3. Classification et facteurs de pronostic
CLASSIFICATIONS ANATOMOCLINIQUES
Il s’agit de classifications cliniques, généralement recueillies lors du stade préthérapeutique de la maladie, et de ce fait souvent relativement imprécises. En particulier, il ne faut pas confondre le N de la classification TNM, correspondant à l’évaluation clinique de la présence d’une adénopathie maligne (30 à 50 % d’erreur…) avec le N fourni par l’anatomopathologie après examen microscopique du curage ganglionnaire (pN) : il s’agit là d’une donnée objective, quantifiable, et en définitive la seule valable pour la décision thérapeutique. La classification pN permet une standardisation optimale des résultats de l’examen des ganglions, permettant une meilleure reproductibilité du pronostic d’une patiente à l’autre.
Le besoin d’une classification précise, dictée par l’existence de conséquences thérapeutiques lourdes s’accommode en effet mal d’une classification purement clinique et descriptive : l’évaluation définitive sera donc un panachage entre les éléments cliniques du TNM et les principaux éléments du pronostic tant morphologiques (pN, grade SBR, index mitotique) que biopathologiques (récepteurs hormonaux, statut HER2, ploïdie, Ki-67, phase S, signature génomique…).
Classification TNM-UICC
Elle recueille cliniquement les informations concernant la taille de la tumeur, les adénopathies satellites, l’existence de métastases (tableau 3.I). Régulièrement mise à jour, elle en est actuellement à sa 6e version. On peut noter comme nouveautés la prise en compte des très petites tumeurs comme sousgroupe de T1, le reclassement de toutes les localisations métastatiques ganglionnaires. L’existence d’une adénopathie sus-claviculaire homolatérale a été sortie de la classification M1 pour rejoindre la classification N3c.
T=Tumeur primitive | |
Tx : aucune information sur la tumeur T0 : tumeur non perceptible cliniquement Tis : idem avec présence de carcinome in situ ou maladie de Paget sans tumeur décelable T1 : tumeur de moins de 20mm, avec la sous-classification suivante : | |
T1mic : micro-invasion <1mm T1a=moins de 5mm T1b=de 5 à 10mm T1c=de 10 à 20mm | |
T2 : tumeur de 20 à 50mm T3 : tumeur de plus de 50mm T4 : quelle que soit la taille, avec : | |
– T4a=extension à la paroi thoracique – T4b=extension à la peau y compris «peau d’orange», ulcération cutanée ou nodules de perméation – T4c=T4a + T4b – T4d=cancer inflammatoire | |
N=Adénopathies régionales | |
Nx : pas d’information sur les adénopathies régionales N0 : pas d’adénopathie perceptible cliniquement N1 : présence d’une ou plusieurs adénopathies axillaires homolatérales | |
N1a=présumée non atteinte N1b=présumée atteinte | |
N2 : adénopathies axillaires homolatérales fixées OU adénopathies mammaires internes homolatérales cliniquement apparentes | |
N2a : adénopathies axillaires homolatérales fixées N2b : adénopathies mammaires internes homolatérales, en l’absence d’adénopathies axillaires cliniquement décelables | |
N3 : adénopathie sous-claviculaire homolatérale OU adénopathie mammaire interne homolatérale cliniquement apparente associée à une adénopathie axillaire homolatérale cliniquement patente OU adénopathie sus-claviculaire homolatérale associée ou non à une adénopathie axillaire ou mammaire interne. | |
N3a : adénopathies sous-claviculaires associées à des adénopathies axillaires homolatérales N3b : adénopathies mammaires internes associées à des adénopathies axillaires homolatérales N3c : adénopathies sus-claviculaires homolatérales | |
M=Métastases | |
Mx : aucune information sur la présence de métastases à distance | |
M0 : absence de métastase à distance | |
M1 : présence d’une métastase à distance |
Classification PEV
La classification PEV renseigne sur le potentiel évolutif de la tumeur : dans la pratique seuls les PEV 2 et PEV 3 sont actuellement utilisés, la notion de croissance rapide à la base de la classification PEV 1 étant par trop subjective (tableau 3.II).
PEV 0 | absence de signe évolutif |
PEV 1 | existence d’une tumeur à temps de croissance rapide |
PEV 2 | signes inflammatoires localisés |
PEV 3 | signes inflammatoires étendus à l’ensemble du sein (mastite carcinomateuse) |
Classification en stades de progression
Elle regroupe les patientes en fonction du TNM. Le stade IIIC est une nouveauté de la version 6 de la classification TNM (tableau 3.III).
Stade 0 | Tis | N0 | M0 | |
Stade I | T1 et T1mic | N0 | M0 | |
Stade II | ||||
IIA | T0 T1 et T1mic T2 | N1 N1 N0 | M0 M0 M0 | |
IIB | T2 T3 | N1 N0 | M0 M0 | |
Stade III | ||||
IIIA | T0 T1 et T1mic T2 T3 | N2 N2 N2 N1, N2 | M0 M0 M0 M0 | |
IIIB | T4 | N0, N1, N2 | M0 | |
IIIC | tous T | N3 | M0 | |
Stade IV | tous T | tous N | M1 |
Il faut noter que la nouvelle classification TNM a modifié certains stades, ce qui peut entraîner une confusion. Par exemple, certaines patientes anciennement classées en stade II doivent maintenant être classées IIIA. La comparaison des résultats lors des essais cliniques devra donc tenir compte de cette actualisation par rapport aux données anciennes.
