Partie 6 Hématologie – Oncologie
Prescription d’un protocole de chimiothérapie
Thérapies moléculaires ciblées
Leucémies aiguës-protocole d’induction
Leucémie lymphoïde chronique maladie de Waldenstrom chimiothérapie
Lymphomes non hodgkiniens de faible malignité-chimiothérapie
Lymphomes non hodgkiniens de grande malignité-chimiothérapie
Maladie de Hodgkin-chimiothérapie
Aplasie suite à une chimiothérapie
CHIMIOTHÉRAPIE
FICHE MALADIE
DÉFINITION
Traitement spécifique contre les cellules cancéreuses, la chimiothérapie administre une substance chimique qui diffuse dans l’organisme en bloquant la reproduction des cellules atteintes, mais aussi normales, ce qui peut entraîner des réactions toxiques des tissus sains.
RÈGLES GÉNÉRALES
• Intégrer la chimiothérapie dans la stratégie thérapeutique.
• Préciser les enjeux qui conditionnent la réalisation du traitement :
• Surveiller les paramètres suivants :
• Apprécier les compétences de l’ensemble de l’équipe, tout le long de la chaîne de la chimiothérapie : ne pas hésiter à référer à des structures plus spécialisées pour ne pas entraîner de pertes de chance.
• Présenter le traitement au patient.
• Prescrire la chimiothérapie : établie par le médecin prescripteur, précisant l’identité du patient, le poids, la taille, la surface corporelle, le protocole précis de chimiothérapie utilisé, le nom de chaque médicament, la dose unitaire et la dose calculée, les jours d’administration, la chronologie si nécessaire, le mode d’administration, les traitements associés. Elle n’est validée qu’après vérification des bilans cliniques et biologiques autorisant sa réalisation. Elle précise les éléments de surveillance. Elle est enfin datée et signée par le médecin prescripteur.
• Préparer la chimiothérapie selon les bonnes pratiques.
• Administrer la chimiothérapie par du personnel infirmier formé.
COMPLICATIONS
AU DÉCOURS DE LA CHIMIOTHÉRAPIE
Les complications sont dominées par l’aplasie médullaire (neutropénie fébrile et thrombopénie).
• Si la température est > 38,5 °C et si les polynucléaires neutrophiles (PNN) sont < 1.109/L (1 000/mm3), il y a risque de choc septique.
• Hospitalisation, d’autant plus que PNN < 0,5.109/L (500/mm3).
• Rechercher une porte d’entrée, notamment le système implantable endoveineux.
• Prélèvement bactériologique.
• Antibiothérapie empirique à large spectre ; antibiothérapie plus ciblée si d’autres germes sont suspectés, notamment antifongique et antistaphylococcique.
• Pas d’indication de facteurs de croissance hématopoïétiques.
Une neutropénie fébrile doit faire discuter, lors de la cure suivante de chimiothérapie :
• Elle est jugée sévère si elle se traduit cliniquement ou si les plaquettes sont < 10.109/L (10 000/mm3).
Réaction inflammatoire très douloureuse altérant la capacité à s’alimenter normalement.
Le simple érythème peut se transformer en ulcération et doit être traité.
• Réaliser le bilan préthérapeutique : biologique (hémogramme, bilan rénal, hépatique, cardiaque), clinique et radiologique (TDM ou IRM).
• éliminer tout foyer infectieux latent ou évolutif ;
• rechercher les différentes affections (rénale, cardiaque, hépatique) ;
• évaluer le capital veineux en vue de la pose d’un système implantable endoveineux (SIEV).
• S’assurer de l’information du patient sur le traitement et les effets secondaires.
• Vérifier la prescription nominative, datée, signée par le prescripteur.
• Contrôler la dose avec la surface corporelle.
• Vérifier le bilan biologique.
• Se référer aux modalités d’injection selon le protocole écrit (hydratation, mode d’injection, protection de la lumière).
• Prendre connaissance des prescriptions complémentaires (antiémétiques, corticoïdes).
• Préparer les produits à administrer en prenant les précautions nécessaires ou réceptionner les produits préparés par l’unité spécialisée et contrôler le nom du patient, des produits, des doses préparées.
