47: Pseudo-uvéites non cancéreuses

Chapitre 47 Pseudo-uvéites non cancéreuses



Certains cas d’inflammations intraoculaires peuvent être d’origine réactionnelle à un phénomène mécanique ou purement circulatoire. Ils se manifestent par une inflammation aspécifique sans caractères évocateurs d’une réaction immunologique ou infectieuse. L’analyse du contexte et l’examen clinique, associés ou non à des examens complémentaires, permettront d’arriver au diagnostic étiologique.




Pseudo-uvéites des décollements de rétine inflammatoires


Un décollement de rétine rhegmatogène est défini par le passage de liquide dans l’espace sous-rétinien à travers une déhiscence rétinienne. Il s’en suit une séparation entre les articles externes des photorécepteurs et les cellules de l’épithélium pigmentaire. Tous les décollements de rétine rhegmatogènes s’accompagnent de signes inflammatoires a minima. Ils peuvent parfois faire passer le décollement au second plan et être diagnostiqués à tort comme une uvéite.


Lors d’un décollement de rétine, les rapports anatomiques et cellulaires sont modifiés. Ils sont à l’origine de phénomènes inflammatoires. On retrouve des cellules de l’épithélium pigmentaire dans le vitré (« tobacco dust », ou signe de Shafer ; fig. 47-1), qu’il ne faut pas confondre avec un tyndall du vitré. Le « tobacco dust » est quasiment pathognomonique de la présence d’une déchirure rétinienne en présence d’un décollement postérieur du vitré. Un passage de macrophages dans le liquide sous-rétinien lors de la création d’un décollement de rétine rhegmatogène a été retrouvé chez le lapin [1]. Des mélanophages peuvent également provenir de la métaplasie de cellules de l’épithélium pigmentaire. L’inflammation qui en résulte est à l’origine d’une augmentation de la perméabilité des capillaires, surtout choroïdiens.



Les décollements de rétine inflammatoires ont quelques particularités communes.


Ils peuvent être chroniques mais parfois aussi récents. L’hyperhémie conjonctivale (fig. 47-2a) est associée à des synéchies postérieures, un flare de chambre antérieure important (fig. 47-2b) par rapport à un tyndall fin, des précipités rétrodescemétiques pigmentés. Une séclusion pupillaire est possible. Le vitré est dense, non optiquement vide, avec présence de grains pigmentés (« tobacco dust ») plus qu’un réel tyndall cellulaire vitréen. La rétine est souvent souple et le liquide sous-rétinien clair. Le décollement peut avoir des topographies variées mais il est souvent inférieur, positionnel en cas de décollement chronique : il semble inférieur en position verticale mais s’étend au pôle postérieur en position allongée. Il est plus ou moins bulleux, parfois plan en absence de décollement postérieur du vitré. L’apparition d’un décollement choroïdien est favorisée par l’hypotonie associée à l’augmentation de la perméabilité capillaire. Celui-ci est localisé dans un ou plusieurs cadrans, périphérique, soulevant l’ora. Il n’est visible parfois qu’au travers de la rétine décollée. La déhiscence, quand elle est retrouvée, est une déchirure à clapet souvent de petite taille. Cela peut aussi être une dialyse à l’ora en cas de traumatisme ancien.



Cette inflammation secondaire survenant dans ce type de décollement de rétine semble dissociée de la prolifération vitréorétinienne. En effet, inflammation du segment antérieur et prolifération vitréorétinienne ne sont pas toujours associées dans ces cas. Alors que la prolifération vitréorétinienne est plutôt corrélée à la grande taille de la ou des déchirures rétiniennes, le décollement de rétine inflammatoire peut se voir avec de très petites déchirures.


Le diagnostic est évoqué lorsque la déchirure est retrouvée et que sa localisation est en accord avec la topographie du décollement de rétine. L’existence de nœuds de prolifération vitréorétinienne sera également évocatrice d’un mécanisme rhegmatogène au décollement, comme la présence de lignes pigmentées de démarcation pour les formes chroniques. Le diagnostic est difficile lorsque la déchirure n’est pas visible. En effet, les conditions de visibilité peuvent être médiocres du fait de l’existence de synéchies postérieures, d’inflammation du segment antérieur, associées ou non à une cataracte. Tout doit être mise en œuvre pour retrouver la déchirure (examen au verre à trois miroirs avec indentation, ophtalmoscopie indirecte, échographie en mode B). Le contexte peut également aider au diagnostic : antécédent de traumatisme ancien (dialyse), chirurgie de la cataracte, laser YAG.


Lors du traitement, on optera souvent pour une chirurgie par voie endoculaire en cas de déhiscence non retrouvée. L’inflammation cédera avec la réapplication de la rétine, ce qui apportera la confirmation finale du diagnostic.


Dans le syndrome de Schwartz [2], qui associe un décollement de rétine, une hypertonie et un tyndall très fin de chambre antérieure, le décollement de rétine est alimenté par une déchirure rétinienne très antérieure, parfois jusqu’en rétine ciliaire [3]. Il existe alors un passage de segments externes des photorécepteurs en chambre antérieure expliquant le tyndall et l’hypertonie par obstruction du trabéculum. L’hypertonie régresse habituellement après chirurgie du décollement de rétine mais peut laisser des amputations séquellaires du champ visuel.


Chez le patient myope fort, un vitré chargé avec nombreux corps flottants (fig. 47-3a) peut être pris à tort pour une hyalite en absence de tout phénomène inflammatoire. Associées à une mauvaise visibilité, une atrophie choriorétinienne du pôle postérieur ou des fibres à myéline (fig. 47-3b) peuvent donner le change avec un foyer infectieux choriorétinien.


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Jun 13, 2017 | Posted by in GÉNÉRAL | Comments Off on 47: Pseudo-uvéites non cancéreuses

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