43. Retards de croissance – retards pubertaires

Chapitre 43. Retards de croissance – retards pubertaires


Retard de croissanceRetard pubertaireL’endocrinologue pédiatre s’intéresse à l’étude des hormones et à leurs dysfonctionnements dans le corps humain, depuis la naissance jusqu’à l’âge adulte. La croissance, le développement pubertaire et sexuel et les dysrégulations hormonales (hypophyse, hypothalamus, thyroïde, parathyroïde, pancréas, surrénales, ovaires, testicules…) sont donc au centre de ses préoccupations cliniques. Aujourd’hui, certains mécanismes de secrétions hormonales restent inconnus; de même, nombre d’interactions hormonales sont encore mystérieuses. Ils sont pourtant au centre du développement de l’enfant. Les liens de l’endocrinologie avec la génétique et la gynécologie pédiatrique sont donc très importants; les résonances avec la pédopsychiatrie sont elles aussi très fortes.

Parmi les troubles et les pathologies rencontrés dans cette discipline, nous insisterons ici sur deux circonstances fréquentes de consultations : les retards de croissance et les retards pubertaires.


Rappels



Retards de croissance


La croissance est intimement liée aux facteurs génétiques ainsi qu’aux facteurs endocriniens, métaboliques et environnementaux (entourage parental, alimentation, conditions de vie…). La croissance fait l’objet de mesures précises et répétées (taille et poids) au cours de l’enfance. Ces mesures sont indiquées sur les courbes de croissance, disponibles dans le carnet de santé de l’enfant. Les limites de la croissance «normale» sont définies sur des bases statistiques. La majorité des enfants (95 %) se retrouve dans une moyenne, située entre −2 DS et +2 DS (déviations standard).

À l’hôpital, ce sont généralement les retards de croissance (plutôt que les accélérations) qui font l’objet de demandes de consultation. Ces retards, progressifs ou survenant sous forme de cassure de la courbe, justifient un avis médical spécialisé. Il s’agit d’enfants :




• dont la taille est petite, en référence aux courbes de croissance de la population;


• dont la taille est petite, en référence à la taille de ses parents;


• ou dont la vitesse de croissance n’est pas régulière, c’est-à-dire que la taille ne se maintient pas sur une ligne de croissance régulière.

Le nombre de filles et de garçons dont la taille sort des limites est le même. Et pourtant :




• dans 60 à 70 % des cas, ce sont les garçons qui viennent consulter pour de petite taille (ou un retard pubertaire);


• dans 60 à 70 % des cas, ce sont les filles qui viennent consulter pour une grande taille (ou une avance pubertaire).

Les causes de ces retards sont parfois retrouvées. Il s’agit principalement de :




• maladies chroniques : malabsorption intestinale (maladie cœliaque), maladies respiratoires (hypoxie chronique), insuffisance rénale chronique, cardiopathies congénitales, maladie osseuse constitutionnelle, mucoviscidose;


• Pathologies endocriniennes : déficits congénitaux en hormone de croissance ou en hormone thyroïdienne, déficit en IGF-1 (insulin-like growth factor), hypercorticismes (maladie de Cushing);


• dysgénésies gonadiques et autres maladies génétiques : syndrome de Turner;


• pathologies psychiatriques : anorexie mentale…

Mais les raisons d’une petite taille peuvent aussi être secondaires à des conditions de vie :




• malnutrition, nanisme psychosocial;


• exercice physique intensif.

Enfin, il peut s’agir de :




• retard de croissance intra-utérin;


• retard simple de croissance et de puberté;


• petite taille constitutionnelle.

Ainsi, parfois, il n’existe pas d’étiologie médicale avérée, et une origine psychosociale est suspectée. Cette influence de l’environnement affectif est reconnue depuis longtemps dans l’étiologie des retards de croissance (nanisme psychosocial). Quelle que soit l’origine du retard de croissance (maladie chronique mal vécue, circonstance de survenue psychoaffective), le pédopsychiatre ou psychologue de liaison est interpellé. Le vécu psychique d’une petite taille est parfois très douloureux. Dans notre société, «être petit» renvoie à l’impuissance, à la faiblesse et au manque de virilité. Le garçon (le plus souvent) vit très mal sa petite taille et peut être convaincu que son développement et son épanouissement passent par une taille «comme les autres». Cette souffrance est souvent aiguë à l’adolescence et vient fragiliser les assises narcissiques.

