Chapitre 7 Reconstruction mammaire par prothèse ou expandeur
La pratique de l’augmentation mammaire par implant a débuté dans les années cinquante. De nombreux matériaux avaient été utilisés mais, rapidement, la silicone s’est imposée par sa bonne tolérance. Rapidement, des implants gonflables sont apparus, préremplis ou avec valves intégrées permettant de les remplir en peropératoire. Enfin, des prothèses à expansion progressive (expandeurs) sont apparues, certaines provisoires, d’autres définitives. Suspendu de pose pendant plusieurs années, on attendra la fin du moratoire et la méta-analyse du New England Journal of Medicine en 2000, qui confirmera l’innocuité des implants à la silicone et l’absence de lien avec les maladies auto-immunes ou le cancer, pour remettre en service la silicone de façon quasi exclusive. Sont alors apparus de multiples formes, surfaces, consistances, remplissages des implants à la silicone. Ces multiples modèles ont permis d’adapter au mieux le choix de l’implant à la forme du sein controlatéral.
IMPLANTS ET EXPANDEURS
Types d’implants
Enveloppe
Les enveloppes sont faites de plusieurs couches de silicone (trois à sept couches) empilées les unes sur les autres, ce qui les rend très solides et limite la perspiration (passage de molécule de silicone à travers la paroi). Elles peuvent être lisses ou texturées (figure 7.1). Les enveloppes texturées sont censées limiter les phénomènes de coque (figure 7.2); elles sont d’ailleurs les seules prises en charge par l’assurance-maladie.
Il existe de nombreux types de texturation, qu’on peut en gros diviser en deux catégories, les macro- et les microtextures. Les microtextures sont censées être moins source de développement de coque périprothétique, mais elles sont plus mobiles dans la loge, ce qui peut gêner la patiente.
Contenu
La prothèse peut être remplie de sérum physiologique ou de silicone.
Celles remplies de sérum peuvent être préremplies avec un volume fixe, scellées par un patch de silicone collé ou porteur d’une valve qui permet de les remplir en peropératoire et donc d’ajuster le volume aux besoins. Ces prothèses sont généralement rondes; on ne pourra donc pas adapter sa forme au sein controlatéral.
Celles remplies à la silicone n’ont pas cessé d’évoluer, avec un gel de silicone de plus en plus cohésif, ce qui les rend plus solides et qui permet d’obtenir des formes stables de plus en plus nombreuses et adaptées aux besoins. Le taux de remplissage est également variable en fonction du résultat souhaité. Les implants fortement remplis permettraient de limiter le risque de « vague ».
Toutes ces évolutions ont permis de limiter au maximum les risques de perspiration de la silicone à travers la paroi, de rupture et de déformation. Le taux et l’intensité des coques périprothétiques ont également pu être limités.
Forme
Formes rondes
Elles ont une base plane, leur diamètre est variable et elles peuvent avoir des projections (distance antéropostérieure) plus ou moins marquées : profils haut, moyen ou bas (figure 7.3a).
Formes anatomiques
Les prothèses ont des formes variables, plus hautes que larges ou plus larges que hautes selon les besoins. Leur projection est également variable, avec un point de projection maximal plus ou moins haut. Les combinaisons sont multiples et permettent d’adapter au mieux le choix de l’implant à la forme du sein controlatéral (figure 7.3b).
Autres types d’implants : les expandeurs
Il en existe de deux types : permanents ou non.
Modèles gonflables à une seule chambre
Ces expandeurs ne sont pas permanents. Ils sont remplis progressivement par l’intermédiaire d’une valve qui est soit intégrée à la face antérieure de l’implant (figure 7.5), soit déportée et reliée par un tube de silicone (figure 7.4). De forme ronde ou anatomique, ils sont positionnés de la même façon que les prothèses définitives mais devront être à terme remplacés par un implant définitif.
Modèles à double lumière
Ils présentent une chambre externe remplie de silicone liquide et une chambre interne dont on pourra faire varier le volume par une chambre externe reliée par un tube de silicone.
Certains sont même également des implants définitifs si on le souhaite (figure 7.6) : en effet, le tube de silicone peut être retiré par voie externe par simple traction. À la sortie des deux chambres, il existe des clapets qui se ferment automatiquement lorsqu’on extrait le tube de silicone. Le volume est alors définitif, en partie silicone et en partie sérum physiologique.
Intérêt
Ces expandeurs permettent d’obtenir une distension progressive de la peau et du muscle pectoral. Cela peut représenter un avantage certain dans des situations difficiles, en particulier lorsque les tissus sont peu souples et que la création d’une loge rétromusculaire de volume correct est délicate. On pourra alors gonfler progressivement l’expandeur en cinq à dix séances au cours des consultations postopératoires. On pourra même surgonfler de 30 % à 50 % l’expandeur, afin d’obtenir une bonne distension cutanée qui favorisera la souplesse et la qualité de la reconstruction.
Certains auteurs les utilisent systématiquement pour leurs reconstructions par prothèse.
RECONSTRUCTION MAMMAIRE SECONDAIRE PAR PROTHÈSE
La reconstruction secondaire par prothèse se déroule généralement en deux ou trois phases à distance des traitements adjuvants, au moins quatre à six mois après une mastectomie associée ou pas à une chimiothérapie. En revanche, il faudra attendre neuf à douze mois après une radiothérapie de paroi et évaluer la qualité des tissus pour confirmer l’indication d’une reconstruction par prothèses si elle est envisageable.
De nombreux artifices, décrits plus loin, ont permis d’augmenter les indications et la qualité des résultats de la reconstruction par prothèse :
Si le choix s’est porté sur la reconstruction secondaire par prothèse, les informations et le bilan évoqué dans le chapitre 6 sont à préciser de vive voix et par un écrit spécifique (notice d’information).
Trois situations sont le plus fréquemment envisagées :



