8: Mouvements du rachis lombal

Chapitre 8


Mouvements du rachis lombal



Les principaux mouvements du rachis lombal et de ses articulations individuelles sont la compression axiale, la distraction axiale, la flexion, l’extension, la rotation axiale et la latéroflexion. La translation horizontale n’est pas un mouvement isolé pur, mais il est associé à la rotation axiale.



COMPRESSION AXIALE


La compression axiale est un mouvement se produisant debout en charge ou à la suite de la contraction des muscles longitudinaux du rachis (voir chapitre 9). En ce qui concerne les articulations intersomatiques, les mécanismes des disques intervertébraux en charge ont déjà été décrits au chapitre 2 où il est expliqué que le nucléus pulposus et l’anulus fibrosus participent à la transmission de la charge d’une vertèbre à l’autre. Il est maintenant opportun d’ajouter davantage de détails.


Lors de la compression axiale, l’anulus fibrosus et le nucléus pulposus supportent la charge et la transmettent aux plateaux vertébraux (voir chapitre 2). Dans un disque normal, les fibres extérieures de l’anulus ne participent pas au port de la charge. Par ailleurs, la charge compressive est supportée uniformément par la partie intérieure de l’anulus et du nucléus, avec une contrainte maximale à l’intérieur de la partie postérieure de l’anulus [14] (figure 8.1). Cette contrainte maximale sur la partie postérieure est plus importante sur les disques plus âgés [3,4].



La compression expulse l’eau du disque [57]. Sous une charge de 100 kPa, le nucléus perd 8 % de son eau et l’anulus 11 % [810]. La perte d’eau entraîne une relative augmentation des électrolytes restant dans le disque, et l’augmentation de cette concentration sert à réhydrater le disque une fois la pression relâchée [9].


Les corps vertébraux du disque se rapprochent sous l’effet de la compression, car les plateaux vertébraux fléchissent sous les disques [6,8,11] et ces derniers gonflent radialement [1113]. En effet, le fléchissement de chaque plateau vertébral est à peu près équivalent à la moitié du déplacement des vertèbres [12], ce qui correspond à une contrainte d’environ 3 % sur le plateau vertébral [12]. Le disque gonfle, car lorsque la taille de l’anulus diminue en périphérie, la portion en excès doit s’adapter d’une manière ou d’une autre en déformant les lamelles de l’anulus. La pression nucléaire prévient normalement le plissement vers l’intérieur, laissant le bombement radial externe comme seul moyen d’adaptation à la perte de hauteur discale. Le bombement est plus important antérieurement que dans l’angle postérolatéral du disque et provoque une contrainte dans l’anulus fibrosus d’à peu près 2 % par mm de hauteur discale perdue [14]. La suppression d’une partie du nucléus (comme lors d’une discectomie) augmente à la fois la perte de hauteur discale et le bombement radial [15].


La charge sur le plateau vertébral lors de la compression est répartie de façon homogène sur sa surface. La charge n’est pas plus importante au-dessus du nucléus pulposus qu’au-dessus de l’anulus fibrosus [16]. Le plateau vertébral fléchit toutefois, car sa périphérie est fortement soutenue par l’os cortical de la vertèbre sous-jacente, alors que sa partie centrale est soutenue par l’os trabéculaire du corps vertébral, légèrement plus fragile. Le soutien trabéculaire est crucial pour l’intégrité du plateau vertébral.


Les plateaux vertébraux et les trabécules sous-jacentes se fracturent lorsque des charges excessives sont appliquées sur des disques intervertébraux normaux, particulièrement dans leur partie centrale, habituellement au-dessus du nucléus plutôt qu’au-dessus de l’anulus [5,1720]. Le plateau vertébral peut se fracturer complètement lors de l’application de charges très importantes [1921].


