Item 66. Thérapeutiques antalgiques médicamenteuses (P) et non médicamenteuses
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OBJECTIFS
• Argumenter la stratégie de prise en charge globale d’une douleur aiguë ou chronique chez l’adulte.
• Prescrire les thérapeutiques antalgiques médicamenteuses et non médicamenteuses.
• Évaluer l’efficacité d’un traitement antalgique.
LIENS TRANSVERSAUX
ITEM 1 La relation médecin-malade. L’annonce d’une maladie grave. La formation du patient atteint de maladie chronique. La personnalisation de la prise en charge médicale.
ITEM 65 Bases neurophysiologiques et évaluation d’une douleur aiguë et chronique.
ITEM 68 Douleur chez l’enfant : sédation et traitements antalgiques.
ITEM 69 Soins palliatifs pluridisciplinaires chez un malade en fin de vie. Accompagnement d’un mourant et de son entourage.
ITEM 142 Prise en charge et accompagnement d’un malade cancéreux à tous les stades de la maladie. Traitements symptomatiques. Modalités de surveillance. Problèmes psychologiques, éthiques et sociaux.
ITEM 167 Thérapeutiques médicamenteuses et non médicamenteuses. Cadre réglementaire de la prescription thérapeutique et recommandations.
ITEM 168 Effet placebo et médicaments placebo.
ITEM 170 La décision thérapeutique personnalisée. Observance médicamenteuse.
ITEM 174 Prescription et surveillance des anti-inflammatoires stéroïdiens et non stéroïdiens.
ITEM 262 Migraine et algies de la face.
Sujets tombés aux concours de l’Internat et aux ECN : 1995, 1997, 2001, 2007, 2008, 2009 
• 1995, zone Nord :
Homme de 60 ans, cancer du rectum, douleurs pelviennes, automédication par noramidopyrine (Baralgine ®).
2) Accidents thérapeutiques possibles avec cette automédication.
3) Symptomatologie des complications de la noramidopyrine.
4) Prescription antalgique.
• 1997, zone Nord :
Homme de 50 ans, cancer du poumon, douleurs à type de brûlure permanente au niveau de la face interne du bras et avant-bras droits jusqu’aux 2 dernières phalanges, non calmées par paracétamol + codéine. Deux adénopathies dures sus-claviculaires droites + Claude Bernard-Horner œil droit.
1. Argumenter une prescription de buprénorphine en association au paracétamol + codéine.
2. Causes des douleurs du membre supérieur droit.
3. Autres médicaments utiles pour traiter cette douleur en dehors des analgésiques purs.
• 2001, zone Sud :
Homme de 65 ans, cancer du rectum, métastases multiples, douleurs pelviennes, automédication par paracétamol 500 mg PO à la demande, d’efficacité modeste.
1) Commentez le traitement.
2) Risque principal de cette automédication.
3) Traitement par Di-Antalvic ® pendant 48 h, douleur inchangée. Rédigez l’ordonnance du nouveau traitement et expliquez-la au patient.
4) Durée de traitement sur l’ordonnance ? Expliquez.
5) Moyens d’évaluation de la douleur à la nouvelle consultation.
• 2007, dossier 4, question 7 :
Évaluer l’intensité de la douleur. Traitements symptomatiques préconisés pour la douleur intense, non calmée après l’administration de 1 g de paracétamol
• 2008, dossier 3, question 4 :
Femme de 68 ans, myélome, violentes lombalgies insomniantes continues : prise en charge de la douleur.
• 2009, dossier 6, questions 2 et 3 :
Homme de 50 ans, récidive de colique néphrétique.
1) Quel traitement antalgique proposez-vous ?
2) Quelles sont les complications iatrogènes les plus courantes envisageables chez ce patient avec le traitement de première intention que vous avez prescrit ?
CONSENSUS 
• Anti-inflammatoires non stéroïdiens – ANAES, 1996.
• Prise en charge de la douleur postopératoire chez l’adulte et l’enfant – SFAR, ANAES, 1997.
• Prise en charge de la douleur chronique de l’adulte en médecine ambulatoire – ANAES, 1999.
• Standards, options et recommandations 2002 pour les traitements antalgiques médicamenteux des douleurs cancéreuses par excès de nociception chez l’adulte. Mise à jour du rapport original de 1996 (rapport abrégé) – Bull Cancer 2002 ; 89 (12) : 1067–74.
• Mise au point sur le bon usage des opioïdes forts dans le traitement des douleurs chroniques non cancéreuses – Recommandations pour la pratique clinique – Afssaps, 2004 (http://www.agmed.sante.gouv.fr/htm/10/opioide/mapopio.pdf).
• Prise en charge de la douleur postopératoire chez l’adulte et l’enfant. Recommandations formalisées d’experts 2008 – Comité douleur-anesthésie locorégionale et Comité des référentiels de la SFAR – Ann Fr Anesth Reanim 2008 ; 27 : 1035–41 (http://www.sfar.org/t/img/pdf/rfe_douleur08.pdf).
▪ L’analyse sémiologique fine de la douleur conditionne la qualité de sa prise en charge thérapeutique.
▪ La douleur persistante est une situation clinique fréquente, impliquant dans sa genèse de nombreux facteurs et nécessitant une évaluation multifactorielle et une prise en charge multidisciplinaire, au mieux au sein d’une structure spécialisée.
▪ Le traitement chirurgical comporte des possibilités de plus en plus sélectives, dont les résultats sont essentiellement liés à l’indication en fonction du type de douleur.
I. STRATÉGIE DE PRISE EN CHARGE GLOBALE D’UNE DOULEUR AIGUË OU CHRONIQUE
▪ Le choix du traitement dépend :
– de l’étiologie de la douleur, déterminée par l’examen clinique et éventuellement des examens complémentaires ;
– de son mécanisme (par excès de nociception, neuropathique, psychogène ou mixte ITEM 65
– de son caractère aigu ou chronique ;
– de son intensité ;
– de son évolution dans le temps.
▪ Le traitement doit être multimodal : association de différentes thérapeutiques antalgiques entre elles et du traitement étiologique.
▪ Il faut favoriser les voies d’administration simples (voie orale +++).
▪ Il faut utiliser des posologies adaptées.
▪ L’administration des traitements antalgiques doit être systématique en période douloureuse, le rythme dépendant des propriétés pharmacocinétiques de chaque médicament.
▪ Il faut prévenir et traiter les effets secondaires usuels. 

