15. Particularités de l’administration médicamenteuse chez les enfants et les personnes âgées
Particularités de l’administration des médicaments chez l’enfant
Généralités
Ces prescriptions impliquent donc l’extrapolation aux enfants des données acquises chez l’adulte : or l’enfant n’est pas un adulte en miniature. Il présente, en fonction de son âge, des particularités pharmacocinétiques et pharmacodynamiques qui doivent guider le prescripteur dans ses choix thérapeutiques.
Le risque majeur est la survenue fréquente d’effets indésirables ou d’inefficacité des traitements.
Particularités pharmacocinétiques chez l’enfant
LES CATÉGORIES D’ÂGE (RÈGLEMENT EUROPÉEN) : LA PÉDIATRIE DE 0 À 18 ANS…
– Prématuré : < 36 SA (semaines d’aménorrhée) + 6 jours
– Nouveau-né à terme à partir de 37 SA
– Nouveau-né : J0-J27
– Enfant : de 24 mois à 12 ans
– Adolescent 12 à 18 ans
C’est pendant la période périnatale que les particularités du devenir des médicaments dans l’organisme sont les plus marquées.
RÉSORPTION DES MÉDICAMENTS EN POPULATION PÉDIATRIQUE
L’alimentation lactée, riche en calcium et en lipides, tant qu’elle est exclusive, peut diminuer la résorption de certains médicaments.
L’évacuation gastrique est souvent plus lente chez le nourrisson, et ne devient comparable à celle de l’adulte qu’à l’âge de 6 à 8 mois. Il en est de même du péristaltisme intestinal, irrégulier en début de vie. Par conséquent, la résorption digestive et la biodisponibilité de certains médicaments sont modifiées chez le nouveau-né et le nourrisson, dans le sens de l’allongement du délai d’absorption et d’obtention de la concentration maximale, par rapport à l’adulte.
EXEMPLE
La biodisponibilité orale de la rifampicine qui est proche de 100 % chez l’adulte est d’environ de 50 % chez l’enfant (3-36 mois). Par conséquent et afin d’atteindre les concentrations sanguines efficaces, la posologie chez l’enfant (15mg/kg/j) est plus importante que celle préconisée chez l’adulte (10mg/kg/j).
ATTENTION
L’administration de comprimés est contre-indiquée chez les enfants de moins de 6 ans, du fait du risque de fausse route.
La voie rectale est pratique chez le jeune enfant, surtout en cas de vomissements. Elle peut être utilisée comme voie d’urgence lorsque l’accès veineux est difficile (exemple : administration de solutés de diazépam, Valium, en cas de convulsions).
Cependant, il faut garder à l’esprit que la résorption par voie rectale reste relativement aléatoire (fonction du niveau de résorption dans l’ampoule rectale et de l’éventuelle expulsion réflexe de tout ou partie du suppositoire).
La voie intramusculaire est dangereuse et à éviter autant que possible chez le nouveau-né, car :
– la masse musculaire est réduite ;
– la perfusion musculaire est relativement faible ;
– il existe un risque de lésion du nerf sciatique en cas d’administration au niveau de la fesse.
La surface cutanée rapportée au poids corporel est plus importante chez le jeune enfant que chez l’adulte. De plus, la résorption cutanée est également plus importante du fait de l’épaisseur réduite de la couche cornée et de l’hydratation importante de la peau. Il en résulte une augmentation du passage systémique des médicaments administrés sur la peau, et donc un risque de surdosage.
EXEMPLES
Ralentissement de la croissance avec l’application de pommade aux corticoïdes, ou hypothyroïdie avec l’application d’antiseptique iodé (Bétadine), surtout en cas d’application au niveau du siège, sous les couches.
La résorption systémique est également plus importante après administration par voie nasale ou ophtalmique que chez l’adulte.
L’administration IV pose parfois des problèmes d’ordre technique :
– très petits volumes à administrer (risque d’erreurs de dilution) ;
– volumes peu adaptés au calibre des seringues, des tubulures.
DISTRIBUTION DES MÉDICAMENTS EN POPULATION PÉDIATRIQUE
Chez le nouveau-né et le nourrisson, l’eau totale et extracellulaire est augmentée : en conséquence, les médicaments hydrosolubles ont un volume de distribution beaucoup plus important que chez l’adulte, et inversement pour les médicaments liposolubles. De plus, la concentration plasmatique de l’albumine est plus faible que chez l’adulte ; autrement dit, les médicaments qui se lient aux protéines plasmatiques ont une fraction libre plus élevée que chez l’adulte. Selon les caractéristiques pharmacocinétiques du médicament (Vd et degré de fixation aux protéines plasmatiques), il conviendra d’adapter ou non la posologie et le délai entre les prises d’un médicament chez le nouveau-né et le nourrisson, afin que sa concentration reste efficace et non toxique.
Les barrières physiologiques telles que la barrière hématoencéphalique sont immatures chez le nouveau-né (la maturation de la barrière hématoencéphalique se poursuit dans les premiers 24 mois de la vie). Les médicaments diffusent plus facilement dans le système nerveux central. Il existe donc un risque accru de toxicité neurologique des médicaments chez le nouveau-né.
MÉTABOLISME ET ÉLIMINATION DES MÉDICAMENTS EN POPULATION PÉDIATRIQUE
Chez le nouveau-né, et plus encore chez le prématuré, les capacités métaboliques de transformation et rénales d’élimination sont diminuées car les organes sont encore immatures (la demi-vie est augmentée), alors que le volume de distribution de la plupart des médicaments est augmenté. Ces particularités expliquent qu’au final, les posologies unitaires rapportées au poids sont souvent plus faibles que les posologies adultes et que l’espacement entre les doses est plus important.
EXEMPLES
Le Valium est utilisé pour traiter des crises convulsives chez le nouveau-né. Son élimination rénale est très ralentie à la naissance (par rapport à l’âge adulte), sa demi-vie augmentée d’un facteur 10 : d’où la nécessité de diminuer les posologies administrées.