5. Prise en charge des séquelles générales


Prise en charge des séquelles générales


PLAN DU CHAPITRE




Prise en charge des séquelles nutritionnelles1


A. Bozec, M.-N. Falewee, C. Hebert



Introduction


La dénutrition est particulièrement fréquente chez les patients porteurs d’un cancer des voies aérodigestives supérieures. Ainsi, elle a été rapportée chez plus de la moitié des patients atteints d’un cancer localement avancé des VADS au moment du diagnostic de la maladie [13]. Il existe de nombreux outils permettant d’évaluer l’état nutritionnel des patients et d’établir la sévérité de la dénutrition (indice de masse corporelle, perte de poids, nutritional risk index, paramètres biologiques, etc. cf. chapitre 1). En pratique, comme dans la plupart des études, une perte de plus de 10 % du poids corporel au cours des 6 derniers mois ou de plus de 5 % au cours du dernier mois est un critère simple permettant de juger de la présence d’une dénutrition cliniquement significative [16].



Mécanismes de la dénutrition


Chez les patients atteints de cancer des VADS, la dénutrition résulte principalement d’une réduction des apports caloriques et protéiques en dessous de ceux permettant le maintien d’un bon statut nutritionnel (30 à 35 kcal et 1,2 à 2,0 g de protéines par kg de poids corporel) [2, 3, 5]. Cette insuffisance d’apports peut être présente dès le diagnostic en raison de la dysphagie et de l’odynophagie. Elle peut s’aggraver durant la phase de traitement et perdurer ensuite. En effet, les traitements anticancéreux tels que la radiothérapie et la chimiothérapie engendrent une mucite, d’intensité variable, qui va aggraver la dysphagie du patient [7, 8]. Ils entraînent aussi fréquemment des nausées, une dysgueusie et une anorexie qui sont autant de facteurs aggravants. Après traitement, les troubles fonctionnels résultant de la chirurgie et les séquelles de la radiothérapie peuvent freiner voire empêcher la restauration d’une alimentation orale suffisante.


Une perte de poids peut également survenir alors que les apports caloriques et protéiques sont maintenus à des niveaux normaux du fait d’un syndrome inflammatoire et d’un état hypercatabolique [9, 10]. En effet, la maladie cancéreuse est à l’origine de perturbations métaboliques spécifiques avec des troubles du métabolisme énergétique et une diminution progressive de la masse protéique (par protéolyse musculaire) [9, 10].



Conséquences cliniques de la dénutrition


La présence d’une dénutrition au moment du diagnostic d’un cancer des VADS a été corrélée à une augmentation de la morbidité et de la mortalité postopératoires, à une mauvaise tolérance aux traitements anticancéreux comme la radiothérapie et la chimiothérapie, avec plus d’interruptions thérapeutiques et, au final, à un pronostic péjoratif [2, 6].


Différents éléments peuvent expliquer l’impact négatif de la dénutrition sur le devenir des patients atteints d’un cancer des VADS. Il est notamment clairement établi que la dénutrition diminue les capacités de cicatrisation ainsi que les défenses immunitaires [6, 10]. Ceci peut d’une part favoriser les infections postopératoires mais également compromettre les défenses de l’hôte contre le développement tumoral. Par ailleurs, il a été démontré que la présence d’une dénutrition diminue la qualité de vie des patients atteints d’un cancer des VADS avant, pendant et surtout après traitement [1113].



Prise en charge de la dénutrition



Suivi nutritionnel et conseils diététiques


La prise en charge des troubles nutritionnels des patients atteints d’un cancer des VADS doit intervenir aussi précocement que possible. Il convient d’adresser le patient en consultation spécialisée afin de dépister les sujets dénutris ou à risque de le devenir. Le suivi nutritionnel se poursuivra à toutes les étapes de la prise en charge. La phase thérapeutique peut justifier d’intensifier les mesures de support nutritionnel. Après le traitement, le suivi et l’aide nutritionnelle seront adaptés aux progrès du patient, notamment sur le plan de la déglutition.


Si les patients porteurs d’un cancer des VADS sont souvent dans l’impossibilité de maintenir leur régime alimentaire habituel, ils restent néanmoins longtemps capables de s’alimenter par voie orale. Des modifications adaptées de leur régime alimentaire (composition des repas, modification des textures, etc.) peuvent donc suffire dans un certain nombre de cas à maintenir des apports suffisants [14, 15]. Lorsqu’ils sont associés à des conseils nutritionnels personnalisés, les compléments alimentaires oraux peuvent néanmoins aider à maintenir des apports nutritionnels suffisants, tout en évitant le recours à l’alimentation entérale.



