179 Chutes
Introduction
Une chute est un accident fréquent et grave chez les personnes âgées. Environ 35 à 40 % des adultes de plus de 65 ans vivant à domicile et plus de 50 % de ceux séjournant dans une maison de retraite ou à l’hôpital chuteront chaque année. Les chutes sont associées à une mortalité et une morbidité considérables, ainsi qu’à une admission prématurée en maison de retraite. Parmi ceux qui ont fait une chute, 25 % mourront dans les 6 mois, 60 % auront une mobilité restreinte et 25 % resteront fonctionnellement plus dépendants. En outre, la peur de tomber peut entraîner une baisse d’activité, conduire à l’isolement et accélérer le déclin. Aux états-Unis, les frais médicaux dus aux chutes dépassent annuellement 2 milliards de dollars et comptent pour 6 % de toutes les dépenses médicales pour les personnes âgées de 65 ans et plus.
Étiologie et pathogénie
Les causes des chutes sont multiples et souvent évitables. Il existe des facteurs intrinsèques, comme les affections médicales et les changements normaux liés au vieillissement, ainsi que des facteurs extrinsèques, comme les médicaments ou l’environnement. Ces facteurs peuvent soit prédisposer à la chute ou la précipiter. Dans au moins deux études, on a constaté que des affections comme l’arthrite, les symptômes dépressifs, l’orthostatisme, des troubles de la cognition, de la vue, de l’équilibre, de la marche ou de la force musculaire, ainsi que la consommation d’au moins quatre médicaments sous prescription augmentaient le risque de chute.
Tableau clinique
La moitié seulement des victimes d’une chute sont capables de se relever sans aide, vivant ainsi le syndrome post-chute, qui entraîne un déclin de l’état fonctionnel et peut compliquer les blessures liées aux chutes1.
Diagnostic différentiel
Bien que la chute soit considérée comme un syndrome gériatrique en tant que tel, elle peut également survenir en association avec d’autres diagnostics. Les chutes associées à une perte de conscience devraient conduire à un bilan de syncope (voir le chapitre 38). Elles peuvent également se produire dans le cadre d’une maladie aiguë comme une infection des voies urinaires ou une pneumonie. Un diagnostic de maladie de Parkinson peut parfois être posé après une chute. Il est important de toujours suspecter ces associations, ainsi que le rôle d’autres facteurs susceptibles de favoriser les chutes.
Démarche diagnostique
L’approche clinique de la prévention des chutes est présentée dans la figure 179.1.
Figure 179.1 Approche clinique de la prévention des chutes.
D’après Tinetti M. Clinical practice. Preventing falls in elderly persons. N Engl J Med 2003 ; 348 (1) : 42–9.
Examen physique
En particulier chez les patients qui se présentent avec des symptômes de présyncope ou de syncope associés à la chute, il faut mesurer la pression sanguine orthostatique (figure 179.2) et procéder à des examens cardio vasculaires et neurologiques. En plus de la fréquence et du rythme cardiaques, l’examen cardiovasculaire devrait inclure un massage du sinus carotidien avec prise du pouls. De nombreuses chutes, non accidentelles, peuvent être expliquées par une hypersensibilité du sinus carotidien et justifient le placement d’un pacemaker. L’examinateur doit effectuer ce massage du sinus carotidien dans un environnement contrôlé avec accès au contrôle de la fonction cardiaque et au matériel de réanimation.
La possibilité pour les patients de maintenir leur centre de masse dans leur aire d’appui est indispensable pour enrayer une chute. Les trois principaux sens réceptifs impliqués dans l’équilibre sont les systèmes visuel, proprioceptif et vestibulaire. L’examen neurologique doit se concentrer sur la recherche des troubles de la vision ou des sensations, ainsi que d’une dysfonction vestibulaire ou de la cognition. L’acuité visuelle peut être testée avec une carte Snellen ou simplement en demandant au patient de lire n’importe quel texte disponible dans la salle d’examen. Dans la population âgée, la sensibilité aux vibrations est un marqueur plus sensible à une neuropathie qu’à un trouble de la proprioception. Le test peut être effectué au moyen d’un diapason grave de 128 ou 256 Hz, en demandant au patient quand il perçoit l’arrêt des vibrations. La fonction vestibulaire peut être évaluée par la manœuvre de Dix-Hallpike et l’examen des mouvements oculaires de nystagmus. L’examen neurologique doit également tester la cognition et chercher des changements liés à la maladie de Parkinson, qui se reconnaît à la marche festinante, aux tremblements, à la rigidité musculaire avec le signe de la roue dentée et à la bradykinésie (figure 179.3).
L’examen de l’appareil locomoteur devrait rechercher les anomalies des articulations des membres inférieurs et des dysfonctionnements, comme la limitation de l’amplitude de mouvement en raison d’une arthrose ainsi que la diminution de la force musculaire. Avec l’âge, les muscles squelettiques, dans leur ensemble, s’atrophient, mais leur force peut se maintenir relativement bien.