6: Fractures du col du fémur : réduction et ostéosynthèse

6 Fractures du col du fémur : réduction et ostéosynthèse




Traduction : Thomas Rousseau




Classification


Il existe plusieurs classifications permettant de comprendre les fractures du col fémoral et de les relier à des facteurs pronostiques de nécrose aseptique, de pseudarthrose, de stabilité. Les classifications les plus connues sont celle de Garden (1964) et celle de Pauwels (1935)3,4.



Rappel historique


De nombreux auteurs ont classé les fractures du col fémoral en fonction du pronostic lié à cette fracture. La première classification des fractures du col du fémur a été publiée en 1823 par Cooper, qui divisait ces lésions en fractures intracapsulaires et fractures extracapsulaires5. Waldenström en 1924 et Cotton en 1927 ont classé ces fractures en fonction de leur déplacement ; la fracture était soit en abduction, soit en adduction6,7. En 1955, Watson-Jones a développé une classification fondée sur l’âge du patient. Il concluait qu’un type fracturaire se retrouvait en fonction d’un groupe d’âge donné8. Des systèmes de classification raisonnés et durables ont finalement été mis au point par Pauwels en 1935, Linton en 1941 et Garden en 19613,4,9,10.



Classification de Garden


En 1964, Garden et al. ont créé une classification des fractures du col du fémur divisée en quatre types fracturaires (de Garden I à Garden IV). La classification dépend de la position et du déplacement de la tête fémorale sur une radiographie de face (fig. 6-1). Dans leur système, le type I inclut des fractures incomplètes passant par le col du fémur avec un fragment proximal en valgus. Le type II comprend des fractures complètes passant par le col du fémur mais sans déplacement entre les fragments proximaux et distaux. Le type III inclut des fractures complètes passant par le col fémoral avec un déplacement en varus du fragment proximal intéressant moins de 50 % du diamètre du col du fémur. Le type IV comprend des fractures en déplacement en varus de plus de 50 % du col fémoral ou une dissociation complète des fragments proximaux et distaux.



Cette classification renseigne sur la probabilité de développer une nécrose aseptique de la tête fémorale. Les patients avec une fracture de type I ont une probabilité de nécrose inférieure à 5 %. Dans les types II, cette complication est inférieure à 10 %. Cependant, la probabilité de nécrose aseptique est supérieure à 50 % dans les fractures de type III et supérieure à 80 % dans les fractures de type IV. La classification de Garden reste la plus importante et la plus communément utilisée pour classer les fractures fémorales et déterminer ainsi les stratégies de traitement de ces lésions.





Classification de Linton


En 1941, Linton a présenté sa classification qui incluait trois types de fractures du col fémoral en fonction de l’angulation entre les travées médianes du col fémoral et les travées de la corticale médiale du fémur. L’angle normal sur la radiographie de face est de 160° (fig. 6-4). Linton considérait de plus le déplacement de l’axe central de la tête fémorale par rapport à l’axe central du col sur une vue radiographique de face, cet angle étant habituellement représenté par une ligne droite de 180°. Au final, les fractures sont divisées selon les catégories suivantes : (1) les fractures en adduction, avec un déplacement en varus et un angle entre l’axe fémoral médian et les travées de la corticale médiale du fémur inférieur à 160° ; (2) les fractures en abduction, avec un déplacement en valgus et un axe cervical médian parallèle aux travées de la corticale médiale du fémur ; et (3) les fractures intermédiaires, qui correspondent à un déplacement à mi-chemin entre les fractures en adduction et les fractures en abduction.




Diagnostic


Un examen clinique approfondi ainsi que des radiographies complémentaires sont demandés pour effectuer un diagnostic précis de fracture du col fémoral. Les signes cliniques caractéristiques de patients atteints de fracture du col fémoral sont : un raccourcissement et une rotation externe du membre lésé, une douleur à la mobilisation active et passive, et une incapacité de marcher ou de poser le pied par terre.


Bien que ces signes soient visibles chez la majorité des patients atteints d’une fracture du col fémoral, cette présentation clinique n’est pas toujours retrouvée. Ainsi, en cas de patient présentant une fracture incomplète en abduction, avec une impaction en valgus, ou une fracture de fatigue non déplacée, la présentation clinique peut être fruste, voire absente. L’interrogatoire et le recueil des antécédents doivent être complets. Il s’agit de rechercher les antécédents médicaux du patient qui pourraient orienter vers une fracture de type pathologique ou une fracture secondaire à une irradiation.






Traitement conservateur


Le traitement conservateur des fractures intracapsulaires est limité. Ce traitement conservateur est parfois indiqué en cas de patient fragilisé, dément ou grabataire, ou atteint de pathologies importantes, pour lesquelles un traitement chirurgical serait à haut risque de mortalité, que ce risque soit lié à la chirurgie ou à l’anesthésie.


Dans certains cas, un traitement non chirurgical peut être une option chez des patients dont la fracture est impactée en valgus, non déplacée (classée Garden I ou Pauwels I). L’engrènement doit être visualisé sur les radiographies de face et de profil et l’alignement axial du col fémoral doit être intact. La prise en charge conservatrice de ces fractures commence par du repos avec immobilisation dans le lit tant que persistent les phénomènes douloureux. La mobilisation est graduelle et progressive, en commençant par la mise au fauteuil, la marche sans appui à l’aide de cannes ou de tout autre système d’aide à la marche, puis l’appui partiel du membre inférieur lésé. Après 6 à 8 semaines, l’appui complet peut être débuté. Les contrôles radiographiques doivent être réguliers, notamment au début de la prise en charge, après la reprise d’un appui partiel, et juste avant la reprise d’un appui complet. Dans la littérature, ces traitements conservateurs restent encore controversés. Raaymakers et al. ont rapporté des résultats satisfaisants après un traitement conservateur, mais ils ont aussi observé un taux élevé de déplacements secondaires, en particulier chez les patients âgés11,12. Ces auteurs ont montré une instabilité présente chez 41 % des patients de plus de 70 ans contre seulement 7 % des patients en bonne santé de moins de 70 ans. Shuquiang et al. ont aussi montré un déplacement chez 41 % des patients de leur série. Le taux de déplacement le plus important était observé dans la tranche d’âge de 60 à 80 ans13. Bentley, Hilleboe et al., et Jensen et Hogh ont rapporté des taux de déplacement ou de désengrènement allant de 10 à 27 % en cas de traitement conservateur1416. Raaymakers et al. ont observé de plus une corrélation élevée entre l’instabilité secondaire et les comorbidités11. Verheyen et al. ont montré que la stabilité de la fracture était liée à différents facteurs intrinsèques et extrinsèques comme l’âge, les comorbidités, l’angle de Pauwels et la rétroversion17.


Compte tenu de ces résultats, de plus en plus d’auteurs recommandent une ostéosynthèse primaire chirurgicale en cas de fracture engrenée. Lorsque les comorbidités du patient ne présentent pas un risque chirurgical important, la plupart des chirurgiens ont recours à une stratégie d’ostéosynthèse interne prophylactique en cas de fracture engrenée ou non déplacée du col fémoral.

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Jul 2, 2017 | Posted by in GÉNÉRAL | Comments Off on 6: Fractures du col du fémur : réduction et ostéosynthèse

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