6: Les caractéristiques pharmacocinétiques des médicaments après administration par voies intravasculaires et extravasculaires


Les caractéristiques pharmacocinétiques des médicaments après administration par voies intravasculaires et extravasculaires





La pharmacocinétique, définie par le devenir biologique d’un médicament après administration, en fonction du temps, dans l’organisme vivant, est réalisée au moyen de prélèvements sanguins successifs (10 à 15) dans lesquels la molécule médicamenteuse est dosée. Ces dosages répétés permettent de déterminer des concentrations indispensables pour déterminer des paramètres pharmacocinétiques permettant de caractériser l’action du médicament comme sa durée d’action ou la dose à administrer. Ainsi les paramètres pharmacocinétiques sont des variables quantitatives reflétant le devenir du médicament. L’objectif principal est de proposer un schéma thérapeutique optimal.


La concentration plasmatique d’un médicament dépend généralement :



La notion de compartiment fait appel à un volume théorique, correspondant ou non à une entité physiologique réelle, dans lequel le médicament se répartit de façon homogène.


Plusieurs compartiments physiologiques peuvent être distingués :



Le nombre de compartiments différents dans lequel le médicament va se distribuer suite à son administration conditionnera le modèle pharmacocinétique.


La plupart des paramètres pharmacocinétiques étudiés étant dépendants du modèle, la connaissance de ce dernier constituera un préalable à la détermination des paramètres.




Dose unique intraveineuse (IV)


La voie d’administration la plus simple pour calculer les paramètres pharmacocinétiques d’un médicament est la voie intraveineuse (IV) car l’absorption immédiate permet à la molécule de se retrouver dès la fin de l’administration à la concentration maximale dans le plasma. En revanche, si l’administration IV permet d’éviter un effet de premier passage hépatique observé fréquemment avec les administrations orales, un métabolisme ne doit pas être exclu. En effet, un effet de premier passage pulmonaire peut exister avant que le principe actif n’atteigne la circulation générale suite à une injection IV.



Modèle monocompartimental


Une molécule suivant un modèle monocompartimental implique que celle-ci ne se distribue que dans un seul compartiment et ce de manière homogène. Ainsi la molécule répartie dans le compartiment pourra y disparaître de deux manières : par métabolisme ou élimination sous forme inchangée (figure 6.1).



Lorsque l’équilibre des concentrations entre le plasma et les tissus est atteint simultanément, la phase de distribution est alors instantanée et seule la phase d’élimination est visible sur la courbe représentant la concentration en fonction du temps (figure 6.2).



Cette courbe représente une exponentielle décroissante avec l’équation suivante :


Ct = Co e−ket


Où C0 représente la concentration initiale c’est-à-dire au temps t = 0.


Dans ce cas, cette concentration C0 peut être calculée facilement en divisant la dose administrée (D) par le volume dans lequel se distribue la quantité injectée appelée volume de distribution (Vd).


C0 = D/Vd


Afin de faciliter la représentation de l’évolution temporelle des concentrations, il est possible de linéariser l’équation Ct = Co e−ket en utilisant une échelle semi-logarithmique (concentrations représentées par leur logarithme décimal) (figure 6.3).



L’équation devenant alors Ln Ct = Ln Co − ke t représente bien celle d’une droite dont la pente est égale à − ke correspondant à la constante d’élimination. Sur la représentation, l’intercept à l’origine Ln Co permet de déterminer la concentration initiale maximale.




Distribution


À tout moment, un médicament administré se distribue dans l’organisme dans un certain volume. Le volume apparent de distribution Vd correspond à un volume fictif dans lequel la totalité du médicament se distribue à la même concentration que dans le plasma. Par hypothèse, la concentration du médicament est considérée en tout point égale.


Le volume de distribution est relié à la quantité initiale de principe actif (Q) et à la concentration plasmatique (C), de ce dernier, lorsque l’équilibre est atteint.


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Le volume de distribution peut être, parfois, exprimé par rapport au poids de l’individu. Certaines molécules présentent un volume de distribution très important (de l’ordre de plusieurs centaines ou milliers de litres) signifiant que ces molécules ont une concentration plasmatique assez faible et donc, une concentration tissulaire relativement élevée. Inversement, le volume de distribution sera considéré comme petit lorsqu’il se rapprochera de la valeur du volume plasmatique (0,04 L/kg) justifiant d’une concentration tissulaire faible (tableau 6.1).



On considère que le volume de distribution est faible, justifiant d’une faible affinité tissulaire du principe actif, si ce dernier est inférieur à 20 litres. Pour des valeurs autour de 40 litres, le volume de distribution est considéré comme moyen alors que pour des volumes de distribution supérieurs à 100 litres, on considère qu’ils sont élevés traduisant une forte affinité tissulaire.



