Prévention de l’accident vasculaire cérébral

6. Prévention de l’accident vasculaire cérébral


Dans ce chapitre sont principalement abordés les thèmes de la prévention secondaire de l’AVC, mais la plupart des mesures, particulièrement le contrôle des facteurs de risque et les changements de mode de vie comme l’arrêt de la cigarette, le contrôle de la pression artérielle, etc., sont aussi des mesures importantes pour éviter un premier AVC.

Dans un premier temps est abordée la question d’un diagnostic sur mesure, puis les mesures générales pour la prévention secondaire d’un AVC et finalement les recommandations particulières qui sont associées à la prévention d’un premier AVC.


Investigations


L’objectif de ce bilan est de trouver la cause de l’AVC afin de déterminer les meilleures options de traitement pour augmenter les chances de prévenir un nouvel AVC.

Un minutieux bilan d’un AVC ne saurait se limiter au scanner/IRM/angio-IRM/échographie/carotides/écho-Doppler transcrânien/lipides/HbA1c.

Il n’y a pas de recette de bilan pour un AVC ischémique. Il est important de considérer les facteurs de risque du patient et le tableau de l’AVC pour déterminer l’étendue de l’évaluation diagnostique à réaliser. Par exemple, un patient de 75 ans avec un long passé d’hypertension, de diabète, d’hypercholestérolémie et un infarctus lacunaire confirmé sur une imagerie cérébrale peut nécessiter un bilan supplémentaire au travers d’une échocardiographie carotidienne et d’un EEG. En revanche, un homme de 40 ans sans facteur de risque qui a présenté un AVC doit avoir une évaluation plus conséquente.

La liste suivante est celle des examens utiles pour la plupart des patients avec un AVC pour distinguer les sous-types d’AVC et déterminer les mesures de prévention.

L’ annexe 11 détaille les évaluations additionnelles pour les jeunes patients avec un AVC sans facteur de risque, et les autres pour lesquels les causes sous-jacentes peuvent être plus obscures. En supplément de ce qui suit, quasiment tous les patients doivent avoir un bilan sanguin complet, bilan des électrolytes, de la créatininémie, de la glycémie dans le sang, l’INR, le TP et un ECG (voir annexe 2).



Scanner cérébral initial en phase aiguë*






• Pour éliminer une HIC ou d’autres causes, pour identifier un AVC ancien et pour détecter des signes précoces d’ischémie.


IRM cérébrale/angio-IRM du cou et du cerveau (polygone de Willis)






• Pour localiser la lésion.


• Pour essayer de comprendre le mécanisme en intégrant les données de l’IRM ou de l’angio-IRM:




▪ infarctus lacunaire d’un petit vaisseau,


▪ athérosclérose d’une grosse artère,


▪ embolie,


▪ hémodynamique,


▪ veineux.


• Pour distinguer ce qui est aigu de ce qui est ancien, utiliser la séquence pondérée.


• Pour comprendre la physiologie des tissus (imagerie de perfusion).


• Pour examiner la totalité de la vascularisation cervicale et cérébrale à la recherche de sténoses (athérosclérose, dissection, etc.), anévrisme, MAV.


• Pour faire des découvertes inattendues, incluant des découvertes incidentes.


Possibilité de répéter le scanner cérébral






• Pour localiser la lésion si le patient ne peut pas avoir d’IRM.


• Pour évaluer la détérioration du patient:




▪ pour mettre en évidence un effet de masse ou un œdème,


▪ pour rechercher une conversion hémorragique,


▪ pour rechercher une récurrence d’AVC.


Angioscanner du cou et du cerveau (polygone de Willis)






• Pour rechercher une sténose artérielle, une dissection, un anévrisme (particulièrement si le patient ne peut pas avoir d’IRM).


ETT (avec injection de microbulles)






• Pour rechercher une origine embolique (akinésie du mur antérieur ou apical, caillot, maladie vasculaire, important PFO).


• Une faible fraction d’éjection (20–30 % est généralement retenu comme le seuil) accroît de façon significative le risque thromboembolique en raison de la stase et peut ultérieurement justifier une évaluation cardiaque et un traitement spécifiques.


