Chapitre 5
Douleurs thoraciques
La douleur ou gêne thoracique est un motif fréquent de consultation médicale pour un adulte, chaque année. La douleur thoracique est non seulement la plainte médicale la plus commune, mais elle peut aussi être un signe révélateur d’une urgence vitale vraie. Dans ce chapitre, nous vous aiderons à rapidement identifier les causes, depuis l’urgence vitale jusqu’à la consultation de base, en classant ce symptôme courant en fonction des trois systèmes anatomiques potentiellement affectés : le système cardiovasculaire, le système pulmonaire et le système gastro-intestinal. Nous vous fournirons des informations afin de vous aider à faire un diagnostic de terrain précis, à développer un schéma thérapeutique et à surveiller le patient pour adapter le traitement si nécessaire.
Angor qui augmente en fréquence, en sévérité, ou survenant pour des efforts moindres qu’à l’habitude. Ce symptôme suggère une progression d’une lésion stable, majorant la baisse du flux sanguin coronaire lors d’une demande accrue en oxygène.
Symptômes de type gêne thoracique, essoufflement, ou autre, apparaissant d’une manière prévisible lors d’un exercice et disparaissant à l’arrêt de ce dernier, au repos. Ce phénomène suggère la présence d’une lésion stable d’une coronaire, qui empêche la perfusion adéquate lors d’une demande croissante en oxygène.
Arrêt brutal du flux d’une artère pulmonaire secondaire à un caillot sanguin, provenant souvent d’une veine profonde des membres inférieurs ou du bassin, qui migre dans une artère pulmonaire jusqu’à son blocage. Elle peut provoquer une tachycardie, une hypoxie ou une hypotension artérielle.
infarctus aigu du myocarde (IDM)
Appelé communément « crise cardiaque », l’IDM survient lorsque le flux sanguin est interrompu vers une partie du cœur, provoquant une mort cellulaire. Le plus souvent, il s’agit d’une occlusion artérielle par rupture de plaque adhérente à la paroi artérielle. L’ischémie induite et la baisse en apport d’oxygène qui en résulte, en l’absence de traitement, peuvent provoquer des dommages et/ou une mort cellulaire cardiaque.
Une diminution de l’apport d’oxygène et de sa délivrance aux cellules musculaires, secondaire à une obstruction artérielle mécanique, ou à une demande accrue des tissus, ou hypoxie, qui induisent des lésions cellulaires ou une anomalie de fonctionnement des tissus.
Inflammation du sac qui entoure le cœur (péricarde). Elle peut être secondaire à de nombreux facteurs, mais fait souvent suite à une infection virale. En cas de défaillance cardiaque ou de présence de signes d’insuffisance cardiaque congestive, une atteinte myocardique directe ou une participation musculaire cardiaque doit être évoquée.
Fine membrane qui entoure et protège les poumons (plèvre viscérale) et tapisse la cavité thoracique (plèvre pariétale).
pneumothorax sous tension (ou compressif)
Urgence vitale qui fait suite à un pneumothorax et une accumulation d’air sous pression dans l’espace pleural. Il peut aboutir à une baisse progressive du retour veineux dans les cavités cardiaques, induisant une baisse de la précharge, puis une hypotension artérielle systolique.
Diminution anormale de la pression artérielle systolique lors d’une respiration normale. Il est défini par une baisse de plus de 10 mmHg de la pression artérielle lors d’une inspiration.