Liaison aux protéines


Certaines molécules médicamenteuses se fixent sur les protéines plasmatiques pour être transportées dans l’organisme contribuant à la formation d’un complexe protéine-médicament. Ainsi, deux formes de médicaments se retrouvent dans l’organisme : le médicament sous forme libre (seule forme active pharmacologiquement) et liée. La détermination de la fraction libre plasmatique (fu) est reliée à la concentration de la forme libre du médicament dans la plasma (Cu) et la concentration plasmatique totale (soit la somme des formes libre et liées plasmatiques) (Cp).


De même, l’évaluation de la fraction libre tissulaire (fuT) peut être effectuée à partir de la concentration de la forme libre du médicament au niveau tissulaire (CuT) en fonction de la concentration tissulaire totale (CT).


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Élimination


La clairance totale (ClT) ou plasmatique (ClP) est définie comme la capacité globale de l’organisme à éliminer une molécule. Elle correspond au volume de plasma totalement épuré de principe actif en un intervalle de temps donné. L’intérêt de la détermination de la clairance est de définir la dose thérapeutique efficace de principe actif à administrer à un patient donné.


La clairance totale est égale à la somme des clairances de tous les organes impliqués dans l’élimination du médicament (clairance rénale, hépatique, intestinale, pulmonaire…) :


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Exprimée en volume par unité de temps (L.h− 1, mL.min− 1), la clairance (Cl) est calculée à partir du volume de distribution (Vd) et de la constante d’élimination (ke).


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Connaissant la valeur de la clairance totale d’un principe actif, il est possible d’en déduire la clairance sanguine (de valeur toujours supérieure à celle de la clairance plasmatique) calculée à partir du rapport des concentrations sanguines et plasmatiques (R) de ce même principe actif. Ainsi :


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Sur la base des valeurs de clairance sanguine (Cls) et de débit sanguin hépatique (QH), il est possible de déterminer la capacité d’extraction hépatique d’un principe actif. Ainsi :




Par définition, il est considéré que la clairance totale (ClT) est égale à la somme de la clairance rénale (ClR) et de la clairance métabolique ou extrarénale (ClM).


La clairance rénale est la somme des clairances de filtration glomérulaire (ClFG) et secrétée (Clsec) auxquelles est retranchée la clairance réabsorbée (Clréab).


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La clairance rénale dépend de la concentration urinaire de la molécule d’intérêt (U), du volume urinaire par unité de temps (V) et de la concentration plasmatique de la molécule d’intérêt (Cp). Ainsi, la clairance rénale peut être calculée selon la relation :


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Il est également possible de déterminer la clairance rénale à partir de la valeur de clairance totale et de la fraction de la dose de principe actif administrée, éliminée sous forme inchangée dans les urines (fe).


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Afin de déterminer si le médicament d’intérêt est réabsorbé ou secrété au niveau rénal, il convient d’évaluer, en parallèle de la clairance rénale, la clairance de filtration glomérulaire (ClFG) qui dépend du débit de filtration glomérulaire (DFG = Clcréatinine). Ce dernier est calculé en évaluant la clairance à la créatinine.


La créatinine est un déchet métabolique issu du catabolisme de la créatine musculaire. Son taux circulant dépend de la masse musculaire et sa production et sa concentration sont, en l’absence de pathologie, stables d’un jour à l’autre. Chez l’adulte sain, la clairance à la créatinine est comprise entre 85 et 125 mL/min.


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Sur la base de ces valeurs, on considère qu’un médicament est réabsorbé lorsque sa clairance de filtration glomérulaire est très supérieure à sa clairance rénale. Inversement, un médicament est secrété au niveau tubulaire lorsque sa clairance rénale est très supérieure à sa clairance de filtration glomérulaire.


La clairance hépatique (ClHep) est la somme de la clairance métabolique (Clmetab) et de la clairance d’excrétion biliaire (Clex) :


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La clairance hépatique peut être calculée à partir de la dose administrée de principe actif (Q) et de la fraction hépatique (E) :


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Conséquences pour l’emploi des médicaments


Pour les médicaments fortement métabolisés, la clairance totale est fonction de la clairance hépatique et il convient de s’assurer d’un bon fonctionnement du foie (en particulier pour les âges extrêmes de la vie ou les patients atteints de pathologies hépatiques), mais également de prendre en compte les éventuelles associations médicamenteuses (inhibiteurs ou inducteurs enzymatiques) ou les modifications de fraction libre médicamenteuse.


Pour les médicaments faiblement métabolisés, la clairance totale est fonction de la clairance rénale. Dans ce cas, il conviendra de vérifier les fonctions physiologiques du rein (en particulier chez les patients aux âges extrêmes de la vie ou en cas de pathologies rénales), l’association de différentes classes pharmacologiques (en particulier celles interférant avec certains transporteurs) et les modifications de fraction libre médicamenteuse.


Un autre paramètre est largement utilisé pour évaluer l’élimination d’un médicament de l’organisme : la demi-vie (t1/2). Cette dernière correspond au temps au terme duquel la concentration plasmatique a diminué de moitié (figure 6.4).


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May 4, 2017 | Posted by in GÉNÉRAL | Comments Off on 6: Les caractéristiques pharmacocinétiques des médicaments après administration par voies intravasculaires et extravasculaires

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