fémorales des prothèses totales de hanche par tige de première intention

Reprises fémorales des prothèses totales de hanche par tige de première intention

THA revision surgery with standard stems

P. Massin1, P. Boyer1, F.R. Depuy2 and C. Jeanrot1


1CHU Bichat, GHU Paris Nord, 75877 Paris cedex 18;

2CHU Angers, 49933 Angers cedex 09

Résumé
Les possibilités de reprise de prothèse totale de hanche par des tiges standard sont assez fréquentes si l’on considère que près de 40 % des changements sont de principe et non de nécessité. Par ailleurs, dans les changements de nécessité, la destruction osseuse ne correspond pas toujours à la cause initiale de ce changement, il peut donc apparaître logique de conserver le même de type de tige. Nous rappelons les principales circonstances dans lesquelles nous sommes conduits à changer de tige en dehors des destructions osseuses minimes des stades 1 et 2. Une revue de la littérature et l’analyse d’une série personnelle de 191 reprises de prothèse totale de hanche rappellent ces principales étiologies. Nous avons pu lister également les complications les plus fréquemment retrouvées. En peropératoire, les fractures sont plus liées à des problèmes d’extraction qu’à la mise en place de la nouvelle tige à proprement parler. En postopératoire, les complications n’ont rien de spécifique : hématome, luxation précoce, non-consolidation trochantérienne… Nous évoquons également les indications en insistant sur les causes liées à la stabilité de la prothèse lors d’un changement isolé de la cupule qui conduit fréquemment au changement de la tige décidé en peropératoire. Nous abordons les problèmes techniques d’extraction qui doivent être aussi peu traumatiques que possible mais aussi de mise en place de ces tiges en discutant pour la fixation le choix du ciment ou du non cimenté. Enfin, le souci louable de ne pas aller vers une escalade thérapeutique en s’attachant à utiliser des tiges standard ne doit pas nous faire oublier de posséder dans le bloc opératoire des tiges plus longues ou modulaires pour résoudre des situations que la tige standard ne permettrait pas de contrôler.




Summary

The possibilities for revision surgery in THA with standard stems are frequent when we consider that nearly 40% of revisions are undertaken more on principle than out of necessity. In fact, when THA revision is necessary, we note that bone loosening may not be the initial indication. Therefore, it may appear logical to try to implant an identical type of stem. We discuss the most frequent situations where a stem change may be indicated, in cases other than SOFCOT stages 1 or 2 of femoral bone deficiency. The various etiologies are provided on the basis of a literature review and of a personal series of 191 hip prosthesis revisions. The most frequent complications are also presented. During surgery, fractures more often occur during extraction than during implantation of the new stem. Postoperative complications are not specific to this type of surgery (haematoma, early dislocation, poor consolidation of the trochanteric area, etc.) Instability situations created by isolated cup removal are discussed, as well as the fact that the decision stem revision is often made during surgery. We also discuss the necessity for atraumatic techniques to remove the previous stem and to implant the new stem. The advantages and limits of cemented or uncemented techniques are also presented. In conclusion, we emphasize the fact that even if we have planned to implant a new standard stem, the local surgical situation may not allow this strategy. We must therefore be ready to change surgical procedure and device, having available in the operating room other types of femoral implants (long revision stem, modular stem).


D’une façon générale, les reprises de prothèses fémorales de hanche par tige de première intention ne sont possibles que lorsque les dégâts osseux sont limités à la partie proximale du fémur, c’est-à-dire dans les stades SOFCOT 1 et 2. L’utilisation de tige standard est plus problématique en cas d’extension diaphysaire de l’ostéolyse, et elle doit être alors couplée à des techniques de reconstruction osseuse en un ou deux temps.

La littérature concernant les reprises par tiges de première intention est relativement pauvre. L’amélioration des techniques de cimentage semble avoir apporté une amélioration de la survie des tiges implantées en chirurgie de révision [8]. Plus récemment, Howie rapporte une expérience avec des tiges standard cimentées, qui ont un taux de survie à moyen terme de 93 % légèrement inférieur à celui des tiges longues de même dessin [12]. En revanche, les reprises de tiges sans ciment par tiges cimentées rapportées par Davis et al. semblent moins prometteuses [5]. En fixation sans ciment, Reikeras et Gunderson rapportent de bons résultats avec une tige de première intention entièrement recouverte d’hydroxyapatite aussi bien dans les reprises de tiges cimentées que de tiges sans ciment [35].