C’est un terme générique qui englobe plusieurs groupes de symptômes en relation avec une ischémie myocardique (douleur thoracique secondaire à un apport insuffisant de sang au muscle cardiaque, secondaire à une atteinte des artères coronaires). Les SCA couvrent les entités cliniques allant de l’angor instable à l’infarctus du myocarde avec sus-décalage du segment ST (SCA ST +) ou sans sus-décalage du segment ST (SCA ST–).
syndrome coronaire aigu avec sus-décalage du segment ST (SCA ST +)
Type d’infarctus du myocarde secondaire à l’arrêt du flux sanguin, qui provoque un infarctus transmural dans un territoire musculaire cardiaque. Cette pathologie comporte un risque non négligeable de mort subite ou de défaillance cardiaque aiguë, raisons pour lesquelles une reperfusion rapide doit être organisée en présence d’un SCA ST + .
syndrome coronaire aigu sans sus-décalage du segment ST (SCA ST–)
Type d’infarctus du myocarde secondaire à l’arrêt du flux sanguin, qui provoque un infarctus non transmural dans une zone du muscle cardiaque. Il n’y a pas d’ascension du segment ST sur le tracé électrocardiographique (ECG), mais les signes cliniques d’infarctus sont présents.
Aussi appelée tamponnade péricardique, c’est une affection à prendre en charge en urgence dans laquelle un liquide s’est accumulé dans le péricarde (poche entourant le cœur). Si la quantité de liquide croît progressivement (dans l’hypothyroïdie par exemple), le sac péricardique peut s’expandre et contenir plus d’un litre de liquide avant de provoquer une tamponnade. Si la quantité de liquide augmente brutalement (comme lors d’un traumatisme ou d’une rupture myocardique), moins de 100 ml peuvent suffire à provoquer une tamponnade.
C’est le Dr Werner Forssmann qui a réalisé le premier cathétérisme cardiaque en 1929. Si une partie de la communauté médicale mondiale avait prêté attention aux critiques concernant cette méthode, suggérant notamment qu’elle était plus appropriée à un cirque qu’à un hôpital respectueux, le cathétérisme cardiaque et les nombreuses procédures qui ont été développés depuis auraient subi de sérieux revers. Pourquoi ces collègues ont-ils jugé cette idée comme étant digne d’un cirque ?
Anatomie et physiologie
Plusieurs organes et structures de la cage thoracique peuvent provoquer une gêne ou une douleur thoracique s’ils sont atteints ou blessés, y compris la paroi thoracique, qui englobe les côtes, les vertèbres, les muscles, la plèvre et les poumons, le cœur et les gros vaisseaux, l’œsophage et le diaphragme (figure 5-1).
Figure 5-1 Cage thoracique, incluant les côtes, les muscles intercostaux, le diaphragme, le médiastin, les poumons, le cœur, les gros vaisseaux, les bronches, la trachée et l’œsophage. (Source : PHTLS : Prehospital trauma life support, ed 6, St Louis, 2007, MosbyJems.)
Gros vaisseaux
Les gros vaisseaux incluent l’aorte, les veines caves supérieure et inférieure, les artères pulmonaires et les veines pulmonaires (figure 5-2). La portion de l’aorte qui passe dans le thorax est appelée l’aorte thoracique et elle se poursuit vers le bas vers l’abdomen, où elle est appelée aorte abdominale. Une pathologie grave, urgence absolue, survient lorsque l’aorte devient pathologique et que les feuillets qui la composent commencent à se séparer (dissection aortique [NdT]).
Poumons et plèvre
Le chapitre 3 a déjà traité en profondeur les pathologies respiratoires, mais revoyons brièvement l’anatomie et la physiologie. Les poumons sont de grands organes constitués de lobes spongieux de tissu élastique, tissu qui s’étire et se resserre lors des inspirations et expirations. La trachée et les bronches sont faits de muscles lisses et de cartilages, permettant aux voies respiratoires de se contracter et de s’expandre. Les poumons et les voies respiratoires apportent l’air frais, riche en oxygène, et évacuent le dioxyde de carbone produit par le métabolisme. Quand vous inspirez, le diaphragme et les muscles intercostaux se contractent et expandent la poitrine. Cette expansion baisse la pression intrathoracique à un niveau inférieur à celui de la pression atmosphérique extérieure. L’air s’engouffre alors par les voies aériennes d’une zone de haute pression vers une zone de basse pression, et remplit les poumons. Quand vous expirez, le diaphragme et les muscles intercostaux se relâchent, et le poids de la paroi thoracique, aidé par l’élasticité du diaphragme, expulse l’air dehors.