La question d’une prescription d’hormone de croissance est posée. Ce traitement, non dénué d’effets secondaires, peut relancer la croissance et simultanément la dynamique psychique. Mais le vécu du traitement ne se superpose pas à ses résultats objectifs (Gueniche, 2007). La prise en compte de la souffrance sous-jacente à la réalité physique est donc très importante.


Retards pubertaires


La puberté est sous la dépendance de l’activation de l’axe hypothalamo-hypophyso-gonadique. Les mécanismes de lancement de la puberté restent encore mystérieux; ils font intervenir une multitude de facteurs : génétiques, endocriniens, psychiques, sociaux… Les hormones sexuelles induisent alors la puberté physiologique avec trois aspects fondamentaux (Despert, 2008) :




• le développement des caractères sexuels secondaires (stades de Tanner);


• l’augmentation de la vitesse de croissance;


• l’augmentation de la maturation osseuse.


Puberté normale


Chez le garçon, le début du développement des caractères sexuels secondaires se fait entre 9 et 14 ans (moyenne à 12,5 ans). Le premier signe en est l’augmentation du volume testiculaire.

Chez la fille, le début de la puberté se situe entre 8 et 13 ans (moyenne à 10 ans). Le premier signe est la poussée mammaire. Les différents stades de puberté (5 stades de Tanner) sont bien connus et décrits (Alvin, Marcelli, 2005). Le stade 1 représente l’état infantile, le stade 5 l’état adulte et les trois stades intermédiaires ceux du développement pubertaire proprement dit. La cotation s’effectue :




• pour le garçon : sur la pilosité pubienne (P) et les organes génitaux externes, pénis et scrotum (G);


• pour la fille : sur la pilosité pubienne (P) et le développement mammaire (M).


Retards pubertaires


Pour le garçon, le retard pubertaire est pris en compte lorsque l’adolescent ne présente aucun signe de puberté physique à l’âge de 14 ans. Ce retard touche statistiquement 2,5 % des garçons. Le retard pubertaire est aussi diagnostiqué quand on note une absence de développement pubertaire complet 4 à 5 ans après l’apparition des premiers signes de puberté.

Pour la fille, le retard pubertaire est évoqué quand il y a une absence de signe pubertaire (développement mammaire) pour un âge chronologique ayant dépassé 12,5 à 13 ans. Ce retard touche statistiquement 2,5 % des filles. On considère aussi le retard pubertaire quand il y a une absence de ménarche 4 à 5 ans après le début des premiers signes de puberté (Coutant, 2009).

Les étiologies de ces retards pubertaires sont là aussi multiples. Les causes principales sont :




• chez le garçon :




– le retard pubertaire simple,


– le déficit gonadotrope organique (syndrome de Kaullmann, tumeur cérébrale…);


• chez la fille :




– le retard pubertaire simple,


– le déficit gonadotrope fonctionnel (carences énergétiques, anorexie mentale…);


– le syndrome de Turner.

Devant un retard pubertaire, un bilan clinique et des examens complémentaires sont indispensables. Sont pratiqués systématiquement : une étude de l’anamnèse (antécédents personnels et familiaux, courbes de croissance), un examen clinique médical complet et des radiographies (main et poignet gauche) pour évaluer l’âge osseux. En cas de doute, des dosages biologiques (ionogramme sanguin, fonction rénale) et hormonaux (FSH, LH, testostérone, inhibine B) sont faits. Dans de rares cas, un scanner et une IRM cérébrale sont demandés. Ces bilans, non invasifs, permettent dans la plupart des cas, de retrouver la cause du retard pubertaire. Il sera enfin très important, dans ce bilan, d’apprécier le retentissement psychologique du retard pubertaire et de l’éventuel retard de croissance associé.

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Apr 22, 2017 | Posted by in PÉDIATRIE | Comments Off on 43. Retards de croissance – retards pubertaires

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