ETO (avec injection de microbulles)






• Pour établir une origine embolique mal visualisée à l’ETT (athérome aortique, PFO, anévrisme auriculo-septal, contraste échographique spontané, caillot dans l’auricule gauche).


• Si un PFO est identifié, rechercher un état d’hypercoagulation, réaliser une échographie bilatérale des membres inférieurs et une IRM du pelvis à la recherche d’une thrombose veineuse. Voir la discussion sur le PFO à la fin de ce chapitre.


Échographie carotidienne






• Pour identifier une sténose ou une occlusion de la carotide interne.


• Elle montre la direction du flux dans l’artère vertébrale.


• Inutile si l’angioscanner ou l’angio-IRM de la circulation extracrânienne (de bonne qualité) est normal. L’échographie de l’artère carotide peut être utilisée pour confirmer une sténose constatée sur l’angioscanner ou l’angio-IRM. Si ces tests non invasifs sont concordants, il n’est peut-être pas nécessaire de recourir à une angiographie numérisée pour déterminer l’éligibilité du patient à un traitement endovasculaire ou chirurgical d’une sténose carotidienne.


Doppler transcrânien (avec ou sans injection de microbulles)






• Pour monitorer la présence d’un caillot ou de la lyse lors d’un épisode aigu.


• Pour confirmer la sténose ou l’occlusion intracrânienne des artères principales, vue sur l’angioscanner ou l’angio-IRM.


• Détecter et monitorer une embolie.


• Rechercher un PFO par injection de microbulles. Le Doppler transcrânien avec injection de microbulles est le plus sensible et le moins cher des examens pour visualiser un shunt droite-gauche.


• Réserve hémodynamique (index respiratoire, réactivité vasomotrice).


• Évaluer les flux collatéraux.


Angiographie numérisée






• La référence pour déterminer le degré de sténose.


• La seule voie pour délimiter définitivement et suivre l’évolution des anévrismes et des MAV, les dissections, les vascularites et autres artériopathies.


Bilan lipidique






• Rechercher un cholestérol total élevé, des triglycérides, un LDL. Objectif: LDL < 100 mg/dl; pour les patients à très haut risque LDL: < 70 mg/dl.


• Surveillance du HDL cholestérol.


Hémoglobine glyquée (HbA1c)






• Rechercher un diabète et/ou évaluer son traitement.


Prévention de l’AVC ischémique: mesures générales


Éduquer les patients afin qu’ils prennent une part active dans leurs soins et la prévention secondaire de l’AVC ischémique.

Essayer d’habituer les patients avant leur sortie aux médications qu’ils devront prendre une fois à leur domicile, afin d’être sûr d’une bonne tolérance. Prendre aussi en considération le coût de ces traitements. Un patient qui n’a pas les moyens de ses traitements ne les prendra pas !

Les consignes suivantes sont issues des très récentes recommandations à consulter pour plus de précisions [27].


(1). CONTRÔLE DES FACTEURS DE RISQUE






• Hypertension (recommandations basée sur l’étude SHEP et autres) [28]*. Voir plus loin pour plus de détails.




▪ Inhibiteurs de l’enzyme de conversion (études HOPE, PROGRESS) [29,30]*.


▪ Diurétiques et inhibiteurs calciques (étude ALLHAT) [31]*.


• Lipides élevés.




▪ Statines (plusieurs études dont l’étude MCR Heart Protection) [32].


▪ Objectif LDL ≤ 70 mg/dl, en accord avec les plus récentes recommandations pour les patients à haut risque cardiovasculaire [33].


▪ S’assurer d’avoir un bilan hépatique de base avant de commencer un traitement par statines.


• Tabac.




▪ Arrêt: conseil et pharmacothérapie.


• Diabète.




▪ Identification.


▪ Traitement, incluant le régime.


• Hyperhomocystéinémie.




▪ Peut justifier un traitement par acide folique, vitamines B12 et B6, mais jusqu’à présent il n’y a pas eu de preuve de l’efficacité des vitamines (dont l’acide folique) dans la prévention de l’AVC (étude VISP) [34].


▪ Mais comme il n’existe pas de traitement efficace pour ce facteur de risque d’AVC, la recherche systématique d’une hyperhomocystéinémie n’est probablement pas économiquement rentable.


