58. Consommation de produits

Chapitre 58. Consommation de produits



État du problème



Consommation de produits à l’adolescence : un problème préoccupant


Consommation de produitsLes premières expériences de prises de substances psychoactives débutent généralement à l’adolescence. En effet, l’adolescence est un moment propice aux expérimentations et à la recherche de sensations. C’est également à cette période que vont se mettre en place les habitudes de consommation futures. Comment, dans notre société actuelle, où l’acte de consommer est une valeur fondamentale, résister à l’essai de consommation d’un produit? Reste que certains jeunes vont se limiter à l’essai, d’autres vont s’installer dans une véritable conduite d’abus et de dépendance.

En effet, la consommation de produits n’est pas un chemin rectiligne et uniforme conduisant à la toxicomanie (Alvin & Marcelli, 2005). Il est important de ne pas stigmatiser le jeune consommateur et de ne pas le considérer comme «toxicomane» dès l’adolescence. Il est nécessaire de bien différencier les niveaux et les modalités de consommation, de façon à repérer les consommations «à risque».

Une consommation régulière peut débuter à l’adolescence et des conduites de dépendance – tabagisme, alcoolisme, toxicomanie – peuvent s’installer durant cette période. La consommation simultanée de plusieurs produits et la recherche systématique d’excès («se défoncer») peuvent correspondre au début d’un comportement «dépendant» d’allure toxicomaniaque (Catry et al., 2006). Par ailleurs, le risque de dépendance à un produit est d’autant plus élevé que le produit est expérimenté tôt dans la vie.

Du fait des risques occasionnés par une consommation problématique, une conduite addictive ou une conduite de dépendance, les consommations de produits chez les jeunes font l’objet d’une attention et d’une préoccupation particulière de la part des pouvoirs publics et des acteurs de santé et de prévention.

En France, l’action des ministères concernés par la lutte contre la drogueDrogues et la préventionPrévention des dépendances est coordonnée par la Mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie (MILD), dont les champs d’intervention concernent les drogues illicites, mais aussi l’abus et la dépendance au tabac et à l’alcool. Le décret de novembre 2006, qui remplace le texte de mai 1992 pris en application de la loi Évin, interdit totalement l’usage du tabac dans les lieux publics, notamment à l’hôpital et en milieu scolaire. Cette mesure s’applique depuis le 1er février 2007. De plus, l’Observatoire français des drogues et des toxicomanies (OFDT) a mis en place un dispositif d’observation des consommations de produits à l’adolescence, qui repose sur 3 enquêtes : HBSC, Espad, Escapad. Ces enquêtes s’intéressent à la fréquence et à l’évolution des usages de produits.




• L’enquête HBSC(Health Behaviour in School-Aged Children), soutenue par l’Organisation mondiale de la santé, s’intéresse à des élèves de 11, 13 et 15 ans (Legleye et al., 2008);


• l’enquête Espad(European School Survey Project on Alcohol and Other Drugs) cible les élèves de 16 ans (Legleye et al., 2009a);


• l’enquête Escapad (Enquête sur la santé et les consommations lors de l’appel de préparation à la défense) concerne des adolescents de 17 ans (Legleye et al., 2009b). Cette enquête nationale, qui est réalisée lors de la journée d’appel et de préparation à la défense, déborde le milieu scolaire, contrairement aux deux précédentes.


Différents produits


Par «produits», on entend «substances psychoactives». On parle aussi parfois de «drogues». Ces substances sont devenues plus nombreuses, mais surtout plus accessibles, au cours des dernières décennies.

Les produits psychoactifs sont variés : tabac, alcool, cannabis, stupéfiants, produits détournés de leur usage habituel (médicaments psychotropes et antalgiques, solvants). Ces produits peuvent être licites (tabac, alcool) ou illicites (haschich…). Les produits qui entraînent la plus forte dépendance ne sont pas forcément illicites (tabac).

Les produits les plus fréquemment expérimentés à l’adolescence sont l’alcool, le tabac et le cannabis. On peut retrouver une consommation simultanée de plusieurs produits (cumul) ou des polyconsommations; en particulier l’association tabac-alcool ou tabac-alcool-cannabis. Les poly-intoxications augmentent avec l’âge.

