14. Item 114 – Allergies cutanéo-muqueuses chez l’enfant et l’adulte : eczéma de contact
◗ Diagnostiquer un eczéma de contact chez l’enfant et chez l’adulte.
◗ Argumenter l’attitude thérapeutique et planifier le suivi du patient.
• L’eczéma de contact est la deuxième grande cause d’eczéma à côté de la dermatite (eczéma) atopique.
• Il est dû à une sensibilisation par voie cutanée à des petites molécules (haptènes) présentes dans notre environnement (à l’opposé de la sensibilisation à des protéines – atopènes – dans le cas de l’eczéma atopique).
• Les eczémas de contact de cause professionnelle sont parmi les plus fréquentes des maladies professionnelles indemnisables.
• Eczéma de contact et eczéma atopique peuvent s’associer, expliquant l’efficacité relative des mesures d’éviction, par exemple pour les dermatites des mains.
• Certains allergènes n’induisent un eczéma de contact qu’après irradiation par les rayons ultraviolets (photoallergie).
• La réalisation des tests épicutanés doit être orientée par l’interrogatoire et l’examen clinique.
• On peut rester sensibilisé très longtemps à un allergène de contact commun : la pertinence des tests épicutanés positifs doit donc systématiquement être discutée.
• Les allergènes les plus fréquents sont les métaux, en particulier le nickel.
• L’éviction de l’allergène est une condition indispensable à la guérison.
• L’ubiquité de certains allergènes rend leur éviction difficile et rend compte de la chronicité de certains eczémas de contact.
• Le traitement symptomatique repose sur l’application de corticoïdes locaux.
• L’information du patient est indispensable pour qu’il parvienne à se protéger de tout contact ultérieur avec l’allergène.
Zéro à la question
• Le diagnostic étiologique ne repose ni sur la biopsie cutanée pour examen histologique ni sur le dosage des IgE.
• L’éviction de l’allergène est indispensable à la guérison car il n’y a pas de possibilité de désensibilisation dans l’eczéma de contact (zéro à la question si non mentionnée).
Cette dermatose est très fréquente.
L’Eczémade contacteczéma de contact est une cause majeure des eczémas.
Elle est due à une sensibilisation percutanée à des molécules non tolérées ou allergènes. Eczéma atopique et eczéma de contact peuvent être associés, en particulier dans le cas des dermatites des mains.
L’eczéma de contact est dû à une réaction d’hypersensibilité retardée à médiation cellulaire déclenchée par le contact de la peau avec une substance exogène.
L’eczéma de contact évolue en deux phases : une phase de sensibilisation et une phase de révélation.
Phase de sensibilisation
Le produit sensibilisant exogène est le plus souvent un haptène, c’est-à-dire une substance de petite taille non immunogène par elle-même.
Elle pénètre dans la peau et s’associe à une protéine pour former un couple haptène-protéine qui constitue l’allergène.
Celui-ci est pris en charge par les cellules dendritiques de l’épiderme (cellules de Langerhans) ou du derme. Ces cellules migrent par voie lymphatique dermique vers la zone paracorticale des ganglions lymphatiques.
Pendant cette migration, elles subissent une maturation qui les rend capables d’activer des lymphocytes T « naïfs ». Ces lymphocytes T prolifèrent et se différencient alors en lymphocytes « mémoires » circulants.
Cette première phase est cliniquement asymptomatique.
Elle peut durer quelques jours à plusieurs années.
L’exposition à des irritants qui fragilisent la fonction barrière de la peau (eau, occlusion sous les gants, détergents, solvants…) facilite la pénétration des allergènes dans la peau et le développement de la réaction allergique.
Phase de révélation
Elle survient chez un sujet déjà sensibilisé, 24 à 48 heures après un nouveau contact avec l’allergène.
Des lymphocytes T mémoire spécifiques de l’allergène à (re)circulation cutanée reconnaissent l’allergène présenté par les cellules de Langerhans.
Ils prolifèrent et sécrètent des cytokines pro-inflammatoires (IL-2, TNFα) qui recrutent des cellules mononucléées inflammatoires responsables de la réaction clinique et histologique (spongiose et exocytose épidermiques) d’eczéma.
Les kératinocytes produisent aussi des cytokines (IL-1, IL-6, GM-CSF et TNFα).
L’eczéma de contact est une hypersensibilité cellulaire retardée de type Th1 du fait du profil des cytokines produites par les lymphocytes spécifiques de l’allergène (IFNα, TNFα).
Il s’oppose ainsi à l’eczéma atopique qui a une phase de révélation (lors de contacts épicutanés avec des atopènes, molécules de poids moléculaire beaucoup plus élevé que les haptènes) dépendante de lymphocytes Th2 (IL-4, IL-5, IL-13).
I. Diagnostic
A. Diagnostic positif
1. Forme typique : eczéma aigu
Les lésions sont très prurigineuses (+++).
Elles réalisent des placards érythémateux à contours émiettés.
L’eczéma aigu évolue en quatre phases successives, souvent intriquées :
• phase érythémateuse : placard érythémateux ;
• phase vésiculeuse : vésicules remplies de liquide clair, confluant parfois en bulles (fig. 14.1) ;
Fig. 14.1 |
• phase croûteuse ou desquamative suivie d’une guérison sans cicatrice.
2. Formes cliniques
a. Formes topographiques
L’eczéma peut prendre un aspect très œdémateux sur le visage, en particulier sur les paupières, et sur les organes génitaux.
Sur les paumes et les plantes, où la couche cornée est beaucoup plus épaisse, la rupture des vésicules est plus difficile, et l’eczéma aigu se présente sous forme de vésicules prurigineuses dures enchâssées (aspect de Dysidrose dysidrose). D’autres causes de dysidrose sont possibles (cf. « Diagnostic différentiel »).
b. Formes chroniques
On distingue :
• l’eczéma lichénifié : le grattage entraîne un épaississement de la peau qui devient quadrillée et pigmentée (fig. 14.3) ;
Fig. 14.3 |
• l’eczéma chronique des paumes et des plantes : dans cette localisation, les lésions sont fréquemment fissuraires et hyperkératosiques, entraînant une kératodermie palmo-plantaire.
3. Examen histologique
En pratique, la biopsie cutanée est habituellement inutile au diagnostic.
Elle n’est réalisée qu’en cas de doute diagnostique, ou pour documenter le caractère spongiotique d’un test épicutané.
L’examen histologique montre :
• une spongioseSpongiose (œdème dissociant les kératinocytes et aboutissant à la formation de vésicules intraépidermiques) ;
• une exocytose (infiltrat de cellules mononucléées entre les kératinocytes) ;
• un œdème dermique et un infiltrat riche en lymphocytes à prédominance périvasculaire.
B. Diagnostic différentiel
1. Dermatite d’irritation
Elle est fréquente sur les mains.
Elle est secondaire à des agressions physiques ou chimiques directes, qui ne nécessitent pas l’intervention de mécanismes immunologiques spécifiques d’un allergène.