15. Item 116 – Dermatoses bulleuses auto-immunes
◗ Expliquer l’épidémiologie, les facteurs favorisants, et l’évolution des dermatoses bulleuses auto-immunes.
◗ Interpréter les anomalies biologiques les plus fréquentes observées.
◗ Argumenter les principes du traitement et la surveillance au long cours.
• Le diagnostic des maladies bulleuses auto-immunes repose sur l’examen clinique complété par l’examen histologique d’une biopsie cutanée et par la recherche d’anticorps antiépiderme.
• Les anticorps sont dirigés contre des protéines de la jonction dermo-épidermique (JDE) au cours des maladies de la JDE et contre les jonctions interkératinocytaires au cours du pemphigus.
• Les anticorps antiépiderme fixés in vivo sont détectés par immunofluorescence directe et les anticorps sériques par immunofluorescence indirecte, immunotransfert ou ELISA.
• Une dermatose bulleuse étendue et/ou rapidement évolutive impose une hospitalisation en service spécialisé.
• La plus fréquente des dermatoses bulleuses auto-immunes est la pemphigoïde bulleuse.
• Le pemphigus vulgaire se traduit essentiellement par des érosions muqueuses, en particulier de la muqueuse buccale, à l’origine d’une dysphagie.
• Le traitement des principales maladies bulleuses auto-immunes repose principalement sur la corticothérapie locale ou générale.
Les dermatoses bulleuses auto-immunes (DBAI) constituent un groupe hétérogène de maladies à la fois très diverses, peu fréquentes et de pronostic variable, parfois péjoratif.
La diversité des dermatoses bulleuses auto-immunes nécessite la combinaison d’examens clinique, anatomopathologique et immunopathologique.
Les DBAI sont secondaires à une atteinte des différents systèmes de jonction interkératinocytaires ou de la jonction dermo-épidermique (JDE).
La cohésion de la peau est assurée par deux systèmes d’adhésion :
• la cohésion de l’épiderme est principalement assurée par les desmosomes qui permettent l’adhésion interkératinocytaire ;
• la jonction dermo-épidermique assure une bonne adhésion entre l’épiderme et le derme sous-jacent ; c’est une région macromoléculaire complexe qui comprend, de la superficie vers la profondeur : les hémidesmosomes, les filaments d’ancrage, la lame dense et les fibrilles d’ancrage.
C’est l’altération de ces différents systèmes d’adhésion secondaire à la fixation des auto-anticorps qui est à l’origine de la formation des bulles.
Parmi les DBAI, on distingue, en fonction du site de clivage :
• les DBAI sous-épidermiques, avec perte de l’adhésion dermo-épidermique par altération d’un composant de la JDE par des autoanticorps ;
• les DBAI intraépidermiques (groupe des pemphigus) où la perte de cohésion des kératinocytes (acantholyse) est due à l’altération des desmosomes par des autoanticorps.
I. Diagnostic positif
A. Clinique
Une bulle est une collection liquidienne superficielle à contenu clair ou sérohématique de taille > 5 mm. Elle peut siéger sur la peau ou les muqueuses (buccale, génitale…).
Il faut savoir également évoquer une dermatose bulleuse devant :
• une érosion postbulleuse, en particulier sur les muqueuses, caractéristique par sa forme arrondie et la présence d’une collerette épithéliale périphérique, parfois croûteuse ;
• ou un vaste décollement épidermique donnant un aspect de « linge mouillé sur la peau » ;
• le signe de Nikolsky (signe de -)Nikolsky correspond à un décollement cutané provoqué par le frottement appuyé de la peau saine. Il traduit un décollement intraépidermique (acantholyse) au cours des pemphigus.
B. Histologie
Il existe une assez bonne concordance entre l’aspect clinique d’une bulle récente et son type histologique selon le niveau de clivage :
• entre le derme et l’épiderme (bulle sous-épidermique) : bulle tendue, à contenu clair ou parfois hématique ;
• ou à l’intérieur de l’épiderme (bulle intraépidermique) : bulle flasque et fragile.
C. Immunopathologie
Le diagnostic positif d’une DBAI repose sur l’examen en immunofluorescence directe (IFD) d’une biopsie de peau (ou de muqueuse externe) péribulleuse qui objective des dépôts d’immunoglobulines G (IgG), ou A (IgA) et/ou de C3, in vivo.
