11. Item 281 – Rétrécissement aortique
Objectifs pédagogiques
Nationaux
◗ Diagnostiquer un rétrécissement aortique.
◗ Argumenter l’attitude thérapeutique et planifier le suivi du patient.
CNEC
◗ Connaître la définition et les étiologies principales.
◗ Identifier la triade symptomatique à l’effort (douleur, dyspnée, syncope) qui conduit à la suspicion du diagnostic devant un souffle éjectionnel aortique.
◗ Savoir le rôle essentiel de l’échocardiographie dans la confirmation du diagnostic et les principales mesures devant figurer au compte rendu.
◗ Savoir que l’apparition des symptômes marque un premier tournant évolutif et que l’apparition d’une dysfonction systolique du ventricule gauche indique un second tournant évolutif qui grève la mortalité chirurgicale.
◗ Savoir utiliser l’échographie de stress pour apprécier la réserve contractile des formes avec dysfonction systolique du ventricule gauche.
◗ Savoir poser l’indication opératoire en cas de rétrécissement aortique serré symptomatique, soit par valve mécanique soit par bioprothèse.
◗ Connaître le pronostic sombre des formes serrées et symptomatiques en l’absence de traitement.
◗ Savoir mesurer le rapport bénéfice – risque des deux types de prothèses : biologique et mécanique.
◗ Connaître qu’il existe des alternatives à la chirurgie par voie percutanée soit palliatives (valvuloplastie), soit en cours de développement (valves percutanées).
I. DÉFINITION
Le rétrécissement aortique (RA) est défini comme une obstruction à l’éjection du ventricule gauche localisée le plus souvent au niveau de la valve aortique. Il existe d’autres formes d’obstruction à l’éjection du ventricule gauche non abordées ici :
– rétrécissement supra-aortique ;
– obstruction dynamique des myocardiopathies obstructives.
II. ÉTIOLOGIES
A. Rétrécissement aortique congénital
Plusieurs types de malformation congénitale de la valve aortique peuvent s’observer :
– unicuspidie : très rare ;
– bicuspidie :
• étiologie la plus fréquente entre 30 et 65 ans,
• en général, bien tolérée pendant l’enfance et l’adolescence. C’est une malformation « évolutive » qui finit par entraîner un rétrécissement aortique à l’âge adulte ;
– tricuspidie : certaines tricuspidies sont congénitales et sont caractérisées par trois valvules de dimensions inégales.
B. Rétrécissement aortique acquis
– Post-rhumatismal : cette étiologie est devenue rare. En général, le RA est associé à une IA et à une atteinte mitrale (RM + IM).
– Dégénératif (sénile) ou maladie de Mönckeberg :
• forme la plus fréquente de rétrécissement aortique chez le patient âgé (> 65–70 ans) ;
• caractérisé par un dépôt de calcifications à la base des valvules qui deviennent rigides.
– Causes plus rares :
• maladie de Paget ;
• insuffisance rénale terminale ;
• polyarthrite rhumatoïde ;
• ochronose.
Les étiologies du rétrécissement aortique peuvent être résumées ainsi :
– bicuspidie dans la majorité des cas avant 65–70 ans ;
– dégénératif dans la majorité des cas après cette limite d’âge.
III. PHYSIOPATHOLOGIE ET CONSÉQUENCES HÉMODYNAMIQUES
La diminution de la surface de l’orifice aortique réalise une résistance à l’éjection ventriculaire entraînant plusieurs conséquences : gradient de pression ventriculoaortique, hypertrophie pariétale et dysfonction diastolique.
A. Gradient de pression ventriculo-aortique
En présence d’un obstacle à l’éjection ventriculaire, apparition d’une hyperpression intraventriculaire gauche avec gradient de pression ventriculo-aortique (PVG > PAo).
Le gradient de pression VG – aorte est d’autant plus élevé que le rétrécissement aortique est serré. Lorsque le gradient de pression VG – aorte dépasse 50 mmHg, le RA est considéré comme serré.
B. Hypertrophie pariétale
L’augmentation de pression intraventriculaire gauche entraîne dans un premier temps une augmentation des contraintes pariétales ou post-charge. Loi de Laplace :