De nombreux autres produits illicites existent (cocaïne, amphétamine, ecstasy, champignons hallucinogènes, LSD, héroïne, crack, GHB, kétamine, produits à inhaler…). Parfois, la consommation abusive concerne des médicaments anxiolytiques et hypnotiques. Ces consommations étant moins fréquentes à l’adolescence, nous nous limiterons ici aux consommations de tabac, d’alcool et de cannabis.

Si le produit a longtemps été placé au centre des problématiques de consommations de substances, la prise en compte du type de consommation et de ses déterminants est centrale actuellement.


Différents types de consommations – précisions terminologiques


Les modalités de consommations de produits à l’adolescence sont variées, et il est important de différencier l’expérimentation, l’usage, l’usage à risque ou l’usage problématique, l’abus, la dépendance. Le rôle du groupe est primordial à l’adolescence, et il est fondamental de bien distinguer la consommation groupale et festive, basée sur l’allégeance et les identifications aux pairs, et la consommation solitaire, autothérapeutique ou toxicomaniaque.

Plusieurs définitions existent (OFDT, 2009; Costes & OFDT, 2005 et 2009; Reynaud, 2006a; Legleye et al., 2009a; Bournot et al., 2009). Les principales classifications (DSM IV – TR, CIM 10) définissent l’abus de substance et la dépendance (cf.encadrés 58.1 et 58.2). Le DSM IV définit l’«abus», alors que la CIM-10 parle d’«utilisation nocive pour la santé».

ENCADRÉ 58.1







A. Mode d’utilisation inadéquat d’une substance conduisant à une altération du fonctionnement ou à une souffrance cliniquement significative, caractérisée par la présence d’au moins une des manifestations suivantes au cours d’une période de 12 mois :




1 – utilisation répétée d’une substance conduisant à l’incapacité de remplir des obligations majeures, au travail, à l’école, ou à la maison (par exemple, absences répétées ou mauvaises performances au travail du fait de l’utilisation de la substance, absences, exclusions temporaires ou définitives de l’école, négligences des tâches habituelles);


2 – utilisation répétée d’une substance dans des situations où cela peut être physiquement dangereux (par exemple lors de la conduite d’un véhicule ou en faisant fonctionner une machine alors qu’on est sous l’influence d’une substance);


3 – problèmes judiciaires répétés liés à l’utilisation d’une substance (par exemple, arrestations pour comportement anormal en rapport avec l’utilisation de la substance);


4 – utilisation de la substance malgré des problèmes interpersonnels ou sociaux, persistants ou récurrents, causés ou exacerbés par les effets de la substance (par exemple, conflits familiaux à propos des conséquences de l’intoxication, bagarres).


B. Les symptômes n’ont jamais atteint, pour cette classe de substance, les critères de la dépendance à une substance.

APA, 2000.

ENCADRÉ 58.2



Mode d’utilisation inadapté d’une substance conduisant à une altération du fonctionnement ou une souffrance, cliniquement significative, caractérisée par la présence de 3 (ou plus) des manifestations suivantes, à un moment quelconque d’une période continue de 12 mois :




1 – tolérance, définie par l’un des symptômes suivants :




(a) besoin de quantités notablement plus fortes de la substance pour obtenir une intoxication ou l’effet désiré,


(b) effet notablement diminué en cas d’utilisation continue d’une même quantité de la substance;


2 – sevrage, caractérisé par l’une ou l’autre des manifestations suivantes :




(a) syndrome de sevrage caractéristique de la substance,


(b) la même substance (ou une substance très proche) est prise pour soulager ou éviter les symptômes de sevrage;


3 – la substance est souvent prise en quantité plus importante ou pendant une période plus prolongée que prévu;


4 – il y a le désir persistant, ou des efforts infructueux, pour diminuer ou contrôler l’utilisation de la substance;


5 – beaucoup de temps est passé à des activités nécessaires pour obtenir la substance, à utiliser le produit, ou à récupérer de ses effets;


6 – des activités sociales, professionnelles ou de loisirs importantes sont abandonnées ou réduites à cause de l’utilisation de la substance;


7 – l’utilisation de la substance est poursuivie bien que la personne sache avoir un problème psychologique ou physique persistant ou récurrent susceptible d’avoir été causé ou exacerbé par la substance.

APA, 2000.

