Les grands problèmes de société
CE QU’IL FAUT SAVOIR
Précarité et exclusion, ou la question des grandes pauvretés
Introduction
La grande pauvreté constitue une problématique complexe à gérer : elle n’est plus seulement liée au dénuement et à la pénurie, mais elle pousse vers la désocialisation, l’exclusion et affecte l’individu dans son être profond, intime. Toute la difficulté, pour les associations, les travailleurs sociaux et autres dispositifs d’assistance, consiste à prendre en charge ces publics brisés, affectés dans l’estime d’eux-mêmes et incapables de se réinscrire, avant longtemps, dans un vrai projet de vie.
La pauvreté reste une question essentielle dans les pays avancés. Plutôt que de pauvreté, il faudrait sûrement plus parler, en l’occurrence, de « misère » : la notion rendrait mieux compte du degré extrême de dénuement voire d’indigence dans lequel semblent cantonnés les exclus dans la société française d’aujourd’hui. C’est à partir des années 1980 et 1990 que de nouvelles formes de pauvreté sont apparues. Aux « clochards » quelque peu déviants des Trente Glorieuses (1946–1976), ont succédé les sans domicile fixe (SDF) et les exclus. La fracture sociale a condamné des franges toujours plus importantes de la population. La crise qui secoue les nations dites « avancées » depuis 2008 précarise encore un peu plus ces populations déjà fragilisées.
Différentes formes d’exclusion
Exclusion de la consommation
Dans une société fondée sur le culte de la consommation, le fait de ne pas participer aux frénésies d’achats confine à la ségrégation. Les sollicitations sont tellement nombreuses et obscènes (publicités, hypermarchés, vitrines des grands magasins…) que les plus démunis vivent leur manque de pouvoir d’achat comme une immense frustration.
Exclusion du logement
Le nombre de sans-abri en France ne cesse d’augmenter, tout comme celui des locataires habitant un logement précaire, c’est-à-dire insalubre, hors normes. La pénurie de logements sociaux oblige les familles socialement fragiles (souvent des immigrés et des sans-papiers) à accepter les taudis que des « marchands de sommeil » peu scrupuleux leur proposent.
Exclusion du travail
Les métiers qui recrutent se répartissent en deux catégories : ceux qui ne réclament aucune compétence dans les services (travail précaire dans la restauration rapide, par exemple) et ceux qui demandent toujours plus de qualifications et de diplômes. Les premiers ne permettent pas de sortir de la pauvreté ; les seconds sont réservés aux catégories sociales qui ont pu faire des études.
Exclusion de la santé
Malgré un système de protection sociale fondé sur la solidarité (la Sécurité sociale et la couverture maladie universelle, la CMU, permettent aux plus démunis d’obtenir des soins décents), la prise en charge sanitaire fonctionne à deux vitesses dans notre société. Les exclus et les titulaires des minima sociaux ont une mortalité supérieure aux autres. À âge égal, les titulaires du revenu de solidarité active (RSA) ont un taux de mortalité 1,5 fois supérieur à l’ensemble de la population. On trouve plusieurs raisons à cela :
Exclusion de l’éducation
Bien qu’obligatoire et gratuit, le système éducatif est resté inégalitaire. L’ascenseur social que devait constituer l’école est en panne, car le système scolaire reproduit les inégalités au lieu de les combler. Malgré un taux de scolarisation proche de 100 % en France, l’illettrisme continue à toucher les classes.
Causes de l’exclusion sociale
Évolution du travail et crise économique
La robotisation ou mécanisation de l’outil de production a détruit des emplois (non qualifiés) tout en créant de l’activité de pointe (il faut concevoir et programmer les machines) et des gains de productivité. Cette mutation a modifié la structure des emplois et condamné les moins qualifiés à se former.
La mondialisation, autrement dit l’évolution de la société vers la globalisation des échanges, a aussi joué un rôle dans cette mutation. Le marché s’est ouvert à l’échange international, créant un phénomène de concurrence et de dérégulation : la libéralisation des échanges s’est soldée par une disparition progressive des règles qui jusque-là organisaient le marché mondial (tarif douanier, droit du travail, délocalisation…). La mondialisation a créé des richesses en favorisant le commerce. Mais elle a aussi détruit des emplois.
Fin des dispositifs d’assistance et de solidarité
Face à cette économie prédatrice, les dispositifs d’assistance sont en recul :
Facteurs individuels
Des trajectoires personnelles fragilisées que renforce souvent un environnement social ou familial peu solidaire peuvent conduire à l’exclusion : l’alcoolisme, un divorce, une longue maladie, des problèmes affectifs ou filiaux (par exemple, une rupture amoureuse). Bien sûr, ces phénomènes ne sont pas nouveaux. Ce qui a changé, ce sont les liens sociaux (famille, communauté…), désormais moins à même, du moins dans certains milieux, d’aider les plus démunis à amortir leurs difficultés.