▪ Le traitement sera remis en question régulièrement en fonction de son efficacité, évaluée par des échelles spécifiques.
Prise en charge de la douleur chronique de l’adulte en médecine ambulatoire ANAES, 1999
Le traitement antalgique fait partie d’une prise en charge globale du malade avec évaluation de sa personnalité, de la situation familiale et professionnelle, appréciation du retentissement de la douleur sur sa vie de relation ITEM 170

▪ La relation médecin-malade joue un rôle essentiel dans la prise en charge de la douleur. L’adhésion du malade à son traitement permet d’en améliorer l’efficacité ITEMS 1, 170

II. TRAITEMENTS MEDICAMENTEUX DE LA DOULEUR
A. Analgésiques
1. Analgésiques de palier 1 (classification OMS)
Les indications sont les douleurs aiguës ou chroniques d’intensité faible.
a) Acide acétylsalicylique (aspirine)
▪ Pharmacologie : résorption rapide (pic de concentration 40 à 60 min après) et presque complète ; forte liaison protéique (80 à 95 %) ; volume de distribution faible (0,16 L/kg) ; demi-vie de 15 à 30 min ; hydrolyse totale par les estérases plasmatiques en acide salicylique (demi-vie de 3 à 9 h), métabolite également actif et élimination rénale sous forme conjuguée.
▪ Voie per os (PO) :
– formes à libération rapide : Aspégic ®, Catalgine ®, Solupsan ® ;
– forme à libération prolongée : Aspirine pH 8 ® ;
– les formes solubles ou effervescentes sont mieux et plus rapidement résorbées que les comprimés.
▪ Voie intraveineuse (IV) : Aspégic ®.
▪ Posologie : 2 à 3 g/j.
▪ Effet antiagrégant plaquettaire : 100–150 mg/j ; effet antalgique : 1–2 g/j ; effet antiinflammatoire : 3 g/j.
▪ Effets secondaires nombreux : digestifs (nausées, douleurs abdominales, ulcères, hémorragies), hématologiques (syndrome hémorragique), allergiques (hypersensibilité, œdème de Quincke), syndrome de Reye, neurologiques (céphalées, vertiges, baisse de l’acuité auditive, bourdonnements d’oreille), hyperuricémie 

.



b)Paracétamol*
▪ Action centrale : métabolite actif de substances dérivées de la phénacétine et de l’acétaminophène
.

▪ Activité analgésique comparable à celle de l’acétylsalicylique mais sans les effets anti-inflammatoires et antiagrégants.
▪ Pharmacologie : résorption digestive rapide et presque complète (pic de concentration 30 à 90 min après) ; 80 % de biodisponibilité orale ; pas de liaison aux protéines plasmatiques (peu d’interférences médicamenteuses) ; volume de distribution de 0,9 L/kg ; demi-vie de 2 h, prolongée chez l’insuffisant hépatocellulaire et le nourrisson ; métabolisme hépatique principal en dérivés gluco et sulfoconjugués + voie secondaire par la N-acétyl-p-benzoquinone, responsable de nécrose hépatique en cas de surdosage massif.
▪ Voie PO : Dafalgan ®, Efferalgan ®.
▪ Voie IV : Perfalgan ®.
▪ Posologie : 0,5 à 1 g par prise, 1 à 4 g par 24 h, intervalle minimal de 4 h entre les prises.
▪ Bonne tolérance gastrique, allergie rare.
▪ Toxicité hépatique avec insuffisance hépatique aiguë à partir de 10–15 g en dose unique chez l’adulte et 150 mg/kg chez l’enfant. Facteurs favorisants : insuffisance hépatique préexistante, variabilité métabolique. Antidote : N-acétylcystéine. 

c) Anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS)* ITEM 174
▪ Pharmacologie : résorption rapide et quasi complète, Cmax = 1-2 h, liaison protéines à 90 %, métabolites hépatiques et surtout rénaux inactifs, élimination biliaire avec cycle entéro-hépatique (indométacine, diclofénac, piroxicam), demi-vie d’élimination variable d’une molécule à l’autre.
▪ Voie PO, prise en cours de repas : kétoprofène (Bi-profénid ®), 150 mg × 2/j, Celebrex ®, 100 à 200 mg × 1 à 2/j.
▪ Voie rectale : morniflumate (Nifluril ® suppositoires), 1 suppositoire × 2/j.
▪ Voie IM : kétoprofène (Profénid ®), 100 mg × 2-3/j.
▪ Voie IV lente : kétoprofène (Profénid ®), 100 mg × 2/j.
▪ Voie cutanée : acide niflurique (Nifluril ® pommade 3 %), 1 application × 3/j.
Anti-inflammatoires non stéroïdiens Recommandations ANAES, 1996
Sujets > 70 ans :
▪ réduire les doses en fonction du poids ;
▪ éviter les molécules à demi-vie longue ;
▪ éviter les indoliques qui augmentent le risque de chutes ;
▪ s’assurer impérativement que la clairance de la créatinine est supérieure à 30 mL/min avant de commencer le traitement ;
▪ prescrire un protecteur gastroduodénal efficace (misoprostol) ;
▪ surveiller la pression artérielle si le sujet est hypertendu, ainsi que la prise de poids et la survenue d’œdèmes des membres inférieurs.
▪ Indications en particulier dans le cadre des douleurs secondaires à des pathologies inflammatoires.
▪ Effets secondaires digestifs (nausées, douleurs abdominales, ulcère), allergiques(rash, syndrome de Lyell), rénaux (insuffisance rénale aiguë fonctionnelle, troubles hydroélectrolytiques, néphropathies interstitielles), hématologiques (syndrome hémorragique), neurologiques (céphalées, vertiges), effets cardiovasculaires des coxibs. 





d) Antalgiques en arrêt de commercialisation
▪ Floctafénine : n’est plus commercialisée suite à des réactions allergiques graves (choc anaphylactique).
▪ Noramidopyrine* : arrêt de commercialisation du fait de la survenue possible d’ agranulocytose immunoallergique indépendante de la dose, ainsi que de collapsus et bronchospasme. 



2. Analgésiques de palier 2 : opioïdes faibles
a) Codéine
▪ Morphinique faible.
▪ 30 mg de codéine PO sont équianalgésiques à 650 mg d’aspirine.
▪ Pharmacologie : absorption intestinale (70 %), métabolisme hépatique rapide soit en dérivés glycuronés, soit en morphine (10 %), durée d’action de 4 h.
▪ Voie orale uniquement :
– en association avec le paracétamol : Efferalgan codéiné ®, Dafalgan codéiné ®, Codoliprane ®* (1 à 6 cp/j). Il existe une synergie d’action potentialisatrice entre les 2 molécules en cas de dosage optimal (paracétamol 500 mg + codéine 30 mg)
.

– formes orales LP : dihydrocodéine (Dicodin ®) : 60 mg/12 h).
▪ Effets secondaires fréquents : nausées, somnolence, constipation.
b) Dextropropoxyphène
▪ Retrait progressif du marché en Europe sur 1 an à partir de juin 2009. Ne sera plus commercialisé en France à partir de 2010. Décision de l’Agence européenne du médicament (EMEA), suite à la constatation de décès par surdoses intentionnelles ou accidentelles.
▪ Morphinique faible.
▪ Pharmacologie : absorption par voie orale, durée d’action de 4 h, demi-vie de 8–10 h.
▪ En association au paracétamol par voie orale : Di-Antalvic ®* (dextropropoxyphène 30 mg + paracétamol 400 mg)
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▪ Posologie : voie PO uniquement, 2 gélules/8 h au maximum.
▪ Effets secondaires de type morphinique : nausées, vomissements, constipation, somnolence, vertiges.
c) Tramadol
▪ Action centrale avec un effet opioïde par fixation aux récepteurs m et un effet monoaminergique par inhibition du recaptage de la noradrénaline, ce dernier mécanisme étant impliqué dans le contrôle de la transmission nociceptive centrale (intérêt potentiel dans le traitement des douleurs neuropathiques).

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