Chapitre 48. Maladies rares
Chapitre relu par M. Barth, Mme le Dr
pédiatre en génétique au CHU d’Angers
Généralités
Les maladies rares en chiffres
MaladierareCentre de référenceConsultationd’annonceIdentificationClivageLes maladies rares touchent, comme leur nom l’indique, un nombre restreint de personnes en regard de la population générale. Le seuil admis en Europe est d’une personne atteinte sur 2 000, soit, pour la France, moins de 30 000 personnes pour une maladie donnée. On dénombre plusieurs milliers de maladies rares et 200 à 300 nouvelles maladies rares sont décrites chaque année.
En France, la prévalence cumulée se situe entre 4 et 6 %, la majorité des 500 maladies rares les plus fréquentes ayant une prévalence inférieure à 1 pour 100 000, ce qui signifie que moins de 600 personnes sont atteintes pour chacune de ces pathologies.
À titre d’exemple, on dénombre en France :
• 15 000 malades atteints de drépanocytose;
• 8 000 malades atteints de sclérose latérale amyotrophique;
• 5 000 à 6 000 malades atteints de mucoviscidose;
• 5 000 malades atteints de myopathie de Duchenne;
• 400 à 500 malades atteints de leucodystrophie;
• quelques cas de progeria (ou vieillissement précoce), qui ne compte pas plus de 100 cas dans le monde.
Souvent graves et invalidantes, ces maladies rares sont caractérisées par :
• un début précoce dans la vie, deux fois sur trois avant l’âge de deux ans;
• des douleurs chroniques chez un malade sur cinq;
• la survenue d’un déficit moteur, sensoriel ou intellectuel dans la moitié des cas, à l’origine d’une incapacité réduisant l’autonomie dans un cas sur trois, la perte complète d’autonomie concernant 9 % des personnes atteintes;
• la mise en jeu du pronostic vital dans presque la moitié des cas. Les maladies rares expliquent 35 % des décès avant l’âge d’un an, 10 % entre 1 et 5 ans, et 12 % entre 5 et 15 ans.
Origines
Les maladies rares ont une origine génétique (c’est-à-dire qu’elles résultent d’une altération des gènes, soit héréditaireHéréditaireMaladiehéréditaire, soit par une nouvelle mutation) dans 80 % des cas. Mais ces «maladies génétiques Maladiegénétique» regroupent en fait un groupe très hétérogène. On distingue ainsi :
• les maladies monogéniques, résultant de la mutation d’un seul gène, et dont la transmission suit les lois de Mendel (mucoviscidose, hémophilie…);
• les maladies mitochondriales, dont la cause réside dans l’altération de la chaîne respiratoire. Certaines sont dues une altération du génome de la mitochondrie et sont transmises exclusivement par la mère (certaines encéphalomyopathies, l’atrophie optique de Leber…);
• les maladies polygéniques (ou multigéniques), dans lesquelles plusieurs gènes sont impliqués, et qui sont les plus fréquentes;
• les maladies plurifactorielles dans lesquelles, à côté de l’altération de plusieurs gènes de prédisposition, interviennent des facteurs environnementaux;
• les maladies résultant d’aberrations chromosomiques, le plus souvent provoquées par l’existence d’un chromosome (ou d’une partie de chromosome) excédentaire (comme dans la trisomie 21) ou par l’absence de tout ou partie d’un chromosome dans une paire.
Dans 20 % des cas, aucune composante génétique n’est retrouvée. C’est le cas des pathologies auto-immunes, ou encore de pathologies infectieuses ou cancéreuses rares.
Parcours de soins
En dépit de cette hétérogénéité, les maladies rares présentent des caractéristiques communes : elles sont souvent graves, chroniques, évolutives et peuvent mettre en jeu le pronostic vital. L’atteinte des fonctions supérieures implique souvent une perte d’autonomie et des handicaps qui altèrent la qualité de vie. Il convient toutefois de souligner que les handicapsHandicap induits par une maladie rare ne sont pas pour autant des «handicaps rares». Le terme de «handicap rare» est, lui, défini comme une configuration rare de déficience et de troubles associés, dont la prise en charge nécessite la mise en œuvre de protocoles particuliers.
Le contexte particulier aux maladies rares, les difficultés du diagnostic, le sentiment d’exclusion, l’absence de traitement (maladies dites «orphelines» car «orphelines de traitement») génèrent alors une souffrance morale dont certains caractères apparaissent assez spécifiques.
