Prises en charge des enfants, des adolescents et de leurs familles, venus d’Asie


Prises en charge des enfants, des adolescents et de leurs familles, venus d’Asie


Ting Chih Hsieh


Pour parler des enfants et des adolescents asiatiques et pouvoir faire des prises en charge psychothérapeutiques, il faut remonter à la source, et d’abord se demander : qui sont ces Asiatiques venus en France ? Quand sont-ils venus ? Où se trouvent-ils ? Quels métiers exercent-ils ? Le système familial est-il semblable partout en Asie ? Un garçon et une fille ont-ils la même position dans la famille asiatique ? Quel impact la politique de l’enfant unique, pratiquée depuis 1978, a-t-elle sur les Chinois immigrés ? La religion et la croyance ont-elles toujours une influence sur eux ?



Repères historiques et géographiques



Flux migratoires asiatiques


Un jour, dans la rue, un Français m’a insultée en disant « Retourne dans ton pays, sale Chinoise ! » (pour les Français, tous les Asiatiques sont des Chinois, je l’ai compris après). À l’époque, je n’étais pas encore au courant de l’histoire de l’immigration asiatique. Je lui ai adressé la parole poliment en disant « Bonjour Monsieur, je suis étudiante, vous n’aimez pas les gens qui viennent étudier votre civilisation ? » Il s’est excusé sur-le-champ. J’étais intriguée par cet incident. Je voulais connaître la cause de cette aversion, mais je ne pouvais pas tout faire en même temps, parce que j’étais trop sous le charme de la culture française. Je m’étais dit que peut-être ce n’était pas mauvais de connaître l’Autre, les Français d’abord, ensuite je ferai mes recherches sur l’histoire des Asiatiques en France. En effet, pour compléter ma thèse en lettres, j’avais suivi des cours d’anthropologie à l’École des hautes études, ensuite j’étais devenue membre associé au Centre d’anthropologie de la Chine et de la péninsule indochinoise du CNRS.


Très attachés à leur terre, les Asiatiques qui ont quitté leur patrie pour venir en France n’ont pu le faire que par contrainte.




Les gens de Wenzhou


Mais les Indochinois ne sont pas la première vague d’Asiatiques débarqués en France. Avant eux il y a déjà eu des Chinois de Chine continentale qui avaient été sollicités pour renforcer la pénurie de main-d’œuvre française et anglaise, à l’aube du XXe siècle. Ces Chinois ont travaillé dans les usines, ramassé des cadavres, nettoyé les champs de bataille (1914-1918), etc. Ainsi, 140 000 Chinois se sont activés pour la guerre des autres. Parmi eux, beaucoup venaient de la région de Wenzhou (400 km au sud de Shanghai), province de Zhejiang. Wenzhou est une région côtière enclavée par des montagnes, elle a donc de la difficulté à communiquer avec les autres régions de la Chine. Par contre, il y est plus facile de partir pour l’étranger. C’est aussi une région très pauvre, elle n’a pas assez de terre pour nourrir toute sa population. Quand les recruteurs français leur promirent un bon salaire, les Chinois partirent. La première vague de migrants asiatiques est ainsi arrivée en France vers 1915.


À la fin de la guerre, il fallait les rapatrier. Le rendez-vous était à la gare de Lyon. Quelques centaines de Chinois qui étaient émerveillés par la France ont décidé de rester. Ils subsistaient tant bien que mal en vendant des babioles chinoises sur les marchés. Au fur et à mesure, ils ont trouvé du travail dans la maroquinerie. Pendant la Seconde Guerre mondiale, malheureusement, les juifs qui étaient souvent des patrons dans la maroquinerie (dans les 3e et 4e arrondissements de Paris) ont été déportés. Faute de patrons, les ouvriers chinois ont pris le relais, et ils y sont encore.


Dans les années 1980, la France a déclenché une régularisation des étrangers sans papiers, les Chinois en ont été les bénéficiaires. Avec une carte de séjour, les anciens clandestins ont pu, enfin, rentrer en Chine, voir leur famille avec des bras chargés de cadeaux, leur distribuer de l’argent ainsi qu’aux voisins. De retour, ils ont fait venir leur famille avec l’autorisation pour le regroupement familial. Cela a créé un sentiment d’envie chez les autres Chinois pour partir, faire fortune, réussir sa vie et devenir un honorable Chinois en rentrant au pays. Ne pouvant pas obtenir de visa pour s’expatrier, des filières clandestines se sont mises en place, véritable filon d’or pour des passeurs. Car un passage coûte entre 100 000 et 150 000 RMB (équivalent à 10 000 et 15 000 euros).