• Utilisation des estrogènes (étude WEST, Women’s Health Initiative) [35–37]*.




▪ Éviter dans la plupart des cas.


• Drogues et abus d’alcool.




▪ Leur consommation doit être découragée et évitée, particulièrement dans le cas des drogues vaso-actives comme la cocaïne et les amphétamines.


▪ Pas plus de deux verres par jour.


(2). TRAITEMENTS ANTITHROMBOTIQUES ET ANTICOAGULANTS






• Aspirine (nombreuses études) [38]*. Environ 20 % de réduction du risque relatif de récidive d’un AVC secondaire ou d’un autre événement vasculaire. Doses de 50 mg/j ou plus; habituellement de 81 à 325 mg.


• Aspirine/dipyridamole LP (Asasantine®). Études ESPS-1 et ESPS-2; efficacité de 30 % supérieure à l’aspirine seule [39,40]*.




▪ L’étude PRoFESS n’a pas retrouvé de différence significative dans la survenue d’AVC secondaire avec l’association aspirine/dipyridamole LP (Asasantine®) ou clopidogrel (Plavix®).


• Clopidogrel (Plavix®). Étude CAPRIE [41] 1;. Légèrement meilleur que l’aspirine, particulièrement pour les patients avec atteintes périphériques, et mieux toléré.



• Combinaison aspirine/clopidogrel. Une utilisation au long cours accroît les saignements sans bénéfice sur la prévention de l’AVC (études MATCH et CHARISMA) [42,43]. Aussi, l’association n’est pas recommandée au long cours (plus de quelques jours) sauf si le patient a bénéficié de la pose récente d’un stent.


• Warfarine (Coumadine®). Dans la plupart des situations suivantes, l’utilisation de warfarine peut être envisagée, basée sur de nombreuses études randomisées (niveau A) ou des recommandations de consensus (niveau C). Cependant, excepté les preuves de classe 1 (c’est-à-dire où il y a généralement consensus sur son utilisation), les autres traitements antiagrégants plaquettaires ou la warfarine peuvent être utilisés.




▪ Fibrillation auriculaire, excepté pour un épisode isolé (voir plus loin) (études SPAF) [44,45]*. Classe 1, niveau de preuve A.


▪ Sténose carotidienne intracrânienne critique. Occlusion complète ou quasiment complète (anecdotique).


▪ Thrombose/sténose basilaire (anecdotique).


▪ Dissection artérielle (consensus).


▪ Autres situations cardiaques emboligènes [46]:




• valvulopathie rhumatismale ou valve mécanique (preuve de classe 1),


• fraction d’éjection du ventricule gauche < 30 % (consensus),


• akinésie ou hypokinésie segmentaire sévère du ventricule gauche (particulièrement du mur antérieur ou de l’apex) (consensus),


• AVC juste après un infarctus du myocarde, particulièrement si un thrombus mural est visualisé sur une ETT (études randomisées),


• athérome aortique > 4 mm (analyses de sous-groupes SPAF III, consensus) [47,48].


▪ Aspect d’AVC embolique cryptogénétique (étude randomisée, analyses de sous-groupes WARSS) [49,50].


▪ Patients présentant un AVC avec une coagulopathie documentée (consensus):




• particulièrement en cas de présence avérée ou en cas d’antécédent de TVP ou d’embolie pulmonaire,


• mais aussi en cas de patients présentant un syndrome des antiphospholipides (thrombose veineuse, avortements spontanés, livedo réticulaire).


▪ Infarctus veineux provoqué par une thrombose des sinus veineux cérébraux (consensus).


• D’après les études randomisées suivantes, la warfarine n’est pas indiquée en utilisation de routine pour:




▪ les AVC dus à de l’athérosclérose intracrânienne (étude WASID) [51],


▪ la plupart des AVC non cardioemboliques (WARSS) [52],


▪ la plupart des patients avec un AVC et des anticorps antiphospholipides positifs (APASS, sous-étude de WARSS) [53], ou


▪ la plupart des patients avec un PFO (PICCS, sous-étude de WARSS) [50]*.

Jun 2, 2017 | Posted by in MÉDECINE INTERNE | Comments Off on Prévention de l’accident vasculaire cérébral

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