Dans ce contexte, il convient de noter que les plateaux vertébraux représentent la composante la plus fragile du disque intervertébral face à la compression axiale. L’augmentation de la charge crée une rupture d’un ou de plusieurs plateaux vertébraux qui se fracturent avant la rupture de l’anulus fibrosus, à condition que le disque soit sain et en bon état [5,19,20]. Ce phénomène a des relations précises avec la pathologie lésionnelle par compression du rachis lombal et avec la dégénérescence discale (voir chapitre 15). Il est fondé sur la relative résistance de l’anulus fibrosus et de la partie osseuse du corps vertébral. Des calculs ont montré que l’anulus fibrosus peut supporter une pression de 3,2 × 107 N m−2, mais que l’os spongieux cède à 3,4 × 106 N m−2 [8]. Par conséquent, on devrait s’attendre à ce que les plateaux vertébraux cèdent plus tôt que l’anulus fibrosus lorsque le disque est soumis à une compression axiale.


En ce qui concerne les corps vertébraux chez les adultes de moins de 40 ans, 25 à 55 % de la charge appliquée sur le corps vertébral est supportée par l’os trabéculaire [11,22,23]. Le reste est supporté par la coquille corticale. Ce rapport se modifie chez les personnes plus âgées pour des raisons expliquées au chapitre 13. La résistance du corps vertébral est globalement très grande, mais elle varie considérablement d’un individu à l’autre. La résistance compressive maximale d’un corps vertébral se situe entre 3 et 12 kN [24,25]. Cette résistance est directement liée à la densité osseuse [24,26,27], et peut être pronostiquée à moins de 1 kN, à partir de la densité osseuse et de la surface du plateau vertébral déterminée par tomodensitométrie [28]. En outre, elle semble inversement associée à l’activité physique, car les individus actifs ont des vertèbres plus solides [29].


Le sang à l’intérieur des espaces médullaires et des veines intraosseuses est un autre facteur qui augmente la capacité de charge du corps vertébral (voir chapitre 11). La compression du corps vertébral et le bombement des plateaux vertébraux entraînent un rejet du sang de la vertèbre [6]. Ce processus amortit dans une certaine mesure le corps vertébral contre les charges compressives qui lui sont appliquées, car il requiert de l’énergie [20].


Lors de la compression, les disques intervertébraux subissent une période initiale de fluage rapide en se déformant d’environ 1,5 mm durant les premières 2 à 10 minutes, selon l’importance de la charge appliquée [3032]. Par la suite, un fluage apparent mais plus lent se poursuit à la vitesse d’environ 1 mm à l’heure [32]. Selon l’âge, un plateau est atteint après environ 90 minutes au-delà desquelles plus aucun fluage ne se produit [31].


Le fluage est à l’origine de la variation de taille subie par les individus durant les activités de la vie quotidienne. La pression subie par les disques intervertébraux pendant une journée de 16 heures en marchant et en position assise crée une déshydratation du disque entraînant une perte de la hauteur discale de 10 % [10] et une perte de volume discal de 16 % [33]. Étant donné que le disque intervertébral représente un peu moins du quart de la hauteur de la colonne vertébrale, la perte de 10 % de liquide entraîne une diminution de la taille des individus à la fin de la journée de 1 à 2 % [3436]. Cette taille est restaurée pendant la nuit ou lors du repos en position allongée, lorsque la colonne vertébrale n’est pas comprimée axialement et que les disques sont réhydratés par la pression osmotique des protéoglycanes discaux [10]. En outre, il a été démontré que le repos en décubitus dorsal avec les extrémités inférieures fléchies et surélevées entraîne une récupération plus rapide et complète de la taille du disque que le repos en décubitus dorsal étendu [36].


La pression intradiscale peut être mesurée en utilisant des aiguilles spéciales [3739], et la mesure de la pression discale, ou discométrie, apporte un indice sur les contraintes appliquées à un disque dans différents postures et mouvements. Plusieurs études ont abordé ce problème bien que, pour des raisons techniques, elles aient pratiquement toutes uniquement porté sur le disque L3–L4.


En position debout, la charge sur le disque est d’environ 70 kPa [38]. Le port d’une charge de 5 kg dans cette position augmente la pression discale d’environ 700 kPa [38,40]. Le changement de pression discale lors des autres mouvements et manœuvres est décrit au chapitre 9.