Passagers clandestins


Combien de temps faut-il pour venir en France ? Cela dépend. Quand les candidats ont de la chance, ils arrivent en deux jours par avion. Sinon, il leur faut plusieurs mois, voire plusieurs années, en prenant le train, le camion, la voiture et en marchant à pieds pendant la nuit afin de ne pas se faire repérer. Ou encore, de Pékin, ils prennent le train qui traverse la Sibérie et les autres pays de l’Europe de l’Est. Ou de Shanghai, ils passent par le Cambodge, le Vietnam. Ou par l’Afrique avec un passeport coréen pour atterrir en France.


À peine arrivés, ils téléphonent au pays pour que la famille verse les frais de voyage aux passeurs. Cela veut dire qu’ils ont déjà une dette de 10 000 à 15 000 euros à rembourser. Donc, la première chose à faire en arrivant en France est de travailler et de rembourser la dette au plus vite, car les intérêts augmentent chaque jour. Ils travaillent et dorment souvent dans l’atelier ou bien louent un lit chez un « marchand de sommeil ». Ils sont volontaires pour appliquer le slogan « travailler plus pour gagner plus », et effectivement ils peuvent travailler de 15 à 20 heures par jour, selon la commande. Ce sont souvent des paysans jeunes, peu instruits. Certains sont carrément illettrés. D’après nos enquêtes, ils ont avoué qu’avant de venir en France, ils avaient déjà quitté leur village pour travailler dans les autres provinces de la Chine pour réussir leur vie.


Après les événements de la Place de Tiananmen (en 1989), le gouvernement français a accordé l’asile politique aux Chinois, victimes de la répression. Certains Chinois venus du Wenzhou en ont profité pour se faire régulariser. La communauté a donc sensiblement grossi de plusieurs milliers « d’âmes ». Les gens de Wenzhou se sont d’abord installés dans les quartiers de la gare de Lyon, du Marais, de Belleville, dans le 11e arrondissement et en Seine-St-Denis. Avec la saturation urbaine à Paris, ils sont allés s’établir peu à peu dans d’autres départements de France.



Les gens du Dongbei


Au tournant de l’année 2000, une autre vague de Chinois est arrivée. Ce sont des habitants du nord-est de la Chine, ancienne Mandchourie (province de Heilongjiang, Liaoning, Jilin). Pourquoi sont-ils aussi venus en France ?


Depuis 1980, le président Deng Xiao Ping a changé la politique économique du pays. Il a décidé d’ouvrir les ports de commerce et d’encourager l’investissement des étrangers. Des Européens (Français, Anglais, etc.) et des Chinois d’outre-mer (Taïwanais, Hong-kongais, etc.) sont alors venus avec leur haute technologie. Cela a provoqué la faillite des entreprises d’État dont l’équipement était si archaïque ou en mauvais état qu’il leur était impossible de rivaliser. Depuis, une partie de la population qui travaillait dans les entreprises est au chômage. Certains passeurs ont profité de la détresse de certains chômeurs qui voulaient s’expatrier pour vendre le rêve d’un eldorado en France ou aux États-Unis. Auparavant, les gens du Dongbei, qui n’étaient pas reconnus comme clandestins potentiels, obtenaient aisément un visa d’affaires ou de tourisme moyennant 3 000 à 5 000 euros. À présent, l’obtention du visa est devenue difficile et lorsqu’ils ont recours à des passeurs, ils doivent leur remettre 10 000 euros. Venant pour la plupart des grandes villes, ils ont un niveau d’instruction relativement plus élevé que les gens de Wenzhou. Parmi eux, on peut rencontrer des ingénieurs, des médecins, même des cadres du parti communiste et des fonctionnaires. D’après nos enquêtes, ils sont plus âgés (de 30 à 50 ans) que ceux de Wenzhou. Beaucoup de femmes, parmi les candidats à l’émigration, ont divorcé ou sont veuves et ont avoué qu’elles aspiraient à trouver « leur deuxième printemps », un homme à épouser.



Les jeunes mineurs chinois


En 2002, un Français et une Chinoise ont organisé une colonie de vacances en France et ont fait venir de Chine deux cents jeunes mineurs. Les frais de participation étaient de 13 000 euros. Après ce voyage, ils sont retournés en Chine. Mais, comme leur visa initial durait trois mois, certains jeunes, avec l’aide des passeurs, sont revenus en France par petits groupes. Ils ont campé devant le tribunal, le commissariat, etc., en prétendant qu’ils étaient des mineurs isolés. Ils demandaient à être accueillis dans un « orphelinat » (terme utilisé dans la communauté). C’était une stratégie pour obtenir un titre de séjour plus rapidement que leurs aînés qui avaient enduré dix ans de vie clandestine. Les passeurs leur avaient expliqué les avantages et les démarches à effectuer pour en bénéficier : pris en charge par l’aide sociale, ils seraient nourris, logés et scolarisés. À 18 ans, ils auraient un titre de séjour ou, encore mieux, pourraient avoir la nationalité française, à condition qu’ils arrivent à inventer un scénario et « qu’ils tiennent le coup ». C’est dans ce contexte que des services sociaux et le tribunal pour enfants nous ont sollicitées.