On distingue ainsi :




• l’expérimentation : au moins un usage au cours de la vie;



• l’usage au cours de l’année : une consommation au moins au cours de l’année;


• l’usage régulier : tabagisme quotidien; au moins 3 consommations d’alcool dans la semaine, ou au moins 10 épisodes de consommation d’alcool au cours des 30 derniers jours; au moins 10 consommations de cannabis dans le mois;


• l’abus ou l’usage nocif : consommation répétée induisant des dommages dans les domaines somatiques, psychoaffectifs ou sociaux, soit pour le sujet, soit pour son environnement (Bournot, 2009).


• la toxicomanie : décrit l’ensemble des éléments qui caractérise la dépendance d’un sujet à la consommation d’une drogue. Ce terme est souvent utilisé de manière péjorative dans le langage courant. Il importe donc d’être vigilant sur l’emploi des termes.


• la dépendance : désir compulsif du produit, difficulté à contrôler sa propre consommation, prise du produit pour éviter le syndrome de sevrage, besoin d’augmenter les doses pour conserver le même effet, place centrale prise par le produit dans la vie du consommateur (Bournot et al., 2009).

Par ailleurs, les notions d’«addiction» et de «conduites addictives» ont progressivement remplacé celles de toxicomanie, de «dépendance» et de «pharmacodépendance».

Les conduites addictives présentent plusieurs caractéristiques (Marcelli & Braconnier, 2008) :




• compulsion à s’engager dans le comportement (perte de la capacité de plaisir);


• maintien du comportement malgré ses conséquences négatives;


• obsession concernant le comportement;


• culpabilité au décours;


• présence de symptôme de sevrage psychologique ou physiologique lors de l’arrêt brutal.

L’addiction se caractérise par l’impossibilité répétée de contrôler un comportement, et la poursuite du comportement en dépit de la connaissance de ses conséquences négatives (Reynaud, 2006).

Les données récentes soulignent l’intérêt d’une approche commune des pratiques addictives. Les addictions représentent un vaste domaine et regroupent également des conduites addictives sans utilisation d’un produit extérieur (troubles des conduites alimentaires (TCA), jeu pathologique…). Nous nous limiterons dans ce chapitre aux addictions avec usage de produits, les TCA étant traités ailleurs (cf.chapitre 56).


Données épidémiologiques


Un certain nombre de données sur les consommations de produits permettent d’étudier la fréquence des consommations de substances chez les jeunes et l’évolution des usages. Ces données sont issues, entre autres, de l’OFDT, des enquêtes HBSC, ESPAD et ESCAPAD, et du Baromètre santé jeunes.

Les produits les plus consommés en France sont le tabac, l’alcool, le cannabis et les médicaments psychotropes et antalgiques.

Les consommations des jeunes se différencient de celles de leurs aînés par la place qu’occupe le tabac et l’importance du rôle tenu par le cannabis (Costes & Cadet-Taïrou, 2008).

La consommation de produits est dans l’ensemble plus fréquente chez les garçons. En revanche, l’usage de psychotropes et antalgiques est plus fréquent chez les filles. Chez les adolescents, l’expérimentation des drogues illicites autres que le cannabis est un phénomène assez rare. Enfin, les consommations de produits sont plus fréquentes chez des adolescents dont le parcours scolaire est difficile.

L’expérimentation des principaux produits se fait au cours de l’adolescence; souvent lors du collège. En 2008, d’après l’enquête Escapad, l’âge moyen de la première cigarette est 13,4 ans pour les garçons et 13,7 ans pour les filles; celui de la première ivresse est 14,9 ans pour les garçons et 15,3 ans pour les filles; celui du premier usage de cannabis est 15,1 ans pour les garçons et 15,3 ans pour les filles (Legleye et al., 2009b). Comparée aux autres pays européens, pour les jeunes de 16 ans, la France se situe :




• au 19e rang pour l’usage quotidien de tabac (plus de 10 cigarettes par jour);


• au 21e rang pour l’absorption régulière d’alcool;


• au 1er rang pour la consommation régulière de cannabis (Espad, 2004a et b).


