4: Ligaments du rachis lombal

Chapitre 4


Ligaments du rachis lombal



Topographiquement, les ligaments du rachis lombal peuvent être classés en quatre catégories :




LIGAMENTS DES CORPS VERTÉBRAUX


Les ligaments longitudinaux antérieurs et postérieurs interconnectent les corps vertébraux. Les anulus fibrosus des disques intervertébraux sont intimement liés à ces ligaments, et il faut souligner que chaque anulus fibrosus est structurellement et fonctionnellement analogue à un ligament, bien qu’ils soient décrits comme des composantes du disque intervertébral. En réalité, la taille et la résistance des anulus fibrosus permettent de déduire qu’ils sont les principaux ligaments des corps vertébraux. C’est pour cette raison que l’on retrouve leur structure parmi les ligaments du rachis lombal.



Anulus fibrosus


Comme il est décrit dans le chapitre 2, chaque anulus fibrosus est constitué de fibres de collagène courant d’un corps vertébral à l’autre et disposées en lamelles concentriques. En outre, les lamelles de collagène les plus profondes sont continues avec les fibres de collagène des plateaux vertébraux fibrocartilagineux (voir chapitre 2). Les couches internes de l’anulus fibrosus forment une capsule ou une enveloppe entourant le nucléus pulposus, laissant penser que leur fonction principale est de renfermer le nucléus (figure 4.1).



En revanche, les fibres externes de l’anulus fibrosus sont attachées au listel marginal (voir chapitre 2). Pour différentes raisons, ce sont ces fibres qui permettent de supposer qu’elles représentent la partie « ligamentaire » principale de l’anulus fibrosus. Comme pour les autres ligaments, elles sont tout d’abord insérées sur des os distincts et sont composées en grande partie de collagène de type I, conçu pour résister à la tension (voir chapitre 2). De telles tensions surviennent lors de mouvements de balancement ou de torsion des corps vertébraux. Lors de ces mouvements, les bords périphériques des corps vertébraux se séparent davantage que les parties les plus centrales, et les contraintes de traction appliquées à la périphérie de l’anulus sont plus grandes que celles appliquées à l’intérieur de l’anulus. En résistant à ces mouvements, les fibres périphériques de l’anulus fibrosus sont sujettes aux mêmes sollicitations que les ligaments classiques et fonctionnent en conséquence.


Comme il est exposé dans le chapitre 2 et davantage étudié au chapitre 8, l’anulus fibrosus fonctionne comme un ligament en résistant aux mouvements de distraction, de flexion, de glissement et de torsion de l’articulation intervertébrale. L’anulus fibrosus est ainsi appelé à fonctionner comme un ligament à chaque mouvement du rachis lombal. Ce n’est qu’en charge qu’il fonctionne en harmonie avec le nucléus pulposus.



Ligament longitudinal antérieur


Les descriptions classiques prétendent que le ligament longitudinal antérieur est une longue bande recouvrant les faces antérieures des corps vertébraux lombaux et des disques intervertébraux [1] (figure 4.2). Ce ligament n’est pas limité à la région lombale malgré le fait qu’il soit bien développé dans cette région. Il se prolonge inférieurement vers le sacrum et se continue supérieurement vers les régions thoraciques et cervicales pour recouvrir la surface antérieure de toute la colonne vertébrale.



Le ligament longitudinal postérieur est supposé être structurellement composé de plusieurs rangées de fibres de collagène [1]. Ce sont de courtes fibres qui s’étendent entre chaque articulation intersomatique, recouvrant le disque intervertébral et s’attachant sur les bords des corps vertébraux (figures 4.2 et 4.3). Ces fibres sont insérées sur l’os de la surface antérieure des corps vertébraux ou sur le périoste qui le recouvre [2,3]. Les premiers auteurs ont parfois défini ces fibres comme des parties de l’anulus fibrosus [4], et la tendance de certains cercles actuels est de définir ces fibres comme les composantes d’une « capsule discale ». Embryologiquement, leurs insertions sont cependant toujours unies à l’os cortical, comme pour tout ligament en général, alors que l’anulus fibrosus proprement dit est fixé au plateau vertébral [2]. Les fibres mêmes de l’anulus adulte qui s’insèrent sur l’os sont secondairement intégrées au listel marginal qui n’est pas de l’os cortical (voir chapitre 2). Les fibres profondes et courtes du ligament longitudinal antérieur ne doivent pas être considérées comme faisant partie de l’anulus fibrosus à cause de ces différences de développement.



