9: Implant intraoculaire ajustable par la lumière

CHAPITRE 9 Implant intraoculaire ajustable par la lumière



Le développement des capacités réfractives des implants posés lors de la chirurgie de la cataracte vise à corriger le plus efficacement possible l’amétropie en vision de loin et à compenser la presbytie, de façon à ce que l’acuité non corrigée soit la plus proche possible de l’acuité corrigée, en visions de loin, de près et intermédiaire, et que la qualité de vision subjective soit aussi satisfaisante que possible. Ces résultats réfractifs se sont améliorés depuis quelques années grâce aux progrès observés dans la prédiction de la puissance de l’implant oculaire, dans les designs optiques des implants (asphérique, multifocaux, toriques, accommodatifs) et leurs combinaisons, dans la mise en œuvre chirurgicale des implants; ils demeurent toutefois insuffisamment prédictibles, notamment lorsqu’on les compare à ceux de la chirurgie réfractive au laser à excimères.


L’implant ajustable par la lumière LAL® (Light-Adjustable Lens) de Calhoun Vision apporte une solution originale et particulièrement efficace en chirurgie réfractive de la cataracte, notamment dans le cas des biométries difficiles et dans le cadre la compensation chirurgicale de la presbytie.


Il existe actuellement quatre solutions pour compenser la presbytie avec l’implant ajustable par la lumière : la monovision ajustable, l’emmétropisation effective des cornées multifocales, la modulation de l’asphéricité, l’addition centrale « customisée » (CNA).



Limites actuelles de la chirurgie réfractive de la cataracte


Les études récentes montrent que la précision actuelle de la chirurgie réfractive de la cataracte classique est encore limitée. Une petite imprécision biométrique ou un astigmatisme résiduel visuellement significatif, liés à la variabilité de la prédictibilité biométrique, au positionnement effectif de l’implant intraoculaire in vivo ou à la relaxation variable des incisions, nécessitent souvent le port d’une correction complémentaire, occasionnelle ou permanente. L’imprécision de la chirurgie réfractive classique de la cataracte demeure significative, avec seulement 40 % à 60 % des yeux à ± 0,50 D de l’objectif en sphère et en cylindre, contre 80 % à 95 % avec les lasers à excimères les plus récents.


Les causes principales de cette imprécision résiduelle sont principalement liées aux limites de la biométrie prédictive, notamment en cas d’irrégularité, d’asphéricité de la face antérieure ou de modification acquise de la face postérieure de la cornée, de difficulté de la mesure de la longueur axiale. Il est par ailleurs impossible de prédire avec exactitude la position axiale de l’implant une fois en place dans le sac capsulaire (profondeur de la chambre antérieure postopératoire), ce qui entraîne des variations individuelles de la constante A. De plus, les formules de calcul empiriques sont inadaptées pour certaines formes anatomiques et pour les longueurs axiales extrêmes. Enfin, l’alignement axial des méthodes de correction de l’astigmatisme (LRI, implant torique) est souvent imparfait. Ces difficultés sont parfois cumulées en cas d’antécédents de chirurgie réfractive.


Les conséquences fonctionnelles de ces imprécisions sont d’autant plus significatives qu’un système multifocal est utilisé pour la compensation de la presbytie. En effet, l’efficacité visuelle de ces systèmes est fortement corrélée à l’obtention d’une emmétropie axiale et cylindrique. Par ailleurs, tous les modèles ne disposent pas encore d’une correction torique intégrée et la chirurgie incisionnelle relaxante, utilisée dans ce cas lors de cylindre kératomé-trique préopératoire, n’est pas aussi prédictible.


Les solutions classiques à l’erreur réfractive résiduelle ne sont pas totalement précises et peuvent être risquées:



L’échec relatif de la procédure de « chirurgie réfractive de la cataracte » initiale est de ce fait souvent mal vécu par les patients, notamment lorsque le chirurgien a imprudemment promis l’indépendance vis-à-vis des lunettes et qu’il hésite à mettre en œuvre les techniques complémentaires requises.


Il apparaît donc tentant de disposer d’une technologie permettant de compenser l’erreur résiduelle de façon simple a posteriori et, ainsi, de « jouer au tiercé après le résultat de la course » (Laurent Gauthier-Fournet, Saint-Jean-de-Luz).



Implant ajustable par la lumière LAL®


L’implant ajustable par la lumière LAL® (Light-Adjustable Lens, Calhoun Vision, distribué en France par la société EBC puis par la société Ophta-France) est un implant en matériau silicone photosensible, dont la puissance réfractive, sphérique et cylindrique, ainsi que l’asphéricité peuvent être ajustées de façon non invasive, en postopératoire après implantation intraoculaire, avant d’être « verrouillées » définitivement par irradiation UV externe. Robert Grubbs, cofondateur de Calhoun Vision avec Daniel Schwartz et inventeur de ce matériau original développé initialement à l’université Caltech, a reçu en 2005 le prix Nobel de chimie pour ses travaux sur la métathèse (réactions de substitutions atomiques au cours des processus de synthèse organique permettant de conférer à certains polymères des propriétés pharmacologiques, physiques, géométriques ou électriques spécifiques).