Les poumons sont aussi entourés par la paroi thoracique, tapissée tout d’abord par la plèvre (figure 5-3). La plèvre viscérale entoure les poumons et la plèvre pariétale tapisse la paroi thoracique. Une faible quantité de liquide d’origine viscérale agit comme un lubrifiant pour permettre les mouvements physiologiques du poumon dans le thorax, et une adhérence entre les plèvres pariétale et viscérale est également assurée par une faible quantité de liquide. Cette adhérence permet aux poumons de conserver leur volume et de tendre le tissu spongieux lors des inspirations. (Pour illustrer l’adhérence induite par un liquide, prenez deux plaques de verre. Si vous les posez l’une sur l’autre, vous pouvez aisément les séparer, mais si vous ajoutez juste une petite quantité d’eau entre elles, il vous sera bien plus difficile de les séparer.)
Figure 5-3 A. Vue antérieure de la plèvre viscérale et de la plèvre pariétale des poumons. B. Coupe transversale de la plèvre viscérale et de la plèvre pariétale des poumons. (Source : Shade B, Collins T, Wertz E, et al : Mosby’s EMT-intermediate textbook for the 1999 national standard curriculum, ed 3, St Louis, 2007, Mosby.)
L’oxygénation se produit dans les alvéoles, les sacs terminaux des poumons (figure 5-4). Les alvéoles sont couverts de capillaires unicellulaires, où les échanges de gaz (oxygène et dioxyde de carbone) ont lieu. Quelle que soit l’origine d’une anomalie de diffusion entre les alvéoles et les capillaires, l’oxygénation peut être perturbée, aboutissant à l’hypoxie. Un exemple en est l’œdème pulmonaire. Dans cette pathologie, des liquides s’accumulent dans l’espace interstitiel et les alvéoles, amputant la capacité de l’oxygène de passer des alvéoles aux capillaires et contribuant à l’hypoxie.
Sensation de douleurs thoraciques
Toutes les plaintes thoraciques devraient être considérées comme potentiellement létales jusqu’à avoir formellement exclu toutes les urgences vitales. Parfois, il peut être difficile de faire la part des choses entre gêne thoracique et pathologie provoquée par des organes ou structures extrathoraciques (figure 5-5). Même si les limites du thorax sont bien définies, des organes ou structures contiguës à celles-ci peuvent être desservis par des racines nerveuses identiques. Un patient présentant une pathologie vésiculaire peut, par exemple, se plaindre d’une douleur thoracique supérieure droite ou de l’épaule droite, bien que la vésicule biliaire soit strictement intra-abdominale, et la douleur peut être « référée » au thorax ou à l’épaule. L’inverse peut aussi être vrai ; la physiopathologie intrathoracique peut prêter à confusion et être interprétée par le patient comme des symptômes extrathoraciques – abdominaux, cervicaux ou dorsaux. Classiquement, un IDM peut se déclarer par une gêne ou pesanteur épigastrique, des nausées ou des vomissements.
Figure 5-5 Localisation de la rate, du foie et de la vésicule biliaire. (Source : Aehlert B : Paramedic practice today : above and beyond, St Louis, 2009, Mosby.)
Évaluation clinique
Éliminer les urgences vitales
Pour évaluer un patient présentant une plainte thoracique, vos connaissances en anatomie, en physiologie et en physiopathologie vous orienteront vers les étiologies courantes des douleurs thoraciques. L’encadré 5-1 en énumère certaines. La menace vitale la plus commune est un IDM. Cependant, moins de la moitié des patients présentant un IDM appellent les services d’urgences. Considérant l’ensemble des étiologies possibles, les soignants doivent avoir de forts soupçons quand ils prennent en charge un patient porteur d’une pathologie potentiellement intrathoracique.
