4: Anesthésie générale versus anesthésie locorégionale dans la prise en charge des fractures de l’extrémité proximale du fémur

4 Anesthésie générale versus anesthésie locorégionale dans la prise en charge des fractures de l’extrémité proximale du fémur




Traduction : Alexandre Pegot


L’anesthésie est communément classée en deux techniques principales : l’anesthésie générale, qui provoque une déconnexion du système nerveux central à l’aide de substances inhalées et injectées en intraveineux ; et l’anesthésie locorégionale, qui bloque localement les afférences et efférences nerveuses en administrant directement la substance anesthésiante dans la moelle spinale ou les nerfs1. Le choix d’une de ces techniques dans la prise en charge des fractures de l’extrémité proximale du fémur dépend de certains facteurs, dont les comorbidités du patient, la technique chirurgicale ainsi que le niveau d’analgésie postopératoire requis.


L’anesthésie dans la prise en charge des fractures de l’extrémité proximale du fémur représente un défi puisque les patients sont classiquement âgés et peuvent avoir d’importantes comorbidités, telles qu’une pathologie cardiaque ischémique, de l’hypertension artérielle, une dysfonction rénale, une bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO), du diabète ou une obésité, lesquelles peuvent influencer défavorablement la prise en charge dans la période périopératoire. Il est donc important de choisir une technique d’anesthésie efficace, que le patient tolérera avec un minimum d’effets secondaires. La technique anesthésique doit également permettre une récupération fonctionnelle optimale et diminuer la morbidité et la mortalité postopératoires. Malgré le nombre important de fractures de l’extrémité proximale du fémur pris en charge, il n’existe pas, quant à la technique d’anesthésie, de consensus international fondé sur des preuves scientifiques. La prise en charge anesthésique tend à être influencée, au niveau d’une structure de soins, par des facteurs tels que l’expérience locale et les compétences de chacun.



Anesthésie générale


L’anesthésie générale implique de rendre un patient inconscient en utilisant une médication intraveineuse et des substances inhalées ou un mélange des deux. Pour une anesthésie générale sûre et adaptée, l’anesthésiste doit administrer un mélange afin d’obtenir inconscience, analgésie et relâchement musculaire en sorte d’offrir au chirurgien les meilleures conditions opératoires.


Entraîner une anesthésie générale nécessite plusieurs étapes, dont la consultation préopératoire, la prémédication, l’induction, l’entretien, l’extubation, les soins et la prise en charge de la douleur postopératoires.



Consultation préopératoire


Idéalement, la consultation en vue d’une anesthésie doit être réalisée avant la date de l’intervention chirurgicale. La consultation préopératoire sert à obtenir une anamnèse précise, à réaliser un examen clinique ciblé, à demander et contrôler les examens complémentaires, et à préparer le patient pour l’intervention chirurgicale. L’anesthésiste prêtera attention aux facteurs spécifiques qui feront que le patient sera un meilleur candidat à l’anesthésie générale ou l’anesthésie neuraxiale.


L’anamnèse précise comprend l’histoire de la maladie, le traitement, les allergies, l’existence de précédentes anesthésies, les antécédents familiaux d’hyperthermie maligne et les antécédents personnels. D’importantes comorbidités pouvant influencer l’indication opératoire et le choix de l’anesthésie sont recherchées, dont la présence d’une pathologie cardiaque (pathologie coronarienne, valvulopathie), d’une maladie respiratoire (BPCO, asthme), de troubles de l’hémostase (maladie de von Willebrand, hémophilie), de diabète, ou de reflux gastro-œsophagien.


Un examen clinique ciblé comprend l’examen des voies aériennes qui évaluera la difficulté d’intubation du patient, l’identification et l’inspection des repères potentiels pour les techniques d’anesthésie neuraxiale ainsi qu’une évaluation cardiorespiratoire. Les examens complémentaires incluent un électrocardiogramme, une numération formule sanguine, un bilan électrolytique et d’hémostase ainsi que des examens plus approfondis en fonction des éléments retrouvés lors de l’anamnèse et de l’examen clinique.