Bien que les articulations intersomatiques soient conçues pour être les composantes principales du port de charge du rachis lombal (chapitre 2), l’intérêt s’est porté sur le rôle des articulations zygapophysaires en charge. Les études les plus anciennes apportent à ce sujet des estimations indirectes de la charge supportée par les articulations zygapophysaires à partir de la mesure de la pression intradiscale. Il a été décrit que les articulations zygapophysaires supportent approximativement 20 % de la charge verticale appliquée sur une articulation intervertébrale [37]. Cette conclusion a toutefois été ensuite réfutée [41].


Les études ultérieures ont décrit successivement des articulations zygapophysaires pouvant supporter 28 [42] ou 40 % [43] d’une charge appliquée verticalement. D’autres ont au contraire indiqué que « la compression ne créait pas de charge importante sur les articulations facettaires » [44], et qu’« étant donné que le rachis lombal est légèrement redressé […] toute la force compressive intervertébrale est supportée par le disque » [45].


Les raisons de ces conclusions différentes sont liées aux techniques expérimentales utilisées et à une compréhension différente de l’anatomie des articulations zygapophysaires et de leur comportement lors de la compression axiale.


Les surfaces articulaires des articulations zygapophysaires lombales sont rectilignes de haut en bas dans les plans frontal et sagittal (voir chapitre 11), bien qu’elles soient incurvées dans le plan transverse (voir chapitre 3). Les articulations zygapophysaires ne peuvent donc pas supporter des charges appliquées verticalement en position neutre. Leurs surfaces articulaires se déplacent parallèlement l’une à l’autre et parallèlement à la direction de la charge appliquée. Elles glisseront simplement l’une sur l’autre si les articulations intervertébrales sont compressées axialement. Des anomalies dans l’orientation des articulations zygapophysaires doivent être présentes pour que celles-ci participent à la charge en position debout. Un des deux mécanismes peut opérer seul ou en combinaison pour recruter les articulations zygapophysaires en charge.


Les pointes des processus articulaires inférieurs de la vertèbre seront dirigées vers les facettes articulaires de la vertèbre du dessous, si celle-ci s’incline vers l’arrière de leur disque intervertébral sans pouvoir glisser postérieurement (figure 8.2). La compression axiale de l’articulation intervertébrale entraînera la transmission d’une partie de la charge sur la partie engrenée des articulations zygapophysaires. En inclinant une paire de vertèbres lombales, on peut facilement en conclure par observation que le site d’engrenage entre les deux vertèbres tombe sur la portion inféro-interne des facettes. Des expérimentations méthodiques ont montré qu’il s’agissait de l’endroit où la pression était maximale dans les articulations zygapophysaires chargées en extension [46].



Un autre mécanisme ne concerne pas les surfaces des articulations zygapophysaires mais plutôt les pointes des processus articulaires inférieurs. Lors d’une compression axiale importante et prolongée, les disques intervertébraux peuvent être comprimés à un point tel que les processus articulaires inférieurs de la vertèbre du dessus s’affaissent jusqu’à l’impaction de leurs pointes avec les lames de la vertèbre du dessous [47] (figure 8.3). Par ailleurs, le même contact peut se produire si une articulation intervertébrale est compressée axialement en étant en même temps inclinée vers l’arrière, comme c’est le cas sur un rachis lombal lordotique en charge [4649]. Les charges axiales peuvent ensuite être transmises aux lames par l’intermédiaire des processus articulaires inférieurs.



Il a été démontré que les articulations zygapophysaires ne sont pas en contact et ne supportent aucune charge verticale provenant de l’articulation intervertébrale dans la position assise droite. En revanche, lors d’une position debout prolongée avec un rachis lordotique, les articulations en contact à chaque niveau segmentaire supportent en moyenne 16 % de la charge axiale [45,48]. À cet égard, les articulations inférieures (L3–L4, L4–L5, L5–S1) en supportent une partie relativement plus grande (19 %), alors que les articulations supérieures (L1–L2, L2–L3) en supportent moins de 11 % [48]. D’autres études ont montré que la charge réelle supportée par le contact des processus articulaires varie de 3 à 18 % de la charge appliquée et dépend précisément de l’inclinaison de l’articulation intervertébrale [49]. On a estimé que la diminution pathologique de l’espace discal peut faire supporter 70 % de la charge axiale par les processus articulaires inférieurs et les lames [45].