• Réaliser l’injection IV dans la chambre implantable en respectant les méthodes recommandées, après avoir bien installé le patient et lui avoir donné la possibilité de se déplacer ensuite, s’il le souhaite, avec un pied à sérum à roulettes.
• Respecter rigoureusement le déroulement du protocole prescrit ; noter sur le dossier les produits administrés et les réactions éventuelles du patient ainsi que la tolérance psychologique.
• Demander au patient de signaler toute réaction anormale et assurer pendant l’administration une surveillance rapprochée et régulière.
• Prendre les mesures nécessaires pour prévenir ou traiter les effets secondaires.
• Nausées, vomissements (antiémétique, environnement calme, hygiène alimentaire).
• Troubles intestinaux (diarrhée, constipation).
• Sécheresse buccale (alimentation liquide, boisson).
• Ulcérations buccales, aphtes (bains de bouche, antiseptiques et antifongiques, hygiène buccale et dentaire, brosse souple, dentifrice sans alcool).
• Toxicité hématologique (baisse des globules blancs, avec déficit des défenses immunitaires et risque infectieux, baisse de l’hémoglobine ou anémie avec fatigue intense et dyspnée, baisse des plaquettes avec risque hémorragique).
• Autres toxicités, rénale, cardiaque, pulmonaire, neurologique : surveillance de la diurèse, TA, ECG, rythme respiratoire, crampes, convulsions, fièvre.
L’information du patient et de ses proches sera claire, répétée, adaptée, et concernera :
• les effets de la chimiothérapie sur le fonctionnement de la cellule saine et de la moelle osseuse ;
• les moyens de prévenir l’infection : éviter les foules, pratiquer les soins d’hygiène appropriés et se laver les mains soigneusement. Signaler tout signe de fièvre, frissons, saignement de nez, ecchymose, selles foncées (cf. Fiche technique p. 599) ;
• la mise en place de mesures visant à éviter l’hémorragie, l’interdiction de l’ASPIRINE ;
• la prévention des nausées et vomissements :
• réduire les stimuli causés par les odeurs, en particulier celles des aliments ; préférer les repas tièdes, sans excitant, de digestion facile, fractionnés ; boire en petite quantité ; 6 repas légers par jour ; surveiller la courbe de poids et préconiser une alimentation plus riche pour éviter une perte de poids trop importante ;
• préférer la position semi-assise lors de l’apparition des nausées ;
• réaliser des bains de bouche associés à la chimiothérapie à distance des repas ;
• l’importance d’un apport liquidien suffisant pour prévenir la déshydratation et le déséquilibre électrolytique ;
• les signes de stomatites douloureuses : expliquer l’importance de l’hygiène buccale et prévoir une ordonnance afin de traiter une mycose si nécessaire ;
• la perte transitoire éventuelle des cheveux selon le type de médicament utilisé. Aider le patient à se procurer une perruque ou une foulard, un bandeau ;
• les risques de stérilité ou atteinte du système reproducteur et le recours possible au CECOS ;
• le risque de fatigue : apprendre à la nommer, l’évaluer et à s’adapter à cet état en limitant les activités ;
• l’importance du rôle des proches dans le soutien et le bon déroulement du traitement.
CONSULTATION INFIRMIÈRE D’ANNONCE
La consultation infirmière d’annonce s’inscrit dans un dispositif pluridisciplinaire médical, paramédical, psychologique et social qui vise à accompagner le patient pour lequel le diagnostic d’une maladie grave vient d’être confirmé.
Il explique le projet thérapeutique à adopter.
L’infirmière s’assoit auprès du patient.
• évaluer le degré d’anxiété ;
• évaluer son état nutritionnel ;
• évaluer ses difficultés (s’il y en a) sociales et socioprofessionnelles.
L’entretien dure environ 1 heure.
La communication et la relation de confiance quecette consultation infirmière propose sont incontournables.
CONDUITE À TENIR EN CAS D’EXTRAVASATI ON
• Arrêter immédiatement la perfusion.
• Avec une seringue de 10 mL connectée directement sur l’aiguille ou le cathéter, aspirer 3 à 5 mL de sang pour retirer le maximum de cytotoxique.
• Délimiter le contour du territoire extravasé avec un stylo-feutre.
• Appeler le médecin (qui appellera éventuellement le chirurgien).
• En attendant le médecin, noter les observations sur le dossier.