Par définition, il est difficile de nommer ces maladies très peu et mal connues. Or cet inconnu est source d’angoisses et amène parfois certains patients (adolescents ou parents) à traquer la moindre information sur la dite maladie. Dans une quête éperdue, le recours très fréquent à Internet illustre ce besoin irrépressible de savoir. Et sans doute, parfois, le patient vient à en savoir plus que le médecin, ce qui n’est pas sans poser certaines questions ni sans provoquer certains conflits (de savoir).
Aux incertitudes portant sur le diagnostic, s’ajoute l’inconnue de l’évolution; et cette imprévisibilité redouble les angoisses sur l’avenir. Ces inquiétudes renforcent les sentiments de solitude, l’impression de ne pas être reconnu et le vécu d’exclusion, fréquents chez ces patients.
Très souvent, ces maladies sont responsables d’un accès aux soins et d’un parcours de soins très complexe, dont la spécificité n’est pas toujours compatible avec les exigences et les mouvements de la vie personnelle, sociale, scolaire ou professionnelle. S’il n’existe pas souvent de traitement curatif efficace pour toutes les maladies rares (des recherches sont toutefois engagées, aidées par une politique de promotion des médicaments dits «orphelins»), des soins précoces et appropriés peuvent permettre d’améliorer non seulement la «survie» mais aussi la qualité de vie des sujets touchés.
Centres de référence – Centres de compétence
Centre de référenceLe plan national «Maladie rares» (2005–2008) a permis de structurer l’organisation de l’offre de soins pour les maladies rares et d’améliorer sa lisibilité pour les patients. La reconnaissance de structures d’excellence scientifique et clinique, la constitution progressive d’une filière de soins spécialisés dans le diagnostic et la prise en charge par des centres de compétences régionaux et interrégionaux, visent à répondre aux spécificités liées à ces maladies.
Centres de référence labellisés pour une maladie ou un groupe de maladies
131 centres de référence, regroupant des équipes hospitalo-universitaires hautement spécialisées, ont été labellisés dans le cadre des missions d’intérêt général. Un centre de référence maladies rares assure ainsi à la fois un rôle :
• d’expertise pour une maladie ou un groupe de maladies;
• de recours, qui lui permet, du fait de la rareté de la pathologie prise en charge et du faible nombre d’équipes spécialisées dans le domaine, d’exercer une «attraction» (interrégionale, nationale ou internationale), au-delà du bassin de santé de son site d’implantation.
Les centres de référence ont pour mission de faciliter le diagnostic, de définir une stratégie de prise en charge thérapeutique et sociale, de définir et diffuser des protocoles de prise en charge, de coordonner les travaux de recherche, de participer à des actions de formation et d’information pour les professionnels de santé, les malades et leurs familles, d’animer et coordonner les réseaux de correspondants sanitaires et médico-sociaux, et enfin d’être des interlocuteurs privilégiés pour les tutelles et les associations de malades.
Centres de compétences
Les centres de compétence ont pour vocation d’assurer la prise en charge et le suivi des patients, à proximité de leur domicile, et de participer à l’ensemble des missions des centres de référence.
Le nombre de centres de compétences et leur répartition géographique sont déterminés en fonction de la prévalence et de la typologie des maladies rares, de l’importance de la file active suivie, de l’organisation territoriale des soins pour la pathologie concernée, de la lourdeur de la prise en charge des patients, des critères épidémiologiques spécifiques aux régions concernées, de la fréquence du recours aux soins et du nombre de centres de référence labellisés pour le groupe de maladies rares concerné.
Découverte et vécu d’une maladie rare
Consultation d’annonce
Consultationd’annonceL’annonce d’une maladie, en l’occurrence rare, est toujours un moment particulièrement difficile et traumatique. Au point que certains services de génétiques et certains centres de références se sont dotés de psychologues dits de «consultations d’annonce».
Les modalités de l’annonce sont pensées et le cadre est aménagé, au cas par cas. Cette annonce est d’autant plus complexe que la maladie est mal connue. L’accompagnement des familles est donc ici fondamental. Il est pluridisciplinaire et s’inscrit dans la durée. Il concerne un enfant ou une fratrie.
Maladie à expression précoce
La plupart des maladies rares présentent une expression clinique précoce, avant l’âge de deux ans, parfois encore bien plus tôt, dès l’âge de quelques semaines ou quelques mois. Ces débuts précoces, souvent cliniquement bruyants, touchant parfois simultanément plusieurs organes et donc plusieurs fonctions, dont certaines sont vitales, posent le triple problème du diagnostic, du pronostic, et de la prise en charge, à l’issue souvent aléatoire. Cette prise en charge est par ailleurs initialement – et parfois durablement – hospitalière.

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