IMPLANT LAL®


L’implant LAL® est un implant silicone de design classique à trois pièces pliable par 3,2 mm ou injectable par 2,8 mm, dont le matériau biocompatible non toxique est composé de trois éléments : une matrice polymère comportant un agent bloquant les UV lié de façon covalente, des molécules macromères comportant des extrémités polymérisables, des agents de photo-initiation. L’implant comporte une couche postérieure dont la densité en agent UV-bloquant permet d’absorber la totalité des UV entrant par la face antérieure, afin d’éviter tout risque phototoxique d’exposition UV du segment postérieur. Lors des séances d’ajustement, l’irradiation UV sectorielle de l’implant, appliquée de façon non invasive par voie externe transpupillaire, induit une polymérisation des macromères libres au sein de la matrice polymère de l’optique de l’implant (fig. 9-1). Cette polymérisation régionale sélective « déplace » les macromères libres vers la région exposée au rayonnement UV et s’accompagne en quelques heures à quelques jours d’une modification de la géométrie de l’optique. Plusieurs ajustements successifs sont possibles, jusqu’à un mois après l’intervention. Lorsque le résultat souhaité est obtenu, une exposition UV de la totalité de l’implant est réalisée, ce qui polymérise l’ensemble des macromères résiduels disponibles et « gèle » définitivement la forme finale de l’optique de l’implant. Les capacités d’ajustement de cet implant (± 2 D en une à quatre sessions successives) ainsi que la possibilité de moduler l’asphéricité pour augmenter la profondeur de champ et compenser la presbytie « à la demande » apportent une solution élégante et originale dans la démarche actuelle de chirurgie réfractive de la cataracte [10, 15].




DISPOSITIF D’IRRADIATION UV CONTRÔLÉE


Le dispositif de délivrance de la lumière (Light Delivery Device, LDD) utilisé pour ajuster la puissance réfractive de l’implant est compact (encombrement d’une lampe à fente) et se programme à l’aide d’un logiciel assez simple (fig. 9-2c). L’élément principal du LDD est un système de micromiroirs (correspondant à plus de 700 000 miroirs individuels, Texas Instruments) permettant d’appliquer par rotation digitale une infinité de profils d’irradiance spatiale. Ceci permet de modifier à volonté la géométrie finale de l’optique du LAL® (fig. 9-2d) : par exemple, pour augmenter la puissance dioptrique de l’implant, l’irradiation sera appliquée sur la zone centrale (fig. 9-3). Le contrôle de l’intensité de l’exposition, du profil spatial du faisceau, de la durée d’irradiation et de la géométrie de la zone où celle-ci est appliquée permet de moduler l’ajustement réfractif de l’implant avec beaucoup de précision.




L’absence de phototoxicité endoculaire (endothélium, rétine) a été démontrée [17].



PROCÉDURE CHIRURGICALE ET PROTOCOLE D’AJUSTEMENT


L’intervention chirurgicale d’implantation ne présente aucune particularité comparée à une implantation monofocale conventionnelle. L’implant est un modèle classique d’optique 6 mm silicone à anses rapportées en PMMA, qui doit être inséré après pliage par une pince spéciale (pinces de Nichamin II et III) par une incision de 3,2 mm ou par injection avec une cartouche spéciale par une incision de 2,8 à 3,0 mm image (vidéo 9-1). Le déploiement de l’implant est assez rapide comme avec toutes les optiques silicones conventionnelles, mais sans surprise car la pince permet un bon contrôle. Une fois implanté, l’implant se centre parfaitement (fig. 9-2b). En postopératoire, le patient doit porter une protection anti-UV efficace stricte (lunettes pour l’intérieur et lunettes pour l’extérieur fournies avec l’implant) jusqu’à finalisation optique (session de « lock-in »), en permanence (sauf pendant le sommeil). Il lui est conseillé de fermer les yeux lors du changement de lunettes anti-UV. Les ajustements éventuels du LAL® sont réalisés deux à quatre semaines après l’intervention, à vingt-quatre heures d’intervalles en deux à quatre séances, à la lampe à fente avec le LDD au travers d’un verre de contact similaire au V3M. Les modifications réfractives ne sont pas immédiates (environ vingt-quatre heures). La finalisation optique du LAL®lock-in ») est effectuée deux à sept jours après le dernier ajustement. Il est plus facile de corriger une hypermétropie résiduelle qu’une myopie résiduelle (plus de macromères disponibles au centre de l’implant qu’en périphérie).

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Jun 6, 2017 | Posted by in GÉNÉRAL | Comments Off on 9: Implant intraoculaire ajustable par la lumière

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