Faire comprendre l’importance du risque infectieux
• Faire le bilan des connaissances du malade.
• Expliquer la relation entre chimiothérapie et risque infectieux : diminution des leucocytes (GB) qui protègent de l’infection ; le risque se produit à partir de J8 jusqu’à J15 ou plus.
• Expliquer la prise de température buccale ou axillaire et l’évaluation d’une variation anormale (> 38,5 °C ou < 36,5 °C) à signaler au médecin.
• Contrôler les portes d’entrée : dents, bouche, gorge, voies urinaires, intestin (constipation), anus, système implantable endoveineux (SIEV), plaie.
Délai : avant la sortie du patient.
Enumérer avec lepatient les mesures àadopter et leurmise en pratique (en tenant compte de son millrusoàiocelsurel et familial) :
Évaluation : vérifier l’autonomie du patient, sa prise en charge.
• Encourager le patient à poursuivre ces actions à domicile.
• Vérifier que le patient a intégré les connaissances (reformulation).
• Appliquer les prescriptions médicales à la survenue des signes :
Évaluation : noter les initiatives et les délais de réaction.
CATHÉTER VEINEUX CENTRAL (KTC)
Ce dispositif permet d’administrer les traitements intraveineux, l’alimentation parentérale, assurer des transfusions sanguines tout comme administrer des produits de contrastes afin de réaliser des examens radiologiques.
Il permet également de faire des prélèvements de sang veineux directement sur le cathéter.
Pose d’un cathéter veineux central (KTC) : rôle de l’IDE
Expliquer le déroulement du soin au patient pour obtenir sa compliance.
Préparer l’ensemble du matériel nécessaire à la pose par le médecin :
• Habillage de l’opérateur : casaque stérile, charlotte, masque, gants stériles et lunettes de protection.
• Habillage de l’aide : casaque à usage unique (UU) non stérile, charlotte, gants stériles, masque.
• Habillage du patient : une charlotte et un masque.
• Préparation cutanée : tondeuse (si besoin pour raser la zone ponctionnée), compresses stériles, antiseptique fort, sérum physiologique, champ opératoire fenêtré, champs opératoires stériles pour l’ensemble des matériels et un carré de protection absorbant à mettre sous la nuque du patient.
• Anesthésie locale : un flacon de xylocaïne 1 %, une seringue de 10 cc, une aiguille pompeuse et une aiguille sous-cutanée.
• Matériel propre au cathéter : cathéter central, lignes de perfusion, rampe à 4 robinets, robinets trois voies, pansements stériles adhésifs transparents, compresses stériles, antiseptique fort, poche de soluté (sérum physiologique ou glucosé), fil de suture, bistouri, seringue de 10 cc, aiguilles.
• Élimination des déchets : container à aiguilles, sac poubelle de type DASRI.
• Hygiène des mains : savon antiseptique et solution hydro-alcoolique.
Rôle de l’infirmière lors du soin :
• Friction hydro-alcoolique des mains.
• Préparer l’ensemble des matériels tout en respectant les conditions de stérilité de chacun.
• Réaliser la dépilation de la zone à ponctionner si besoin.
• Réaliser l’asepsie cutanée du patient en 3 temps : toilette locale avec savon antiseptique, rincer, sécher, appliquer un antiseptique fort largement sur la zone à ponctionner, puis poser le champ stérile fenêtré sur cette zone.
• Lavage antiseptique des mains.
• Mettre les gants stériles et préparer la ligne de perfusion dans les conditions de stérilité.
• Aider le médecin à l’habillage stérile.
• Lorsque le KTC est posé, le médecin vérifie avec l’infirmière la bonne perméabilité du cathéter.
• Un contrôle radiologique est fait sitôt la pose, avant de débuter toute thérapeutique.
• Noter la date de la pose sur le pansement et transmettre sur le dossier de soin.
Surveillance et réfection du pansement du KTC
• Le système doit être hermétiquement clos.
• La ligne de perfusion doit être renouvelée toutes les 72 heures.
• Le pansement au niveau du KTC doit être renouvelé tous les 7 jours : l’habillage de l’infirmière est ici stérile.
• Vérifier trois fois par jour : la bonne perméabilité duKTC, le point de ponction et l’aspect du pansement.
• Si le pansement est souillé : le renouveler immédiatement dans les conditions de stérilité exigées.