De façon à mieux cerner les circonstances et les indications des changements simples de tige fémorale en pratique courante, nous avons revu une série consécutive mono-opérateur sur une période de 7 ans (1999–2006). Cette revue a également permis de préciser les modalités techniques (type de fixation) et les complications de ce type de reprises.


Matériel


Dans une base de données remplie de façon prospective, 191 reprises de prothèses totales de hanche pratiquées par le même opérateur (PM) entre 1999 et 2006 ont été retrouvées. Parmi celles-ci, 78 ont comporté une reprise du composant fémoral avec une tige de première intention (51 femmes et 27 hommes d’âge moyen 62 ans avec des extrêmes de 28 à 88 ans), ce qui représente plus de 40 % des reprises effectuées pendant cette période.

Quatre patients ont été perdus de vue, c’est-à-dire qu’ils n’ont pas été réexaminés dans les 2 ans suivant un dernier examen avec un excellent résultat clinique et radiographique (5 %). Quatre patients sont décédés précocement de causes sans rapport avec la chirurgie effectuée (5 %). Le recul effectif moyen des patients restants était de 35 mois avec des extrêmes de 12 à 108. Dans l’énorme majorité des cas (76), les deux composants ont été changés au cours de la reprise.

Soixante-cinq reprises concernaient des tiges cimentées et treize des tiges sans ciment. Les causes de la reprise étaient paradoxalement un descellement cotyloïdien unipolaire avec tige bien fixée dans 44 cas. Dans les autres cas, il y avait une cause fémorale : descellement bipolaire dans 16 cas, instabilité avec luxation récidivante dans six cas et infection chronique dans 12 cas. On peut donc séparer les indications de reprise de la tige en indications de principe lorsque la tige ne présentait apparemment aucun défaut de fixation, et en indications de nécessité lorsque la tige était soit descellée, soit mal posée participant à l’évidence à une instabilité avec luxations récidivantes. On en rapproche les cas d’infection chronique, où une extraction de tout matériel étranger s’inscrit dans une stratégie d’excision carcinologique des tissus et matériels infectés.

Les reprises dites de principe sont les plus difficiles à expliquer, car elles alourdissent une intervention sans nécessité apparente, puisque la tige initiale était non descellée. Mais la revue des dossiers a montré qu’il y avait en général une raison discutée en préopératoire ou mentionnée sur le compte rendu opératoire qui a poussé l’opérateur à changer également la tige.

Les problèmes d’appariement de tête fémorale et de cône morse ont été rencontrés dans dix cas. Dans quatre cas, il s’agissait d’une conversion d’un couple métal/polyéthylène au couple céramique/céramique chez des patients jeunes repris pour une ostéolyse importante (figure 1). Deux autres tiges étaient monoblocs, avec une bille rayée venue au contact des vis de fixation d’une butée après rupture de la cupule en polyéthylène, excessivement usée. Enfin, quatre tiges, initialement posées par voie antérieure, présentaient un col très large, faisant craindre un effet came et des luxations postopératoires en reprise par voie postérieure (figure 2).








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Figure 1
Exemple de rescellement chez une femme opérée très tôt pour une coxarthrose protrusive enraidissante et douloureuse. Elle a présenté 8 ans plus tard un descellement cotyloïdien dû à un granulome d’usure du polyéthylène (a). Il était donc justifié, à moins de 40 ans, de tenter une conversion au couple céramique/céramique lors de la reprise, ce qui nécessitait un changement de tige (b). On voit le résultat du rescellement 4 ans et demi de recul : image optimale du scellement (c).









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Figure 2
Patiente de 69 ans, reprise pour un descellement cotyloïdien aseptique 20 ans après la prothèse initiale (a). Bien que non descellée, la tige a été reprise en raison du volume du col, faisant craindre un effet came et des luxations postopératoires (b). Avec 6 ans de recul, le scellement de la nouvelle tige, bien que suboptimal, ne s’est pas modifié (c). Un liséré régulier sur le dos de la prothèse évoque un recalage initial. On note la bonne ostéo-intégration apparente des greffes comblant le grand trochanter.