Alimentation entérale


Lorsque l’alimentation par voie orale n’est plus possible ou ne peut suffire à couvrir les besoins nutritionnels du patient, il faut recourir à une alimentation entérale. Deux principales méthodes peuvent être utilisées : une sonde nasogastrique (SNG) ou une gastrostomie (GST) [16, 17]. La SNG a l’avantage de pouvoir être posée immédiatement. Les échecs de pose sont rares mais peuvent se produire en cas de tumeur pharyngée obstructive. Par rapport à la GST, la SNG présente de nombreux inconvénients : sonde visible pour l’entourage, risque plus important de perte et d’obstruction, douleurs ou gênes nasales et pharyngées, corps étranger favorisant œdème pharyngolaryngé et fausses routes, reflux gastro-œsophagien [17].


La GST peut être posée par voie endoscopique ou sous guidage radiologique. La voie endoscopique n’est parfois pas utilisable lorsqu’il existe une tumeur obstructive ou une sténose pharyngo-œsophagienne. Les complications de la GST sont rares et surviennent dans moins de 2 % des cas [7, 8, 16, 17]. Il s’agit le plus souvent de complications mineures comme les infections locales, les granulations ou fuites autour du cathéter, les pertes du cathéter. Des complications graves comme la perforation colique et la péritonite peuvent néanmoins être observées. La GST est donc la méthode de choix pour la nutrition entérale prolongée des patients atteints de cancer des VADS. La SNG est par conséquent en principe réservée à l’alimentation entérale de courte durée, lorsqu’une reprise rapide de l’alimentation orale est envisagée (≤ 6 semaines) [7, 8, 16, 17].


Compte tenu des difficultés et des délais pour programmer une GST, de nombreuses équipes privilégient la mise en place prophylactique d’une GST chez les patients à risque de dénutrition, avant même de débuter le traitement, y compris chez des patients qui sont encore capables de s’alimenter par voie orale [7, 8, 16]. Ainsi, plusieurs études ont montré que la mise en place prophylactique d’une GST améliorait le statut nutritionnel du patient pendant et au décours du traitement, diminuait les interruptions thérapeutiques en cours de radiothérapie, réduisait le risque d’hospitalisations non programmées et au final améliorait la qualité de vie des patients [7, 8, 13, 16]. Néanmoins, d’autres études comparant la pose d’une SNG lorsqu’elle était jugée nécessaire à la mise en place prophylactique d’une GST avant traitement ont rapporté des résultats plus contrastés [13, 16, 17]. Il a notamment été démontré que les patients porteurs de GST reprenaient plus tardivement une alimentation orale exclusive que ceux porteurs d’une SNG [13, 17]. Il semble donc utile de déterminer avec précision le profil des patients qui bénéficieront le plus de la mise en place systématique d’une GST. Il ressort de l’analyse de la littérature que le statut nutritionnel au diagnostic, la localisation (ex : cavité buccale) et le stade tumoral, le type de chirurgie proposée, les doses d’irradiation (> 60 Gy) et les combinaisons thérapeutiques (radiochimiothérapie concomitante) sont les principaux critères à prendre en considération pour décider de la pose systématique d’une GST [7, 8, 13, 16, 17].


L’apport énergétique quotidien usuel est de 25 à 35 kcal/kg [5]. Les « immunonutriments » tels que l’arginine, la glutamine, les acides gras polyinsaturés et certains nucléotides ont des propriétés immunostimulantes et améliorent les fonctions des lymphocytes T, B et NK, de même que les fonctions de défense cellulaire et de barrière muqueuse [10, 1820]. L’intérêt de « l’immunonutrition » en périopératoire a été démontré dans le cadre de la chirurgie digestive carcinologique lourde avec, suivant les études, un bénéfice en termes de durée d’hospitalisation et/ou de complications postopératoires, notamment infectieuses [20]. Néanmoins, l’intérêt de l’immunonutrition chez les patients atteints d’un cancer des VADS, en particulier en périopératoire, est encore discuté.