Les gens de Jiangxi


Depuis 2010, des Chinois qui viennent de la province de Jiangxi (juste à côté de celle de Zhejiang) forment un groupe à part entière. Leur lieu de rencontre est à Paris-Belleville.



Repères sociologiques



Une certaine évolution professionnelle


Depuis 30 ans, on note une évolution chez les migrants asiatiques. Les gens venus de l’Asie du Sud-Est se contentent de travailler dans le commerce de l’épicerie, dans la cordonnerie ou la restauration. Ceux de Wenzhou ont une évolution socioprofessionnelle remarquable puisque, colporteurs au début de leur installation, on les trouve maintenant dans des secteurs aussi divers que la maroquinerie, la confection, le bâtiment, la plomberie, la peinture jusqu’à être « restaurateur japonais », patron de brasserie, de bar-tabac. Il faut signaler que pour obtenir la permission d’ouvrir un tabac, le patron doit avoir la nationalité française. Ce sont des jeunes qui se sont engagés dans la Légion étrangère ou bien qui sont venus en tant que jeunes « mineurs isolés » et ont pu obtenir facilement la nationalité française.


De leur côté, les gens du Dongbei, des citadins, n’arrivent pas à travailler autant que les gens de Wenzhou (de 12 à 20 heures par jour pour ces derniers). Les hommes se rassemblent devant la sortie du métro Belleville ou dans un coin des boutiques à Aubervilliers pour vendre leur force dans la manutention. Certains, qui ont une santé fragile, fouillent dans les poubelles et revendent leur butin au marché aux puces. On peut les rencontrer aux portes de Montreuil et de Clignancourt. Les femmes du Dongbei se sont spécialisées comme « bonnes à tout faire » pour les familles de Wenzhou, ou bien elles se prostituent. On peut les trouver à la sortie du métro Belleville ou de Strasbourg-Saint-Denis. Depuis 2006, il y a deux autres métiers pratiqués par les femmes de Dongbei : manucure et masseuse.


En revanche, chez les gens de Jiangxi, les hommes travaillent dans tous les domaines. Depuis 2011, certaines femmes font le trottoir dans le 13e arrondissement de Paris.



Repères culturels


Si nous nous étendons longuement sur l’évolution de la communauté asiatique, c’est parce que les Asiatiques ont l’air tous pareils, mais en réalité ils ne se ressemblent pas. Il est difficile de détailler ; nous essaierons de donner les grandes lignes pour pouvoir identifier plus ou moins leurs origines.



Monde sinisé (Chine, Japon, Vietnam, Corée, Hong Kong, Macao, Taïwan, Singapour) et monde indianisé (Laos, Cambodge, Thaïlande, Myanmar « Birmanie »)


L’Indochine désigne la péninsule du continent asiatique qui se situe entre la Chine et l’Inde. Cette région est partagée entre le Cambodge, le Laos et le Vietnam. Selon les recherches des ethnologues, il apparaît que les Cambodgiens, les Laotiens, les Thaïlandais et les Birmans ont été « influencés » par la culture indienne. Par contre, les Vietnamiens l’ont plutôt été par la culture chinoise. Nous avons divisé, artificiellement, l’Indochine en monde indianisé et en monde sinisé selon les différences culturelles.


Nous pouvons mentionner quelques spécificités entre ces deux mondes.




L’usage des baguettes


Nous remarquons que les gens du monde sinisé mangent avec des baguettes comme les Chinois. Par contre les Laotiens, les Cambodgiens, les Thaïlandais et les Birmans mangent, à la maison, avec la main comme les Indiens. Pour ne pas être traités de « sauvages », ils se servent d’une cuillère quand ils reçoivent ou vont au restaurant.



Le port de chaussettes


Pour une question de santé et de pudeur, les gens du monde sinisé portent des chaussettes. L’image des Japonais qui portent des tongs avec des chaussettes blanches illustre bien cette coutume. Au contraire, les Laotiens, les Cambodgiens, les Thaïlandais et les Birmans sont souvent pieds nus.



