Principes et technologie du changement

5. Principes et technologie du changement




Contre-conditionnement et inhibition réciproque


Ces principes sont issus des expérimentations de Pavlov (1963) sur le conditionnement des réponses du système nerveux végétatif. Lors du contre-conditionnement, il y a apprentissage d’un comportement incompatible avec une réponse inadaptée ou non désirée : ce nouveau comportement élimine la réponse inadaptée. Le meilleur exemple de contre-conditionnement est donné par la désensibilisation systématique des phobies. Le sujet est d’abord relaxé (nouveau comportement), puis on lui présente successivement en imagination les items d’une hiérarchie concernant la situation phobogène ; par exemple sortir s’il est agoraphobe et s’éloigner de 10, 20, 30 mètres. Il apprend ainsi une réponse incompatible avec l’anxiété, qu’il généralisera ensuite à la vie réelle. De même, au cours de l’affirmation de soi, des sujets peuvent apprendre des réponses d’expression de leurs sentiments positifs (amour) ou négatifs (opposition ou colère) qui sont incompatibles avec l’anxiété.

Le développement d’un comportement sexuel normal peut également permettre d’éliminer un comportement sexuel déviant, sans avoir à s’attaquer au comportement déviant. C’est ce qui peut être réalisé en particulier dans certains cas d’homosexualité. Wolpe (1975) a décrit sous le nom d’inhibition réciproque un principe qui rend compte de la procédure de contre-conditionnement en termes physiologiques. Il s’agit de la même chose vue sous l’angle de l’expérimentation animale.


Habituation et principe d’exposition in vivo



Marks (1987) a construit toute sa pratique de la psychothérapie sur ce principe et la procédure thérapeutique d’exposition in vivo (= en réalité) aux stimuli évocateurs d’anxiété. Il a précisé les effets et les conditions d’efficacité dans les troubles anxieux, les dysfonctions sexuelles, la dépression et certains états psychotiques. L’exposition in vivo et/ou en imagination entraîne l’habituation des réponses physiologiques et l’extinction des rituels qui n’ont plus lieu d’être, du fait de la réduction d’anxiété. L’habituation des réponses cardiaques au cours des traitements comportementaux par exposition prolongée a été mise en évidence. La constatation expérimentale d’une sensibilisation au cours d’expositions trop brèves à des stimuli intenses aboutit à la notion que l’immersion dans la situation anxiogène et la prévention de la réponse d’évitement doivent être prolongées et répétées pour devenir efficaces chez les obsessionnels et les phobiques. Il ne faut pas confondre l’habituation des réponses physiologiques (rythme cardiaque, respiratoire, conductance cutanée, potentiels cérébraux) et l’extinction des réponses motrices (rituels, comportement d’évitement) qui en sont la conséquence. Un triple système de réponses a été postulé par un système comportemental, un système physiologique et un système cognitif.

Les changements dans les trois parties du système ne sont en général pas simultanés. Il existe une grande variabilité individuelle. Le système cognitif correspond à un programme comportemental de peur stocké dans la mémoire à long terme comprenant des représentations du stimulus, de la réponse et des interprétations qui les relie. Le corollaire de ce modèle est que les techniques d’habituation, pour être efficaces, doivent présenter en imagination aussi bien les stimuli que les réponses physiologiques. Un certain niveau d’anxiété doit être vécu pour que l’émotion puisse être traitée par le sujet et qu’il perçoive à nouveau la maîtrise des situations redoutées. Cela explique aussi que les benzodiazépines à hautes doses empêchent l’habituation de prendre place car elles bloquent l’activation émotionnelle et la mémorisation de la maîtrise de l’anxiété (Marks, 1987).


Conditionnement opérant



Accroître les comportements



Renforcement positif


On dit qu’il y a renforcement positif lorsque le résultat d’un comportement a pour effet d’augmenter la force ou la fréquence de ce comportement. Le meilleur exemple clinique est donné par les économies de jetons, où un sujet schizophrène reçoit un jeton échangeable contre des récompenses tangibles chaque fois qu’il émet une réponse jugée positive par lui et les thérapeutes, par exemple adresser la parole, avoir une activité de toilette, un travail, etc.