Prise en charge des séquelles psychologiques2


S. Dauchy, M. Reich


L’impact émotionnel des cancers des voies aérodigestives supérieures est majeur [21], en lien avec les diverses atteintes corporelles, physiques, esthétiques et fonctionnelles générées par la maladie et les traitements invasifs qui l’accompagnent. Ce retentissement psychique menace en retour la qualité de vie et la réhabilitation et doit être systématiquement recherché et pris en compte. La prise en charge en sera globale, et intégrera aux soins psychiques des soins somatiques, la rééducation, la prise en compte des difficultés sociales et de la souffrance des proches.


Les facteurs favorisants de la détresse psychologique sont en effet nombreux chez ces patients. Les mutilations, défigurations et modifications du fonctionnement corporel et de l’expression verbale entraînent des changements dans les perceptions et l’image que le patient a de son corps, affectant interactions sociales, sexualité et bien être émotionnel [22]. Lorsqu’elles existent, les modifications gustatives et olfactives, la dysphagie et les difficultés de déglutition entravent l’alimentation et surtout le plaisir associé à celle-ci [23]. L’alimentation mixée, la nutrition par gastrostomie ou une nutrition parentérale contribuent à « instrumentaliser » les fonctions élémentaires de se nourrir et de s’hydrater et entravent la fonction de convivialité de l’alimentation, menaçant encore plus le soutien social, psychologique et/ou matériel dont pourraient bénéficier les patients.


La comorbidité somatique parfois lourde est également un facteur favorisant : complications postopératoires comme les fistules ou les nécroses, douleurs, d’autant plus mal tolérées qu’elles sont souvent révélatrices, mauvais état nutritionnel, intoxication alcoolique et tabagique. Les besoins de réadaptation au cours ou au décours des traitements sont lourds également : soins de canule, réapprentissage de la respiration, la déglutition, la mastication, la parole. La situation s’alourdit souvent d’un réseau social fragile et d’un statut économique précaire.


Tout ceci s’ajoute à un habitus alcoolotabagique fréquent et à des conditions socio-économiques souvent défavorables (emploi peu qualifié, chômage, instabilité professionnelle) pour générer une détresse émotionnelle et une altération de la qualité de vie [24].


Paradoxalement, la détresse psychologique rencontrée chez les patients atteints de cancer de la sphère ORL reste difficile à évaluer [25, 26], ne serait-ce que par l’altération de la communication orale. La répression et ou faible expression émotionnelle est également fréquente chez cette population à prédominance masculine, alcoolotabagique ou ayant été dépendante, pour laquelle l’identification des émotions peut être complexe et leur expression souvent perçue comme une faiblesse. Dans ce contexte, les manifestations non verbales représentent souvent les premiers indicateurs de cette détresse : visage triste, repli sur soi, clinophilie, colère, insatisfaction.


La prévalence de difficultés psychiatriques dans cette population est décrite chez jusqu’à 66 % de patients [27] ; cette proportion intégrant les dépendances notamment à l’alcool. La prévalence des syndromes dépressifs est estimée entre 6 et 15 % [28]. Un risque suicidaire accru a également été rapporté [29], allant jusqu’à un risque relatif de 3,67 chez les femmes. L’humeur dépressive est souvent présente en phase préthérapeutique [27] ; ces symptômes dépressifs ayant tendance à augmenter tout au long du traitement par radiothérapie [30]. Dans l’étude de Humphris et al., les taux de dépression culminent 3 mois après le début du traitement et restent stables jusqu’à 7 mois [31]. Les symptômes peuvent persister après la fin des traitements (8 % 18 mois après la fin de la radiothérapie dans une étude récente de Neilson et al. [32]). Il est intéressant de noter que ces scores de dépression apparaissent fortement liés à la qualité de vie des patients [33], mais ne sont prédits de façon indépendante ni par l’âge, ni par le sexe, ni par la localisation de la tumeur, son stade ou son type de traitement [30, 33]. En revanche la détresse émotionnelle élevée en début de traitement est apparue fortement prédictive de la survenue d’une symptomatologie dépressive après le traitement [34].


La prise en charge psychologique de ces patients ne peut se concevoir que dans le cadre d’un programme global [35] intégrant la rééducation de la parole et de la voix, la prise en charge correcte et continue de la douleur, le réapprentissage de la fonction de déglutition et de mastication [36], et la prise en charge sociale, intégrant la prévention des impacts professionnels et financiers. Elle doit également intégrer le traitement de la dépendance alcoolique, à la fois précoce (en raison des risques de complications postopératoires, syndromes de sevrage ou infections) et au long cours (en raison des risques de deuxième cancer [37]). Or l’adhésion de ces patients à l’injonction d’arrêt reste très limitée : après la fin des traitements, près d’un quart continuerait à fumer, près de la moitié consommerait encore de l’alcool au moins 2 fois par semaine, et seule une minorité (32 % des patients fumeurs et 9 % des patients alcoolodépendants) est intéressée par une prise en charge en addictologie [38].


