Les vulvodynies

13. Les vulvodynies

G. Steg, D. Winaver and M. Lachowsky




Le mot « vulve », lui, vient du latin volva puis vulva, devenu « vulve » en français en 1488. Partie visible du sexe de la femme, la vulve cache et protège le vagin, lieu secret de l’accomplissement du plaisir, objet du désir de l’homme et passage du nouveau-né. Organe génital externe, la vulve ou pudendum est un repli cutané érogène comprenant le mont de Vénus, les grandes et les petites lèvres, le clitoris, le vestibule et les glandes vulvaires. Sa grande richesse en neurorécepteurs fait d’elle le véritable organe sexuel de la femme. La vulve est apte à la jouissance comme à la douleur. Des notions morales, de pudeur et de honte lui restent attachées, même si les anatomistes ont changé leur terminologie : le nerf honteux est devenu le nerf pudendal. La pudeur a remplacé la honte !


Les mots pour le dire


Quand une femme consulte pour douleurs vulvaires, elle dit : « Ça pique, ça brûle, ça fait mal, c’est rouge, c’est gonflé ou ça coule », et ce toujours avec un peu de gêne (honte ou pudeur ?), en désignant d’un geste l’endroit qui fait mal. Le mot « vulve » est souvent ignoré, souvent confondu avec vagin, alors que pubis, lèvres et même clitoris sont plus facilement nommés. En fait, c’est de son sexe que la femme vient se plaindre, d’un sexe qui lui fait mal.


Comment a-t-elle construit et interprété le lien de cause à effet entre un événement médical ancien et la douleur actuelle ? Si logique et même séduisante que puisse nous paraître l’étiologie invoquée, elle peut aussi masquer un événement psychologique que la patiente a préféré oublier, ou auquel elle dénie toute importance. Ainsi, une femme qui se sent coupable d’avoir trompé son mari se plaindra d’une vulvodynie qu’elle attribue à des mycoses à répétition. Nous savons bien d’ailleurs la part de la psyché dans ces mycoses. Mais il est plus confortable pour elle d’utiliser cet alibi. Un accouchement mal vécu, une épisiotomie entraînent rarement des séquelles douloureuses lointaines, mais seront la cause toute trouvée, alors que les difficultés affectives ou sexuelles qui les ont entourés seront minimisées. De même, un herpès, récidivant ou non, n’est pas une cause de douleurs résiduelles, mais la peur et la honte peuvent créer une vulvodynie. Les condylomes et leurs traitements sont aussi très souvent incriminés.



Le regard sur la vulve


L’examen de la vulve fait partie de l’examen gynécologique. Quand la patiente ne se plaint de rien, cette étape de l’examen est souvent rapide. On se contente d’écarter les lèvres pour introduire le spéculum ou faire un toucher vaginal sans faire mal. Est-ce pour ménager la pudeur de la femme ou notre propre pudeur ? Y aurait-il un interdit du regard hérité des religions monothéistes ? Beaucoup de femmes se font encore violence pour s’exposer ainsi au regard du médecin. Quand on les interroge, elles disent que cette partie d’ellesmêmes « est laide, ça a l’air sale, ça n’a pas de forme, c’est foncé, c’est repoussant » ; certaines ne l’ont jamais regardée. Pour que l’exploration de la vulve soit bien vécue, il faut que la patiente ne se sente pas l’objet d’un voyeurisme et cela ne dépend pas toujours de nous. Certaines craignent que le médecin ne découvre, simplement par la vue, un secret de leur passé, deviné à leur insu.


L’examen gynécologique



Dans un premier temps, nous étudierons l’aspect de la vulve, en écartant doucement les grandes et les petites lèvres, sans oublier la fourchette, l’anneau hyménéal, la région périurétrale ; ce faisant, nous nous attacherons à cerner le lieu de la douleur, à l’aide notamment d’un coton-tige. Ainsi, nous pourrons déjà éliminer des lésions vulvaires d’origine mycosique ou herpétique, un eczéma, un lichen plan scléroatrophique ou érosif, un psoriasis, une maladie de Paget ou le simple frottement responsable d’une irritation. Les questions préciseront si prurit, picotements, sécheresse s’associent aux brûlures.

Une rougeur localisée à l’orifice des glandes de Bartholin, s’étendant parfois à toute la zone vestibulaire, une douleur précise réveillée au moindre contact évoquent une vestibulite. Les brûlures sont alors essentiellement provoquées par les rapports sexuels, mais aussi par le frottement des sous-vêtements. Un prélèvement vaginal, indolore et rapide, pourra, après examen au microscope, ajouter une réassurance à notre bilan ; mais qui rassure-t-il : la femme ou le médecin ? L’étiologie neurogène par altérations des nocicepteurs ou des fibres myéliniques existe, comme l’atteinte du sympathique ; elle est évoquée et traitée par les neurologues.

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Apr 27, 2017 | Posted by in MÉDECINE INTERNE | Comments Off on Les vulvodynies

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