Dans dix cas, la reconstruction cotyloïdienne avec recentrage de la cupule entraînait une inégalité de longueur non maîtrisable par l’utilisation d’une tête modulaire courte, en raison du caractère perché de la tige fémorale.

Dans 12 cas, la décision de reprise de la tige a été prise en peropératoire en raison d’une absence d’antéversion voire d’une rétroversion de la tige fémorale, augmentant le risque de luxations postopératoires chez ces patients repris par voie postérieure. Le critère pour laisser en place la tige initiale était d’obtenir un secteur de 40° de rotation interne à 90° de flexion sans effet came après changement de la cupule et libération des parties molles. De plus, cinq de ces cas avaient en plus du défaut d’antéversion une tige implantée en position haute, avec le risque d’un allongement postopératoire excessif. Il est intéressant de noter que dix de ces tiges avaient été initialement posées par une voie antérieure de Hueter et avaient été stables malgré leur faible antéversion.

Dans 11 cas, la tige avait un dessin très médialisant par rapport au côté sain controlatéral, et était peu antéversée : elle a été changée pour une tige plus latéralisante et antéversée.

Enfin, dans un cas, il y avait une douleur inexpliquée que l’on a attribuée sans grande certitude à un débord de la cupule cotyloïdienne. La tige, posée en varus et «perchée», possiblement responsable d’une partie des douleurs, a également été changée (figure 3).








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Figure 3
Chez ce patient de 46 ans initialement opéré pour une coxarthrose post-traumatique, avec un résultat fonctionnel médiocre, la tige fémorale sans ciment, posée en varus, «perchée» et rétroversée (a) a dû également être changée (b). Une nouvelle tige sans ciment a été posée, lui donnant un résultat satisfaisant avec 4 ans et demi de recul (c).


Toutes les reprises ont été effectuées par voie postérieure associée à une trochantérotomie dans neuf cas, dont trois était des reprises de pseudarthroses du grand trochanter.

Les infections ont été reprises en deux temps dans les 12 cas avec interposition temporaire d’un espaceur cimenté. Dans 11 cas, tout le ciment a pu être enlevé par voie haute sans trochantérotomie et, dans un cas, une fémorotomie a été nécessaire en raison de l’importance du bouchon de ciment. L’implantation secondaire de la tige de première intention a été effectuée sur une fémorotomie consolidée (figure 4).












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Figure 4
Patient de 78 ans dont la prothèse a été reprise pour une infection hématogène à point de départ urinaire. L’implant et le ciment ont été déposés par fémorotomie (a). Une fracture postopératoire du grand trochanter a consolidé spontanément (b). La réimplantation avec reconstruction cotyloïdienne a donné un résultat satisfaisant avec 4 ans et demi de recul (c).


Dans 59 cas, la tige de reprise a été cimentée (53 reprises de tiges cimentées et six reprises de tige sans ciment).

La tige utilisée en reprise a été cimentée dans une gaine de ciment incomplètement enlevée dans 47 cas, où il n’y avait pas de notion d’infection. Alors que la partie proximale de la gaine de ciment a été extraite manuellement aux ciseaux, la partie distale située dans le fût diaphysaire a été élargie et le bouchon a été creusé à l’aide de l’appareil à ultrasons (OSCAR). La prothèse utilisée en reprise était la tige Collégia (Wright Cremascoli Ortho, Créteil, France) dessinée pour un appui métaphysaire avec une épaule latérale, de surface polie et lisse.

Des reconstructions osseuses diaphysaires ont été nécessaires dans trois cas, deux fois avec la technique d’Exeter, et une fois avec une allogreffe structurale endomédullaire encastrée pour reconstruire une ostéolyse de la corticale métaphysaire médiale. De façon routinière, le grand trochanter a été complètement nettoyé des résidus de ciment et a été comblé avec de l’allogreffe morcelée (figure 2).

Les reprises de tige varisée ont été effectuées en s’aidant d’une tige guide vissée dans le bouchon avec une râpe perforée coulissant sur la tige. Un contrôle radiographique peropératoire a été systématiquement effectué pour s’assurer l’absence de fausse route et du positionnement correct du guide.

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Apr 2, 2020 | Posted by in GÉNÉRAL | Comments Off on fémorales des prothèses totales de hanche par tige de première intention

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