La pratique religieuse


En Asie, on trouve partout des temples ou des pagodes, comme on trouve partout des églises en France.


Le bouddhisme est divisé en « Grand Véhicule » et en « Petit Véhicule ». Le Laos, le Cambodge, la Birmanie et la Thaïlande font partie du « Petit Véhicule ». Le Vietnam, la Chine, le Japon, la Corée, Taïwan et Singapour font partie du « Grand Véhicule ».



Ce qui différencie le bouddhisme du « Petit Véhicule » de celui du « Grand Véhicule »


Les bonzes du « Petit Véhicule » continuent à pratiquer la théorie primitive que Bouddha avait prêchée. L’attention est basée sur l’effacement total du « moi » du monde matériel et sentimental. Au mieux, ils parviennent à l’état d’Éveil et au nirvana. Les moines du « Grand Véhicule » respectent bien sûr ce que disait Bouddha, mais étendent aussi leur attention et leur compassion auprès des autres pour qu’ils puissent bénéficier de cet Éveil et atteindre le nirvana. Il y a donc la volonté d’évoluer du petit « moi » individuel au grand « Moi » collectif.


Tous les hommes du monde indianisé doivent se faire bonze au moins une fois dans leur vie comme un rituel d’entrée dans le monde adulte. En conséquence, ils ont une sorte de garantie morale et ont la possibilité de se marier. À l’occasion de la mort des ascendants (père, mère, grand-père…), ils doivent aussi se faire bonze pour gagner des mérites et en transférer au défunt. L’avantage du « Petit Véhicule » est la durée de cette retraite. La personne peut rester autant de temps qu’elle le souhaite (3 jours, une semaine…), puis elle retourne à la vie civile. C’est un régime plutôt souple. Lors d’un moment de crise dans la vie, notamment pour les jeunes, il est possible d’entrer dans les ordres pour une durée déterminée afin de se purifier de ses péchés, de se débarrasser de la possession (ou des agressions) du mauvais esprit. Le garçon se rase les cheveux, la fille porte une tenue blanche. Les règles du « Grand Véhicule » sont strictes. Une fois que l’on décide de devenir moine ou nonne bouddhiste, il faut faire une période d’essai. Si on réussit à vaincre tous les obstacles, le maître célébrera l’ordination du candidat. Ensuite, soit celui-ci demeure à vie dans son nouvel état de bonze, soit il en ressort définitivement.


Les bonzes du « Petit Véhicule » sont revêtus d’une toge orange, le bras droit dévoilé et les pieds nus. Les moines du « Grand Véhicule » portent une tenue qui couvre leur corps : elle est de couleur noire, jaune, ou grise. On retrouve les influences indiennes avec les notions de pudeur et de santé chez ces religieux du monde sinisé.



Le système familial (la parenté)


Dans le monde sinisé, la famille est de type patriarcal. Pour le mariage, c’est l’homme qui demande la main de la femme, puis celle-ci vient s’installer dans la famille du mari. Il s’agit donc d’une pratique patrilocale. Ou alors, la femme suit son mari là où il va travailler et il s’agit là d’un système virilocal. La femme est la monnaie d’échange. Selon la règle sociale, l’homme offre une somme d’argent ou un demi-kilo d’or à la famille de la fille comme prix du lait, nécessité pour son élevage. En contrepartie, la famille de la fille doit préparer un trousseau ou une dot pour le jour du mariage qui sera étalé sur un chariot tiré par un bœuf ou sur un camion qui déambule dans le village ou dans les rues jusqu’à la maison du mari. Le nom de la famille s’attache au nom du père et perpétue le patronyme. Les fils partagent le patrimoine. Les filles en sont exclues. Ainsi donc, il faut au moins un fils dans chaque famille chinoise, parce que c’est lui qui assure la continuité de la lignée, qui vénère les ancêtres et sera le « bâton de vieillesse » pour ses parents. Au contraire, la fille est considérée comme « une marchandise que l’on vend à perte ». La place du garçon est primordiale dans le monde sinisé. On préfère investir sur les garçons. Par exemple, on les allaite plus longtemps que les filles, ils ont plus de chance d’entrer et de rester à l’école et de finir leurs études. Nous avons constaté que ces principes traditionnels étaient aussi plus ou moins pratiqués en France, dans la communauté.


