8: Aspect post-thérapeutique du cancer du rein

Chapitre 8


Aspect post-thérapeutique du cancer du rein




Place de la thérapeutique oncologique médicale et radiothérapique dans le traitement actuel du cancer du rein



Traitement du cancer localisé


Le traitement de référence du cancer du rein (CCCR) localisé est chirurgical. La néphrectomie totale élargie, avec ou sans curage ganglionnaire est réalisée soit par chirurgie ouverte, soit par cœlioscopie et tout dernièrement « robot-assistée ». Lorsque la tumeur fait moins de 4 cm et se trouve localisée en périphérie du rein, une tumorectomie ou une néphrectomie partielle sera proposée afin de conserver du parenchyme sain et le capital néphronique du patient.


Les indications des techniques d’ablation non chirurgicales de destruction tumorale par le froid (cryothérapie), la chaleur (radiofréquence) ou par irradiation (radiothérapie stéréotaxique) sont limitées aux patients fragiles à risque chirurgical, à capital néphronique réduit (récidive tumorale après chirurgie) ou atteints de tumeurs récidivantes héréditaires (VHL : maladie de von Hippel-Lindau).


Il n’y a actuellement pas d’indication de traitement adjuvant ou néoadjuvant pour une forme localisée (stades I, II, III), en dehors du cadre d’un essai clinique.



Traitement du cancer du rein métastatique


Près de 30 % des CCCR sont métastatiques au moment du diagnostic alors que 20 à 40 % des patients ayant eu une néphrectomie pour un CCCR localisé vont présenter une extension métastatique secondaire. Dans cette dernière situation il sera d’abord nécessaire de s’assurer de l’origine rénale de la métastase par ponction biopsie percutanée. Le CCCR présente un tropisme métastatique très étendu néanmoins, les sites métastatiques préférentiels sont par ordre de fréquence décroissante : poumons, os, foie, cerveau, surrénale et loge de néphrectomie. Le développement d’une tumeur sur le rein controlatéral restant survient dans 1 à 2 % des cas, sans distinction possible entre métastase ou tumeur métachrone de novo. Après néphrectomie totale ou partielle, le taux de récidive locale est identique, compris entre 3 et 27 %, mais de 2 % pour une tumeur T1-3N0M0.



Place de la chirurgie au stade métastatique


À l’ère de l’immunothérapie, la néphrectomie était considérée comme un traitement standard en raison du bénéfice de la néphrectomie sur la survie des patients métastatiques. Avec l’arrivée récente des antiangiogéniques, le rôle de la néphrectomie première est à nouveau remis en question.


La décision dépend actuellement de la taille tumorale, de son extension, de la cinétique de progression, de l’état général du patient, de son âge et de la présence de comorbidités. Certaines équipes considèrent que la néphrectomie de principe dans les formes métastatiques permet une réduction de la masse tumorale, et une meilleure réponse aux traitements systémiques. Plusieurs études sont actuellement en cours pour évaluer l’impact de la néphrectomie sur la survie des patients à l’ère des thérapies ciblées (étude CARMENA, etc.).


La métastasectomie peut avoir sa place à visée palliative (douleurs, compressions, fractures, etc.) ou à visée curative. La métastasectomie à visée curative ne peut être envisagée que chez des patients sélectionnés (bon pronostic, pauci-métastatiques) et en cas de néphrectomie préalable.



Thérapeutiques médicales du cancer du rein avancé


L’immunothérapie a été pendant près de 20 ans la seule option thérapeutique disponible pour les patients présentant un CCCR métastatique. La découverte fondamentale qu’un défaut du système d’immunosurveillance pouvait être à la base du développement du cancer et que la restauration des fonctions immunitaires pourrait induire des régressions tumorales a conduit au développement de l’immunothérapie. L’interleukine-2 et l’interféron, deux activateurs puissants du système immunitaire en particulier des lymphocytes, ont ainsi largement été utilisés dans le cancer du rein avancé. Mais seuls 10 à 15 % des patients sont considérés comme répondeurs et au prix de nombreux effets indésirables souvent très mal supportés.


Le traitement des cancers du rein métastatique a été bouleversé ces 5 dernières années par l’arrivée des antiangiogéniques. Les avancées de la biologie moléculaire ont permis une meilleure compréhension de la carcinogenèse rénale et ont révélé le rôle fondamental de l’angiogenèse. L’identification des voies de signalisation impliquées dans l’angiogenèse tumorale a conduit au développement de nombreux médicaments ciblant cette voie de signalisation, avec actuellement sept thérapeutiques disponibles.



Biologie moléculaire des cancers du rein


Voie VHL-HIF-VEGF

Le cancer du rein conventionnel (75 % des cas) se caractérise sur le plan moléculaire par une inactivation somatique du gène suppresseur de tumeur Von Hippel Lindau localisé sur le bras court du chromosome 3. L’inactivation de ce gène conduit à la perte de fonction de la protéine pVHL qui joue un rôle essentiel dans la régulation de la dégradation de protéines par le protéasome en particulier les protéines de la famille HIF (Hypoxia Inducible Factor). Il existe deux formes de HIF : HIF1 et HIF2, toutes deux régulées par pVHL. La perte de fonction de pVHL conduit à une accumulation de HIF1 et HIF2, facteurs transcriptionnels qui contrôlent l’expression de près de 80 gènes parmi lesquels le gène VEGF et Plateled Derived Growth Factor (PDGF) impliqués dans l’angiogenèse. Les carcinomes rénaux se caractérisent donc par une induction de l’angiogenèse par hyperexpression du VEGF-A et de molécules apparentées (VEGF-C, PDGF, VEGF-D) qui sont de puissants proangiogéniques.