Une préparation préopératoire peut être nécessaire si le patient est sous traitement anticoagulant, insulinothérapie, sous traitement hypoglycémiant oral ou si ses comorbidités sont mal prises en charge. Par exemple, un patient ayant une BPCO insuffisamment traitée aura besoin d’antibiotiques, de corticoïdes, de bronchodilatateurs et d’une évaluation respiratoire avant d’envisager une anesthésie générale. Une préparation préopératoire peut également comprendre l’arrêt d’anticoagulants, la diminution d’un international normalized ratio (INR) élevé, l’arrêt d’un traitement hypoglycémiant oral la veille de l’intervention chirurgicale, l’instauration d’un traitement antihypertenseur, et des consultations auprès d’autres services ou spécialistes afin d’aider à la prise en charge des comorbidités ou simplement d’évaluer un risque. Dans la prise en charge des fractures de l’extrémité proximale du fémur, les recommandations du Royal College of Physicians préconisent une prise en charge chirurgicale dans les 24 heures suivant l’admission à l’hôpital ; cependant, l’influence du délai d’accès au bloc opératoire sur la mortalité est controversée. Selon une étude, si l’intervention chirurgicale a lieu au-delà de 48 heures après l’admission, la mortalité augmente de 41 % à 30 jours et de 32 % à 1 an2.



Technique


La première étape de l’anesthésie générale est la prémédication ; celle-ci peut utiliser des anxiolytiques, des antibiotiques, des bronchodilatateurs, des antisialogogues et des traitements antireflux. L’induction est une des plus importantes phases de l’anesthésie car c’est l’étape de transition entre l’état éveillé et inconscient du patient. L’induction peut être obtenue à l’aide d’une thérapie intraveineuse ou de substances inhalées. La thérapie intraveineuse met à disposition : les benzodiazépines, qui réduisent l’anxiété et provoquent une amnésie, les opioïdes, qui sont également utilisés pour l’analgésie et pour supprimer la réponse sympathique à l’intubation, les substances inductrices (propofol, thiopental) ; les myorelaxants, qui relâchent les muscles oropharyngés afin de permettre le passage de la sonde endotrachéale (SET) à travers les plis vocaux. Le mélange adapté de ces médicaments dépend des caractéristiques du patient et des préférences de l’anesthésiste. La dose du médicament peut être calculée à l’avance à partir du poids, ou bien une titration peut être réalisée. La relaxation musculaire entraînée durant l’induction ou lors de l’intervention à l’aide de doses complémentaires peut fournir des conditions opératoires optimales ; cependant, la relaxation musculaire doit être surveillée vers la fin de l’intervention car elle peut différer le moment de l’extubation.


Rendre un patient inconscient requiert une protection des voies aériennes sous la forme d’une SET ou d’un masque laryngé (ML) car l’induction aboutit à la perte des réflexes de protection des voies aériennes. La SET ou le ML permettent de fournir l’oxygène ainsi que les substances inhalées afin de maintenir l’anesthésie. Le maintien peut habituellement être atteint avec des substances inhalées, une perfusion intraveineuse continue ou un mélange des deux. Le traitement analgésiant peut être administré sous la forme d’opioïdes à longue durée d’action, de doses répétées d’opioïdes à courte durée d’action, ou de perfusions continues.


Une fois l’intervention chirurgicale terminée, les myorelaxants sont généralement antagonisés, et les substances inhalées ou les anesthésiants intraveineux sont stoppés. La plupart des myorelaxants non dépolarisants peuvent être antagonisés seulement si leur effet commence à s’estomper. C’est uniquement lorsque les patients respirent spontanément, maintiennent des constantes respiratoires normales, répondent aux ordres, et ont une résistance suffisante pour maintenir les réflexes de protection des voies aériennes qu’ils peuvent être extubés. Les patients sont ensuite habituellement monitorés durant une courte période suivant l’intervention chirurgicale en salle de réveil. Les patients doivent répondre aux critères fixés par l’établissement de soin avant de pouvoir retourner dans leur chambre ou à leur domicile. Certains patients, tels que ceux ayant des apnées du sommeil ou une histoire personnelle d’hyperthermie maligne, peuvent nécessiter un séjour hospitalier prolongé afin de contrôler la survenue d’une décompensation respiratoire ou d’une poussée d’hyperthermie maligne. Les patients qui ne répondent pas aux critères d’extubation ou ceux qui ont d’importantes comorbidités augmentant le risque de morbidité et de mortalité postopératoires peuvent nécessiter une surveillance dans une unité de soins intensifs. Après une anesthésie générale, les patients peuvent bénéficier d’une pompe de PCA (patient-controlled analgesia) délivrant une dose prédéfinie de morphinique par voie intraveineuse à la demande.



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Jul 2, 2017 | Posted by in GÉNÉRAL | Comments Off on 4: Anesthésie générale versus anesthésie locorégionale dans la prise en charge des fractures de l’extrémité proximale du fémur

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