Impression initiale
Mon approche de cette situation ou de ce patient est-elle sécuritaire ?
Diagnostics des affections mettant en jeu le pronostic vital et traitement
Gêne thoracique avec difficultés respiratoires
Pneumothorax sous tension (compressif): Le pneumothorax sous tension ou compressif est une urgence vitale qui résulte d’une dégradation progressive d’un pneumothorax simple (l’accumulation d’air sous pression dans l’espace pleural). Si l’évolution se poursuit, un pneumothorax compressif peut induire une déviation du médiastin, comprimant le cœur et les gros vaisseaux, et perturbant le flux sanguin. L’augmentation de la pression intrathoracique va retarder le retour veineux, diminuant la précharge, et menant à une baisse dans la pression artérielle systolique.
L’évaluation d’un pneumothorax compressif révélera une douleur thoracique, une détresse respiratoire, une diminution voire un silence respiratoire sur le côté atteint et un tableau de choc obstructif. Une distension veineuse jugulaire (DVJ) ainsi qu’une déviation de la trachée peuvent se voir, mais il s’agit de signes parfois difficiles à identifier et souvent tardifs. Le traitement est destiné à libérer la pression à l’intérieur de la poitrine en décomprimant le côté affecté. Dans la plupart des cas, une décompression à l’aiguille est effectuée en utilisant un calibre de gros diamètre (12 à 14 gauges), une aiguille longue (6 à 8 cm pour les adolescents et les adultes), celle-ci étant insérée dans le deuxième espace intercostal, sur la ligne médioclaviculaire. Cette technique de thoracostomie à l’aiguille peut aussi être réalisée au niveau du quatrième ou du cinquième espace intercostal sur la ligne axillaire moyenne. Certains experts recommandent cet emplacement car il y a moins de risque de blessure des gros vaisseaux thoraciques. Il s’agit d’une mesure temporaire, dans l’attente de la mise en place d’un drain thoracique. Voir le chapitre 3 pour plus d’informations sur le pneumothorax et ses traitements.
Embolie pulmonaire: L’embolie pulmonaire (EP) appartient à la classe des maladies thrombo-emboliques veineuses (MTEV), qui comporte tant la thrombose veineuse profonde (TVP) que l’EP. Un thrombus ou caillot peut se former lorsqu’il y a un déséquilibre dans la balance « constitution du caillot » et « destruction du caillot ». Beaucoup de facteurs peuvent créer un tel déséquilibre, favorisant la formation des caillots, comme un terrain cancéreux, l’immobilité, et des médicaments comme une contraception orale. Dans cette affection, une lésion de la paroi vasculaire ou un flux sanguin ralenti dans de gros vaisseaux favorisent la formation de fibrine ou d’un caillot, et quand ces caillots se forment dans une veine profonde, une TVP est présente.
Les éléments évocateurs d’une EP dans les antécédents du patient comportent un essoufflement à début brutal, un étourdissement ou une syncope, une douleur thoracique, une toux sèche, ou une tachycardie inexpliquée (encadré 5-2). L’infarctus pulmonaire et la pneumonie présentent des similitudes, mais une fièvre élevée est habituellement retrouvée lors des pneumonies. Le début brutal d’une douleur thoracique et une hémoptysie survenue le même jour suggèrent une possible EP. Un œdème unilatéral de la jambe et des facteurs de risque de TVP peuvent être présents. Les patients avec une EP auront normalement des poumons clairs et propres à l’auscultation.
Diagnostic de l’embolie pulmonaire:
1. Un ECG 12 dérivations devrait être enregistré aussitôt que possible. Chez les patients présentant une douleur thoracique ou un souffle court, les différents diagnostics possibles sont à évaluer de toute urgence. La tachycardie sinusale reste le signe électrocardiographique le plus communément retrouvé. D’autres signes cliniques ou paracliniques suggérant une EP se voient plus rarement, et sont à rapprocher d’une hypertension pulmonaire et d’une dystension du ventricule droit (VD). Ils incluent une onde S en déviation (DI), une onde Q en DIII et une inversion d’onde T en DIII (S1Q3T3 ; figure 5-6).
