Chapitre 7. Les signes psychologiques et comportementaux
1. Les causes d’apparition des signes psychologiques et comportementaux
Les troubles du comportement, appelés également symptômes psychologiques et comportementaux des démences (SPCD), sont des changements dans le comportement du patient qui sont apparus depuis le début de la maladie ou depuis une évaluation précédente.
Par exemple, une personne respectable va, à cause de la maladie, perdre toutes ses convenances sociales. Elle va parler d’une manière grossière, évoquer sa vie intime ouvertement. Ces symptômes sont fréquemment rencontrés et ont tendance à s’accentuer avec l’évolution de la maladie.
Dans la maladie d’Alzheimer (ou syndromes apparentés), le dysfonctionnement cérébral entraîne des troubles des fonctions cognitives ET un changement du comportement !
Le dysfonctionnement cérébral n’explique pas à lui seul les SPCD. En effet, d’autres facteurs influent sur le comportement du patient : l’environnement (changement de chambre, arrivée d’un nouveau résident, couleur des murs), l’histoire de vie et la personnalité du patient, les facteurs somatiques ou encore les médicaments. Ainsi, lors d’un soin, si un patient calme devient brusquement agité, il faut chercher à comprendre la cause de cette réaction.
Il s’est agité quand j’ai touché une partie précise du corps ? Quand un collègue est entré ? Quand j’ai dit tel mot ?
Toujours s’interroger sur les causes d’un changement de comportement brutal. Ne pas négliger :
• les facteurs somatiques (fécalome, globe urinaire, déshydratation, hyperthermie) ;
• les facteurs environnementaux (changements d’environnement, relationnels et physiques) ;
• la iatrogénie (trop de médicaments).
2. Repérer et identifier les signes psychologiques et comportementaux
Les troubles du comportement sont présents chez 80 % des patients. Ils sont donc très fréquents et existent dès les premiers signes de la maladie. La figure 1.9 montre la fréquence de ces symptômes dans plusieurs études européennes. Ces chiffres ont été obtenus en utilisant l’Inventaire neuropsychiatrique aussi appelé NPI.
Fig. 1.9 CMA = comportement moteur aberrant |
Cet inventaire permet d’évaluer 12 troubles du comportement qu’il est important de bien connaître. Il est possible de les regrouper en 5 groupes comme suit : symptômes psychotiques, symptômes d’hyperactivité, symptômes affectifs, apathie, symptômes végétatifs.
Pour chacun des symptômes, on trouvera ci-après une brève définition, la description qui figure sur le NPI et un exemple.
A. Les idées délirantes
Ce sont des idées, des pensées, des jugements, un ressenti qui sont en dehors de la réalité. Dans le NPI, les idées délirantes sont définies à partir de la question suivante : « Le patient croit-il des choses dont vous savez qu’elles ne sont pas vraies ? ».
Par exemple, il insiste sur le fait que des gens essaient de lui faire du mal ou de le voler. Il dit que les membres de sa famille ou de l’équipe soignante ne sont pas les personnes qu’ils prétendent être.
M. S., atteint d’une maladie d’Alzheimer depuis 5 ans, est persuadé que dès que son épouse quitte le domicile, elle part rejoindre le boucher de leur quartier avec qui elle entretient une relation amoureuse depuis 10 ans. Or, vous connaissez très bien la dame et savez qu’elle est entièrement dévouée à son époux.
Vous surprenez une dispute entre deux résidents. Mme B. accuse sa voisine de la chambre d’à côté de lui avoir volé sa canne. Or, cette dernière n’a pas besoin d’aide externe pour se déplacer et n’est pas du genre à prendre des affaires qui ne lui appartiennent pas. Finalement, vous retrouvez la canne dans le placard de Mme B. Elle ne l’avait simplement pas vue. Vous la lui montrez, mais elle reste persuadée que sa voisine lui vole ses affaires.
B. Les hallucinations
Ce sont des perceptions sans qu’il y ait un objet à percevoir.
Dans le NPI, les hallucinations sont définies par la question suivante : « Le patient a-t-il des visions ou entend-il des voix ? Semble-t-il voir, entendre ou percevoir des choses qui n’existent pas, s’adresse-t-il à des personnes qui ne sont pas là ? ».
Idées délirantes et hallucinations correspondent aux symptômes psychotiques. Les thèmes délirants les plus fréquents sont : le vol, le préjudice, le rejet, la jalousie ou l’infidélité, le sentiment d’être abandonné/rejeté (fréquent en institution). Les hallucinations les plus fréquentes sont soit visuelles, que l’on retrouve surtout dans la maladie à corps de Lewy, soit auditives.
Michelle, aide-soignante depuis 8 ans dans un EHPAD, nous rapporte le cas de M. I. « Après le repas, M. I. a souvent un comportement particulier. Il se penche légèrement et essaye d’attraper quelque chose sur la table avec son index et son pouce, alors qu’il n’y a rien. Quand je le questionne, il ne répond pas. Il reste concentré sur cette zone de la table »
Vous vous rendez au domicile de Mme C. À votre arrivée, vous trouvez la patiente dans le salon avec le manche du balai à la main. Quand vous lui demandez ce qu’elle fait, cette dernière vous répond qu’elle essaie de faire taire les tintements qui viennent de l’étage d’au-dessus. Or, il n’y a aucun bruit.
C. L’agitation-agressivité
L’agitation est définie comme une activité verbale, vocale ou motrice inappropriée, considérée par un observateur extérieur, comme ne résultant ni d’un besoin, ni d’un état de confusion. Il peut s’agir de cris ou de verbalisations répétitifs.