Le retrait d’un KTC se réalise par l’infirmière sous prescription médicale.
Expliquer le soin au patient pour qu’il collabore de façon adaptée.
• Pour le patient : charlotte et masque.
• Pour l’IDE : casaque à usage unique (UU) non stérile, charlotte, masque, lunettes de protection, gants stériles.
• Matériel : compresses stériles, antiseptique fort, sérum physiologique, pansement stérile sec, bistouri, champ stérile, un petit pot stérile fermant hermétiquement, conteneur à aiguilles et sac d’élimination type DASRI.
• Friction hydro-alcoolique des mains.
• Lavage antiseptique des mains.
• Réaliser l’ablation de la suture du KTC à la peau.
• Demander au patient de bloquer sa respiration et retirer le KTC.
• Réaliser une compression sur le point de ponction pendant 5 minutes pour réaliser l’hémostase.
• Faire un pansement stérile sec au point de ponction.
• Sectionner stérilement l’extrémité distale du KTC et mettre cette extrémité dans un petit pot stérile pour une analyse bactériologique systématique sur prescription médicale.
KTC SPÉCIFIQUES : LES SITES IMPLANTABLES POUR CHIMIOTHÉRAPIE (PAC)
Dans le cadre des chimiothérapies, le SIEV utilisé préférentiellement est une chambre implantable, appelée également port-à-cathéter (PAC). Ce type de cathétérisme se réalise au bloc opératoire par un chirurgien et sous anesthésie locale.
• Réaliser une friction hydro-alcoolique des mains.
• Mettre une tenue de protection : casaque UU non stérile, masque et charlotte.
• Faire une première antisepsie cutanée de la zone du site implantable.
• Réaliser une friction hydro-alcoolique des mains.
• Déposer sur le champ stérile de table, le matériel stérile et les produits nécessaires.
• Se laver les mains (lavage antiseptique).
• Faire une 2e antisepsie de la peau en respectant le temps de pose de l’antiseptique, rincer au sérum physiologique et sécher par tamponnement.
• Appliquer un champ stérile fenestré autour du site à ponctionner.
• Appliquer une compresse sèche stérile au niveau du site pour le protéger.
• Monter la ligne de perfusion jusqu’au raccord qui s’adaptera à l’aiguille de Huber dans un second temps stérilement.
• Purger le circuit de perfusion.
• Remplir la seringue de 20 mL de sérum physiologique 0,9 %.
• Adapter la seringue contenant les 20 mL de sérum physiologique à l’extrémité distale de l’aiguille de Huber.
• Purger l’aiguille de Huber et clamper le prolongateur de l’aiguille en laissant la seringue contenant le reste de sérum physiologique adaptée au dispositif.
• Accrocher la perfusion au pied à sérum délicatement (sans déstériliser ses gants).
• Maintenir les bords du site implantable entre deux doigts (pouce et index en général).
• Piquer perpendiculairement au centre de la membrane jusqu’à l’obtention d’une butée du métal.
• Déclamper le prolongateur de l’aiguille et injecter 5 mL de sérum physiologique à l’aide de la seringue préremplie et adaptée au système clos du dispositif constitué.
• Rechercher ensuite un reflux dans le raccord, s’il est présent, rincer et clamper.
• Diriger l’aiguille de Huber vers le sternum du patient afin que le biseau de l’aiguille soit bien orienté à l’intérieur du site vers la veine centrale ponctionnée.
• Mettre une compresse sèche pliée en deux sous les ailettes (ou la courbure) de l’aiguille et une autre au-dessus.
• Appliquer le pansement occlusif en s’assurant que le clamp du raccord de l’aiguille est en dehors.
• Retirer la seringue de sérum physiologique et adapter la ligne de perfusion purgée préalablement au prolongateur de l’aiguille de Huber.
• S’assurer de l’absence de douleur et d’un débit continu.
• Régler le débit de la perfusion (calculé selon la prescription au préalable).
• Enlever les gants et les habits protecteurs.
• Enlever le masque et la charlotte du patient.
• Identifier la poche de perfusion (nom, date et heure de pose).
• Dater le pansement occlusif.
• Se laver les mains (lavage simple).
• Noter l’acte dans le dossier de soin du patient et sur la fiche de surveillance.