Si les contraintes pariétales restent élevées, on assiste à une diminution de la performance systolique du ventricule gauche puisque les contraintes pariétales s’opposent physiologiquement au déplacement des parois du ventricule.
En pratique, les patients atteints d’un RA conservent longtemps une performance systolique normale. En effet, l’augmentation des contraintes pariétales est un puissant stimulant de la réplication des cellules myocardiques aboutissant à une hypertrophie pariétale (épaississement des parois) ; cette hypertrophie pariétale concentrique finit, à son tour, par compenser l’élévation de pression intraventriculaire et normaliser les contraintes pariétales (cf. loi de Laplace), ce qui permet finalement de maintenir normale la performance systolique ventriculaire globale (évaluée, par exemple, par la mesure de la fraction d’éjection). Au début, la performance systolique globale du VG est le plus souvent normale chez un patient atteint de RA. Cependant chez certains patients, l’hypertrophie pariétale n’est pas suffisante pour normaliser les contraintes pariétales d’où une diminution de la performance systolique globale (baisse de la fraction d’éjection) et signes d’insuffisance cardiaque.
La performance systolique du ventricule se normalise dès qu’on supprime l’obstacle aortique (remplacement valvulaire).
En général après plusieurs années, le myocarde hypertrophié perd une partie de ses propriétés contractiles avec diminution de la performance systolique globale du ventricule et tableau clinique d’insuffisance cardiaque par dysfonction systolique. Dans ce cas, la dysfonction systolique globale est liée à une atteinte souvent irréversible de la contractilité myocardique et la récupération de la performance systolique après remplacement valvulaire est incomplète.
L’hypertrophie pariétale peut entraîner également une ischémie myocardique (angor d’effort typique), même en dehors de toute lésion coronaire, par perte de la réponse vasodilatatrice des artérioles intramyocardiques en cas d’augmentation des besoins du myocarde en oxygène (c’est-à-dire diminution de la réserve coronaire).
C. Dysfonction diastolique
Ces deux anomalies de la fonction diastolique entraînent une élévation des pressions du ventricule gauche pendant la phase de remplissage. Cette augmentation de pression diastolique se transmet en amont au niveau des veines et capillaires pulmonaires avec pour conséquence un tableau d’insuffisance cardiaque (congestion pulmonaire).
La contraction de l’oreillette prend alors un rôle important dans le remplissage ventriculaire et donc dans le maintien du débit cardiaque. C’est pourquoi la perte de la systole par fibrillation auriculaire est en général mal tolérée chez les patients atteints de RA.
IV. ASPECTS CLINIQUES
A. Signes fonctionnels
L’apparition des symptômes est précédée d’une longue période asymptomatique qui peut durer plusieurs années.
L’angor, la syncope d’effort et la dyspnée d’effort sont les trois maîtres symptômes du rétrécissement aortique.
Quand les symptômes apparaissent, le pronostic vital est mis en jeu :
– décès dans les 2 ans après apparition de signes d’insuffisance cardiaque +++ ;
– décès dans les 3 ans après syncope ;
– décès dans les 5 ans après angor.
Les symptômes sont :
– dyspnée : c’est le symptôme le plus fréquent ;
– angor : dans deux tiers des cas ;
– syncope : les syncopes sont souvent orthostatiques. Elles surviennent également souvent à l’effort, secondaires à une inadaptation du débit à l’effort ;
– hémorragie digestive : le mécanisme est mal élucidé.
B. Examen et auscultation
– Anomalies de la pulsatilité artérielle : le pouls est en général faible avec une ascension lente. La pression aortique systolique et la pression différentielle sont en général diminuées.

Stay updated, free articles. Join our Telegram channel

Full access? Get Clinical Tree


