Cancer du sein

80 Cancer du sein





Étiologie et pathogénie


L’âge est le plus important facteur de risque de cancer du sein non hérité. Les femmes de 65 ans ont un risque plusieurs fois supérieur à celui encouru par celles âgées de 40 ans. À tout âge, des antécédents de cancer mammaire ou ovarien augmentent le risque de cancer du sein ultérieur. Dans une moindre mesure, mais tout de même de manière importante, les antécédents familiaux contribuent au risque ; pour les parents au premier degré, ce risque augmente d’environ 2 à 5 fois ; il est cependant plus élevé pour la forme héréditaire. Ce type de tumeur est responsable de 5 à 10 % de tous les cancers du sein ; il est principalement dû à des mutations du gène BRCA1 ou BRCA2, qui sont transmises selon un mode autosomique dominant. Les porteuses de ces mutations présentent un risque à vie de cancer du sein de 60 à 80 % et un risque accru d’être atteinte avant la ménopause et de manière bilatérale. L’identification des familles prédisposées au cancer héréditaire est cruciale. En effet, des tests génétiques peuvent identifier les porteurs de mutation, et l’on dispose de stratégies efficaces de prévention.


Les facteurs de risque hormonaux sont globalement tous ceux qui augmentent le nombre de cycles menstruels normaux dans une vie, surtout si les cycles surviennent avant une première grossesse menée à terme. Ils comprennent une ménarche précoce, une ménopause tardive et la nulliparité ou la première grossesse à un âge dépassant 30 ans. Plusieurs autres variables ont été associées à un risque de cancer du sein, probablement en augmentant les taux d’hormones. Par exemple, l’obésité, une alimentation riche en matières grasses et l’alcool peuvent entraîner une augmentation des taux sanguins d’estrogènes. Certaines maladies bénignes du sein confèrent un risque accru de cancer mammaire. L’hyperplasie atypique est associée à un risque annuel de 1 % de cancer invasif. Malgré son nom, le carcinome lobulaire in situ n’est pas une lésion néoplasique ou prénéoplasique, mais c’est un marqueur de risque accru de tumeur pouvant survenir dans n’importe quel quadrant des deux seins ; le risque de cancer du sein invasif peut alors approcher 1,5 % par an.



Tableau clinique


Il existe deux formes principales de cancer primaire du sein : invasive et non invasive. Le type non invasif inclut le carcinome canalaire in situ (CCIS), qui est une véritable lésion prénéoplasique dans la mesure où jusqu’à 30 % des cas traités de manière inappropriée récidivent ou évoluent vers un cancer invasif. La plupart des cas de CCIS sont détectés par mammographie ; seuls 10 % sont palpables. La maladie de Paget est une variante rare de CCIS qui peut se manifester seule ou en même temps qu’une tumeur invasive. Elle se manifeste par des lésions eczémateuses du mamelon qui représentent une extension de la composante CCIS du cancer dans les canaux principaux.


Un cancer du sein invasif se présente habituellement comme une masse indolore ou des calcifications détectées par mammographie, une distorsion anatomique ou une densité asymétrique. L’examen clinique ou l’autopalpation peuvent aussi détecter une tumeur par un capitonnage ou une rétraction de la peau ou encore une asymétrie des seins (figure 80.1). Parfois, le cancer du sein sera associé à l’inversion du mamelon ou des écoulements. La suspicion de malignité sera d’autant plus grande si l’écoulement s’avère contenir du sang. Rarement, les cancers du sein entraînent des modifications cutanées inflammatoires. Depuis les dépistages, davantage de cancers du sein sont diagnostiqués à un stade précoce et curable, la tumeur ne s’étendant pas en dehors du sein ou des ganglions lymphatiques locaux. Moins de 10 % des patientes atteintes de cancer du sein se présentent avec des métastases à distance.