Les attitudes de déni et le faible engagement dans les programmes de soins avec une tendance au fatalisme et à la résignation ne facilitent pas l’adhésion à des programmes de prise en charge psycho-oncologique [39]. Pourtant des interventions psycho-éducationnelles et/ou cognitivo-comportementales voire des groupes de soutien amélioreraient le devenir psychologique de ces patients [40] et leur qualité de vie [41]. Durant les traitements physiques des cancers de la sphère ORL, l’utilisation d’un antidépresseur (citalopram) en prophylaxie pourrait prévenir l’apparition de troubles dépressifs [42]. L’adhésion à des associations de malades, à des groupes de soutien et une aide pour le sevrage tabagique et alcoolique peuvent compléter la prise en charge.


En conclusion, la fréquence, la durée et l’intensité des troubles émotionnels chez les patients atteints de cancer ORL impliquent leur repérage systématique, qui peut être facilité par l’utilisation d’une échelle d’autoévaluation comme l’échelle HADS validée en français. Celle-ci est la plus fréquemment utilisée dans les études impliquant des patients atteints de cancer ORL, en raison de sa brièveté, de sa simplicité et de son excellente acceptabilité [27, 31, 4345]. Elle peut permettre une proposition d’entretien psychiatrique aux patients les plus en détresse psychologique.


Des interventions précoces visant notamment à traiter les symptômes dépressifs dès le début du traitement sont recommandées [46], notamment en raison de leur retentissement potentiel sur la qualité de vie des patients [47], objectif d’autant plus important que la fréquence des récidives est élevée et la survie limitée. Elles impliquent d’optimiser la collaboration pluridisciplinaire avec les équipes de chirurgie et de chimioradiothérapie.



Prise en charge des séquelles douloureuses3


J.-M. Prades, M. Navez, M. Gavid, A.-P. Timochenko



Mécanismes physiopathologiques des douleurs – Classification et sémiologie


Les douleurs somatiques (ou tissulaires) par excès de stimulations nociceptives sont à distinguer des douleurs neuropathiques par lésion du système nerveux et mauvais contrôle des influx nociceptifs. Une douleur est rapportée par 50 % des patients avant le traitement, 80 % durant le traitement, 70 % à la fin du traitement. Trente à 34 % voient leur douleur persister au-delà de 6 mois. Celle-ci apparaît plus sévère que la douleur précessive [48, 49]. La douleur orofaciale semble corrélée avec les difficultés de déglutition et d’élocution, l’âge élevé mais aussi la dépression [50].



Douleurs par excès de nociception


Elles sont la conséquence d’une hyperstimulation cutanéomuqueuse, de la distension ou la contraction pariétale d’un viscère, d’une altération musculotendineuse ou vasculaire. Elles sont parfois intenses, insomniantes, à type de broiement. Elles peuvent avoir un déclenchement mécanique (tableau 5.1).




Douleurs neuropathiques


Elles sont la conséquence d’un défaut de régulation des voies nerveuses. Elles sont d’origine périphérique en rapport avec une lésion d’un neurone périphérique par traumatisme direct chirurgical ou indirect par la radiothérapie, la chimiothérapie mais aussi un virus (zona). Plus rarement, elles ont une origine centrale.


Elles réalisent des paresthésies ou dysesthésies (picotements, fourmillements). Elles sont volontiers associées à des douleurs spontanées continues à type de brûlure ou paroxystiques en décharges électriques ou coups de poignard [48]. Elles peuvent être provoquées. Le déclenchement fait suite à une stimulation normalement indolore, mécanique ou thermique : on parle alors d’allodynie. La stimulation est normalement douloureuse mais déclenche une douleur d’intensité anormale : on parle d’hyperpathie [51]. Il existe également la possibilité d’une hyperalgésie induite par les opioïdes à l’origine d’une douleur paradoxale. Les patients porteurs d’un carcinome des voies aérodigestives supérieures développent en effet une tolérance aux opioïdes [52].