Voie PI3K-Akt-mTOR

L’activation de la voie PI3K (phospho-inositide-kinases)/Akt/mTOR via des récepteurs de divers facteurs de croissance est cruciale pour la prolifération et la survie des cellules dans de nombreux types de cancers, et plus particulièrement le cancer du rein, qui en fait une cible thérapeutique privilégiée. mTOR (mammalian Target of Rapamycin) est une sérine-thréonine-kinase qui intervient dans la synthèse protéique par l’intermédiaire de la kinase S6 et du facteur 4EBP1. La protéine mTOR régule l’expression de HIF1-α et β-HIF2, reliant ainsi la voie mTOR à celle de l’angiogenèse. Le blocage de cette voie empêche l’action du VEGF, et par conséquent la prolifération, survie et migration des cellules endothéliales. Les inhibiteurs de mTOR, en diminuant l’expression de HIF, agissent ainsi sur l’angiogenèse tumorale.



Antiangiogéniques et inhibiteurs mTOR : études et recommandations

Les traitements peuvent être regroupés en trois familles : les inhibiteurs de tyrosine-kinase (TKI), les anticorps monoclonaux anti-VEGF ainsi que les inhibiteurs de l’activité sérine/thréonine kinase de mTOR. Les algorithmes de prise en charge thérapeutique reposent sur des résultats de larges études randomisées de phase III dans lesquelles les patients ont été stratifiés en différents groupes pronostiques (tableau 8.1).












Perspectives

La majorité des patients vont tôt ou tard échapper aux thérapeutiques antiangiogéniques en raison de l’émergence de mécanismes de résistance. Plusieurs approches sont actuellement à l’étude afin de retarder ou de contourner ces mécanismes de résistance. La première stratégie a été de combiner antiangiogéniques (TKI ou anticorps) et inhibiteur de mTOR. Cette stratégie n’a pas montré de bénéfice en termes de survie sans progression par rapport à un traitement séquentiel qui reste donc le standard en 2013 [8]. Une deuxième piste est le développement de l’immunothérapie de nouvelle génération avec l’arrivée d’anticorps dirigés contre CTLA4 (ipilimumab), ou encore PD-1 ou son ligand qui interviennent dans la régulation négative du système immunitaire. Enfin le dernier espoir repose sur l’arrivée des TKI de dernière génération avec de nouvelles cibles thérapeutiques.



Radiothérapie


Le cancer du rein et ses métastases sont considérés comme radiorésistants. La radiothérapie garde quelques indications essentiellement palliatives symptomatiques pour le traitement des localisations métastatiques cérébrales et osseuses. Dans ce dernier cas, l’objectif de la radiothérapie est soit antalgique soit à visée décompressive en cas d’atteinte neurologique. Les lésions avec risque fracturaire élevé doivent quant à elles bénéficier d’un traitement chirurgical (ostéosynthèse) ou en radiologie interventionnelle (cimentoplastie), préalable à l’irradiation.


L’efficacité antalgique de la radiothérapie des métastases osseuses de cancer du rein est établie mais il persiste des divergences sur le niveau de dose à délivrer et sur le fractionnement à utiliser. Les mécanismes par lesquels la radiothérapie permet d’obtenir un effet antalgique sont mal connus. En effet, il n’y a pas de corrélation nette entre l’effet antalgique obtenu, le site anatomique de la métastase osseuse ou encore la dose délivrée.


Globalement, la radiothérapie des métastases osseuses permet d’obtenir un effet antalgique dans 70 à 80 % des cas. Il sera rapide ou au contraire retardé mais se maintient relativement longtemps.


La radiothérapie externe a moins d’effet sur le contrôle des métastases cérébrales ou sur les compressions médullaires : l’effet sur les symptômes est modéré (moins de 30 % d’amélioration), et une réponse partielle sur le volume tumoral n’est obtenue que dans 20 à 30 % des cas. L’association à la radiothérapie conventionnelle de l’exérèse d’une métastase du SNC (système nerveux central) peut permettre d’améliorer le pronostic, qui néanmoins reste sombre. La radiothérapie stéréotaxique actuellement en plein développement laisse espérer de nouvelles indications d’irradiation et devrait renforcer le rôle de la radiothérapie dans la prise en charge des cancers du rein métastatiques (irradiation stéréotaxique cérébrale, irradiation de la tumeur primitive, etc.).




Évaluation de la réponse précoce et tardive au traitement



Place de l’imagerie morphologique et fonctionnelle (fig. 8.1 et 8.2)


La technique de référence est la TDM avec injection de produit de contraste. Elle a d’abord permis une évaluation de la réponse thérapeutique basée essentiellement sur le critère de la taille avec le référentiel RECIST version 1.1 de 2009, de façon simple en déterminant la somme du plus grand diamètre des lésions cibles définies comme mesurables supérieures à 10 mm et à contours nets (5 lésions par patient, 2 à 3 lésions par organe), en déterminant des lésions non cibles mesurables ou non mais évaluables et en tenant compte des adénopathies supérieures à 15 mm de petit axe. La réponse est évaluée sur le pourcentage de variation de cette somme en quatre catégories :


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Apr 24, 2017 | Posted by in RADIOLOGIE | Comments Off on 8: Aspect post-thérapeutique du cancer du rein

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