La plupart des cancers mammaires invasifs primaires sont des adénocarcinomes canalaires, lobulaires ou mixtes. Moins de 5 % sont purement tubulaires, colloïdes, mucineux ou de type médullaire atypique, qui sont considérés comme ayant un meilleur pronostic. Les oncologues cliniques utilisent plusieurs caractéristiques du patient et de la tumeur afin d’évaluer la probabilité de récidive. À cet effet, le système TNM (tumor, node, metastasis ou tumeur, ganglion, métastase) de l’American Joint Commission on Cancer, même s’il est imparfait, est le plus couramment utilisé. T fait référence à la taille de la tumeur ou à la fixation aux structures locales, le caractère défavorable du pronostic dépendant non seulement de la taille de la tumeur mais aussi de sa fixation. N (nœud ou ganglion lymphatique) concerne les métastases ganglionnaires régionales, l’invasion des ganglions axillaires, mammaires, supra- ou infraclaviculaires étant de pronostic moins favorable. M se réfère aux métastases à distance, qui sont généralement considérées comme incurables. Plusieurs facteurs pronostiques du patient ou de la tumeur ne sont pas compris dans le système TNM. Certaines études suggèrent que les tumeurs de haut grade ont un pronostic plus mauvais. Des recherches récentes ont mis l’accent sur l’hétérogénéité biologique du cancer du sein. Les études du profil d’expression génique par puce à ADN donnent à penser que le cancer du sein représente en fait plusieurs maladies biologiquement distinctes. Bien que ces sous-types de cancer du sein ne puissent être correctement distingués que par la technologie des biopuces qui ne sont pas actuellement disponibles en clinique, ils diffèrent par certains caractères plus facilement identifiables par des tests cliniques qui sont régulièrement appliqués en cas de cancer du sein, à savoir la recherche du récepteur des œstrogènes (RO), des récepteurs de la progestérone (RP) et du récepteur à activité de tyrosine kinase, HER2. La présence du RO ou du RP identifie les sous-types luminaux, qui représentent environ 70 % des cancers du sein et sont considérés comme sensibles aux thérapies endocrines et sont d’un pronostic légèrement meilleur et de récidive plus tardive. Les sous-types à récepteurs hormonaux négatifs, qui constituent environ 30 % des cancers du sein, sont composés à peu près de manière égale des sous-types de type basal et HER2+/RO qui, cliniquement, peuvent être identifiés grossièrement comme négatifs pour les trois marqueurs (type basal) ou négatifs pour le RO et le RP, mais positifs pour HER2 (HER2+/RO). Ces deux sous-types sont généralement très prolifératifs, ont un mauvais pronostic et un risque plus élevé de récidive précoce, bien que le recours à une thérapie ciblée sur HER2 dans le sous-type HER2+/RO modifie l’histoire naturelle de ce sous-type. HER2, le récepteur à activité de tyrosine kinase, est surexprimé à la surface cellulaire non seulement dans le sous-type HER2+/RO mais aussi dans certains cancers luminaux. À l’instar des agents qui ciblent avec succès les tumeurs hormonodépendantes, comme le tamoxifène, les médicaments anti-HER2, par exemple l’anticorps monoclonal trastuzumab, s’avèrent efficaces contre les tumeurs exprimant HER2.


La plupart des patients se présentent avec un cancer du sein à un stade précoce non métastatique, à un moment où un traitement multimodal rapide peut réduire le risque de récidive et de mort. La récurrence du cancer du sein sous forme de maladie métastatique peut survenir à tout moment, mais le risque est plus élevé dans les 5 à 10 premières années après le diagnostic. Il existe de multiples facteurs dépendant des tumeurs et de la patiente qui déterminent la capacité des cellules cancéreuses de quitter le sein, de survivre dans le sang et les vaisseaux lymphatiques, de s’arrêter et gagner un nouveau site, finalement de survivre et de croître dans ce site tout en déclenchant les signes cliniques de maladie métastatique (figure 80.2). Les sites les plus communs de récidive sont locaux (notamment ceux du sein conservé ou la paroi thoracique), les os, les ganglions lymphatiques, les poumons et le foie. Les métastases dans le système nerveux central (SNC), rares avant l’ère de la thérapie systémique agressive, semblent être en augmentation, probablement parce que les médicaments utilisés pour prévenir les rechutes systémiques ne pénètrent pas dans le SNC de manière adéquate. La récidive locale, en particulier dans un sein conservé, est curable par chirurgie et radiothérapie, mais elle est de mauvais pronostic. Le cancer du sein métastatique est considéré comme incurable, mais, chez quelques patientes, la survie peut excéder 10 ans et le pronostic après le diagnostic métastatique continue à s’améliorer.



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May 20, 2017 | Posted by in Uncategorized | Comments Off on Cancer du sein

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