Évaluation de la douleur


L’échelle visuelle analogique (EVA) est incomprise par 5 à 7 % des patients mais considérée comme l’outil de référence [53]. L’échelle numérique de 0 à 10 selon une douleur absente ou maximale imaginable ne nécessite pas de support. L’échelle verbale simple (EVS) est constituée de 4 catégories de description : pas de douleur (0), douleur légère (1 à 3), douleur modérée (4 à 6) douleur sévère (7 à 10). Un questionnaire qualitatif de la douleur neuropathique peut utiliser 10 items simples (brûlure, dysesthésie, allodynie, hypoesthésie, etc.).



Séquelles algiques observées après traitements carcinologiques sur les VADS


La présence d’une douleur sévère avec une EVA supérieure à 7 est retrouvée pour 52 % des patients antérieurement traités avec 35 % des douleurs en rapport avec une récidive et 30 % avec une séquelle algique isolée. La douleur a le plus souvent un mécanisme complexe à la fois nociceptif et neuropathique dans 75 % des cas [54].


Les structures anatomiques atteintes permettent de classer les phénomènes douloureux : l’origine peut être myofaciale, nerveuse, ostéocartilagineuse ou muqueuse. Plusieurs atteintes peuvent être associées.



Douleurs d’origine myofaciale et tendineuse


Les douleurs d’origine myofaciale, tendineuse et articulaire sont présentes chez plus d’un tiers des patients traités [55]. Le type en est la douleur scapulo-humérale par paralysie du nerf accessoire. Elle toucherait 66 % des opérés [56]. Le déséquilibre scapulo-huméral est à l’origine d’une limitation de l’abduction de l’épaule inférieure à 90°, chute du moignon et décollement scapulothoracique. La douleur est en rapport avec l’étirement du muscle angulaire de la scapula et le conflit sous-acromial peut réaliser une capsulite rétractive. Le sacrifice de la veine jugulaire interne et la radiothérapie cervicale sont deux facteurs qui aggravent le pronostic douloureux et fonctionnel [55, 56].


Le traitement doit être précoce, associant antalgiques de niveau 1 et 2, anti-inflammatoires non stéroïdiens et rééducation. Le but est de maintenir une mobilité passive pour éviter capsulite rétractile et fibreuse musculaire. En cas de résultat insuffisant ont été proposées une infiltration du muscle angulaire de la scapula, l’utilisation de toxine botulinique, voire une chirurgie de réinnervation [57].


Les muscles ptérygoïdien, masséter et temporal sont souvent à l’origine de séquelles algiques tardives. L’atteinte peut être d’origine chirurgicale ou radiothérapique. Les douleurs temporomandibulaires et le trismus sont volontiers associés. Les gestes chirurgicaux de désarticulation mandibulaire sont fréquemment en cause. Les douleurs sont homolatérales ou controlatérales par déséquilibre de l’articulé dentaire et contractures. La prise en charge est essentiellement orthopédique et rééducative avec des gouttières et une rééquilibration orthodontique ; des myorelaxants voire une infiltration myofaciale ou articulaire peuvent être proposés [56, 57].



Douleurs d’origine muqueuse et des tissus adjacents


La toxicité muqueuse d’origine radique peut être à l’origine de dysphagie, de stridor et de trismus conduisant à une dégradation de l’état général avec dénutrition. Dans d’une méta-analyse de patients irradiés pour un carcinome des voies aéro-digestives supérieures, 34 % avaient une mucite de grade 3–4 en radiothérapie conventionnelle et 43 % en radiochimiothérapie concomitante, 16 % nécessitaient une hospitalisation pour mucite et 11 % voyaient leur traitement suspendu [58]. Chez les patients traités pour un carcinome nasopharyngien, le taux de complications tardives à 3 ans est de 28 % pour les malades ayant reçu une radiochimiothérapie contre 13 % pour ceux uniquement irradiés [59] : les complications mineures observées sont la xérostomie (56 %), l’otite séromuqueuse (44 %), la fibrose cervicale (25 %).


Les morphiniques, instaurés précocement, constituent le traitement de référence de la douleur des mucites sévères, surtout sous forme d’analgésie autocontrôlée (tableaux 5.2 et 5.3) [60]. La douleur des mucites n’est pas toujours bien contrôlée à la fin de la radiothérapie par les opioïdes notamment systémiques [61]. Ce phénomène est probablement en rapport avec l’existence de douleurs neuropathiques. Aussi, l’association avec un antidépresseur ou un anticonvulsivant (gabapentine) permet une plus grande efficacité et de réduire les doses d’opioïdes [51].


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May 5, 2017 | Posted by in MÉDECINE INTERNE | Comments Off on 5. Prise en charge des séquelles générales

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