7.7 Intervention sur le sein opposé à la reconstruction mammaire secondaire par prothèse.
a. Sein opposé de volume moyen, bien projeté et sans ptose : volume simulable par l’implant. b. Sein opposé trop volumineux et ptosé : une réduction est nécessaire. c. Sein opposé trop petit : une augmentation sera nécessaire.
Dessins préopératoires
Du côté de la mastectomie
Du côté opposé à la mastectomie
Dessins nécessaires à la réduction ou à l’augmentation (cf. chapitre 13 consacré à la symétrisation).
Matériel
Le matériel spécifique souhaitable consiste en :
Installation de la patiente
La patiente est installée en décubitus dorsal, bras écartés si un geste axillaire est nécessaire (bras le long du corps sinon), avec protection anti-escarres sous les bras et les talons, vérification de la station assise avant et après l’anesthésie, fixation du bassin afin d’éviter le glissement lors de la station assise.
Un double badigeonnage vient clôturer la préparation préopératoire (deux douches bétadinées). Les dessins sont vérifiés après le badigeonnage.
Déroulement de l’intervention
Du côté opposé à la mastectomie
Certains – dont l’auteur de ces lignes – préconisent de débuter l’intervention par le remodelage du sein opposé s’il est nécessaire (plastie d’augmentation ou de réduction). Ceci afin de pouvoir simuler au mieux la reconstruction par prothèse (cf. chapitre 13 consacré à la symétrisation).
Le sein remodelé par augmentation ou réduction sera généralement positionné quelques centimètres plus haut que le sein à reconstruire – la patiente sera bien sûr prévenue de cette asymétrie provisoire durant quelques mois.
Du côté de la mastectomie
La cicatrice de mastectomie est reprise le plus souvent au centre ou à la partie externe sur 3 cm à 5 cm de celle-ci; puis on décolle la peau du muscle pectoral sur 2 cm à 4 cm en périphérie en fonction des besoins afin de faciliter la fermeture des deux plans en fin d’intervention (figure 7.9).

7.9 Reconstruction secondaire par prothèse : incision de la peau sur 3 à 5 cm et décollement cutanéomusculaire en périphérie.
Le muscle pectoral est incisé dans le sens des fibres, en regard d’une côte afin d’éviter une intrusion sanglante dans les espaces intercostaux très vascularisés. On évite aussi une éventuelle brèche pleurale.
Si possible, l’incision musculaire sera située plus haute que l’incision cutanée, afin qu’elles soient décalées lors de la fermeture pour diminuer le risque d’exposition de la prothèse.
Cette incision doit être située plus haut que la zone d’insertion inférieure du muscle pectoral, mais pas trop haut afin de limiter les difficultés opératoires lors de la création du LAA et du sillon sous-mammaire (figure 7.8b).
Le décollement des quadrants supérieurs est très facile et sera effectué généralement au doigt (figure 7.10).

7.10 Reconstruction secondaire par prothèse : décollement rétropectoral au doigt des quadrants supérieurs.
Le décollement supérieur et externe réalisé, on positionnera la patiente assise afin d’effectuer, sous contrôle d’une valve éclairante, le décollement interne et, surtout, inférieur. Celui-ci est plus difficile : on utilisera le bistouri électrique.
Après avoir réalisé le décollement des zones définies par le dessin préopératoire, en position assise on va décoller au ras de l’aponévrose la peau sur toute la zone prédéfinie et, souvent, quelques centimètres plus bas afin de faciliter l’ascension de ce lambeau dermograisseux (figure 7.11a). De profil, on descend plus bas que l’insertion du muscle pectoral, en sous-cutané, sur quelques centimètres (figure 7.11b).


7.11 Reconstruction secondaire par prothèse : décollement rétromusculaire.
a. En position assise et au bistouri électrique, on pratique un décollement rétromusculaire inférieur et interne allant plus loin que le dessin préétabli. b. De profil, le décollement inférieur descend très bas.

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