5 Anesthésie locorégionale intraveineuse (ALRIV)1
Bloc du membre supérieur (bloc de Bier)
L’anesthésie locorégionale intraveineuse (ALRIV) est une technique simple et efficace pour l’avant-bras, le poignet et la main (par exemple pour réduire une fracture de l’extrémité distale du radius). L’ALRIV entraîne une diffusion directe de l’anesthésique des veines vers les nerfs adjacents. Les avantages de cette technique sont sa simplicité et sa reproductibilité. Les inconvénients sont l’absence d’anesthésie résiduelle (par levée quasi immédiate de celle-ci au dégonflage du garrot), le temps de préparation et de réalisation du bloc, et enfin le respect strict d’un certain délai avant de dégonfler le garrot. L’ALRIV est plus efficace qu’une anesthésie du foyer de fracture pour la réduction d’une fracture du radius distal et est parfois plus simple à réaliser que certaines anesthésies locorégionales. L’ALRIV ne se conçoit que pour les gestes dont la durée n’excède pas 45 minutes à cause de la douleur engendrée par le garrot.
Préparation
Matériel nécessaire : garrot ou simple brassard à tension dont un assistant peut contrôler la pression à tout moment. Le garrot doit être de taille suffisante et sans fuite.
Placer une voie veineuse sur le membre supérieur controlatéral et s’assurer de la présence de tout le matériel de réanimation.
Placer une voie veineuse (22 G) sur la main du membre blessé afin d’administrer l’anesthésique local.
Utiliser une sédation si nécessaire.
Le patient doit être allongé et le membre surélevé pendant 1 à 2 minutes afin de vider les veines par gravité.
Préparer l’anesthésique local en calculant la dose en fonction du poids et de l’état du malade. N’utiliser que de la lidocaïne intraveineuse. La bupivacaïne et le ropivacaïne sont contre-indiquées.
Technique
Placer le garrot sur le bras à anesthésier. Envelopper le reste du membre dans un jersey pour éviter la gêne et des lésions cutanées. S’assurer de l’absence de fuite et de l’absence de risque de déplacement ou d’ouverture brusque, ce qui causerait un passage immédiat d’anesthésique local dans la circulation. On assurera le garrot avec une bande autocollante.
Placer une bande d’Esmarch de 100 mm sur le membre surélevé. Étirer légèrement la bande avant d’entamer le tour supplémentaire (pour éviter les lésions dues à une surcompression).
Gonfler le garrot à 100 mmHg au-dessus de la pression artérielle systolique, et au moins à 300 mmHg. En cas de double garrot, on gonflera le plus proximal dans un premier temps.
Injecter lentement l’anesthésique local à travers la voie IV au dos de la main.
La lidocaïne est l’agent le plus utilisé pour l’ALRIV. On utilisera un grand volume de solution diluée (par exemple 20 à 50 ml de lidocaïne à 0,5 %) ou un plus petit volume de solution plus concentrée (par exemple 12 à 15 ml de lidocaïne à 2 %). Les petits volumes sont plus simples à utiliser et fonctionnent très bien, du moment que l’exsanguination du membre est parfaite.
Le délai d’action est d’environ 5 minutes.
Après 30 à 45 minutes, la douleur liée au garrot devient insupportable. Dans ce cas, on peut utiliser des sédatifs ou des analgésiques centraux, ou encore gonfler un deuxième garrot, un peu plus distal et situé de ce fait en zone anesthésiée. On peut alors dégonfler le garrot proximal, ce qui soulage immédiatement. Si un double garrot est utilisé, on gonflera le distal et on dégonflera le proximal. On peut prolonger ainsi la durée de 15 à 30 minutes.
À la fin du geste chirurgical, il est important de respecter un certain nombre de précautions afin d’éviter le passage massif d’anesthésique local dans la circulation. Si le geste est terminé en 45 minutes, dégonfler en deux temps. Dégonfler 10 secondes et regonfler immédiatement pendant une minute. Cela permet une élimination progressive de l’anesthésique local.
Si le geste est plus court (20 minutes), on dégonflera en plusieurs fois, avec une pose de 2 minutes entre chaque dégonflage.