Figure 5-6 Tracé d’un électrocardiogramme 12 dérivations avec un tracé de type S1Q3T3. (Source : Marx JA, Hockberger RS, Walls RM : Rosen’s emergency medicine : concepts and clinical practice, ed 6, St Louis, 2006, Mosby.)
Le signe de McGinn-White est un ensemble de signes et modifications électriques. Il comporte :
• une onde Q et une inversion de l’onde T en DIII ;
• un sous-décalage du segment ST en DII ;
• une inversion des ondes T dans les dérivations précordiales V2 et V3, signes électrocardiographiques de la dilatation ventriculaire droite secondaire à une EP massive ;
2. La radiographie du thorax, bien qu’elle soit dans l’incapacité de montrer une EP, est nécessaire afin d’éliminer les autres diagnostics possibles lors de douleurs thoraciques ou d’essoufflement. Les découvertes sur la radiographie thoracique, bien que spécifiques, ne sont pas sensibles pour le diagnostic de l’EP ; elles incluent la bosse de Hampton (opacité triangulaire en forme de coin, pleurale, qui correspond à un infarcissement pulmonaire) et le signe de Westermark (disparition de l’ombre radiologique normale de tissu pulmonaire distal en aval d’une EP).
3. D’autres imageries intéressantes pour le diagnostic d’EP sont l’échocardiographie, l’angioscanner thoracique et la scintigraphie pulmonaire de ventilation-perfusion (V/Q). Une échographie cardiaque qui révèle une distension ventriculaire droite est commune dans les cas d’EP massive. Un angioscanner peut être réalisé dans les hôpitaux équipés ; il est rapide et sensible à près de 90 %. La scintigraphie pulmonaire V/Q peut aussi être employée, le patient inhalant un radio-isotope, un second étant administré sous forme injectable, permettant une comparaison entre la ventilation et la perfusion.
4. Des examens de laboratoire, comme la radiographie du thorax à l’hôpital, sont utilisés pour étayer ou éliminer les autres causes nombreuses de douleurs thoraciques et/ou de dyspnée. Il n’y a pas de test biologique ultime suffisamment sensible pour porter le diagnostic d’EP. L’étude fonctionnelle de la coagulation se situe d’habitude dans les limites de la normale ; le dosage des D-dimères est raisonnablement sensible, mais insuffi samment spécifique pour être diagnostique en cas de positivité. Bien que très utiles chez les patients à faible risque, les D-dimères ne sont pas contributifs en cas de risque élevé de TVP ou d’EP. Les gaz du sang peuvent être demandés, mais les anomalies évidentes des échanges gazeux font souvent défaut en cas d’EP.
Prise en charge de l’embolie pulmonaire: En préhospitalier, le patient présentant une douleur thoracique aiguë, une dyspnée et/ou une altération des paramètres vitaux devrait bénéficier d’administration d’oxygène, d’une voie veineuse, d’un monitorage électrique et d’un ECG 12 dérivations. Le traitement initial d’un syndrome coronaire aigu avec de l’aspirine est approprié si le diagnostic est incertain. Si le patient a été identifié comme porteur d’une insuffisance respiratoire, le contrôle des voies aériennes et la ventilation assistée sont aussi requis. La stabilisation des paramètres vitaux peut comprendre un usage de cristalloïdes et l’utilisation de substances vasopressives en perfusion continue afin de lutter contre un état de choc obstructif.
Rupture œsophagienne: Une douleur thoracique avec dyspnée peut correspondre à une rupture œsophagienne. Quand l’œsophage est déchiré, le contenu gastrique pénètre dans le médiastin, conduisant à un processus infectieux. Les causes de perforation œsophagienne les plus communes comprennent une blessure iatrogène lors d’une endoscopie, des bols alimentaires mal mâchés ou des corps étrangers aiguisés, des brûlures par produits caustiques, un traumatisme pénétrant, une rupture spontanée (syndrome de Boerhaave secondaire à de violents vomissements), ou des complications postopératoires.