Tabac


La baisse de la consommation quotidienne de tabac est continue depuis une dizaine d’années. En 2007, 60 % des adolescents de 16 ans déclarent avoir déjà fumé une cigarette au cours de leur vie. L’usage quotidien concerne 1 adolescent sur 6, sans différence entre les sexes (enquête Espad 2007 : Legleye et al., 2009a). Les motivations fortes à fumer les plus rapportées par les lycéens fumeurs sont la relaxation, le plaisir, et la diminution des émotions négatives, telles l’anxiété et la timidité (Chabrol et al., 2000). Se retrouvent aussi la recherche d’une stimulation intellectuelle, de la réduction de l’appétit, un moment de partage convivial avec les pairs, un sentiment de liberté («je fais ce que je veux!»). Fumer peut alors apparaître pour certains comme une élégante indifférence à sa propre santé, une inspiration romantique, un déni de la réalité. À l’âge où provoquer la destinée et incarner un idéal relèvent du besoin, l’adolescent joue avec le feu; il tente un compromis acrobatique entre une revendication d’autonomie et la nécessité d’un esclavage, d’une dépendance. S’agit-il d’un choix?


Alcool


L’alcool est le produit le plus répandu; 88 % des élèves de 16 ans en ont déjà bu au cours de leur vie. Il est également le premier produit expérimenté. Son expérimentation a souvent lieu avant l’adolescence : 70 à 80 % des jeunes avant 11 ans ont déjà goûté de la bière, du vin ou du champagne (Karila et al., 2007).

Les jeunes consomment de l’alcool moins régulièrement que leurs aînés, mais déclarent plus fréquemment des épisodes d’alcoolisation massive (Bournot et al., 2009). Il existe aussi des ivresses massives ponctuelles, proches du binge-drinking anglo-saxon.

La consommation régulière d’alcool concerne 1 élève de 16 ans sur 8 (enquête Espad 2007 : Legleye et al., 2009a); ce comportement est fortement masculin, et près de 60 % des jeunes de 17 ans déclarent avoir déjà été ivres.


Cannabis


C’est le produit illicite le plus consommé. En 2008, 42 % des jeunes de 17 ans ont fumé du cannabis au cours de leur vie (enquête Escapad 2008 : Legleye et al., 2009b). Les consommations «régulières» de cannabis ont tendance à augmenter pour les garçons de 14–19 ans et restent stable chez les filles de 14–19 ans (Choquet, 2009).


Médicaments psychotropes et antalgiques


Dans notre société, le recours au médicament à l’adolescence a beaucoup évolué (Duverger, 2010). Aujourd’hui, plus de la moitié des adolescents de 12–19 ans ont pris un médicament au cours du dernier mois; les psychotropes représentent 20 % de ces consommations; les antalgiques, 68 %. L’usage régulier d’un produit psychotrope est rare avant 15 ans, mais se banalise dès 16–17 ans. Et plus l’âge augmente, plus les consommations sont importantes. Rappelons que la France est le premier consommateur mondial de médicaments psychotropes, tous âges confondus.


Évolution récente des usages de substances psychoactives


L’expérimentation du tabac est en baisse depuis 2000, celle du cannabis depuis 2003. L’expérimentation d’alcool, après avoir légèrement baissé, s’est stabilisée depuis 2003, alors que celle de l’ivresse est orientée à la hausse depuis 2003 (Legleye et al., 2009b). Les niveaux d’usages réguliers des principaux produits – tabac, alcool, cannabis – sont globalement en baisse depuis 2005. De plus, la proportion d’adolescents (76 %) ne déclarant aucune consommation régulière de tabac, d’alcool ou de cannabis est en nette hausse depuis 1999 (enquête Espad 2007 : Legleye et al., 2009a).


Influence de l’environnement familial


L’usage par les parents de tabac, d’alcool ou de drogues illicites serait associé à une augmentation significative du risque d’usage précoce et de dépendance par l’adolescent (Assailly, 2009). Les parents semblent jouer un rôle important dans l’initiation du comportement (en particulier en ce qui concerne l’alcool), et les pairs, pour le maintien de ce comportement. Dans ses comportements de consommation de produits, l’adolescent interroge l’adulte, la société, les limites, la loi, la liberté. Mais la liberté est une épreuve; elle redouble les effets de la puberté, elle met à l’épreuve la vie psychique. La liberté est un casse-tête, et au moment où elle est tant revendiquée à l’égard des parents, le jeune peut s’installer dans une conduite de dépendance à un ou plusieurs produits. Or la dépendance, c’est bien l’opposé de la liberté. Être dépendant relève de la contrainte, de l’appauvrissement.

