6: ECG et pacemakers, défibrillateurs et électrophysiologie

6 ECG et pacemakers, défibrillateurs et électrophysiologie



Ce chapitre décrit les matériels intracardiaques les plus couramment utilisés et montre comment l’électrophysiologie cardiaque peut être utilisée pour la prise en charge des arythmies.


L’ECG 12 dérivations est essentiel pour le diagnostic des troubles de conduction cardiaques et des arythmies, et par conséquent pour décider de quelle manière prendre en charge le patient, en particulier pour ce qui concerne les appareils tels que pacemakers ou défibrillateurs implantables. Après que l’un de ces appareils a été mis en place, l’ECG 12 dérivations peut être utilisé pour reconnaître le type de matériel et diagnostiquer les défauts de fonctionnement.


Des enregistrements intracardiaques peuvent être pratiqués à l’aide d’un câble isolé comportant une ou plusieurs électrodes métalliques, monté par voie veineuse percutanée jusqu’aux cavités cardiaques. De tels enregistrements (ECG intracardiaque) peuvent montrer la progression de l’onde d’excitation à travers le cœur, plus fidèlement que l’ECG de surface.




PACEMAKERS


Les pacemakers ainsi que d’autres matériels cardiaques sont de plus en plus répandus, spécialement chez les sujets âgés. Bien qu’étant habituellement implantés et surveillés par des rythmologues, ces appareils se rencontrent fréquemment dans un large éventail de contextes cliniques. Les différents types de pacemakers peuvent être caractérisés par le nombre de cavités cardiaques concernées (voir le tableau 6.1, page 306). Les patients sont souvent porteurs d’une carte indiquant le type d’appareil implanté, lequel peut également être identifié par ses caractéristiques visibles sur une simple radiographie de thorax. Une radiographie thoracique est, par conséquent, un élément indispensable de la surveillance de tout pacemaker, et c’est pourquoi ce chapitre comporte une série de clichés radiographiques. Il est essentiel que le type d’appareil soit connu avant l’interprétation de l’ECG.


Tableau 6.1 Types d’appareils et indications cliniques.















































Fonction Chambre(s) où l’électrode est implantée Indications cliniques
Monochambre    
VVI Ventricule droit Fibrillation auriculaire lente ou fibrillation auriculaire avec pauses
Fonction d’appoint avec maladie du sinus ou BAV
Syndrome bradycardie-tachycardie
Patients très âgés
AAI Oreillette droite Maladie du sinus en l’absence de BAV
Syncope sinocarotidienne
VVI/DAI Ventricule droit Survivant d’arrêt cardiaque dû à FV ou TV
TV soutenue spontanée responsable de syncope ou d’atteinte hémodynamique
TV soutenue ou arrêt cardiaque et fraction d’éjection < 35 % et classe NYHA* non < III
Risque familial de mort subite (cardiomyopathie hypertrophique, syndrome du QT long, syndrome de Brugada, dysplasie arythmogène du ventricule droit )
Réparation chirurgicale d’une cardiopathie congénitale
TV non soutenue et fraction d’éjection < 35 % avec classe NYHA* non < III, et antécédents d’infarctus du myocarde (de plus de 4 semaines) et tachycardie ventriculaire inductible par moyens électrophysiologiques
Fraction d’éjection < 30 % et complexes QRS > 120 ms avec absence d’infarctus du myocarde dans les 4 semaines précédentes
Double chambre    
DDD Ventricule droit
Oreillette droite
BAV habituellement du troisième degré ou bloc du deuxième degré type Mobitz II
Syndrome bradycardie-tachycardie
DDD/DAI Ventricule droit (sonde pour choc)
Oreillette droite (sonde pour stimulation)
Indications idem VVI/DAI mais patients nécessitant une fonction pacemaker DDD
Biventriculaire    
Resynchronisation cardiaque Ventricule droit
Ventricule gauche, sinus
coronaire ± oreillette droite
Insuffisance cardiaque NYHA classe III ou IV* et fraction d’éjection < 35 % avec soit bloc de branche gauche et complexes QRS > 150 ms, soit complexes entre 120 et 150 ms avec asynchronisme à l’échographie
Resynchronisation cardiaque + DAI Ventricule droit (sonde pour choc)
Ventricule gauche (sonde pour stimulation)
Sinus coronaire ± oreillette droite (sonde pour stimulation)
Indications idem resynchronisation et DAI
Groupes de patients bénéficiant de ce traitement combiné non encore clairement individualisés

* Classe III ou IV de la New York Heart Association : insuffisance cardiaque modérée/sévère.


Tous les pacemakers remplissent deux fonctions fondamentales : l’entraînement et la détection. La plupart des données de l’ECG dans le fonctionnement normal ou anormal du pacemaker peuvent s’expliquer en termes de fonctions d’entraînement et de détection.






