Les neurones

Chapitre 1 Les neurones




La découverte que le système nerveux est constitué de cellules qui lui sont propres résulte de l’expansion notable de la microscopie et des techniques histologiques sur coupes fines à la fin du xixe siècle, mais aussi de la découverte de deux colorations extraordinaires pour visualiser les cellules nerveuses qui ont été nommées à cette occasion « neurones ». La première est due à l’allemand Franz Nissl (1860, 1919), qui montra que le crésyl violet était susceptible de se fixer sur des corpuscules (nommés depuis « corps de Nissl ») présents dans le cytoplasme des neurones autour du noyau. Les corps des cellules nerveuses et eux seuls sont donc colorés. Vers la même époque, l’italien Camillo Golgi (1843, 1926) découvre que lorsqu’on plonge un tissu nerveux dans une solution de chrome argentique, un nombre très limité de neurones se colorent dans leur totalité en noir. Cette technique sera mise à profit par son contemporain l’espagnol Santiago Ramon y Cajal (1852, 1934) pour décrire les neurones de tout le système nerveux, leur développement et leur régénération (figure 1.1). Tous deux auront le prix Nobel en 1906, bien que Golgi défende l’idée que les neurones reliés entre eux ne forment qu’un seul ensemble comme le système vasculaire, alors que Ramon y Cajal est sûr d’avoir vu des contacts entre cellules et défend l’idée de synapse déjà proposée à l’époque par Claude Bernard. Le débat sera tranché en 1950 avec la visualisation de la jonction neuromusculaire en microscopie électronique par le français René Couteaux (1909, 1999).



La microscopie optique a permis de découvrir la diversité des neurones et de savoir que la plupart d’entre eux a des corps cellulaires minuscules de 5 à 10 μm, des dendrites de 1 mm et moins. Mais la surprise a aussi été grande de découvrir des axones de plus de 1 m de long dans les cordons postérieurs de la moelle. Les neurones sont constitués de trois parties : un arbre dendritique plus ou moins touffu, un corps cellulaire, et un prolongement unique ramifié à son extrémité nommé « axone » (figure 1.2). Ces trois éléments sont polarisés (figure 1.3). En effet, le neurone reçoit toutes les informations de l’extérieur grâce aux synapses dendritiques et somatiques. C’est la zone réceptrice. Le corps cellulaire contenant le noyau a un rôle supplémentaire en synthétisant la majorité des protéines : il assure la maintenance des expansions cytoplasmiques, surtout de l’axone. L’axone synthétise et transporte des transmetteurs chimiques qu’il délivre à son extrémité dans des fentes synaptiques grâce au potentiel d’action qui parcourt sa membrane. C’est la partie émettrice du neurone. La découverte des fluctuations de son potentiel de membrane dans les années quarante puis la proposition par Weiss en 1948 qu’il existait un trafic intra-axonal a relancé l’intérêt pour la biologie des neurones, en particulier pour leur régénération après lésion.





Dendrites



Morphologie et membrane


Les dendrites sont caractérisées par la richesse de leurs embranchements, à la manière des branches d’un arbre, ce qui leur a donné leur nom (« dendrite » signifie « arbre » en grec). Le nombre, l’organisation et les angulations des dendrites sont très variables d’une structure du système nerveux à une autre. Une des arborisations les plus riches et les plus étudiées est celle de la cellule de Purkinje du cervelet, parce que toutes les dendrites sont dans un même plan à la manière d’un arbre en espalier. Les dendrites sont le plus souvent le siège d’expansions courtes nommées épines qui augmentent la surface de contact membranaire avec l’extérieur. Déterminer le rôle exact des épines reste un challenge pour le futur à l’aide de méthodes d’imagerie dynamique à haut pouvoir de définition. Enfin, à l’inverse de l’axone dont le diamètre reste constant même lorsqu’il s’arborise, le diamètre des dendrites diminue en allant vers leur extrémité distale. La principale caractéristique de la membrane dendritique est sa très grande richesse en zones post-synaptiques hautement spécialisées par leur contenu en récepteurs. En revanche, il n’y a pratiquement aucun canal ionique voltage-dépendant permettant la propagation de potentiels d’action (voir chapitre 2, Le fonctionnement du neurone). Les synapses engendrent des fluctuations locales du potentiel de membrane dont le champ électrique influence le potentiel local de la base de l’axone (voir chapitre 3, Les synapses du système nerveux central). Certaines dendrites possèdent des canaux calcium de type lent (L) et de type transitoire (T) comme le soma de leur neurone, susceptibles de générer des potentiels fluctuants locaux qui réguleraient la fréquence de décharge des potentiels d’action axonaux répétitifs.



Contenu cytoplasmique


Dans la totalité du neurone, les protéines du cytosquelette sont très abondantes. Elles forment un réseau enchevêtré, constitué de trois types différents de filaments : les microtubules, les microfilaments et les neurofilaments.


Les microtubules (24 μm de diamètre environ) sont des polymères d’unités de base de tubuline (on en décrit deux types : A et B). Les microtubules se déplacent dans les expansions cytoplasmiques. Les unités de tubuline se polymérisent à une extrémité dite + et se dépolymérisent à l’autre extrémité dite + pour être recyclées. Par conséquent, les tubules sont polarisés. Dans les dendrites, des extrémités + et + se trouvent à la fois près du corps neuronal et de l’extrémité dendritique. Aux tubules sont associées des protéines spécifiques (MAP, pour microtubule associated proteins) qui jouent un rôle dans le transport d’autres protéines et de certaines structures. Dans le cas des dendrites, ce sont des ribosomes qui sont transportés vers la périphérie par les tubules présentant une extrémité + du côté somatique. Cette présence de ribosomes intradendritiques suggère la possibilité de synthèse protéique dans les dendrites, toutefois il semble peu probable qu’il s’agisse de protéines en relation avec le fonctionnement synaptique (qui nécessitent une phosphorylation) mais plutôt de protéines du cytosquelette.


Les microfilaments sont des filaments de petite taille (5 μm de diamètre) qui résultent d’un assemblage en hélice de deux filaments qui sont des polymères d’actine. Ils sont très nombreux dans les dendrites comme dans l’axone. Comme les microtubules, les microfilaments sont également en polymérisation-dépolymérisation permanente. Leur fixation en maille à la membrane plasmique leur confère un rôle dans la rigidité des expansions cytoplasmiques.


Les neurofilaments ont une taille intermédiaire entre les microtubules et les microfilaments (10 μm). Comme ils sont formés de longues chaînes protéiques très comprimées, ils sont à la fois plus stables et plus rigides que les autres filaments. Par exemple, on les retrouve accumulés après les dégénérescences neuronales dans la maladie d’Alzheimer, et la dégénérescence neurofibrillaire est un critère diagnostique de l’affection.

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May 6, 2017 | Posted by in IMAGERIE MÉDICALE | Comments Off on Les neurones

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