Mais la question n’est sans doute pas tant celle du désir que de l’angoisse; et à l’insécurité intérieure, au débordement interne, répond le besoin d’un accrochage à l’extérieur. Et comme cet objet externe ne peut plus être les parents, le produit devient une solution… jusqu’à une éventuelle destructivité. La consommation de produit n’est alors plus de l’ordre d’un choix mais d’une obligation, sous le regard impuissant des parents.


Adolescents consommant des produits : aspects cliniques



Généralités sur les consommations de produits chez les jeunes


Après quelques rappels sur les produits et les différentes modalités de consommations, nous nous intéresserons au sens et à la fonction que peut prendre la consommation de produit à l’adolescence.


Remarques sur certains produits et leurs effets


Au début de la consommation, les substances peuvent avoir un effet agréable : effet «stimulant» pour le tabac, euphorisant pour l’alcool, «planant» pour le cannabis. Si les effets néfastes n’apparaissent que plus tard, ces produits psychoactifs peuvent cependant rapidement entraîner des effets négatifs et délétères sur la santé (aux plans somatique et psychique), mais aussi provoquer des dommages aux plans scolaire et social.


Tabac


Si la cigarette reste le mode de consommation le plus utilisé par les jeunes, d’autres modes d’utilisation se développent (tabac à rouler, bidîs, narghilé). Il est une source de tentation importante pour les adolescents d’aujourd’hui, malgré les risques affichés de dépendance et de mort sur les produits («fumer tue»). La rencontre avec le tabac semble incontournable, et autour du produit se rejoue des enjeux qui réactualisent l’oralité, la relation à soi (narcissisme) et les relations à l’autre (identification, transgression, séduction, introjection…).

Le tabac a un effet psychostimulant; il a un pouvoir addictif puissant. Il est donc important d’évaluer la dépendance au tabac à l’adolescence.

Le tabagisme est la première cause de mortalité évitable dans les pays industrialisés. Plus le début du tabagisme est précoce et plus le nombre de cigarettes fumées par jour à l’adolescence puis à l’âge adulte est élevé, plus grand sera le risque de développer une maladie liée au tabac (Dupont & Reynaud, 2007).

Les principales pathologies liées au tabac sont : les cancers des bronches et des poumons, les cancers des voies aérodigestives supérieures, les maladies cardiovasculaires et les maladies respiratoires (Costes & Cadet-Taïrou, 2008).


Alcool


La consommation est au départ occasionnelle, souvent au domicile familial à l’occasion d’événements festifs, autorisée par les parents, eux-mêmes consommateurs (Karila et al., 2007).

À la différence de leurs aînés, les adolescents consomment de l’alcool préférentiellement en dehors des repas. Le cadre de l’alcoolisation à l’adolescence est généralement le groupe. Les types d’alcool les plus consommés par les adolescents sont : la bière, les alcools forts et les prémix.

À l’adolescence, le contexte de consommation est souvent «social». Dans les mêmes contextes, les jeunes qui présentent une consommation nocive (abus) et ceux qui sont dépendants boivent nettement plus que les autres (Choquet, 2009).

L’alcool entraîne un certain nombre d’effets sur l’organisme. Les réactions à l’alcool dépendent de plusieurs paramètres (quantité consommée, corpulence, sexe, âge, état de santé, association à une prise de psychotropes…).

Au départ, la consommation d’alcool peut être effectuée à but de détente et de désinhibition. La désinhibition augmente les conduites à risque et la consommation d’alcool expose à divers risques : accidents, rixes, passages à l’acte, tentative de suicide, exposition à des agressions… Cette première phase d’euphorie et de désinhibition peut être suivie par une phase de sédation (Bournot et al., 2009). L’altération de la vigilance peut alors être responsable d’accidents de la circulation.

Consommé en quantités importantes, l’alcool entraîne des risques immédiats (ivresse aiguë, coma éthylique) qui génèrent des admissions en urgence et aux urgences des hôpitaux.