Dans le monde indianisé, les Laotiens, Cambodgiens, Thaïlandais et Birmans n’ont pas, traditionnellement, de nom de famille. On les appelle par leur prénom comme en Inde. Par contre, ils n’appartiennent ni au système patriarcal (comme en Inde) ni au système matriarcal, mais plutôt à un système indifférencié. Le nom de famille était, par exemple, imposé au Laos vers 1940 par le colonisateur français afin de collecter des impôts. Comme le nom de famille ne s’inscrivait pas dans une coutume traditionnelle, il était donc possible de prendre le nom du père ou celui de la mère. Dans le mariage, c’est toujours l’homme qui demande la main, prépare un ou deux buffles, ou bien des colliers, des bracelets en or comme prix des fiançailles (le montant dépend du statut social de la famille de la promise). Plus le statut est élevé, plus l’homme doit payer cher. Ce prix des fiançailles sert aussi d’assurance en cas de divorce. Si après quelques années, l’homme est parti s’installer chez une autre femme, l’argent servira à nourrir les enfants. A contrario, si c’est la femme qui abandonne son mari, le gendre va demander aux beaux-parents de lui rembourser cet argent.


L’originalité du mariage réside dans le fait que c’est l’homme qui va s’établir dans la famille de la femme. C’est ce qu’on appelle la matrilocalité ou l’uxorilocalité. Lorsque la femme quitte ses parents pour travailler ou émigrer, dans ces cas-là, l’homme sera la monnaie d’échange. Quant à l’héritage, ce sont les filles qui partagent le « matrimoine », l’aînée ou la dernière pourra hériter de la maison familiale, en revanche les autres filles n’obtiendront que des bijoux en or ou des pierres précieuses. L’important dans ce type de société est d’avoir au moins une fille, parce que c’est la fille qui vénère les ancêtres et devient le « bâton de vieillesse » des parents. Les filles sont souvent allaitées plus longtemps que les garçons.



L’adoption


On adopte facilement en Asie. C’est une affaire de famille. Ce n’est pas la peine d’aller au tribunal comme la loi française l’impose. Par contre, l’adoption par des étrangers est relativement plus compliquée selon les époques et les pays, en fonction des lois qui régissent la protection de l’enfance. Comme on l’a déjà souligné, en Chine, il faut au moins un garçon dans la famille, sinon on manquera à la piété filiale selon le confucianisme. Les Chinois ont trouvé plusieurs possibilités pour pallier ce manque.




L’adoption intra-familiale


Dans une famille, si un des frères marié depuis des années n’a toujours pas de descendant mâle ou bien n’a que des filles, la mère peut demander à l’un de ses fils qui a plusieurs garçons d’en céder un au frère sans fils. Cette pratique est une affaire de famille où l’on s’arrange entre soi, sans la nécessité d’officialiser cette adoption. L’enfant adopté continue de rester avec ses propres parents ou avec son oncle, dans la grande maison familiale. À l’âge de la retraite de l’oncle, père adoptif, le neveu, fils adoptif, doit le prendre en charge. À la mort de l’oncle, il doit le vénérer et lui faire des offrandes. L’avantage est qu’il va hériter de la part du patrimoine de son oncle.


Il y a quelques années, une assistante sociale signala un enfant chinois qui semblait présenter un trouble mental. L’enfant ne pouvait définir qui était son père. Cette professionnelle nous a sollicitées pour que nous éclaircissions cette affaire. Après avoir longuement discuté avec la famille, nous avons compris que le garçon était le neveu, fils adopté par l’oncle qui l’avait fait venir en France et l’avait déclaré comme son propre fils. Deux ans après, le vrai père de l’enfant est venu à son tour en France. L’enfant savait très bien qui était son vrai père et qui était son oncle, le père adoptif. Comme la famille avait du mal à l’expliquer auprès du service social, l’assistante sociale a pensé que l’enfant avait un trouble mental.



L’achat d’un bébé mâle


Une famille sans fils peut acheter un garçon en payant cher, et en coupant définitivement le lien avec la famille biologique – ce que l’on appelle en France l’adoption plénière. La politique de l’enfant unique en Chine a causé de nombreux drames dans certaines régions, parce qu’il y a eu des vols de garçons pour les vendre à des familles qui n’avaient pas de fils.



« Le recrutement d’un gendre »


C’est une des possibilités offertes à la famille chinoise : « recruter un gendre » quand elle n’a que des filles. Il faut qu’une des filles accepte de se marier avec ce gendre recruté, orphelin, personne errante ou encore issu d’une famille très pauvre ayant plusieurs garçons et acceptant d’en céder un pour lever la pression économique. Le gendre recruté doit accepter d’abandonner son nom de famille et porter le nom du beau-père, ou bien il peut garder son patronyme, mais ses petits-enfants devront prendre le nom du grand-père maternel.


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May 18, 2017 | Posted by in Uncategorized | Comments Off on Prises en charge des enfants, des adolescents et de leurs familles, venus d’Asie

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