Chapitre 4 Échocardiographie de stress
Introduction
Les avantages de l’EDS par rapport aux techniques isotopiques sont :
• l’absence d’irradiation due aux isotopes ;
• un moindre coût de l’examen ;
• une meilleure disponibilité clinique ;
• une durée d’acquisition des données brève ;
Méthodologie
L’électrocardiographie (ECG) d’effort demeure toujours l’examen de première intention pour le diagnostic et le suivi de l’insuffisance coronarienne. Cependant cet examen conventionnel n’est pas applicable à tous les patients et environ 30 % d’entre eux soit ne peuvent pratiquer aucun effort physique, soit ont des résultats peu concluants. Les limites de l’ECG d’effort sont nombreuses et bien connues (encadré 4.1). Pour tenter de pallier ces limites, une technique alternative d’évaluation de la maladie coronarienne dit échocardiographie de stress (EDS) s’est développée progressivement selon diverses modalités.
Encadré 4.1
Limites de l’électrocardiographie (ECG) d’effort
L’interprétation difficile voire litigieuse du test ergométrique
Chez les patients présentant :
des anomalies préexistentes de la repolarisation ventriculaire d’origine iatrogène (patients polymédicamentés), métabolique ou autre ;
une hypertrophie ventriculaire gauche
des troubles de la conduction intraventriculaire (bloc de branche gauche).
Chez la femme : faux positifs de l’ECG d’effort fréquents.
L’incapacité physique de réaliser l’épreuve d’effort en raison :
d’une artériopathie sévère des membres inférieurs ;
d’une affection invalidante neurologique, rhumatologique (handicap moteur) ou pneumologique (bronchite chronique avec facteur bronchospastique) ;
d’un sujet âgé ou obèse incapable de fournir un effort physique suffisant ;
d’un simple manque de coordination ou de coopération sur le tapis roulant ou la bicyclette.
L’apparition assez tardive des modifications d’ECG dans la « cascade » ischémique d’effort.
Modalités de l’EDS
Il existe plusieurs modalités de l’EDS employées par divers laboratoires (tableau 4.1), à savoir :
En fait, la réalisation de l’examen d’EDS nécessite :
• un plateau technique adapté ;
• un personnel qualifié et expérimenté ;
• une réglementation médico-légale en vigueur ;
• une préparation adéquate du patient ;
• un protocole de stress préalablement défini ;
• un système d’acquisition numérique de stockage et de synchronisation des images avec un traitement et des calculs post-images.
Plateau technique
La salle réservée à l’examen de l’EDS doit être :
• intégrée dans un service de cardiologie avec unité de soins intensifs ou dans une clinique spécialisée comportant des lits de réanimation ;
• bien ventilée avec une température relativement constante qui devrait rester entre 16 et 20 ° C et une humidité aux environ de 60 %.
L’équipement de la salle d’EDS comprend :
• l’appareil d’échocardiographie avec le système informatique de stockage des images ;
• un matériel spécifique : une bicyclette ou une table ergométrique et/ou un tapis roulant ;
• un appareil d’ECG à trois pistes minimum, avec, si possible, un système moyennant les tracés ;
• un oscilloscope permettant la surveillance continue de l’électrocardiogramme pendant toute la durée de l’examen ;
• un système de surveillance (automatique ou manuel) de la pression artérielle ;
• un chariot d’urgence équipé (drogues habituelles de réanimation, cathéters, matériel de ventilation artificielle, masque d’oxygène, défibrillateur en parfait état de marche…) ;
• une bouteille ou une arrivée d’oxygène ;
• un nécessaire pour perfusion intraveineuse avec plusieurs seringues auro-pousseuses ;
• des agents pharmacologiques (dobutamine, dipyridamol, atropine, bêta-bloquants, trinitine…).
L’appareil d’échocardiographie utilisé lors de l’EDS doit être performant et doté :
• de l’imagerie harmonique permettant d’améliorer la définition de l’endocarde ventriculaire et d’optimiser la performance diagnostique de l’examen ;
• du système informatique de numérisation (logiciel de stress intégré à l’échographe ou installé sur une station externe/ordinateur) et de stockage sur support à haute capacité des boucles numériques acquises (clips) dans les différentes incidences échographiques aux différents temps d’examen.