Plusieurs couches de fibres de plus en plus longues recouvrent les fibres unisegmentaires profondes du ligament longitudinal antérieur. Ce sont des fibres s’étendant sur deux, trois ou même quatre articulations intersomatiques. Elles s’insèrent sur les extrémités supérieures et inférieures des corps vertébraux comme celles des fibres profondes.


Le ligament est aussi secondairement inséré sur la concavité de la surface antérieure des corps vertébraux, bien qu’il soit essentiellement fixé sur les bords antérieurs des corps vertébraux lombaux. Le corps principal du ligament chevauche cette concavité, mais quelques fibres du plan profond fusionnent avec le périoste la recouvrant. L’espace entre le ligament et l’os est par ailleurs rempli de tissu aréolaire lâche, de vaisseaux sanguins et de nerfs. Sur les disques intervertébraux, le ligament longitudinal antérieur n’est que vaguement attaché à l’avant des anulus fibrosus par du tissu aréolaire lâche.


Le ligament longitudinal antérieur sert principalement à résister à l’écartement vertical des extrémités antérieures des corps vertébraux, grâce à sa disposition longitudinale parfaite. Il fonctionne de cette manière lors des mouvements d’extension des disques intervertébraux, et résiste à l’inclinaison antérieure du rachis lombal (voir chapitre 5).



Commentaire


La structure non ambiguë du ligament longitudinal antérieur ne se trouve que sur le rachis thoracique, car celui-ci reste isolé des muscles prévertébraux. La structure du ligament longitudinal antérieur dans la région lombale est rendue ambiguë par l’attachement du pilier du diaphragme sur les trois premières vertèbres lombales. L’examen détaillé des insertions du pilier laisse à penser que de nombreuses fibres tendineuses du pilier se prolongent caudalement au-delà des trois premières vertèbres lombales, bien que les études méthodiques ne soient pas terminées. Ces tendons semblent former une grande partie de ce qui était par ailleurs considéré comme le ligament longitudinal antérieur lombal. Il est donc possible que le ligament longitudinal antérieur lombal soit plus ou moins le prolongement de l’attache d’un tendon et non pas véritablement un ligament.



Ligament longitudinal postérieur


Le ligament longitudinal postérieur est présent tout le long de la colonne vertébrale, comme le ligament longitudinal antérieur. Dans la région lombale, il forme une bande étroite à l’arrière des corps vertébraux mais s’étend latéralement sur les parties postérieures des corps vertébraux pour leur donner un aspect dentelé ou en « dents de scie » (figure 4.4). Ses fibres se mêlent à celles des anulus fibrosus mais les traversent pour s’attacher sur les bords postérieurs des corps vertébraux [3]. Les fibres les plus profondes et les plus courtes du ligament longitudinal postérieur recouvrent deux disques intervertébraux. Elles prennent naissance sur le bord supérieur d’une vertèbre et s’insèrent sur le bord inférieur de la vertèbre se trouvant deux niveaux plus haut, en dessinant une courbe concave latéralement. Les fibres les plus superficielles s’étendent sur trois, quatre ou même cinq vertèbres (figures 4.3 et 4.4).



Le ligament longitudinal postérieur permet de résister à la séparation des extrémités postérieures des corps vertébraux, mais grâce à sa disposition polysegmentaire, sa force s’exerce non pas sur une mais sur plusieurs articulations intersomatiques.



