Chapter 9. Item 105 – Surveillance des porteurs de valves et prothèses vasculaires
Seule la partie concernant les prothèses valvulaires est traitée ici.
Objectifs pédagogiques
Nationaux
◗ Expliquer les risques inhérents aux valves artificielles et aux prothèses vasculaires et les mesures préventives correspondantes.
◗ Diagnostiquer une complication liée au matériel prothétique ou au traitement associé.
CNEC (pour les prothèses valvulaires)
◗ Connaître les différents types de prothèses valvulaires et les différences entre valves mécaniques et biologiques.
◗ Connaître les principales complications des prothèses valvulaires :
• thromboses obstructives et non obstructives des prothèses mécaniques ;
• désinsertions de valve ;
• risque majeur d’endocardite infectieuse ;
• dégénérescence inéluctable des bioprothèses.
◗ Connaître les risques et les complications du traitement anticoagulant.
◗ Connaître les objectifs du traitement anticoagulant en fonction du type de valve, du contexte et des pathologies associées.
◗ Savoir planifier le suivi d’un porteur de prothèse valvulaire par le généraliste et le cardiologue, connaître les moyens de la surveillance cliniques et paracliniques.
I. DIFFÉRENTS TYPES DE PROTHÈSES VALVULAIRES
Il existe deux grands types de prothèses valvulaires : les prothèses mécaniques et les prothèses biologiques.
A. Prothèses mécaniques
Ce sont des dispositifs totalement artificiels, construits actuellement en titane et carbone (fig. 9.1 cahier couleur).
Les premières valves mécaniques étaient à bille (prothèse de Starr), puis sont apparues des valves monodisque (prothèse de Bjork-Shiley®), puis des prothèses à double ailette (prothèse de Saint-Jude®, Sorin-Bicarbon®, Mira®.). Seules les valves à double ailette, qui ont le meilleur «rendement hémodynamique» et sont les moins thrombogènes, sont implantées de nos jours.
Les valves cardiaques mécaniques nécessitent un traitement anticoagulant définitif, fortement dosé.
Elles ont une excellente durabilité et doivent en principe durer toute la vie du patient.
B. Prothèses biologiques ou bioprothèses
Les valves biologiques sont le plus souvent des valves animales (Carpentier- Edwards®, Perimount®…) ou xénogreffes, en général porcines (fig.9.2 cahier couleur), plus rarement des homogreffes d’origine humaine, de meilleure durabilité, mais peu disponibles (fig. 9.3 cahier couleur).
Les bioprothèses sont le plus souvent montées sur une armature de métal et sont donc encombrantes. Plus rarement, il s’agit de prothèses sans armature ou stentless.
Elles ne nécessitent pas d’anticoagulants au-delà du 3e mois postopératoire en l’absence de fibrillation atriale, ce qui est leur principal avantage.
Mais leur durabilité est médiocre, surtout chez les sujets jeunes et chez les insuffisants rénaux, ce qui est leur principal inconvénient. Elles sont donc à réserver aux sujets de plus de 70–75 ans ou dans de rares cas de désir de grossesse (AVK contre-indiqués car tératogènes entre 6e et 12e semaine de grossesse).
Il existe un risque majeur d’endocardite infectieuse (EI) quel que soit le type de prothèse, mécanique ou biologique, car il s’agit dans tous les cas d’un corps étranger.
II. PHYSIOPATHOLOGIE
Les prothèses valvulaires fonctionnent comme des valves natives : le jeu de l’élément mobile (bille autrefois, disque basculant ou double ailette de nos jours) se fait sous l’effet des variations de pression dans les cavités cardiaques en amont et en aval de la prothèse.
Les valves mécaniques comportent un risque de thrombose si elles sont imparfaitement anticoagulées.
III. COMPLICATIONS DES VALVES CARDIAQUES
A. Complications thrombo-emboliques
– Complications les plus fréquentes des prothèses valvulaires.