Il est donc évident que la mise en charge se fait par l’intermédiaire des articulations zygapophysaires, à condition que les processus articulaires inférieurs soient en contact avec les facettes articulaires supérieures ou avec les lames de la vertèbre inférieure. Les variations de niveau de ces contacts expliquent les variations des estimations de la charge axiale supportée par les articulations zygapophysaires [49]. Elles expliquent les estimations les plus hautes décrites dans les études dans lesquelles les articulations intervertébrales ont été chargées en extension [42,43,5052].


D’autres composantes du rachis lombal participent aussi à la compression axiale, même si l’explication précédente souligne le rôle des disques et des articulations zygapophysaires en charge. La forme lordotique du rachis lombal permet au ligament longitudinal antérieur et aux parties antérieures de l’anulus fibrosus d’être associés au port de charge. Les éléments postérieurs des disques intervertébraux et les articulations zygapophysaires sont comprimés à cause de la courbe lordotique, alors que les ligaments antérieurs sont tendus. Une charge axiale sur un rachis lordotique tend à accentuer la lordose et donc à augmenter la contrainte sur les ligaments antérieurs. En augmentant leur tension, les ligaments antérieurs peuvent résister à cette augmentation et partager la charge.


La lordose du rachis lombal apporte ainsi un mécanisme de charge axiale s’ajoutant à ceux des disques intervertébraux et des articulations zygapophysaires. En outre, comme il est décrit dans le chapitre 5, le mécanisme élastique des ligaments antérieurs apporte une élasticité au rachis lombal. L’énergie délivrée aux ligaments est conservée sous forme de tension. Elle peut être utilisée pour restaurer la courbure du rachis lombal dans son état originel une fois la charge axiale retirée.



Rupture de fatigue


Des compressions répétées sur une articulation intersomatique entraînent des fractures des trabécules sous-chondraux et de l’un des plateaux vertébraux. Ces dommages se produisent avec des charges considérablement inférieures à la force compressive maximale de ces structures, et bien en deçà des variations de forces et répétitions rencontrées dans les activités de la vie courante, lors du travail et des activités sportives.


Des charges appliquées à 0,5 Hz, comprises entre 37 et 80 % de la force de compression maximale, peuvent entraîner des fractures sous-chondrales après seulement 1000 ou 2000 cycles [53]. Des charges entre 50 et 80 % de contrainte maximale peuvent entraîner des fractures sous-chondrales ou vertébrales après moins de 1000 cycles [26].


La probabilité de rupture est fonction de la charge appliquée et du nombre de répétitions. Les charges inférieures à 30 % de la contrainte maximale ont peu chance de développer une rupture, même après 5000 répétitions. L’augmentation de la charge augmente la probabilité de rupture avec moins de répétitions [24]. La probabilité de rupture après 100 cycles est de 39 % avec des charges comprises entre 50 et 60 % de contrainte maximale, et passe à 63 % avec des charges comprises entre 60 et 70 % de contrainte maximale [24]. Les lésions induites varient des fractures trabéculaires sous-chondrales aux empreintes sur le plateau et aux fractures corticales du corps vertébral [24]. Les répétitions de 100 à 1000 entrent dans les limites des variations rencontrées lors de multiples activités professionnelles, de même que les charges à 60 % de la contrainte maximale d’un corps vertébral moyen [24].


Les fractures du plateau entraînent une perte de hauteur discale [17] et des modifications dans la distribution des contraintes nucléaire et annulaire. La contrainte sur le nucléus et sur la partie antérieure de l’anulus diminue, alors que celle sur la partie postérieure de l’anulus augmente [1,11]. Cette augmentation de contrainte entraîne l’effondrement des lamelles de l’anulus vers l’intérieur en désorganisant l’architecture discale interne [11]. Par conséquent, même une petite lésion peut compromettre considérablement les biomécanismes normaux d’un disque. La signification clinique de ces phénomènes est davantage explorée dans le chapitre 15.