LIGAMENTS DES ÉLÉMENTS POSTÉRIEURS


Les ligaments des éléments postérieurs portent le nom de ligaments jaune, interépineux et surépineux. À certains égards, les capsules des articulations zygapophysaires se comportent comme des ligaments en prévenant certains mouvements. Elles peuvent être considérées fonctionnellement comme des ligaments des éléments postérieurs. En effet, leur rôle biomécanique est primordial (voir chapitre 8). Cependant, leur particularité en tant que capsules des articulations zygapophysaires est tellement évidente qu’elles ont été méthodologiquement décrites dans ce contexte.



Ligament jaune


Le ligament jaune est un petit ligament épais qui unit les lames des vertèbres successives. Ce ligament est une structure paire présente à gauche et à droite de chaque niveau intersegmentaire. Le ligament s’insère en haut, de chaque côté, sur la moitié antéro-inférieure de la lame et sur l’angle inférieur du pédicule (figures 4.3). Sa surface lisse s’unit parfaitement avec la surface lisse de la moitié supérieure de la lame. Inférieurement, le ligament se divise de chaque côté en parties latérale et médiale [57]. La partie médiale passe derrière la lame inférieure suivante et s’insère sur la surface rugueuse localisée à peu près sur le quart supérieur de la surface dorsale de cette lame (figure 4.5). La partie latérale passe devant l’articulation zygapophysaire formée par les deux vertèbres que le ligament relie. Elle s’insère sur les angles des processus articulaires inférieurs et supérieurs de cette articulation, et constitue la partie antérieure de la capsule. Les fibres les plus latérales s’étendent le long de la base du processus articulaire supérieur, jusqu’au pédicule inférieur suivant sur lequel elles s’insèrent [7].



Histologiquement, le ligament jaune est composé à 80 % d’élastine et à 20 % de collagène [7,8]. Les fibres élastiques proprement dites se trouvent dans tout le ligament, mais celui-ci contient sur sa partie terminale des fibres modifiées composées d’élastine et de microtubules appelées élaunine [8].


Le ligament jaune diffère de tous les autres ligaments du rachis lombal par son élasticité. Cette différence a conduit à émettre des hypothèses sur la signification de cette fonction unique. Sa nature élastique est supposée aider à redresser le rachis lombal de la flexion vers l’extension, alors que sa partie latérale est supposée éviter que la partie antérieure de la capsule de l’articulation zygapophysaire soit pincée à l’intérieur de la cavité articulaire lors du mouvement. L’importance de ces fonctions sur le mécanisme du rachis lombal est inconnue, bien que la nature élastique du ligament rende toutes ces propositions cohérentes. La portée de la contribution du ligament jaune dans l’extension est contestée [9], et aucun handicap n’a été observé chez les patients dont le ligament avait été excisé sur un ou même plusieurs étages. Des études biomécaniques ont révélé que le ligament jaune servait à précontraindre le disque intervertébral en exerçant une pression d’à peu près 0,70 kg/cm−2 [10], mais la signification biologique de ce résultat reste obscure.


L’interprétation plausible du caractère unique du ligament jaune concerne plus sa localisation que ses hypothétiques fonctions biomécaniques. Le ligament jaune repose immédiatement derrière le canal vertébral, et donc immédiatement à côté des structures neurologiques à l’intérieur du canal. En tant que ligament, il sert à résister à l’écartement excessif des lames vertébrales. Un ligament collagéneux situé au même endroit ne fonctionnerait pas aussi bien. Il pourrait résister à l’écartement des lames mais se déformerait lors de leur rapprochement. Un ligament déformé à l’intérieur du canal vertébral pourrait faire saillie sur la moelle spinale ou sur les racines nerveuses spinales, et éventuellement les endommager. D’un autre côté, le remplacement d’un ligament collagéneux par un ligament élastique préviendrait le plissement. Un ligament élastique s’allonge et devient plus fin à partir de sa position de repos. En se relâchant, le ligament retrouve simplement son épaisseur originelle. Le plissement ne se produit pas ou reste minimal. Par conséquent, en dotant le ligament jaune de fibres élastiques, le risque d’exposition de la racine nerveuse est réduit.

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Apr 24, 2017 | Posted by in RADIOLOGIE | Comments Off on 4: Ligaments du rachis lombal

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