La douleur, la nociception et l’analgésie

Chapitre 6 La douleur, la nociception et l’analgésie





Définitions


La douleur est définie par l’IASP (International Association for the Study of Pain) comme « une expérience sensorielle et émotionnelle désagréable, associée à une lésion tissulaire réelle ou potentielle, ou décrite en termes d’une telle lésion ». La douleur est un phénomène perceptif, neuropsychologique, qui comporte des composantes sensorielle, affective et cognitive. La composante sensorielle correspond aux opérations de détection, de localisation, de décodage de la qualité et de l’intensité d’une douleur. La composante émotionnelle désigne la tonalité affective désagréable, plus ou moins supportable, et l’état d’anxiété qui accompagne la douleur.


Le terme nociception a été introduit par Sherrington pour désigner le système physiologique qui permet de détecter les stimulations susceptibles de menacer l’intégrité de l’organisme. On qualifie de « nociceptives » ces stimulations ainsi que les réponses induites (nocere, en latin, signifie « nuire »). La finalité biologique de la nociception est celle d’un signal d’alarme utile qui détermine un ensemble de réflexes et de comportements protecteurs (réflexe de retrait, immobilisation de la région lésée, comportement d’évitement). L’importance de cette fonction de protection est bien mise en évidence par les observations, rares, de malades présentant une insensibilité congénitale à la douleur. Ces patients ont une espérance de vie réduite car une symptomatologie infectieuse, appendicite par exemple, n’est pas détectée à temps et évolue vers un tableau généralisé (péritonite, septicémie).


Les notions de nociception et de douleur ne sont pas superposables. La douleur n’est pas un stimulus. En clinique, il existe des lésions tissulaires sans perception de douleur et, à l’inverse, certaines douleurs peuvent survenir en l’absence de cause nociceptive identifiée (douleurs d’origine neuropathique ou psychologique).


Une caractéristique essentielle de la douleur est d’être modifiable par de nombreux facteurs : physiques, psychologiques et pharmacologiques. Ces variations peuvent se concevoir du fait de l’importance des contrôles, excitateurs et inhibiteurs, s’exerçant sur la transmission des messages nociceptifs.



Systèmes de transmission


Une grande variété de stimuli est capable de provoquer une douleur : stimulations mécaniques, thermiques et chimiques.






Enregistrement électrophysiologique de fibres uniques


Les caractéristiques des nocicepteurs sont surtout connues grâce à la décharge de leur fibre afférente. Deux caractéristiques permettent de définir le nocicepteur : son seuil d’excitation (plus élevé que celui des récepteurs non nociceptifs, mécaniques et thermiques) et sa fréquence de décharge (qui peut s’accroître pour des stimulations intenses). Ces deux caractéristiques permettent au nocicepteur de détecter une stimulation nociceptive et d’en coder l’intensité. Chez l’homme, il a été montré que la fréquence de décharge d’une fibre est bien corrélée à l’intensité de la sensation douloureuse perçue mesurée par une échelle numérique ou visuelle analogique (figure 6.1).



Toutes les fibres Aδ et C ne sont pas nociceptives : certaines fibres Aδ sont connectées à des mécanorécepteurs et des thermorécepteurs ; la grande majorité des fibres C afférentes sont capables de transmettre des messages nociceptifs ; toutefois de nombreuses fibres C (20 %) sont des axones de fibres efférentes sympathiques post-ganglionnaires.


On distingue plusieurs groupes de nocicepteurs :




Le seuil des nocicepteurs et la fréquence de décharge des nocicepteurs sont modifiés par une inflammation locale ou par des stimulations thermiques répétées. La sensibilisation des nocicepteurs se traduit par un seuil de décharge diminué, une augmentation de réponse à des stimulations supraliminaires et une activité spontanée. Ces caractéristiques sont à mettre en parallèle avec le phénomène d’hyperalgésie qui se traduit par une diminution du seuil de la douleur, une augmentation de douleur pour les stimulations supraliminaires et enfin une douleur spontanée. L’existence d’une sensibilisation périphérique lors d’une hyperalgésie n’exclut pas l’intervention de phénomènes centraux associés. Le phénomène de sensibilisation s’observe dans des modèles animaux de douleur chronique comme celui du rat arthritique. Signalons que l’aspirine et les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) augmentent le seuil des récepteurs sensibilisés.


On a également décrit des récepteurs silencieux qui ne sont pas activés par des stimulations nociceptives, mais dont le seuil s’abaisse considérablement lors d’une inflammation. Ces récepteurs contribueraient au développement de l’hyperalgésie.




Réflexe d’axone et inflammation neurogène


Une stimulation nociceptive produit diverses réactions locales : un érythème et une augmentation de la chaleur locale correspondant à une vasodilatation, un œdème dû à une extravasation plasmatique et à une augmentation de la perméabilité vasculaire, une hyperalgésie (les stimulations douloureuses sont perçues plus intenses) autour de la zone lésée.


Il a été montré que l’apparition de cette réaction locale nécessite l’intégrité des fibres afférentes C nociceptives :






On explique l’inflammation neurogène par un mécanisme de réflexe d’axone :





Ce mécanisme expliquerait la persistance de la douleur après une lésion et l’hyperalgésie secondaire.



May 6, 2017 | Posted by in IMAGERIE MÉDICALE | Comments Off on La douleur, la nociception et l’analgésie

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