7. Qu’est-ce qu’une relation « réussie » dans le contexte de soins ?

omme tout le monde, j’ai besoin de reconnaissance dans le métier que je fais. On n’en a pas toujours de la part des patients, mais, ce que j’aime entendre c’est « vous êtes rassurante ». Là, je suis reconnue dans ce que j’apporte. Et puis, si je suis « rassurante », c’est que la personne a du plaisir à me voir, qu’elle se sent bien dans ce moment-là et que mes soins seront optimisés par ce lien. Pour moi, une relation réussie c’est tenter de comprendre la personne, de la faire parler, de l’écouter. J’ai longtemps travaillé dans le service IVG d’un grand hôpital où j’ai tenté de mettre en place un accueil, une écoute pour les femmes qui venaient se faire avorter, mais on m’a dit qu’il n’y avait pas d’argent pour ça. J’ai vécu néanmoins une expérience émouvante qui m’a marquée toute ma vie: je recevais, entant qu’infirmière, les femmes ou les jeunes filles qui venaient pratiquer un avortement. Je ne m’occupais pas seulement de les accompagner médicalement bien que ce soit surtout ce qu’on me demandait. Je leur parlais et tentais de leur faire raconter l’histoire de leur grossesse, leur décision relative à l’avortement, sans les juger car c’est vite fait, si on n’est pas d’accord, de tenter de les influencer ou de leur faire violence par une attitude hostile à leur égard alors que ce qu’elles s’apprêtent à faire est déjà très violent. Il était convenu qu’on leur dise qu’elles pouvaient encore changer d’avis, puis qu’on quitte la chambre un moment après avoir dit cela. Parfois, on revenait et la personne était partie parce qu’elle avait changé d’avis. Un jour, j’ai eu une relation privilégiée avec une très jeune fille qui était venue en larmes. Je l’ai faite parler. Elle m’a racontée son histoire, les raisons de sa peine. L’entretien a duré longtemps. J’ai entendu qu’au fond elle ne voulait pas se séparer de son bébé et qu’elle le désirait même si les circonstances ne s’y prêtaient pas selon elle. Je le lui ai formulé. Elle a beaucoup pleuré. J’ai insisté sur le fait qu’elle avait encore la possibilité de le garder si c’était son désir. J’ai quitté la chambre et, lorsque je suis revenue, elle était partie. Un an après, je l’ai vue revenir avec un petit garçon, elle venait me remercier parce qu’elle considérait que c’était grâce à moi, grâce à notre entretien qu’elle s’était rendu compte qu’elle désirait vraiment cet enfant. J’ai été très émue de cette démarche. Pour moi, c’était une relation réussie, même si je ne l’ai su qu’un an après. Dans ces moments-là, on se dit qu’on fait vraiment un beau métier ! »

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May 9, 2017 | Posted by in MÉDECINE INTERNE | Comments Off on 7. Qu’est-ce qu’une relation « réussie » dans le contexte de soins ?

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