12. Analgésiques ou Antalgiques
LA DOULEUR
Il existe deux grands mécanismes de la douleur auxquels correspondent des stratégies thérapeutiques différentes :
– les douleurs nociceptives ont une cause (lésion tissulaire, inflammation) qui doit être traitée. Si ce traitement n’est pas suffisant on a recours aux antalgiques ;
– les douleurs neuropathiques sont dues à une lésion nerveuse et répondent mal aux antalgiques. Dans certains cas, l’utilisation de placebos (mot latin signifiant « je plairai ») soulage le malade aussi bien que les analgésiques. Un placebo est un produit non médicamenteux améliorant les symptômes présentés par le malade ce qui met en évidence la participation psychologique importante dans certaines maladies.
L’intensité de la douleur est graduée en 3 paliers auxquels correspondent des traitements différents :
– palier 1 pour les douleurs faibles : antalgiques non morphiniques (AINS, paracétamol…) ;
– palier 2 pour les douleurs modérées : antalgiques opioïdes faibles (Propofan, Di-Antalvic…) ;
– palier 3 pour les douleurs intenses : les antalgiques opioïdes forts (morphine, Temgésic…).
ANALGÉSIQUES MORPHINIQUES
L’opium et ses préparations
Les propriétés analgésiques de l’opium et de ses préparations sont utilisées en thérapeutique depuis fort longtemps contre les douleurs insupportables, mais son usage conduit rapidement le sujet à l’opiomanie avec l’état de besoin caractéristique car c’est un stupéfiant.
Les préparations à base d’opium (qui ne doivent pas être administrées aux jeunes enfants, aux femmes enceintes et aux personnes âgées) sont :
– le laudanum de Sydenham (stupéfiant), ou teinture d’opium safranée qui renferme 1 % de morphine ;
– l’élixir parégorique, ou teinture d’opium benzoïque, un médicament antidiarrhétique et calmant des douleurs abdominales (liste I) ;
– la teinture d’opium (stupéfiant) qui sert à préparer les sirops d’opium utilisés comme antitussifs (liste I).
La morphine (Morphine, Moscontin, Skenan, Kapanol)
La morphine est l’antalgique de référence. C’est le principal alcaloïde de l’opium qui tire son nom de Morphée, mère des songes. Elle possède de nombreuses actions :
• Sur le système nerveux central, l’action antalgique est la principale propriété recherchée en thérapeutique dans les douleurs sourdes (contusions, fractures), les douleurs viscérales (coliques hépatiques ou néphrétiques) et les douleurs aiguës. Elle a également une action hypnotique surtout à doses élevées ; elle est un puissant sédatif de la toux.
• Sur la respiration, le principal risque de la morphine est son action dépressive sur la respiration, même à faible dose. À dose toxique, elle entraîne un arrêt respiratoire.
• Sur le tube digestif, elle ralentit le péristaltisme intestinal et les sécrétions digestives d’où résulte la constipation quasi constante. On l’utilise pour cette raison, per os, dans les diarrhées incoercibles.
• Sur les muscles lisses, on associe morphine et atropine dans le traitement de la crise de colique néphrétique.
Elle est contre-indiquée dans l’asthme car elle provoque une bronchoconstriction.
• Toxicomanie ou pharmacodépendance. La morphine est un stupéfiant qui conduit à une toxicomanie avec dépendance psychique et physique :
– le morphinomane demande des doses de plus en plus fortes, alors que ces mêmes doses provoqueraient des troubles chez un sujet normal (accoutumance) ;
– le sujet a un besoin impérieux de son toxique : c’est la dépendance psychique.
La pharmacodépendance est expliquée par l’existence de morphines endogènes (synthétisées par l’organisme), les endorphines et les enképhalines, qui se fixent sur la membrane cellulaire (diencéphale et fibre lisse intestinale) au niveau des récepteurs morphiniques et qui sont déplacées par la morphine lors de son administration. La crise d’abstinence (sevrage) serait alors due à un manque d’endorphine au niveau des récepteurs. Le traitement d’une morphinomanie se fait par sevrage progressif.
Il est fondamental de souligner qu’il n’y a pas de pharmacodépendance chez le patient souffrant d’une douleur forte traitée par la morphine.
Lors d’une intoxication aiguë à la morphine, le traitement du coma comporte l’oxygénothérapie et l’administration d’un antidote, la naloxone (Nalone, Narcan), qui supprime tous les effets de la morphine.
• Indications.La voie orale a un long délai d’action (1 heure environ). La voie sublinguale est intéressante si le patient ne peut plus avaler (pic plasmatique en 3 minutes). La voie sous-cutanée n’est utilisable que si les 2 voies d’administration précédentes ne sont pas possibles. La voie intraveineuse, la plus rapide, est le moyen d’utilisation de référence. Deux formes galéniques sont utilisées : la solution de chlorhydrate de morphine d’action immédiate (injection ou voie orale) et le sulfate de morphine à libération prolongée pris par voie orale (Moscontin, Skenan). L’effet de 1cg de morphine atteint son maximum en 7 minutes par voie intraveineuse, 30 minutes par voie intramusculaire, 90 minutes par voie sous-cutanée. Cet effet dure 4 à 5 heures. C’est un stupéfiant dont la prescription est réglementée (ordonnance sécurisée).
La morphine à libération prolongée (Moscontin, Skenan) est utilisée aux doses de 30mg toutes les 12 heures, per os. La dose maximale autorisée est 180mg/jour. On administre la morphine dans :