PACEMAKERS IMPLANTÉS DANS LE VENTRICULE DROIT (VVI)


C’est l’un des types de pacemaker les plus communément utilisés, possédant une sonde unique implantée dans le ventricule droit, généralement à la pointe (figure 6.1). La sonde détecte l’activité électrique du ventricule droit, et, si aucune activité cardiaque spontanée n’est perçue, stimule le ventricule après un délai prédéterminé. Il faut noter que les sondes de stimulation polaires ou bipolaires ne peuvent être facilement différenciées sur un simple cliché thoracique. Les indications de la stimulation VVI sont résumées dans l’encadré 6.1





ASPECT DE L’ECG


Lors de la stimulation ventriculaire droite bipolaire, l’ECG est caractérisé par un « spike » de stimulation suivi d’un complexe QRS large ayant l’aspect d’un BBG (du fait de la dépolarisation cardiaque prenant son origine dans le ventricule droit à partir de l’extrémité de la sonde) [figure 6.2]. Les spikes de stimulation varient en taille et en morphologie en fonction des électrodes et des patients, et ne sont pas visibles dans toutes les dérivations.



Avec l’entraînement unipolaire, au cours duquel le circuit électrique est situé entre l’extrémité de la sonde et le boîtier du pacemaker, le spike de stimulation est très ample, comparé à celui de la stimulation bipolaire, dans laquelle les pôles sont très près l’un de l’autre (figure 6.3).



Si le pacemaker détecte une activité cardiaque spontanée, la stimulation sera inhibée pendant une période préétablie. L’ECG montrera alors une stimulation intermittente – alternant des moments de rythme ventriculaire stimulé et de rythme ventriculaire de base (figures 6.4 et 6.5).




Les tracés ECG des patients programmés pour fournir une fonction « d’appoint » afin de pallier un rythme lent occasionnel peuvent ne pas montrer le moindre battement de stimulation, si le rythme cardiaque intrinsèque excède la fréquence programmée de stimulation.


Le rythme auriculaire sous-jacent peut être évalué sur l’ECG, et peut être important pour le clinicien, ayant par exemple à prendre une décision concernant l’anticoagulation. On peut observer un rythme sinusal, une fibrillation auriculaire (figure 6.4), un flutter auriculaire (figure 6.5) ou un BAV complet (figure 6.6).


















PACEMAKERS IMPLANTÉS DANS L’OREILLETTE DROITE (AAI)


Il s’agit ici d’un mode de stimulation rarement utilisé, avec une sonde unique implantée dans l’oreillette droite, habituellement dans l’auricule (figure 6.7). Ce type de stimulation détecte l’activité spontanée dans l’oreillette droite, et déclenche la stimulation si le nœud sinusal est défaillant, au-dessous d’un niveau prédéterminé.



Les indications de la stimulation type AAI sont résumées dans l’encadré 6.2.






PACEMAKERS DOUBLE CHAMBRE (DDD)


Les pacemakers de type DDD sont des systèmes fréquemment utilisés, comportant deux sondes, l’une implantée dans l’oreillette droite, et l’autre dans le ventricule droit (figure 6.9).


Les cavités auriculaire et ventriculaire droites sont toutes deux stimulées. La sonde de stimulation auriculaire déclenche sa stimulation lorsque aucune activité auriculaire n’est détectée durant un intervalle de temps prédéterminé. Un espace PR maximum est également préréglé. Si ce temps est dépassé (à la suite soit d’une onde P spontanée, soit d’une onde P stimulée) et si aucun battement ventriculaire n’est détecté, c’est alors que se déclenche la stimulation ventriculaire.


La stimulation double chambre est destinée aux situations énumérées dans l’encadré 6.3.




ASPECT DE L’ECG


Lorsque l’oreillette et le ventricule sont tous deux stimulés, un spike de stimulation auriculaire est suivi d’une onde P stimulée, puis un spike de stimulation ventriculaire est suivi d’un complexe ventriculaire stimulé (figure 6.10).



Quand la fréquence auriculaire spontanée excède le seuil de stimulation auriculaire, c’est alors qu’apparaît le « dépistage » auriculaire. La détection auriculaire entre en jeu, mais l’intervalle PR spontané est de durée supérieure au délai AV programmé – déclenchant la stimulation ventriculaire. L’ECG ne montre aucun spike de stimulation auriculaire, mais des ondes P spontanées suivies de spikes de stimulation ventriculaire et des battements ventriculaires de stimulation (figure 6.11).



La stimulation auriculaire avec « dépistage » ventriculaire serait une option peu fréquente, quoique théoriquement possible. Celle-ci surviendrait si la fréquence auriculaire spontanée était plus basse que le seuil de stimulation auriculaire, l’espace PR étant par ailleurs plus court que le délai AV programmé. De ce fait, il y aurait une stimulation auriculaire et des complexes QRS spontanés. L’ECG montrerait des spikes de stimulation auriculaire, des ondes P stimulées, et des battements ventriculaires spontanément conduits.


Lors de la stimulation intermittente, l’activité spontanée auriculaire ou ventriculaire sera détectée – conduisant à l’inhibition de la stimulation de la chambre concernée. Si l’intervalle PR maximal programmé n’est pas dépassé, la contraction auriculaire détectée pourra être suivie d’un battement AV conduit et d’un complexe QRS détecté. L’ECG montrera alors un rythme spontané alternant avec une stimulation intermittente (figure 6.12).



May 31, 2017 | Posted by in MÉDECINE INTERNE | Comments Off on 6: ECG et pacemakers, défibrillateurs et électrophysiologie

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