Prise en charge de l’exclusion sociale
Prises en charge institutionnelles
Elles concernent la manière dont les pouvoirs publics décident de prendre en charge l’aide sociale. Les plans d’aide ou les dispositifs sont nombreux et en continuelle évolution : revenu de solidarité active, minima sociaux (minimum vieillesse, allocation veuvage, allocation parent isolé, minimum invalidité), aide alimentaire, aide au surendettement, aide au logement, aide à la formation, aide à l’emploi, dispositifs d’urgence (Samu social, centre d’hébergement et réinsertion sociale…).
Malgré toutes ces aides, l’exclusion ne cesse de progresser dans notre pays. Sont-elles insuffisantes ? trop complexes ? inadaptées ? mal organisées ? Les avis divergent. Certains (politiquement plutôt à droite) voient dans cette assistance une forme d’assistanat qui cantonne l’exclu dans sa condition et ne l’incite pas à reprendre un travail. Les personnes issues des classes moyennes critiquent également un système qui permet à ceux qui ne travaillent pas de disposer de revenus équivalents (grâce à la CMU, au RSA, aux aides au logement, etc.) à ceux des salariés smicards. D’autres (plutôt à gauche) ont une analyse différente : ils estiment qu’il serait inhumain de laisser se dégrader la situation des plus miséreux au nom de l’efficience économique. Selon eux, si les exclus ne travaillent pas, ce n’est pas pour profiter du système mais parce qu’il n’y a pas suffisamment d’activité économique pour leur fournir un emploi ou parce qu’ils sont trop « détruits » pour en assumer un.
Prises en charge non gouvernementales
Les aides non gouvernementales prennent, pour la plupart, la forme d’associations humanitaires ou caritatives. Ce sont des structures religieuses (Armée du salut, société de Saint-Vincent-de-Paul, Secours catholique, Chiffonniers d’Emmaüs, ATD quart-monde) ou laïques (Secours populaire, Restos du cœur, Médecins sans frontières, Médecins du monde) dont la finalité reste de porter secours aux plus démunis en leur apportant les soins, la nourriture, les biens, le logement dont ils pourraient avoir besoin. Ces structures fonctionnent sur le « bon cœur », le dévouement des adhérents. Certaines se sont professionnalisées au point de devenir les partenaires incontournables de l’aide sociale publique.
À ce propos, les plus critiques estiment que c’est une manière pour l’institution d’échapper à ses responsabilités en déléguant à de bonnes volontés (bénévoles) une prise en charge qui revient normalement aux pouvoirs publics. Des associations comme le DAL (Droit au logement) ou Les Enfants de Don Quichotte n’hésitent pas à organiser des opérations « coups de poing » pour alerter l’opinion sur le sort des sans-abri.
Violences et insécurités
Introduction
Les termes « insécurité » et « violence » sont utilisés couramment, tant par les médias que par les pouvoirs politiques, sans qu’on ne sache plus très bien ce qu’ils recouvrent. Ce climat ambiant amène le citoyen à adhérer à une politique sécuritaire puisqu’il a le sentiment que l’insécurité progresse, que la violence est partout et donc que la société est en déliquescence. Mais les chiffres soutiennent-ils ces déclarations ?
Le droit à la sécurité est devenu primordial dans l’espace public et privé. Les sondages montrent que c’est une des préoccupations principales des Français. Les pouvoirs publics doivent donc se préoccuper des phénomènes de violence pour maintenir un sentiment de sécurité chez les citoyens. Pour cela, la lutte contre la délinquance s’accroît et le recours à l’incarcération se développe.
Délinquance et criminalité
La délinquance est-elle en augmentation ?
Ces quinze dernières années, le nombre de crimes et délits constatés reste stable, mais toutes les infractions ne sont pas signalées à la police. L’écart entre les actes de délinquance réalisés et ceux qui sont répertoriés constitue le « chiffre noir de la délinquance ». On estime que 25 000 infractions sont commises chaque jour. Quantitativement, la délinquance stagne, mais on constate :
un rajeunissement des auteurs d’actes de délinquance ;
une banalisation de la violence et des atteintes aux personnes ;
une multiplication des atteintes à l’autorité et aux services publics.
Les infractions sont le plus souvent commises par des hommes âgés de 18 à 40 ans, mais il y a aussi des mineurs délinquants.
Facteurs de la délinquance
La délinquance trouve son origine dans de multiples causes : certaines sont d’ordre psychologique, d’autres d’ordre social. Prise isolément, aucune ne suffit à expliquer pourquoi certaines personnes vont passer à l’acte, alors que d’autres ne transgresseront pas les règles.

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