Personnel médical
Le médecin a la responsabilité de l’EDS. Son rôle est de :
• surveiller le déroulement de l’examen ;
• assurer l’enregistrement et le stockage des images échographiques ;
L’infirmière spécialisée seconde le médecin dans :
• la préparation du patient (installation, mise en place d’une voie veineuse…) ;
• la vérification du matériel utilisé ;
• l’enregistrement des différents paramètres (ECG, tension artérielle…) ;
• la préparation des injections intraveineuses ;
Elle deviendra l’aide indispensable si une réanimation est nécessaire.
Réglementation médico-légale
• si l’injection intraveineuse d’une drogue reproduisant une ischémie myocardique nécessite une autorisation administrative particulière.
Préparation de l’examen
L’EDS demande une préparation adéquate du patient recruté avant la réalisation de l’examen.
• la préparation psychologique du patient permettant de limiter l’angoisse de celui-ci et d’assurer sa collaboration durant l’examen ;
• le recueil de certaines données concernant le patient examiné (âge, taille, poids, traitement en cours, absence d’allergie, stabilité de l’état clinique : absence de douleur angineuse récente en particulier) ;
• la préparation de la salle d’examen :
Enfin, les contre-indications à l’EDS (superposables à celles de l’épreuve d’effort) (encadré 4.2) et les critères d’arrêt du test doivent être respectés (encadré 4.3). On y ajoute les contre-indications propres aux produits à injecter dans les tests pharmacologiques.
Encadré 4.2
Contre-indications classiques de l’EDS
Infarctus du myocarde (de moins de cinq jours)
Douleur angineuse récente (inférieure à trois jours)
Troubles du rythme : arythmie auriculaire soutenue, arythmie ventriculaire (extrasystoles ventriculaires nombreuses et polymorphes)
Hypertension artérielle non contrôlée
Hypotension artérielle marquée
Insuffisance ventriculaire gauche décompensée
Rétrécissement aortique serré symptomatique
Encadré 4.3
Critères d’arrêt de l’EDS
Utilisation d’une dose maximale de l’agent de stress
Fréquence cardiaque maximale théorique (FMT) atteinte
Apparition d’une douleur angineuse ou d’autre effet indésirable majeur
Sous-décalage du segment ST supérieur ou égal à 1 mm, 80 ms après le point J
Hypertension artérielle : pression systolique supérieure à 220, diastolique supérieure à 140 mmHg
Hypotension artérielle symptomatique
Déclenchement d’un trouble du rythme auriculaire ou ventriculaire répétitif
Apparition de signes d’insuffisance ventriculaire gauche
Induction d’une asynergie myocardique segmentaire (critère relatif)
Réalisation de l’examen
La réalisation pratique de l’EDS comprend :
• l’épreuve de stress selon la modalité choisie : exercice physique, stress pharmacologique, pacing auriculaire ;
• l’acquisition et le stockage des images échographiques ;
• l’analyse et l’interprétation des données échographiques recueillies.
Il faut rappeler que l’EDS reste une technique opérateur-dépendant et que sa réalisation fiable et contributive nécessite une expérience de l’examinateur et une méthodologie rigoureuse.
Échocardiographie d’effort
Avantages et inconvénients l’échocardiographie d’effort
L’avantage de l’échographie d’effort sur le stress pharmacologique est triple :
• Elle autorise la réalisation de l’examen sous traitement aux bêta-bloquants à la différence de l’échographie sous dobutamine.
Les inconvénients de l’échographie d’effort sont :
• l’absence de l’acquisition des boucles d’images durant l’effort (en échographie post-effort) ;
• la moindre qualité des acquisitions (polypnée, fenêtres échographiques variables…) ;
• la fréquence cardiaque maximale théorique (FMT) moins souvent atteinte (impossibilité physique ou défaut d’entraînement).
Logistique d’échocardiographie d’effort
En pratique, deux types d’exercice physique sont le plus souvent utilisés lors de l’EDS :
• une bicyclette en position assise (un cyclo-ergomètre conventionnel) ou une table d’échographie basculante équipée d’un pédalier ;
Échographie post-effort
Dans cette modalité, l’effort étant réalisé sur bicyclette ou tapis, il faudra mettre rapidement le patient en décubitus latéral gauche pour l’analyse ultrasonore avec un risque de perte d’information au pic d’effort (échographie post-effort). En fait, une ischémie myocardique présente au pic de l’effort peut avoir disparu en début de récupération.
Ces limites logistiques et méthodologiques ont conduit à l’amélioration de la technique d’examen.