Œdème aigu du poumon/insuffisance cardiaque congestive: Une autre cause engageant le pronostic vital qui peut être mise en évidence lors de l’examen primaire est l’œdème aigu du poumon (OAP) sur défaillance cardiaque. Ce patient a typiquement une douleur thoracique associée à des difficultés respiratoires. Dans votre évaluation primaire de la respiration, vous pouvez entendre des crépitants ou des râles dans les champs pulmonaires, débutant souvent dans les bases et progressant vers le haut, avec une sévérité accrue. Une évaluation rapide de l’état circulatoire peut vous aider à identifier le problème, particulièrement si un choc cardiogénique est également présent.
Œdème aigu du poumon avec choc: Ce tableau peut être l’expression d’un IDM, avec des signes de choc et d’œdème pulmonaire secondaire à un dysfonctionnement systolique aigu. Du pas de porte, vous pourriez noter que le patient est assis (en raison de l’orthopnée), luttant pour respirer et pouvant se plaindre de difficultés respiratoires ou de gêne thoracique. Des signes d’hypoperfusion (pouls périphériques faibles, peau froide, temps de recoloration capillaire retardé, oligurie et acidose) sont présents. Des signes de congestion systémique et pulmonaire seront aussi présents – tachypnée, respiration chaotique, crépitants bilatéraux (possibilité de sibilants associés [« asthme cardiaque »]), pâleur ou peau cyanosée, hypoxémie et parfois crachat spumeux, rose saumoné, teinté de sang.
Diagnostics chez les patients porteurs d’œdème aigu du poumon/insuffisance cardiaque congestive: Dans le cadre d’une activité préhospitalière, les protocoles de prise en charge des syndromes coronaires aigus (voir SCA ST +, SCA non ST + plus loin dans le chapitre) devraient être appliqués s’ils semblent être la cause de l’ICC ou de l’OAP. D’une manière générale, il faudra se concentrer sur la baisse des pressions. L’oxygène, un accès vasculaire et un monitorage cardiaque doivent être mis en place et un ECG 12 dérivations doit être enregistré pour mettre en évidence l’IDM.
Conduite à tenir devant une insuffisance cardiaque: La conduite à tenir face à une IC est destinée à améliorer les échanges gazeux et le débit cardiaque. Si la pression artérielle présente est adéquate (pression artérielle systolique > 100 mmHg), il faut aider le patient à se mettre dans une position confortable. Souvent, cela peut être fait avec un patient assis les jambes pendantes. Une oxygénothérapie sera mise en place tant que tolérée. L’objectif est une saturation en oxygène au-dessus de 90 %, et il faut évaluer la nécessité d’une ventilation assistée. S’il y a des signes d’insuffisance respiratoire avec troubles de la conscience, une intubation et une ventilation invasive seront nécessaires. Si le patient est suffisamment alerte, une ventilation non invasive par pression positive (VNIPP) peut être salutaire en agissant sur deux plans : (1) diminution du retour veineux et de la précharge, réduisant ainsi l’œdème pulmonaire, et (2) amélioration des échanges gazeux. L’utilisation d’une pression téléexpiratoire positive (positive end-expiratory pressure [PEEP]) d’une VNIPP, d’une pression positive continue (continuous positive airway pressure [CPAP]), et d’une pression positive à double niveau de pression (bilevel positive airway pressure [BiPAP]) est expliquée au chapitre 3.
Conjointement avec le traitement médical envisagé, une pompe de contrepulsion par ballon intra-aortique (CPBIA) aidera à réduire la postcharge et pourra améliorer la perfusion. Cette procédure très spécialisée est expliquée dans la Procédure 5-1