L’abus et la dépendance sont rares avant 16 ans et augmentent entre 16 et 20 ans (Choquet, 2009). Ils concernent plus les garçons que les filles. La consommation régulière excessive d’alcool, répétée et prolongée, favorise une dépendance. Selon le rapport Roques, l’alcool fait en effet partie des produits entraînant une dépendance physique et psychique forte (Roques, 1999). Les principales conséquences d’un mésusage d’alcool à l’adolescence sont d’ordre social (absentéisme scolaire, troubles du comportement, accidents de la route…) et d’ordre psychologique (anxiété, dépression…). Les complications somatiques de la consommation excessive et chronique d’alcool, habituellement retrouvées chez l’adulte, sont rares à l’adolescence (Karila et al., 2007). Il s’agit de cancers (ORL, hépatique), de pathologies hépatiques (cirrhose) et pancréatiques, de troubles cardiovasculaires, de troubles psychiques, d’accidents…


Cannabis


Le principe actif du cannabis, responsable de ses effets psychoactifs, est le tétrahydrocannabinol (THC), dont la consommation est variable selon les préparations et la provenance du produit. Il peut être consommé sous plusieurs formes : herbe (marijuana, beuh…), résine (haschich, shit…), huile de cannabis (usage peu répandu en France).

Les effets ressentis sont variables. Il peut entraîner une euphorie, un sentiment d’apaisement, une envie de rire, une légère somnolence. Certaines personnes, à l’inverse, vont ressentir une anxiété importante, des angoisses. Les sensations sont modifiées.

Une consommation régulière engendre des troubles cognitifs (touchant la mémoire à court terme) et des répercussions sur la scolarité, avec un risque de désinvestissement (Phan et al., 2005). Certains auteurs évoquent le risque de syndrome amotivationnel chez certains adolescents consommateurs chroniques. Exclusion solaire et marginalisation sociale compliquent alors le tableau.

De plus, le cannabis peut être impliqué dans les accidents de la circulation et joue un rôle dans la morbidité et la mortalité routière (Gervais, 1994).


Différents modes de consommations


Il est important de différencier les niveaux et les modalités de consommations, afin de repérer les consommations à risque. La précocité de la consommation est un des facteurs de risque les plus significatifs en terme de prédiction d’une future consommation abusive ou dépendante. Toute consommation régulière de substances dès le début de l’adolescence, doit donc être considérée comme une consommation problématique. Le dépistage est donc ici fondamental.

De plus, l’importance des consommations, leur répétition, leur inscription dans la durée, l’association des produits, peuvent progressivement aboutir à des conduites addictives et à une dépendance. La prévention doit surtout porter sur la chronicisation des consommations et le cumul des produits (Alvin & Marcelli, 2005; Marcelli & Braconnier, 2008).

Certaines caractéristiques et modalités de consommations apparaissent comme des indicateurs de consommations à risque (Reynaud, 2006a; Karila et al., 2007) :




• âge de début précoce;


• consommation autothérapeutique;


• usage solitaire;


• recherche d’excès;


• cumul des produits, polyconsommation;


• répétition et persistance des consommations.

Plusieurs grands types de consommations de produits à l’adolescence ont été décrits. On distingue les usages occasionnels et conviviaux (festifs, récréatifs), des usages «autothérapeutiques», et de la «défonce» à visée anti-pensée. Il est nécessaire de différencier la consommation conviviale de la consommation addictive, sur le mode de la consommation autothérapeutique ou de la consommation toxicomaniaque (Marcelli & Braconnier, 2008). Le tableau ci-dessous résume ces modes de consommation (tableau 58.1).








































Tableau 58.1 Principales caractéristiques des types de consommation à l’adolescence
Selon D. Marcelli (Alvin & Marcelli, 2005; Marcelli & Braconnier, 2008).

Consommation
Conviviale Autothérapeutique Toxicomaniaque
Effet recherché Euphorisant Anxiolytique Anesthésiant
Mode social de consommation En groupe Solitaire +++ (en groupe) Solitaire et groupe
Scolarité Cursus scolaire habituel Décrochage scolaire, rupture Exclusion scolaire
Activités sociales Conservées Limitées Marginalisation
Facteurs de risque familiaux Absents Absents Présents
Facteurs de risque individuels Absents Présents Présents

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Apr 22, 2017 | Posted by in PÉDIATRIE | Comments Off on 58. Consommation de produits

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