Ces dépôts peuvent être localisés :
• le long de la JDE dans les DBAI sous-épidermiques, donnant un aspect linéaire ;
• sur la membrane des kératinocytes dans les DBAI intraépidermiques (pemphigus), donnant un aspect en mailles de filet (ou en résille) ;
• au sommet des papilles dermiques dans la dermatite herpétiforme, d’aspect granuleux.
L’IFD est complétée par :
• l’examen du sérum en immunofluorescence indirecte (IFI) recherchant la présence d’autoanticorps circulants antiépiderme (anticorps anti-JDE, anticorps antimembrane des kératinocytes) ;
• l’examen du sérum en immunotransfert ou ELISA permettant de caractériser les autoanticorps.
II. Diagnostic différentiel
A. D’une dermatose bulleuse
La bulle doit être distinguée :
• de la vésicule, de plus petite taille (1 à 2 mm de diamètre) ;
• de la pustule dont le contenu est purulent.
Cependant, certaines DBAI (dermatite herpétiforme, pemphigoïde bulleuse) s’accompagnent volontiers de vésicules.
Inversement, il peut exister des formes bulleuses de dermatoses vésiculeuses comme :
• l’herpès, le zona ou l’eczéma (formation de bulles par coalescence de vésicules) ;
• les vasculites nécrotico-bulleuses (bulles par nécrose de l’épiderme).
Les érosions postbulleuses doivent être différenciées des autres érosions ou ulcérations primitives (chancre, aphtes), notamment sur les muqueuses buccales ou génitales.
B. D’une maladie bulleuse non auto-immune
Elles sont éliminées sur l’aspect clinique, l’évolution et surtout la négativité des examens immunopathologiques, essentiellement l’IFD cutanée.
Chez l’adulte, on élimine :
• une toxidermie bulleuse (érythème pigmenté fixe bulleux, syndrome de Stevens-Johnson, nécrolyse épidermique toxique). Elle se caractérise par :
– un début brutal,
– une évolution rapide,
– une fréquence de l’atteinte muqueuse et des signes généraux imposant l’hospitalisation en urgence,
– la recherche de prise récente de médicaments inducteurs ;
• une porphyrie cutanée tardive caractérisée par :
• une dermatose bulleuse par agents externes. Les bulles peuvent être :
– de cause physique (« coup de soleil », photophytodermatose ou « dermite des prés »),
– de cause chimique (dermatite caustique, piqûres d’insectes, etc.) dont le diagnostic repose sur l’anamnèse ;
• un érythème polymorphe bulleux :
– lésions cutanées éruptives en « cocardes » ou « cibles »,
– à disposition acrale (coudes, genoux, mains, visage),
– évolution spontanée vers la guérison en 2 à 3 semaines,
– lésions muqueuses bulleuses ou érosives fréquentes ;
– survenue le plus souvent après un herpès récurrent.
Chez l’enfant, on élimine :
• une épidermolyse bulleuse héréditaire :
– mutations de gènes codant diverses protéines de la JDE,
– elle débute généralement en période néonatale,
– fragilité cutanée anormale responsable de bulles siégeant aux zones de friction ou de traumatisme (extrémités, faces d’extension des membres),
– le diagnostic repose sur l’aspect clinique, les antécédents familiaux, l’étude en microscopie électronique d’une biopsie cutanée et, dans certains cas, l’identification de la mutation en cause par la biologie moléculaire ;
• une épidermolyse staphylococcique :
– dermatose bulleuse aiguë due à l’action d’une toxine sécrétée par certaines souches de staphylocoques dorés,
– début brutal, fièvre, AEG avec signe de Nikolsky, foyer infectieux (impétigo, omphalite, otite externe…),
– décollement épidermique très superficiel (sous-corné),
– elle survient dans un contexte infectieux.
III. Diagnostic étiologique
L’interrogatoire et l’examen clinique permettent, dans la plupart des cas, une bonne orientation diagnostique confirmée par les examens complémentaires, en particulier immunopathologiques.
A. Interrogatoire
Il recherche :
![](https://freepngimg.com/download/social_media/63059-media-icons-telegram-twitter-blog-computer-social.png)
Stay updated, free articles. Join our Telegram channel
![](https://clinicalpub.com/wp-content/uploads/2023/09/256.png)
Full access? Get Clinical Tree
![](https://videdental.com/wp-content/uploads/2023/09/appstore.png)
![](https://videdental.com/wp-content/uploads/2023/09/google-play.png)
![](https://clinicalpub.com/wp-content/uploads/2023/09/banner1.png)