Le renforcement doit être immédiat, c’est-à-dire suivre aussitôt l’émission de la réponse. Cependant, le renforcement différé joue un rôle très important chez l’homme. Le renforcement est un principe général. Lorsqu’on parle de renforçateurs, il s’agit de récompenses tangibles, ou d’événements qui sont repérables dans le temps.

Les Renforçateurrenforçateurs peuvent être primaires : nourriture, évitement de la douleur ; ils peuvent être secondaires dans la mesure où ils ne sont pas nécessaires sur le plan biologique. Ce sont en particulier les renforçateurs sociaux (approbation, attention) ou symboliques (argent, médailles). Ce sont aussi des renforçateurs conditionnels qui sont échangeables le plus souvent contre des renforçateurs matériels.


Renforcement négatif


Il apparaît lorsque l’interruption d’un stimulus aversif qui est la conséquence d’un comportement augmente la fréquence et la force de ce comportement.

C’est donc l’échappement ou l’évitement de conséquences aversives qui renforce le comportement. L’agoraphobe qui évite l’angoisse en n’affrontant pas le monde extérieur, et qui se trouve renforcé à répéter son évitement, en est un exemple.

Le comportement d’évitement est renforcé négativement par l’angoisse.



Façonnement progressif (shaping)


Un comportement que l’on veut développer peut être graduellement produit en renforçant, par étapes et approximations successives, tout comportement qui s’en rapproche.

Un exemple peut être trouvé dans l’affirmation de soi, où le thérapeute lors du jeu de rôle approuve tout progrès fait dans la bonne direction par un sujet timide (phobique social). Lorsque le sujet a par exemple des problèmes à conserver un contact visuel avec l’interlocuteur, toute étape sera renforcée ; regarder le menton, puis le front, puis enfin, les yeux, pendant quelques secondes, puis une durée plus grande. L’apprentissage du langage chez les enfants autistiques ou la reprise du contact social chez les schizophrènes peuvent être aussi façonnés progressivement en respectant au début un bas niveau de performance, de façon à faire apparaître progressivement le comportement désiré.


Procédure en chaîne


La plupart des comportements constituent une séquence organisée, qui se déroule, d’une manière relativement stable, jusqu’à ce que la dernière réponse aboutisse à un renforcement. Prenons un exemple. Soit la chaîne : ouvrir la porte → lever les yeux vers l’interlocuteur → dire bonjour → sourire → être renforcé par un bonjour et un sourire → et « Que voulez-vous Monsieur ? ». Chaque réponse n’a pas à être renforcée pour maintenir l’ensemble de la séquence comportementale. Seul le renforcement de la dernière réponse est nécessaire. L’apprentissage par exemple ici pour un sujet timide suivi en affirmation de soi consistera à installer la dernière réponse de la séquence : lever les yeux, sourire – avoir une réponse renforçatrice par un sourire, qui entraînera l’installation de la séquence complète de comportement : oser entrer dans un magasin et s’adresser à la vendeuse. L’analyse comportementale des chaînes ou séquences de comportement est donc un temps capital pour organiser un programme thérapeutique.


Généralisation et discrimination


Un comportement qui a été appris dans certaines circonstances pourra avoir lieu dans des situations similaires et donc se généraliser, en fonction de la ressemblance de ces situations avec la situation d’apprentissage.



Généralisation de la réponse


La généralisation de la réponse est moins connue. Un exemple pourrait être rencontré dans l’agression verbale qui se déclenche contre une personne si l’agression physique s’avère impossible. Dans ce cas, le même stimulus va induire l’apparition de réponses similaires à celle qui a été originellement conditionnée.

May 13, 2017 | Posted by in MÉDECINE INTERNE | Comments Off on Principes et technologie du changement

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