DISTRACTION AXIALE


Comparativement à la compression axiale et aux autres mouvements, la distraction axiale a été beaucoup moins étudiée. Une étude a présenté des données sur les caractéristiques de la contrainte–déformation et sur la rigidité des disques intervertébraux dans leur ensemble. Elle a révélé que les disques n’ont pas la même rigidité en distraction qu’en compression [51]. Cela peut se comprendre car les disques sont conçus principalement pour le port de charges et sont supposés résister davantage à la compression qu’à la tension. Biologiquement, cela correspond au fait que les êtres humains passent beaucoup plus de temps à supporter des charges compressives lors de la marche, en position debout ou assise, qu’à supporter des charges en tension, comme cela se produit chez les brachiateurs (animaux grimpant dans les arbres).


D’autres études se sont concentrées sur les composantes individuelles des disques intervertébraux pour déterminer leurs propriétés élastiques. Lorsqu’elles sont étirées dans le sens de la longueur, les fibres isolées de l’anulus fibrosus présentent une « phase initiale » comprise entre 0 et 3 % de contrainte, une rupture de fatigue comprise entre 4 et 10 Mpa, et une déformation de rupture comprise entre 9 et 15 %. Leur rigidité à l’étirement varie entre 59 et 140 Mpa [54]. Si l’anulus est testé alors qu’il est encore attaché à l’os et subit une distraction dans l’axe longitudinal de la colonne vertébrale contraire au sens des fibres, la rupture de fatigue se maintient entre 4 et 10 Mpa, mais la rigidité chute entre 10 et 80 Mpa [55]. Ces propriétés élastiques varient selon leur localisation, mais les résultats des études sont contradictoires. Les fibres isolées semblent être plus rigides et plus solides dans la région antérieure que dans la région postérolatérale du disque, et plus rigides dans les régions discales externes que dans les régions internes [1]. Par ailleurs, sur les spécimens intacts, la partie externe de la région discale antérieure est plus fragile et moins rigide que celle de la région discale postérieure [55].


Les capsules des articulations zygapophysaires sont extrêmement solides lorsqu’elles sont soumises à une tension longitudinale. Une seule capsule peut supporter 600 N avant de rompre [56]. Analogiquement, cela signifie qu’une paire de capsules soumise à une distraction axiale peut supporter sur un niveau deux fois le poids du corps.


Cependant, l’importance de ces résultats ne repose pas tant sur la capacité de résistance des composantes du rachis lombal à la distraction axiale, que sur leur capacité de résistance à d’autres mouvements les mettant sous contrainte. L’anulus fibrosus sera étiré par la rotation sagittale antérieure et la rotation axiale, et la capsule des articulations zygapophysaires par la rotation sagittale. Ces mouvements seront étudiés ultérieurement.


Une étude [57] a décrit le comportement d’ensemble du rachis lombal (cadavérique) lors d’une distraction axiale prolongée, en imitant la traction utilisée en pratique clinique. L’application d’une charge de 9 kg étirant le rachis lombal entraîne un allongement initial de 7,5 mm en moyenne. L’allongement est plus important (9 mm) sur les rachis lombaux de sujets jeunes, et moindre chez les personnes d’âge moyen (5,5 mm) et les personnes âgées (7,5 mm). Une traction prolongée pendant plus de 30 minutes entraîne un fluage supplémentaire de 1,5 mm. Le retrait de la charge fait apparaître un « ajustement » immédiat de 2,5 mm, qui diminue de seulement 0,5 mm par demi-heure après le retrait de la charge. Les rachis plus jeunes présentent un fluage plus rapide sans « ajustement » résiduel. L’amplitude de la distraction est plus grande sur les disques sains (11 à 12 mm), et considérablement moindre (3 à 5 mm) parmi les rachis dont les disques sont dégénérés.


Environ 40 % de l’allongement du rachis lombal lors de la traction se produisent à la suite de la diminution de la lordose lombale, et 60 % sont dus à la réelle séparation des corps vertébraux. La conséquence principale de cette observation est que l’amplitude de la distraction obtenue par traction (en utilisant une charge de 9 kg) n’est pas grande. Elle s’élève à 60 % des 7,5 mm de réelle séparation vertébrale, soit l’équivalent d’environ 0,9 mm par articulation intervertébrale. Cette publication affaiblit sérieusement les théories soutenant que la traction lombale exerce un effet bénéfique en « réaspirant » les hernies discales. D’autres mécanismes sur l’effet thérapeutique présumé de la traction doivent être considérés [57].