Classification pN ou classification anatomopathologique des adénopathies
Cette classification a été largement remaniée, prenant maintenant en compte les techniques de ganglion sentinelle, d’immunohistochimie, les micrométastases ainsi que le nombre et la situation des localisations ganglionnaires (tableau 3.IV). Elle n’est toutefois pas employée de façon systématique.
pN=Classification anatomopathologique des adénopathies | |||
pNX=aucune information sur les adénopathies régionales | |||
pN0=pas d’adénopathie régionale métastatique en histologie | |||
pN0 (i-) : immunohistochimie négative | pN0 (i+) : immunohistochimie positive | pN0 (mol-) : biologie moléculaire (PCR) négative | pN0 (mol+) : biologie moléculaire (PCR) positive |
pN1 mi=micro métastases >0,2mm et ≤2mm | |||
pN1=métastases dans 1 à 3 ganglions axillaires et/ou métastases dans les ganglions mammaires internes avec lésions microscopiques détectées par l’analyse du ganglion sentinelle mais non apparentes cliniquement | |||
pN1a=métastases dans 1 à 3 ganglions axillaires | pN1b=métastases dans les ganglions mammaires internes avec lésions microscopiques détectées par l’analyse du ganglion sentinelle et non apparents cliniquement | pN1c=pN1a + pN1b | |
pN2=métastases dans 4 à 9 ganglions axillaires ou métastases cliniquement apparentes dans les ganglions mammaires internes en l’absence d’adénopathie axillaire | |||
pN2a=métastase dans 4 ganglions axillaires dont une au moins >2mm | pN2b=métastases cliniquement décelables dans les ganglions mammaires internes en l’absence d’adénopathie axillaire | ||
pN3=métastases dans au moins 10 ganglions axillaires ou dans les ganglions sus-claviculaires, ou métastases cliniquement apparentes dans les ganglions mammaires internes homolatéraux en association à au moins 1 ganglion axillaire métastatique, ou métastase dans plus de 3 ganglions axillaires avec métastases microscopiques des ganglions mammaires internes cliniquement inapparentes ; ou métastases dans les ganglions sus-claviculaires homolatéraux | |||
pN3a=métastases dans au moins 10 ganglions axillaires dont une au moins >2mm ou métastases dans les ganglions sousclaviculaires | pN3b=métastases cliniquement apparentes dans les ganglions mammaires internes homolatéraux en association à au moins 1 ganglion axillaire métastatique ou métastases dans plus de 3 ganglions axillaires et dans les ganglions mammaires internes avec micrométastases détectées par l’analyse du ganglion sentinelle mais non cliniquement apparentes. | pN3c=métastases dans les ganglions sus-claviculaires homolatéraux. |
FACTEURS PRONOSTIQUES
Pourquoi des facteurs pronostiques?
Toutes les patientes ayant une tumeur de taille semblable n’auront pas une évolution identique : certaines resteront en rémission complète pendant de nombreuses années voire définitivement après leur traitement initial; d’autres rechuteront, développeront des métastases et finiront par mourir de leur tumeur à plus ou moins brève échéance.
Les facteurs pronostiques permettent d’identifier des sous-groupes de patientes dont les risques de rechutes locale ou à distance sont comparables et de leur proposer un traitement adapté.
Le problème est donc d’identifier les patientes chez lesquelles il est possible de prévoir un risque d’évolution défavorable, et de les traiter différemment : c’est le rôle de l’analyse des facteurs pronostiques. S’ils permettent ainsi d’identifier les patientes à haut risque métastatique et/ou de récidive locale, les facteurs pronostiques ne sont pas pour autant (hormis le cas des récepteurs hormonaux et du c-erb B2) des facteurs prédictifs de sensibilité thérapeutique.
Le pronostic est établi à partir de données cliniques anatomopathologiques et biologiques. De nombreux éléments sont recueillis pour déterminer le pronostic mais leur valeur n’est pas homogène. Le recueil du plus d’éléments possibles va permettre de déterminer le traitement, en fonction de l’évaluation du risque métastatique.
L’intérêt des facteurs pronostiques est de définir des populations à risque différent, de comparer leur évolution, et de leur proposer des traitements adaptés. Pour le médecin praticien, la connaissance de ces facteurs pronostiques permet non seulement de définir une stratégie thérapeutique, mais aussi une stratégie de surveillance.
L’approche traditionnelle de l’évaluation pronostique a longtemps reposé sur des éléments descriptifs cliniques et anatomopathologiques dont les plus classiques sont la taille tumorale, le statut ganglionnaire, l’existence ou non de métastase(s) (classification TNM). Si ces paramètres gardent aujourd’hui toute leur importance, des critères histologiques et biologiques ont pris une place décisive pour définir le pronostic de la tumeur. Ces différents «biomarqueurs» ont pour but d’évaluer les potentialités cellulaires invasives, prolifératives et métastatiques de la tumeur, même lorsque celle-ci est diagnostiquée à un stade précoce, ce qui correspond actuellement à la majorité des cas. Au sein de ces facteurs, l’étude du grade de Scarff, Bloom et Richardson (grade histopronostique SBR) et l’étude des récepteurs hormonaux et du statut HER2 représentent actuellement les paramètres les plus connus et les plus reproductibles. Ces paramètres pronostiques peuvent schématiquement être classés en facteurs liés au potentiel de prolifération cellulaire, et ceux liés au potentiel invasif des cellules tumorales (tableau 3.V).
Éléments cliniques et anatomopathologiques du pronostic |
– âge, statut ménopausique – taille de la tumeur et stade tumoral (TNM) – existence de signes inflammatoires – statut ganglionnaire axillaire anatomopathologique – type histologique – grade SBR – index mitotique – récepteurs hormonaux (marqueurs d’hormonodépendance)
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