outils de dépistage sont sous-utilisés par les pédiatres.
COMMENT SE PRÉPARER À DE TELLES EXIGENCES ?
Ce « dépistage universel » est une lourde charge pour pédiatres et médecins généralistes. En effet, ils devront:
– mettre à jour leurs connaissances sur le développement, les facteurs de risque, les techniques de dépistage, les ressources dans la communauté ;