Échographie per-effort
La table d’échographie d’effort dotée d’un pédalier doit être préférée à la bicyclette ou au tapis roulant qui ne permettent une acquisition des images qu’au décours immédiat de l’effort. Cette table ergométrique spécifique permet l’acquisition des images tout au long de l’exercice (échographie per-effort), sur un patient en position demi-assise et pouvant être incliné latéralement. La position verticale et latérale de la table est réglable (table basculante) afin de permettre un effort physique optimal et une acquisition des images au repos et à l’effort dans de meilleures conditions (figure 4.1).
Déroulement de l’échographie d’effort
L’EDS à l’effort consiste à réaliser un exercice physique couplé à l’acquisition des images échographiques (figure 4.2). Quel que soit le type d’exercice physique, il est indispensable d’éliminer les contre-indications à l’EDS (encadré 4.2) et de respecter le paramétrage du protocole de stress.
Figure 4.2 Réalisation de l’échocardiographie d’effort sur la table spécifique.
Source : C. Chauvel ; Propos cardiologie, 2008.
La réalisation de l’échographie d’effort comprend :
• l’installation du patient examiné en position demi-assise, dossier incliné à 45° permettant un pédalage efficace. Il est important de bien régler le point d’appui du pied du patient sur la pédale de la table ergométrique pour permettre une bonne transmission de la force dans le pédalier ;
• la surveillance en permanence de l’ECG (12 dérivations de préférence) sur un écran. La numérisation du signal d’ECG est nécessaire pour permettre la synchronisation avec les images échographiques acquises.
• la prise de la pression artérielle au moyen d’un appareil automatique au repos, à chaque palier d’effort et au cours de la récupération ;
Protocole d’échographie d’effort
• homme actif : 40 watts/2 min, femme active : 30 watts/2 min ;
• homme peu actif : 30 watts/2 min, femme peu active : 25 watts/2 min ;
• patient âgé ou insuffisant cardiaque : 20 watts (1er palier) puis incrément de 10 watts/min.
Acquisition des images échocardiographiques
Classiquement, au cours d’épreuve de stress physique, quatre à cinq incidences échocardiographiques (parasternale grand et petit axe, apicale quatre et deux cavités, éventuellement apicale trois cavités) sont réalisées aux quatre paliers (Figure 4.3) :
• au début de l’effort (faible charge) ;
• au pic de l’effort (effort maximal) ;
• à la phase de récupération (une à trois minutes suivant l’arrêt de l’effort).
En l’absence de complications ou de critères d’arrêt (encadré 4.3), l’exercice physique sera arrêté à l’atteinte de la fréquence cardiaque maximale théorique (FMT) calculée à partir de l’âge du patient (formule d’Astrand) : FMT = 220 – âge ± 10 battements par minute.
Échocardiographie à la dobutamine
Avantages et inconvénients de l’EDS sous Dobutamine
Les avantages de l’écho-dobutamine sont :
• l’examen réalisable chez les patients ne pouvant effectuer un effort (problème orthopédique ou neurologique, incapacité physique : obésité, défaut d’entraînement…) ;
• la fréquence cardiaque maximale théorique (FMT) plus facilement accessible ;
Les inconvénients de l’écho-dobutamine sont :
• le stress pharmacologique moins physiologique par rapport à l’effort ;
• la nécessité d’arrêter le traitement bêta-bloquant 48 heures avant une EDS sous dobutamine (à la différence de l’échographie d’effort) afin d’améliorer la sensibilité de l’examen ;
Déroulement de l’EDS à la dobutamine
La réalisation de l’EDS sous dobutamine nécessite :
• la préparation adéquate de l’examen et du patient ;
• le respect des contre-indications (Encadré 4.2) et des critères d’arrêts de l’EDS (Encadré 4.3).
Protocole d’échographie-dobutamine
La dose initiale de dobutamine de 10 μg/kg/min est augmentée toutes les 3–5 minutes par palier de 10 μg/kg/min, pour atteindre la dose maximale de 40 μg/kg/min (figure 4.4).
Classiquement, l’acquisition des images échographiques est effectuée lors des quatre paliers de l’examen :
• à la faible dose de dobutamine (10–20 μg/kg/min) correspondant à une fréquence cardiaque supérieure à 10 battements par rapport à la fréquence de repos ;
• au pic de stress défini par l’atteinte de la fréquence maximale théorique (FMT) ou 90 % de la FMT ;
• lors de la phase de récupération (deux minutes après l’injection de bêta-bloquant).
Interprétation de l’examen
Éléments d’analyse
Les éléments à considérer lors de l’EDS sont :