L’autre conséquence de cette étude se rapporte au fait que l’« ajustement » résiduel après une traction prolongée est assez faible (0,5 mm), s’élevant à environ 0,1 mm par articulation intervertébrale. Il s’agit en outre d’« ajustements » résiduels de rachis qui ne sont pas remis en charge par la suite. Chez des patients vivants, on s’attendrait à ce que l’« ajustement » résiduel de 0,1 mm soit naturellement annulé lorsque le patient se met debout et commence à supporter la compression axiale. Par conséquent, tout effet obtenu par traction thérapeutique doit être établi par étape, c’est-à-dire se produire lors de la traction et ne pas être dû au maintien de l’allongement du rachis lombal.



FLEXION


Lors de la flexion, le rachis lombal entier penche en avant grâce essentiellement au « déroulement » ou redressement de la lordose lombale (figure 8.4). En flexion maximale, le rachis lombal est rectiligne ou légèrement incurvé vers l’avant et tend à inverser la courbure lordotique originelle (figure 8.3). L’inversion se produit principalement au niveau des lombales hautes. Une inversion peut se produire au niveau de L4–L5 mais pas au niveau de L5–S1 [58,59]. La flexion est donc réalisée en grande partie par la rotation de chacune des vertèbres lombales inclinée en lordose verticale, vers une position neutre où les surfaces supérieures et inférieures des corps vertébraux adjacents sont parallèles les unes aux autres. La compression postérieure qui est présente sur les disques intervertébraux et les articulations zygapophysaires du rachis lombal lordotique en charge est ainsi soulagée. Une amplitude de mobilité supplémentaire est obtenue par davantage de rotation antérieure des vertèbres lombales hautes, et par la compression antérieure de leurs disques intervertébraux.



Le mouvement de chaque corps vertébral lors de la flexion du rachis lombal peut sembler provenir d’une simple rotation sagittale antérieure. Cependant, il existe aussi une composante de translation antérieure associée [59,60]. Si la vertèbre bascule antérieurement sur son disque intervertébral, les processus articulaires inférieurs de la vertèbre remontent légèrement vers l’arrière (figure 8.5A). Cela ouvre un petit espace entre la facette articulaire inférieure et la facette articulaire supérieure de chaque articulation zygapophysaire. Étant donné que le rachis lombal penche vers l’avant, la pesanteur ou la force musculaire entraîne un glissement antérieur des vertèbres, et ce mouvement referme l’espace entre les facettes des articulations zygapophysaires (figure 8.5B). La translation antérieure supplémentaire sera stoppée une fois rétabli le contact entre les articulations zygapophysaires, mais une légère translation antérieure se sera néanmoins produite. La flexion associe par conséquent sur chaque articulation une combinaison de rotation sagittale antérieure et de translation antérieure de faible amplitude.



Les articulations zygapophysaires jouent un rôle majeur dans le maintien de la stabilité du rachis en flexion, et une grande attention a été portée ces dernières années sur les mécanismes en jeu. Pour comprendre ces mécanismes, il est important de savoir que la flexion associe à la fois une rotation sagittale antérieure et une translation sagittale antérieure, car les articulations zygapophysaires résistent et stabilisent ces deux composantes de différentes façons.


Le contact direct des facettes articulaires inférieures d’une vertèbre contre les facettes articulaires supérieures de la vertèbre sous-jacente résiste à la translation sagittale antérieure. Ce processus a été entièrement décrit dans le chapitre 3. Ce mécanisme devient de plus en plus important au fur et à mesure de la flexion du rachis lombal, car les surfaces supérieures des corps vertébraux sont inclinées vers le bas (figure 8.6) et les vertèbres supérieures auront tendance à glisser le long de cette pente.


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Apr 24, 2017 | Posted by in RADIOLOGIE | Comments Off on 8: Mouvements du rachis lombal

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