– Beaucoup plus fréquentes avec les prothèses mécaniques qu’avec les prothèses biologiques, d’où la nécessité absolue d’un traitement anticoagulant à vie et parfaitement équilibré pour les porteurs de valves mécaniques +++.
– Incidence plus élevée pour les prothèses mitrales (qui fonctionnent à faible pression) que pour les prothèses aortiques.
– Incidence variant également en fonction du type de prothèse : incidence moindre pour les valves à double ailette que pour les modèles plus anciens.
– Favorisées par un traitement anticoagulant insuffisant ++.
Il en existe plusieurs types : embolies systémiques et thromboses de prothèse mécanique.
1. Embolies systémiques
Elles sont dues à la migration d’un thrombus à partir de la prothèse. Elles sont le plus souvent cérébrales (accident ischémique transitoire ou accident vasculaire cérébral constitué, avec parfois séquelles définitives). Plus rarement, il s’agit d’une ischémie aiguë d’un membre, d’infarctus du myocarde par embolie coronaire, d’infarctus rénal ou splénique…
Il s’agit dans ce cas de thromboses non obstructives, n’empêchant pas l’excursion de l’élément mobile, et survenant surtout sur les prothèses mitrales, avec thrombus sur la face atriale de la prothèse en échographie transœsophagienne (ETO).
2. Thromboses de prothèse mécanique
Elles sont à l’origine d’accidents brutaux, avec œdème aigu pulmonaire, ou syncope, ou état de choc, voire mort subite ou très rapide. Il s’agit dans ce cas de thrombose obstructive gênant les mouvements de l’élément mobile (fig. 9.4 cahier couleur).
Le diagnostic de thrombose de prothèse est souvent difficile : il existe des modifications de l’auscultation (diminution de l’amplitude des bruits de prothèse ou surtout apparition ou renforcement d’un souffle systolique pour une prothèse aortique ou d’un roulement diastolique pour une prothèse mitrale). Le traitement anticoagulant est souvent insuffisant, il faut rapidement vérifier l’INR.
Le diagnostic est fait par le radio-cinéma de prothèse, sous amplificateur de brillance, qui peut montrer une diminution du jeu des éléments mobiles radioopaques, et surtout par l’ETT et l’ETO. À l’écho-doppler, les gradients transprothétiques sont anormalement élevés, la surface valvulaire est réduite ; il peut exister une fuite valvulaire par fermeture incomplète de la prothèse. Enfin, le thrombus est parfois visible en ETO.
Une hospitalisation pour réintervention d’urgence est requise pour changement de valve en cas de thrombose aiguë de prothèse (mortalité 30 %).
Dans les formes subaiguës, la thrombolyse donne parfois de bons résultats. En cas de dysfonction de prothèse de moindre gravité, le traitement anticoagulant doit être rééquilibré avec passage transitoire à l’héparine si nécessaire.
Le diagnostic différentiel (ou l’association) avec l’endocardite bactérienne est parfois difficile d’autant qu’une fébricule est possible dans les thromboses de prothèse.
B. Désinsertions de prothèse
Elles surviennent dans 5 % des cas ; surtout durant les premiers mois postopératoires.
– spontanées, par lâchage de sutures sur des tissus fragilisés par des interventions multiples ou des calcifications annulaires ;
– dues à une endocardite infectieuse (EI).
Une désinsertion peu importante, asymptomatique, est suspectée par l’apparition d’un souffle, diastolique pour une prothèse aortique, systolique pour une prothèse mitrale.
Une désinsertion plus importante peut être à l’origine d’une insuffisance cardiaque ou d’une hémolyse : anémie de gravité variable, avec élévation des LDH et présence de schizocytes, ou hématies fragmentées, qui signent le caractère mécanique de l’hémolyse (fig. 9.5 cahier couleur).

Stay updated, free articles. Join our Telegram channel

Full access? Get Clinical Tree


